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Date : 20210804


Dossier : IMM-1536-20

Référence : 2021 CF 820

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 4 août 2021

En présence de monsieur le juge Manson

ENTRE :

JAVID HOSEIN SOLTANI

demandeur

et

LE MINISTRE DE L’IMMIGRATION, DES RÉFUGIÉS ET DE LA CITOYENNETÉ

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Introduction

[1] La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire à l’égard de la décision rendue le 30 janvier 2020 par le délégué du ministre, qui a conclu que le demandeur constituait un danger pour le public au Canada, qu’il ne serait pas persécuté ni personnellement exposé à un risque s’il était renvoyé en Afghanistan et que les facteurs d’ordre humanitaire ne l’emportaient pas sur le danger qu’il constitue pour le public.

II. Contexte

[2] Le demandeur, M. Javid Hosein Soltani, est né en Afghanistan le 16 janvier 1988. Il appartient au groupe ethnique hazara.

[3] Alors que le demandeur était âgé de moins d’un an, son père a été emprisonné par les Talibans. En 1998, sa famille s’est enfuie en Iran pour éviter la persécution des Talibans. Ensuite, la famille du demandeur a présenté une demande d’asile depuis l’extérieur du Canada par l’intermédiaire du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme [le HCDH]. En novembre 2003, alors que le demandeur était âgé de 15 ans, sa mère, ses quatre frères et sœurs et lui sont entrés au Canada à titre de réfugiés au sens de la Convention et de résidents permanents. Les membres de la famille se sont installés à Kitchener, en Ontario, et le père est venu les rejoindre en 2007.

[4] En 2004, à l’âge de 16 ans, le demandeur a été déclaré coupable de voies de fait causant des lésions corporelles et condamné à 18 mois de probation sous le régime de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, LC 2002, c 1.

[5] Sa première condamnation criminelle en tant qu’adulte a été prononcée en mai 2007. Il a écopé d’une période de probation de 18 mois pour voies de fait au titre de l’article 266 du Code criminel, LRC 1985, c C-46. Cette même année, il a également été déclaré coupable d’avoir proféré des menaces. En août 2008, il a été déclaré coupable de possession d’arme dangereuse et d’avoir proférer des menaces. Jusqu’à présent, il compte près de trente condamnations.

[6] En septembre 2008, le demandeur a fait l’objet d’un rapport au titre de l’article 44 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR] après avoir été déclaré coupable de port d’arme dans un dessein dangereux. Il a reçu une lettre d’avertissement de la part de l’Agence des services frontaliers du Canada [l’ASFC].

[7] Après avoir été déclaré coupable de vol qualifié, le demandeur a fait l’objet d’un rapport au titre du paragraphe 36(1) de la LIPR, et l’affaire a été déférée à la Section de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada [la CISR]. Le 28 mars 2019, la Section de l’immigration a conclu que le demandeur était interdit de territoire au Canada pour grande criminalité et a pris une mesure d’expulsion contre lui.

[8] Le 25 avril 2019, le demandeur a été avisé que l’ASFC avait l’intention de demander l’avis du ministre portant que le demandeur constituait un danger pour le public au Canada conformément à l’alinéa 115(2)a) de la LIPR [l’avis de danger]. En octobre 2019, l’avocat du demandeur a présenté des observations pour le compte de celui-ci.

[9] Le 30 janvier 2020, l’avis de danger a été rendu. Le demandeur a pris connaissance de cette décision à la fin du mois de février, par courriel. Au début du mois de mars, le demandeur a présenté une demande de contrôle judiciaire.

III. Décision faisant l’objet du contrôle

[10] Dans l’avis de danger, le délégué du ministre a décrit le demandeur comme un récidiviste qui, systématiquement, a eu recours à la violence et a menacé de blesser ou de tuer ses victimes. Le délégué du ministre a conclu que les éléments de preuve étaient insuffisants pour démontrer que le demandeur prenait des mesures concrètes pour traiter ses problèmes de santé mentale, gérer son risque de récidive et adopter un style de vie prosocial une fois libéré. Tout bien considéré, le délégué du ministre était convaincu que le demandeur constitue un danger pour le public et que sa présence au Canada pose un risque inacceptable.

