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                                                                                                                                            Date : 20010316

                                                                                                                                Dossier : IMM-1692-00

                                                                                                               Référence neutre : 2001 CFPI 183

Entre :

                                       Odilia Elvira MOALI DE SANCHEZ

                                     Eduviges HEIDINGER KRAUSNAIDE

                                           Jose Raul MOALI HEIDINGER

                                                                                                       Partie demanderesse

                                                               - et -

                                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                               ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                        Partie défenderesse

                                           MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PINARD :

[1]         La demande de contrôle judiciaire vise une décision rendue le 9 mars 2000 par la Section du statut de réfugié (la « SSR » ) statuant que les demandeurs ne sont pas des réfugiés au sens de la Convention, tel que défini au paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2.

[2]         Les demandeurs sont citoyens du Pérou. Ils allèguent avoir une crainte bien fondée de persécution en raison d'opinions politiques imputées et de leur appartenance à un groupe social particulier, soit les propriétaires terriens victimes d'extorsion au Pérou.


[3]         La SSR n'a aucunement remis en question la crédibilité des demandeurs. Elle base son refus sur deux conclusions. Premièrement, elle détermine que la famille n'a pas été extorquée à cause de ses opinions politiques mais plutôt en raison de sa réussite financière. Elle base cette conclusion sur les considérations suivantes :

-           La famille n'a jamais fait de politique;

-           Le fait d'être soumis à des discours d'endoctrinement n'a pas pour conséquence de leur imputer des opinions politiques;

-           Personne dans l'appareil étatique n'est au courant que le Sentier lumineux a tenté d'embrigader les demandeurs à leur cause;

-           La demanderesse, Odilia Elvira Moali De Sanchez, n'a pas informé les autorités policières qu'elle avait remis quoi que ce soit au Sentier lumineux; et

-           Il n'a jamais été question que l'État péruvien ait été l'agent persécuteur.

[4]         Deuxièmement, la SSR détermine que la famille n'a pas été extorquée à cause de son appartenance à un groupe social, puisque les propriétaires fonciers (et, je présume, les gens financièrement aisés) ne font pas partie d'un groupe social au sens de la Convention.

[5]         Concernant la première conclusion, bien que c'est à tort que le tribunal semble exiger la participation de l'État péruvien à titre d'agent persécuteur, ses autres considérations sont toutefois pertinentes et suffisantes pour lui permettre de raisonnablement conclure en fait que la crainte des demandeurs d'être persécutés en raison d'opinions politiques imputées n'est pas bien fondée. Dans ce contexte factuel particulier, les demandeurs n'ont pas bien démontré qu'ils ne pouvaient pas bénéficier de la protection de l'État.


[6]         Je considère en outre que la deuxième conclusion de la SSR est exempte d'erreur. La Cour suprême du Canada a rejeté l'interprétation extensive de la notion de groupe social dans l'arrêt Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689. Le statut de propriétaire terrien ne s'inscrit aucunement dans le cadre des thèmes « sous-jacents généraux de la défense des droits de la personne et de la lutte contre la discrimination » (Ward, supra, page 739) et ne constitue pas une « caractéristique personnelle qu'on ne peut modifier par un acte volontaire et qu'on ne peut, dans certains cas, modifier qu'à un prix inacceptable » (Ward, supra, page 738). Le tribunal a d'ailleurs fait référence à l'affaire Wilcox v. Canada (Minister of Employment and Immigration) (2 novembre 1993), A-1282-92, dans laquelle Madame le juge Reed a statué ce qui suit au paragraphe [3] :

I interpret the Tribunal's decision as finding that there was no evidence that the Peruvian upper middle class is subject to any greater level of (what the Tribunal referred to as) depredation than others in Peruvian society generally. I interpret the Tribunal's decision as finding that the Sendero Luminosa are raining terror on everyone in Peru. While the type of danger which the applicants fear (extortion) may only be operative against the rich, this does not mean that the applicants have been or will be subject to persecution in the convention refugee sense.

[7]         Pour toutes ces raisons, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                                                         

       JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 16 mars 2001

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