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Date : 20210723


Dossier : IMM-6669-20

Référence : 2021 CF 786

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 23 juillet 2021

En présence de monsieur le juge Southcott

ENTRE :

BONGKYUN PARK

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET

DE LA PROTECTION CIVILE

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision datée du 16 décembre 2020 par laquelle la Section de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada [la SI] a conclu que le demandeur était un ressortissant étranger interdit de territoire au Canada pour fausses déclarations en application de l’alinéa 40(1)a) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR]. La décision résulte du fait que le demandeur n’a pas divulgué ses antécédents criminels en République de Corée [la Corée] dans ses demandes d’autorisation de voyage électronique [AVE] et de fiche de visiteur [FV].

[2] Comme je l’expliquerai en détail, la présente demande est accueillie, car la SI a omis d’examiner l’un des principaux arguments du demandeur, qui se rapportait à l’exception relative aux fausses déclarations faites de bonne foi qui peut s’appliquer dans certains cas lorsque l’interdiction de territoire repose sur des fausses déclarations.

II. Le contexte

[3] Le demandeur, M. Bongkyun Park, est un citoyen de la Corée. Il est venu au Canada pour la première fois en tant que visiteur en septembre 2017. En janvier 2018, il a demandé la prolongation de son statut de visiteur. Il est entré au Canada pour la dernière fois en octobre 2018, après avoir obtenu un permis de travail valide jusqu’en octobre 2019.

[4] Dans la demande d’AVE au moyen de laquelle le demandeur a demandé l’autorisation de venir au Canada et dans la demande de FV au moyen de laquelle il a demandé la prolongation de son statut de visiteur, le demandeur a répondu « Non » à la question suivante : « Avez-vous déjà commis une infraction criminelle dans tout pays ou territoire, ou vous a-t-on déjà arrêté pour une telle infraction, accusé d’une telle infraction ou reconnu coupable d’une telle infraction? »

[5] Le 3 mars 2019, l’Agence des services frontaliers du Canada [l’ASFC] a intercepté et saisi, au Centre postal international de Vancouver, des documents en provenance de la Corée qui avaient été envoyés au demandeur. Parmi ces documents figurait une réponse à une vérification du casier judiciaire (enquête) du commissaire général du Service de police national de la Corée, datée du 27 février 2019. Ce document énumère les cinq [traduction] « accusations criminelles » suivantes :

[traduction]

  1. Violation du code de la route, 9 août 1994;

  2. Violation du code de la route (conduite en état d’ébriété), 20 avril 2005;

  3. Violation de la loi sur la répression de la violence (lésions corporelles causées conjointement avec d’autres, la nuit), 16 juillet 2005;

  4. Violation du code de la route (conduite en état d’ébriété), 2 février 2010;

  5. Violation du code de la route (conduite en état d’ébriété), 16 février 2013;

[6] Ce document indique également que le demandeur a reçu des amendes pour toutes les infractions au code de la route et que la violation relative à la loi sur la répression de la violence, qui se rapportait à une affaire de protection de la famille, a été traitée par la division de Goyang du bureau du procureur du district d’Uijeongbu.

[7] Après avoir saisi les documents en question, l’ASFC a ouvert une enquête pour fausses déclarations à l’encontre du demandeur. Dans le cadre de l’enquête, un agent de l’ASFC a soumis le demandeur à une entrevue, qui s’est déroulée à son domicile, avec l’aide d’un interprète. Lors de cette entrevue, le demandeur a indiqué qu’il avait engagé des tiers pour remplir ses demandes d’AVE et de FV et qu’ils avaient rempli les demandes en s’appuyant sur un document de vérification du casier judiciaire qu’il leur avait fourni et qui ne révélait aucune infraction criminelle. Il a également déclaré que les infractions de conduite en état d’ébriété étaient [traduction] « simplement des infractions mineures » et qu’il avait payé des amendes à cet égard. En ce qui concerne l’infraction relative à la loi sur la répression de la violence, le demandeur a expliqué qu’il s’était disputé avec son ex-femme et que la police avait été appelée. Il a déclaré que l’incident était une affaire de famille et qu’aucune amende ne lui avait été imposée à cet égard. Il lui a plutôt été enjoint de faire du bénévolat dans un hôpital.