[11] Le délégué du ministre a ensuite évalué les risques possibles pour la vie, la liberté et la sécurité de la personne si le demandeur était renvoyé en Afghanistan, au titre du paragraphe 115(1) de la LIPR et de l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés, partie 1 de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, c 11 (R.-U.) [la Charte]. À la lumière des éléments de preuve dont il disposait, le délégué du ministre était d’avis que, tout compte fait, le demandeur ne serait pas personnellement exposé à un risque de persécution, à une menace à sa vie, à un risque de torture ou à un risque de traitements ou peines cruels et inusités s’il était renvoyé en Afghanistan.

[12] En ce qui a trait aux facteurs d’ordre humanitaire, le délégué du ministre a conclu que, même si le demandeur vit au Canada depuis l’âge de 15 ans, ses liens y sont plutôt faibles. Il est célibataire, n’a pas d’enfant ni d’emploi et ne possède aucun bien. Le délégué du ministre a conclu que la preuve médicale était insuffisante pour étayer les prétentions selon lesquelles le demandeur est schizophrène et a une maladie rénale. En fin de compte, le délégué du ministre a estimé que les facteurs d’ordre humanitaire ne l’emportent pas sur le danger que le demandeur constitue pour le public.

IV. Questions en litige

[13] En l’espèce, les questions à trancher sont les suivantes :

  • 1) Le délégué du ministre a-t-il négligé ou écarté des éléments de preuve essentiels liés aux risques?

  • 2) Le ministre n’a-t-il pas effectué une véritable analyse raisonnable du risque, comme l’exige le paragraphe 115(2) de la LIPR?

  • 3) La décision du délégué du ministre quant aux facteurs d’ordre humanitaire est-elle raisonnable?

V. Norme de contrôle

[14] Les parties conviennent que la norme de contrôle applicable en l’espèce est celle de la décision raisonnable. La Cour doit faire preuve de déférence à l’endroit du décideur et établir si la décision appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65, au para 16).

VI. Dispositions applicables

[15] Les dispositions applicables sont notamment l’article 115 de la LIPR :

Principe

Protection

115 (1) Ne peut être renvoyée dans un pays où elle risque la persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques, la torture ou des traitements ou peines cruels et inusités, la personne protégée ou la personne dont il est statué que la qualité de réfugié lui a été reconnue par un autre pays vers lequel elle peut être renvoyée.

115 (1) A protected person or a person who is recognized as a Convention refugee by another country to which the person may be returned shall not be removed from Canada to a country where they would be at risk of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion or at risk of torture or cruel and unusual treatment or punishment.

Exclusion

Exceptions

(2) Le paragraphe (1) ne s’applique pas à l’interdit de territoire :

(2) Subsection (1) does not apply in the case of a person

a) pour grande criminalité qui, selon le ministre, constitue un danger pour le public au Canada;

(a) who is inadmissible on grounds of serious criminality and who constitutes, in the opinion of the Minister, a danger to the public in Canada; or

b) pour raison de sécurité ou pour atteinte aux droits humains ou internationaux ou criminalité organisée si, selon le ministre, il ne devrait pas être présent au Canada en raison soit de la nature et de la gravité de ses actes passés, soit du danger qu’il constitue pour la sécurité du Canada.

(b) who is inadmissible on grounds of security, violating human or international rights or organized criminality if, in the opinion of the Minister, the person should not be allowed to remain in Canada on the basis of the nature and severity of acts committed or of danger to the security of Canada.

VII. Analyse

[16] La Cour a réitéré à maintes reprises que les principes régissant l’analyse prévue à l’alinéa 115(2)a) de la LIPR sont les suivants :

  • a) La personne protégée et le réfugié au sens de la Convention bénéficient du principe du non-refoulement reconnu par le paragraphe 115(1) de la LIPR, sauf si l’alinéa 115(2)a) s’applique.

  • b) Pour que l’alinéa 115(2)a) s’applique, il faut que l’intéressé soit interdit de territoire pour grande criminalité.

  • c) Si l’intéressé est interdit de territoire, le ministre doit décider si l’intéressé ne devrait pas être autorisé à demeurer au Canada à cause du danger qu’il constitue pour le public.

