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Date : 20210629


Dossier : IMM-2437-20

Référence : 2021 CF 682

[TRADUCTION FRANÇAISE]

St. John’s (Terre-Neuve-et-Labrador), le 29 juin 2021

En présence de madame la juge Heneghan

ENTRE :

JASMINE CURLEITHA CHARLES

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] Madame Jasmine Curleitha Charles (la demanderesse) sollicite le contrôle judiciaire de la décision rendue le ou vers le 1er mai 2020, par laquelle une agente (l’agente) a rejeté sa demande de résidence permanente pour des motifs d’ordre humanitaire présentée depuis le Canada au titre du paragraphe 25(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la Loi).

[2] La demanderesse est citoyenne de Saint-Vincent-et-les-Grenadines. Elle est arrivée au Canada en tant que visiteuse le 26 février 1999 et y est demeurée depuis. Elle est la mère d’un enfant né au Canada en 2013. Elle a fondé entre autres sa demande pour des motifs d’ordre humanitaire sur son établissement au Canada et sur l’intérêt supérieur de son enfant.

[3] La décision de l’agente est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable, et ce, conformément à l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 (C.S.C.).

[4] La demanderesse soutient que la décision de l’agente est déraisonnable, surtout en ce qui concerne les éléments liés à son établissement et à l’intérêt supérieur de son enfant canadien.

[5] Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (le défendeur) avance que la décision est raisonnable.

[6] Après avoir lu la documentation déposée et entendu les observations des avocats, je ne suis pas convaincue qu’il s’agit d’une décision raisonnable. L’intervention de la Cour en l’espèce est justifiée.

[7] Selon moi, l’agente a considéré de façon déraisonnable le séjour prolongé sans statut canadien de la demanderesse comme un facteur lui permettant d’évaluer son établissement au Canada depuis 1999. L’omission de régulariser son statut d’immigration ne constitue pas, en soi, un facteur qui minimise le degré de l’établissement d’une personne au Canada; voir la décision Mitchell c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 190.

[8] L’agente a aussi conclu de façon déraisonnable qu’il existait peu d’éléments de preuve qui démontraient l’établissement. Cette conclusion n’était pas étayée par la preuve.

[9] À mon avis, l’agente a continué de se méprendre dans son évaluation de l’intérêt supérieur de l’enfant canadien de la demanderesse en ignorant selon toute apparence le fait que l’enfant a toujours vécu au Canada. Je me rallie à l’argument de la demanderesse selon lequel l’agente n’a pas tenu compte de l’intérêt supérieur de l’enfant canadien.

[10] L’extrait suivant des motifs de l’agente montre que cette dernière a adopté une approche malavisée pour évaluer l’intérêt supérieur de l’enfant :

[traduction]

[…] Bien que j’aie considéré que demeurer au Canada avec sa mère serait la situation idéale, je ne suis pas convaincue qu’un retour à Saint-Vincent mettrait gravement en péril l’intérêt supérieur de l’enfant. Je suis consciente que l’enfant va conserver sa citoyenneté canadienne, peu importe où il habite, et jouira donc des droits et des possibilités offerts aux autres citoyens canadiens. J’estime qu’il est dans l’intérêt supérieur de l’enfant de demeurer avec sa mère, peu importe l’endroit où il se trouve.

[11] Bien que les demandes pour des motifs d’ordre humanitaire relèvent du pouvoir discrétionnaire du défendeur et de ses agents et délégués, il reste que ce pouvoir doit être exercé de manière raisonnable, en procédant à une évaluation équitable des circonstances personnelles du demandeur, et non d’une manière mécanique et en cherchant un prétexte pour rejeter la demande.

[12] Je n’ai pas besoin de me pencher sur les autres arguments avancés par la demanderesse.

[13] La demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision de l’agente est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre agent pour être examinée de nouveau. Il n’y a aucune question à certifier.


JUGEMENT dans le dossier IMM-2437-20

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision de l’agente est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre agent pour être examinée de nouveau. Il n’y a aucune question à certifier.

« E. Heneghan »

Juge

Traduction certifiée conforme

Semra Denise Omer


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-2437-20

 

INTITULÉ :

JASMINE CURLEITHA CHARLES c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 28 JUIN 2021

JUGEMENT ET MOTIF S:

LA JUGE HENEGHAN

DATE DES MOTIFS :

LE 29 JUIN 2021

COMPARUTIONS :

Lorne Waldman

POUR LA DEMANDERESSE

Leanne Briscoe

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lorne Waldman

Waldman & Associates

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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