[8] Le 3 juillet 2019, l’agent de l’ASFC a établi un rapport en vertu du paragraphe 44(1) de la LIPR, dans lequel il a conclu, selon la prépondérance des probabilités, que le demandeur était interdit de territoire pour fausses déclarations en application de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR. L’agent a fondé sa conclusion sur le fait que le demandeur avait été déclaré coupable de trois infractions de conduite en état d’ébriété en Corée, mais qu’il avait répondu « Non » à la question concernant les infractions criminelles antérieures dans ses demandes d’AVE et de FV.

[9] La SI a tenu une enquête le 16 novembre 2020. À la suite de son enquête, la SI a rendu la décision qui fait l’objet du présent contrôle judiciaire, dans laquelle elle a déclaré le demandeur interdit de territoire. Par conséquent, la SI a pris une mesure d’exclusion contre le demandeur.

III. La décision faisant l’objet du contrôle

[10] Dans son analyse, la SI a pris note des observations faites par l’avocat du demandeur selon lesquelles les fausses déclarations du demandeur avaient été faites de bonne foi. L’avocat du demandeur a expliqué qu’en Corée la police peut délivrer différents types de documents de vérification du casier judiciaire. Celui que le demandeur a obtenu pour sa demande d’AVE se rapportait à une vérification du casier judiciaire pour [traduction] « une permission d’immigration et de séjour dans un pays étranger ». Ce document indiquait que le demandeur n’avait pas d’antécédents criminels.

[11] La SI a constaté que, selon la loi coréenne, certains documents de vérification du casier judiciaire ne doivent pas être communiqués à des gouvernements étrangers à des fins d’immigration, et que la Corée dispose d’un système dans le cadre duquel certaines infractions sont effacées après un certain temps. La SI a noté d’ailleurs qu’il s’agit d’un point de discorde entre la Corée et plusieurs pays, dont le Canada. Toutefois, la SI a expliqué que le Canada exige qu’une personne déclare tous ses antécédents criminels en répondant à la question suivante : « Avez-vous déjà commis une infraction criminelle dans tout pays ou territoire, ou vous a-t-on déjà arrêté pour une telle infraction, accusé d’une telle infraction ou reconnu coupable d’une telle infraction? » Aucune précision n’est apportée, mais les demandeurs ont la possibilité de donner des détails s’ils répondent « Oui ». La SI a conclu que, peu importe si la Corée considère ou non qu’une infraction criminelle antérieure est caduque, celle-ci doit être divulguée aux agents de l’immigration.

[12] La SI a donc rejeté l’argument du demandeur selon lequel ce dernier avait mal compris la question en raison des différents types de vérification du casier judiciaire qui existent en Corée. Elle a noté que la question posée dans les demandes d’AVE et de FV n’était pas la suivante : [traduction] « Une vérification du casier judiciaire révélerait-elle des infractions criminelles antérieures? »

[13] La SI a également conclu que le demandeur ne pouvait pas invoquer l’exception relative aux fausses déclarations faites de bonne foi, qui s’applique dans les circonstances où le demandeur croyait honnêtement et raisonnablement qu’il ne faisait pas de présentation erronée sur un fait important et où il était impossible pour le demandeur d’avoir connaissance de la fausse déclaration. La SI a expliqué que le demandeur savait qu’il avait été déclaré coupable de conduite en état d’ébriété et d’actes de violence familiale, que ces infractions soient mises au jour lors d’une vérification du casier judiciaire ou non. La SI a également déclaré que le fait qu’il ne s’agissait pas selon lui d’infractions graves ne le libérait pas de l’obligation de les divulguer.

[14] La SI a constaté qu’il était évident que les incidents énumérés dans le document de vérification du casier judiciaire saisi par l’ASFC étaient des infractions criminelles. La SI est arrivée à cette conclusion parce que les infractions étaient décrites comme étant des [traduction] « infractions criminelles » dans le casier judiciaire traduit et dans les décisions rendues par les cours de district. En outre, le code de la route fait de la conduite en état d’ébriété une infraction criminelle passible d’une peine d’emprisonnement. Par conséquent, la SI a conclu que, même si le demandeur s’était seulement vu imposer des amendes pour les incidents de conduite en état d’ébriété, il s’agissait d’accusations dont il avait été déclaré coupable.