  • d) Une fois cette décision prise, le ministre doit procéder à une analyse fondée sur l’article 7 de la Charte. La question fondamentale est la suivante : selon la prépondérance des probabilités, l’intéressé sera-t-il exposé à une menace à sa vie ou à un risque à sa sécurité ou à sa liberté s’il est renvoyé dans son pays d’origine? Le réfugié au sens de la Convention ne peut s’autoriser de son statut pour réclamer l’application de l’article 7 de la Charte.

  • e) Le ministre doit mettre en balance le danger pour le public au Canada et le degré de risque, en tenant également compte de tout autre facteur d’ordre humanitaire applicable.

(Suresh c Canada (Ministre de la Citoyenneté de l’Immigration), 2002 CSC 1, aux para 76-79, 127)

[17] Bien que le paragraphe 115(2) n’exige pas expressément que les décideurs réalisent une analyse du risque ou une comparaison du danger et du risque, la Cour a maintes fois conclu que l’objet de la disposition est d’établir si le danger que le demandeur constitue pour le public au Canada l’emporte sur la menace à sa vie ou le risque à sa sécurité ou à sa liberté, en tenant compte de « tout autre facteur d’ordre humanitaire applicable », auquel il s’expose à son retour dans son pays d’origine. Pour que la personne soit autorisée à demeurer au Canada, les risques et les difficultés doivent être plus importants que le danger qu’elle constitue pour les Canadiens.

[18] Ainsi, la Cour suprême du Canada a ajouté un exercice de pondération pour permettre aux décideurs de décider si la personne qui constitue un danger pour le public au Canada doit conserver le statut de personne protégée en vertu du paragraphe 115(1) ou être exclue de cette protection en application du paragraphe 115(2) (Makomena c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2019 ACF no 782, au para 26).

[19] En l’espèce, il ne fait aucun doute que les infractions commises par le demandeur entraînent son interdiction de territoire pour grande criminalité et, par conséquent, qu’il constitue un danger pour le public au titre de l’alinéa 115(2)a). La question en litige dans le présent contrôle judiciaire vise l’appréciation de ce danger en regard des risques et des difficultés auxquels s’expose le demandeur à son retour en Afghanistan.

[20] Le demandeur soutient que la décision du délégué du ministre était déraisonnable. Il fait valoir qu’elle ne fait pas état d’éléments de preuve essentiels qui contredisent carrément la conclusion du délégué du ministre. Plus précisément, le demandeur a présenté des éléments de preuve relatifs aux risques auxquels il serait exposé en Afghanistan en tant que Hazara et rapatrié revenant d’un pays occidental après y avoir passé de nombreuses années. Malgré ces [traduction] « éléments de preuve convaincants », le délégué du ministre a conclu que l’information était insuffisante pour démontrer que le demandeur serait exposé à un risque. Le demandeur soutient que le délégué du ministre n’a pas effectué une véritable analyse des éléments de preuve dont il disposait et que, par conséquent, la décision est déraisonnable et devrait être annulée.

[21] Le défendeur estime que le demandeur n’a pas présenté un argument raisonnablement défendable portant que la décision du délégué du ministre était déraisonnable. Ce dernier jouit d’un vaste pouvoir discrétionnaire pour juger si la personne protégée ou le réfugié au sens de la Convention qui est interdit de territoire pour grande criminalité constitue un danger pour le public. Le demandeur compte près de trente condamnations criminelles, dont de nombreuses pour des actes de violence, aléatoires ou non. Le délégué du ministre pouvait donc raisonnablement conclure que ces antécédents criminels l’emportaient sur les risques liés au renvoi en Afghanistan et les facteurs d’ordre humanitaire.

[22] Le demandeur a fourni de multiples sources d’éléments de preuve objectifs concernant les risques auxquels il serait exposé s’il était renvoyé en Afghanistan, notamment la discrimination sociale, le harcèlement, les enlèvements et les meurtres dont sont victimes les Hazaras afghans et les rapatriés [traduction] « occidentalisés ». Même si l’avis de danger cite ces éléments de preuve, le demandeur soutient que le délégué du ministre n’a simplement tenu compte de rien lorsqu’il a conclu que l’information était insuffisante pour démontrer que le demandeur serait exposé à un risque.