[15] En ce qui concerne l’incident relatif à la loi sur la répression de la violence, la SI a reconnu qu’il avait pu être traité comme une affaire relevant du tribunal de la famille, mais elle a conclu que l’incident comportait un certain élément de violence, qu’un procès avait été mené et qu’une peine avait été prononcée (des pénalités ont été imposées au demandeur). La SI a donc estimé que l’incident présentait les [traduction] « caractéristiques » d’une infraction criminelle : un poursuivant, un procès et l’imposition d’une peine.

[16] La SI a noté que, pour qu’une personne soit déclarée interdite de territoire, la fausse déclaration doit porter sur un objet pertinent, et que la criminalité est toujours un objet pertinent, parce qu’elle peut fonder une interdiction de territoire en application de l’article 36 de la LIPR. La SI a estimé que l’omission par le demandeur de divulguer les infractions criminelles avait empêché l’agent chargé d’examiner ses demandes d’AVE et de FV de se renseigner davantage sur la possibilité qu’il soit interdit de territoire au Canada. La SI a conclu que le demandeur est un ressortissant étranger qui a directement fait une présentation erronée sur un fait important quant à un objet pertinent, ce qui risquait d’entraîner une erreur dans l’administration de la LIPR, et qu’une mesure d’exclusion devait donc être prise contre lui en application de l’alinéa 229(1)h) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227.

IV. Les questions en litige

[17] Selon le demandeur, la présente demande de contrôle judiciaire soulève les questions en litige suivantes :

  1. La SI a-t-elle omis de fournir des motifs intelligibles lorsqu’elle a rendu sa décision?

  2. La SI a-t-elle omis d’examiner l’ensemble de la preuve?

  3. La SI a-t-elle commis une erreur de fait et de droit dans l’évaluation des fausses déclarations?

  4. La SI a-t-elle manqué à l’équité procédurale?

  5. La SI a-t-elle omis d’appliquer la présomption de véracité et le bénéfice du doute?

  6. La SI a-t-elle porté atteinte au paragraphe 15(1) de la Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, c 11?

[18] Je note également que le demandeur réclame les dépens de la présente demande.

V. Analyse

[19] Comme je l’ai indiqué ci-dessus, le demandeur a soulevé plusieurs questions en litige, et les arguments qu’il a avancés à l’égard de bon nombre d’entre elles se chevauchent considérablement. Ma décision d’accueillir la présente demande de contrôle judiciaire repose sur son argument selon lequel la SI a commis une erreur dans son traitement de l’exception relative aux fausses déclarations faites de bonne foi. La norme du caractère raisonnable s’applique à l’examen par la Cour de cet aspect de la décision (voir, par exemple, Appiah c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 1043 [Appiah]).

[20] Comme la Cour l’a expliqué au paragraphe 18 de la décision Appiah, l’exception relative aux fausses déclarations faites de bonne foi ne s’applique que dans des circonstances extraordinaires où le demandeur croyait honnêtement et raisonnablement qu’il ne faisait pas de présentation erronée :

18. L’exception relative à l’erreur de bonne foi concernant une fausse déclaration est restreinte et ne peut [e]xcuser la non-divulgation de renseignements importants que dans des circonstances extraordinaires où le demandeur croyait honnêtement et raisonnablement qu’il ne faisait pas de présentation erronée sur un fait important, qu’il était impossible pour le demandeur d’avoir connaissance de la déclaration inexacte et que le demandeur n’avait pas connaissance de la fausse déclaration (Wang, au paragraphe 17; Li c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2018 CF 87, au paragraphe 22; Medel c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1990] 2 CF 345). L’exception a été appliquée dans certains cas, lorsque les renseignements fournis par erreur ont pu être corrigés par l’examen d’autres documents présentés dans le cadre de la demande, laissant entendre qu’il n’y avait pas eu intention d’induire en erreur : Karunaratna c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 421, au paragraphe 16; Berlin c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 1117, au paragraphe 18-20. Les tribunaux n’ont pas appliqué cette exception lorsque le demandeur était au courant des renseignements, mais affirmait ne pas savoir honnêtement et raisonnablement qu’ils étaient importants pour la demande; la connaissance de ces renseignements n’échappait pas à la volonté du demandeur et il est de son devoir de remplir la demande avec exactitude : Goburdhun c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 971, aux paragraphes 31 à 34; Diwalpitiye c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 885; Oloumi, au paragraphe 39; Baro c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 1299, au paragraphe 18; Smith c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 1020, au paragraphe 10.