[23] La Cour a déjà conclu que le fait de ne pas examiner certains éléments de preuve peut être suffisant pour annuler une décision, mais seulement lorsque les éléments de preuve passés sous silence sont essentiels et contredisent la conclusion du décideur et que la Cour juge que leur omission signifie que le décideur n’a pas tenu compte des éléments dont il disposait (Cepeda-Gutierrez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] ACF no 1425 (QL), au para 17, confirmé dans Hinzman c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CAF 177).

[24] Le défendeur fait valoir que l’avis de danger est très détaillé et énonce les motifs de la décision dans un langage clair et précis. Les cours de révision ne peuvent s’attendre à ce que les décideurs répondent à tous les arguments ou tirent une conclusion explicite sur chaque élément constitutif du raisonnement qui a mené à la décision finale.

[25] Dans le cadre de son évaluation des risques, le délégué du ministre a tenu compte des éléments de preuve dont il disposait, les a examinés et les a appréciés. Contrairement aux observations du demandeur, il n’a pas simplement procédé à une [traduction] « analyse sélective ». Le fait que l’avis de danger cite directement des éléments de preuve objectifs indique que les éléments de preuve ont été effectivement pris en considération. Le délégué du ministre a tenu compte des éléments de preuve montrant que des rapatriés et des Hazaras avaient été torturés et tués en Afghanistan, mais il a également mentionné des éléments de preuve démontrant que la situation des Hazaras afghans s’était améliorée et que des mesures sont maintenant en place pour favoriser la réintégration durable des rapatriés en Afghanistan. L’avis de danger ne présente aucune lacune importante ou analyse déraisonnable relativement à l’évaluation des risques. Ainsi, la Cour ne doit pas substituer sa propre justification de l’avis de danger. Cela dit, elle reconnaît que l’avis de danger cite des éléments de preuve objectifs montrant que la croissance rapide de la population à Kaboul a rendu encore plus difficile l’accès adéquat à des services de santé mentale. Elle reconnaît également que le délégué du ministre a explicitement tenu compte des problèmes de santé mentale du demandeur, notamment son traumatisme pendant l’enfance et sa schizophrénie.

[26] Le demandeur soutient que le délégué du ministre n’a pas effectué la bonne analyse du risque fondée sur l’article 7 de la Charte. Il fait valoir que le délégué du ministre a tenu compte de la menace à la vie et du risque à la liberté et à la sécurité de la personne visés aux articles 96 et 97 de la LIPR, plutôt que d’appliquer le critère différent et élargi exigé par l’article 115 de la LIPR.

[27] Le défendeur fait valoir que le délégué du ministre a tenu compte des observations du demandeur et de la documentation se rapportant à la situation générale en Afghanistan. Il établit une analogie avec la décision Baladie c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CD 706, aux paragraphes 40-43, où la Cour a expliqué que le fait que le délégué du ministre a mis l’accent sur une évaluation des risques visés aux articles 96 et 97 pouvait se comprendre aisément par le fait que le demandeur n’avait présenté aucun élément de preuve concernant des risques autres que ceux que visent ces deux dispositions.

[28] Dans une analyse du risque au titre du paragraphe 115(2), rien n’exige que le demandeur démontre qu’il sera exposé à un risque plus grand que celui auquel est exposée la population en général. Cependant, « il appartient au demandeur de démontrer qu’il sera personnellement exposé à un risque pour sa vie, sa liberté ou sa sécurité s’il est renvoyé dans son pays d’origine » (Galvez Padilla c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 247, au para 69).

[29] Le délégué du ministre a correctement mené l’analyse du risque fondée sur l’article 7 qui doit être faite en lien avec celle fondée sur l’alinéa 115(2)a) de la LIPR. Le demandeur n’a pas présenté d’éléments de preuve concernant des risques aux droits garantis par l’article 7 qui ne sont pas visés aux articles 96 et 97 de la LIPR, comme le droit à la protection des renseignements personnels, le droit de prendre soin de son enfant et de choisir le lieu de son foyer, etc. De plus, le délégué du ministre indique clairement au dernier paragraphe de son évaluation des risques qu’il a tenu compte des documents se rapportant à la situation du pays, des observations du demandeur ainsi que des risques possibles pour la vie, la liberté et la sécurité de la personne énoncés à l’article 115 de la LIPR et à l’article 7 de la Charte. Il a compris quelle était la bonne évaluation des risques à appliquer conformément au paragraphe 115(2) de la LIPR.