[21] Dans sa décision, la SI a pris note de l’argument du demandeur selon lequel, s’il avait fait une fausse déclaration, c’était de bonne foi, puisque les différents types de vérifications du casier judiciaire effectuées par le service de police coréen avaient créé de la confusion et qu’il ne considérait pas les infractions visées comme des infractions criminelles. Dans son analyse, la SI a examiné les éléments de preuve qui montrent que la Corée dispose d’un système dans le cadre duquel certaines infractions criminelles sont effacées après un certain temps. On parle alors de casiers judiciaires [traduction] « caducs ». La SI a ensuite conclu que, peu importe si la Corée considère ou non qu’une infraction criminelle antérieure est caduque, la question particulière posée aux candidats à l’immigration exige que cette infraction soit divulguée. La SI a exprimé succinctement son raisonnement en expliquant que la question posée n’est pas la suivante : [traduction] « Un casier judiciaire révélerait-il des infractions criminelles antérieures? »

[22] J’estime que ce raisonnement est solide et raisonnable, et qu’il écarte tout argument voulant que le demandeur soit exonéré de toute responsabilité à l’égard de ses fausses déclarations en raison du fait que les infractions qu’il a commises sont devenues caduques. Autrement dit, dans la mesure où le demandeur soutenait qu’il croyait honnêtement et raisonnablement qu’il n’était pas tenu de divulguer ces infractions parce qu’elles étaient caduques, la SI a raisonnablement conclu que l’exception relative aux fausses déclarations faites de bonne foi ne s’appliquait pas.

[23] Cependant, je crois comprendre que l’argument du demandeur quant à la fausse déclaration faite de bonne foi, tant devant la SI que devant notre Cour, est fondé, du moins dans une large mesure, non pas sur la caducité de ses infractions, mais plutôt sur le fait qu’il croyait prétendument que ces infractions n’étaient pas de nature criminelle. Notant que le document de vérification du casier judiciaire que le demandeur a reçu du gouvernement coréen à l’époque pertinente ne mentionnait pas les infractions en question, l’avocat du demandeur a fait valoir devant la SI que son client croyait à l’époque que les infractions n’étaient pas des infractions criminelles. Si je comprends bien l’argument du demandeur, il soutient qu’il croyait honnêtement que les infractions n’étaient pas de nature criminelle et que cette croyance était raisonnable, car elle était étayée par le document délivré par le gouvernement coréen qui indiquait qu’il n’avait pas de casier judiciaire.

[24] Je n’exprime aucune opinion sur la question de savoir si ces faits étayent l’application de l’exception relative aux fausses déclarations faites de bonne foi. Ma décision d’accueillir la présente demande de contrôle judiciaire résulte plutôt du fait que la SI a omis d’examiner l’argument du demandeur selon lequel il croyait honnêtement et raisonnablement qu’il n’avait commis aucune infraction de nature criminelle. À la suite de son analyse concernant la caducité des déclarations de culpabilité, examinée ci-dessus, la SI a conclu que le demandeur ne pouvait pas invoquer l’exception relative aux fausses déclarations faites de bonne foi, car il savait qu’il avait été déclaré coupable de conduite en état d’ébriété et d’actes de violence familiale, que ces infractions soient mises au jour ou non lors d’une vérification du casier judiciaire. La SI a affirmé que le fait que le demandeur était d’avis qu’il ne s’agissait pas d’infractions graves ne le libérait pas de l’obligation de les divulguer. Cependant, elle n’a pas examiné la question de savoir si le demandeur croyait honnêtement que les infractions n’étaient pas de nature criminelle ou si le fait que ces infractions n’apparaissaient pas dans le document de vérification du casier judiciaire reçu par le demandeur rendait cette croyance raisonnable.

[25] La SI a ensuite évalué la question de savoir si les infractions sont de nature criminelle et a conclu qu’elles le sont, en se fondant en partie sur la description des infractions donnée dans le document de vérification du casier judiciaire saisi par l’ASFC. Cependant, encore une fois, cette analyse ne tient pas compte de ce que le demandeur croyait au sujet de la nature des infractions ou du caractère raisonnable de cette croyance lorsqu’il a fait les fausses déclarations, soit avant que le document de vérification du casier judiciaire contenant les infractions ne lui soit envoyé.

[26] Lors de l’audience relative à la présente demande, en réponse à l’argument du demandeur concernant les fausses déclarations faites de bonne foi, le défendeur a renvoyé la Cour aux déclarations faites par le demandeur lorsque l’ASFC l’a interrogé après avoir saisi le document de vérification du casier judiciaire dans lequel figuraient les infractions en question. Lorsque l’ASFC lui a demandé s’il avait déjà été arrêté, accusé ou déclaré coupable d’une infraction criminelle où que ce soit dans le monde, le demandeur a répondu qu’il avait commis des infractions de conduite en état d’ébriété. Je crois comprendre que le défendeur fait valoir que cette déclaration, ainsi que d’autres déclarations faites à l’ASFC au cours de la même entrevue, démontrent que le demandeur comprenait que les infractions en question étaient de nature criminelle. Cependant, ce raisonnement proposé par le défendeur ne se trouve pas dans la décision de la SI et ne constitue donc pas un fondement permettant à la Cour de conclure que le traitement par la SI de l’argument concernant les fausses déclarations faites de bonne foi était raisonnable.

[27] Dans l’affaire Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65, la Cour suprême a expliqué que les principes de la justification et de la transparence exigent que les motifs du décideur administratif tiennent valablement compte des questions et préoccupations centrales soulevées par les parties (au para 127). Comme la SI a omis d’examiner l’un des principaux arguments du demandeur, sa décision est déraisonnable et je dois faire droit à la présente demande de contrôle judiciaire. Il n’est donc pas nécessaire que la Cour examine les autres questions soulevées par le demandeur.

[28] Aucune des parties n’a proposé de question à certifier en vue d’un appel, et aucune question ne sera énoncée.

VI. Les dépens

[29] Comme je l’ai déjà mentionné, le demandeur réclame les dépens. Il reconnaît que les demandes de contrôle judiciaire portant sur des décisions rendues sous le régime de la LIPR ne donnent lieu à des dépens que dans des circonstances exceptionnelles. Il soutient que de telles circonstances existent en l’espèce, en raison des souffrances émotionnelles et des problèmes financiers que lui ont causés la décision déraisonnable de la SI.

[30] Suivant l’article 22 des Règles des cours fédérales en matière de citoyenneté, d’immigration et de protection des réfugiés, DORS/93-22, aucuns dépens ne sont adjugés à moins que des raisons spéciales le justifient. Je suis d’accord avec le défendeur pour dire que le seuil pour l’adjudication de dépens pour des raisons spéciales est élevé (voir, par exemple, Balepo c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 1104 aux para 35-41). À mon avis, les circonstances de l’espèce, y compris le fondement de la décision de la Cour d’accueillir la demande de contrôle judiciaire, ne soulèvent pas de raisons spéciales ni même de fondement crédible pour faire valoir une demande de dépens.

 


JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM-6669-20

LA COUR ORDONNE :

  1. La présente demande de contrôle judiciaire est accueillie. L’affaire est renvoyée devant un autre commissaire de la Section de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié pour qu’une nouvelle décision soit rendue.

  2. Aucune question n’est certifiée aux fins d’un appel.

  3. Aucuns dépens ne sont adjugés.

« Richard F. Southcott »

Juge

Traduction certifiée conforme

Julie Blain McIntosh


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-6669-20

INTITULÉ :

BONGKYUN PARK c LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE à Vancouver (Colombie-Britannique)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 24 juin 2021

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE SOUTHCOTT

DATE DES MOTIFS :

LE 23 JUILLET 2021

COMPARUTIONS :

Min Su Joshua Yang

Pour le demandeur

Andrew Scarth

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Avocat

Coquitlam (Colombie-Britannique)

Pour le demandeur

Procureur général du Canada

Vancouver (Colombie-Britannique)

Pour le défendeur

 

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