A. Facteurs d’ordre humanitaire

[30] En ce qui a trait aux facteurs d’ordre humanitaire, le délégué du ministre a reconnu que le demandeur n’est pas allé en Afghanistan depuis l’âge de 15 ans, qu’il a une onzième année d’études et qu’il souffre de schizophrénie. Il a également reconnu que le demandeur aurait une qualité de vie inférieure en Afghanistan, que sa réintégration serait difficile et que son renvoi serait pénible pour sa famille, particulièrement pour sa mère. Cependant, il a également noté que Kaboul présente bon nombre des services offerts en Afghanistan, que le demandeur est en bonne santé physique et que ses relations avec sa famille se sont détériorées.

[31] Le délégué du ministre a ensuite dû effectuer un exercice de pondération et décider si les facteurs d’ordre humanitaire l’emportaient sur le danger que le demandeur constitue pour le public. Le demandeur semble dire que le délégué du ministre n’a pas effectué cet exercice de pondération, car il n’a pas expliqué comment il est arrivé à sa conclusion.

[32] Je conclus que le délégué du ministre a réalisé un examen approfondi de la situation du demandeur, a effectué l’exercice de pondération et est arrivé à la conclusion raisonnable selon laquelle les facteurs d’ordre humanitaire ne l’emportaient pas sur le danger que le demandeur constitue pour le public au Canada.

[33] Le délégué du ministre avait le droit de fonder sa décision sur une appréciation des éléments de preuve dont il disposait. Il a reconnu que l’Afghanistan est un pays pauvre et instable qui connaît des problèmes de sécurité depuis des décennies. Cependant, le demandeur n’a présenté aucun élément de preuve sur la façon dont ces risques généraux étaient personnellement liés à sa vie, à sa liberté ou à sa sécurité. Le délégué du ministre était sensible au fait que la qualité de vie du demandeur en Afghanistan ne serait pas comparable à celle qu’il a au Canada. Le fait que les conditions en Afghanistan sont moins favorables que celles au Canada ne suffit pas pour l’emporter sur le danger que le demandeur, qui est un délinquant violent et récidiviste, constitue pour le public au Canada. Le demandeur invite la Cour à soupeser de nouveau les éléments de preuve, ce qui n’est pas son rôle.

[34] Le demandeur a eu une vie malheureuse au Canada : pendant presque toute sa vie adulte, il a été sans-abri ou a vécu dans des maisons de chambres, il a été au chômage et a composé avec de sérieux problèmes de santé mentale avec une prise en charge limitée. Bien que les demandeurs ne doivent jamais être réprimandés ou punis pour les traumatismes qu’ils ont subis durant l’enfance ou leurs maladies mentales, néanmoins, dans les circonstances particulières de l’espèce, je conclus que la décision du délégué du ministre est raisonnable.

[35] Pour les motifs qui précèdent, la demande en l’espèce est rejetée.

 


JUGEMENT dans le dossier IMM-1536-20

LA COUR STATUE :

  1. La demande est rejetée.

  2. Il n’y a aucune question à certifier.

« Michael D. Manson »

Juge

Traduction certifiée conforme

Sophie Reid-Triantafyllos


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-1536-20

 

INTITULÉ :

JAVID HOSEIN SOLTANI c LE MINISTRE DE L’IMMIGRATION, DES RÉFUGIÉS ET DE LA CITOYENNETÉ

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 28 JUILLET 2021

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE MANSON

 

DATE DES MOTIFS :

LE 4 AOÛT 2021

 

COMPARUTIONS :

Gurpreet Badh

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Kimberly Sutcliffe

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Badh and Associates

Avocats

Surrey (Colombie-Britannique)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Procureur général du Canada

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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