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Date : 20020426

Dossier : IMM-895-01

Référence neutre : 2002 CFPI 451

ENTRE :

                                                                     NIZAM UDDIN

                                                                                                                                                      Demandeur

                                                                                   et

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                       Défendeur

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE GIBSON :

[1]         Le demandeur vise à obtenir le contrôle judiciaire d'une décision de la Section du statut de réfugié (la SSR) de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié dans laquelle la SSR a décidé que le demandeur n'était pas un réfugié au sens de la Convention selon la définition donnée à cette expression au paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration[1]. La décision de la SSR est datée du 1er février 2001.


[2]         Le demandeur est un Mohajir et un citoyen du Pakistan provenant de la colonie Shah Faisal à Karachi. Il s'est joint à la Ligue musulmane du Pakistan (la LMP) en 1990. Il prétend craindre d'être persécuté, s'il devait retourner au Pakistan, aux mains des membres du parti politique mohajir, le MMQ Haqiqi, qui, à toutes les époques pertinentes, a exercé un important degré d'influence et de contrôle dans la colonie Shah Faisal et aux mains des autorités pakistanaises, en raison de ses opinions politiques et de ses activités comme membre de la LMP.

[3]         Devant la SSR, le demandeur a témoigné d'antécédents à partir d'environ 1992, de harcèlement, d'extorsion, d'agression, d'enlèvement et de torture aux mains du MMQ Haqiqi en raison de son appartenance à la LMP et de ses activités politiques pour le compte de ce parti. Le demandeur a affirmé, dans son témoignage, que le 1er octobre 1999, il avait été témoin des conséquences de ce que la SSR a décrit dans ses motifs comme une [traduction] « scène de carnage » qui aurait été l'oeuvre de membres ou de représentants du MMQ Haqiqi, dont certains, selon lui, l'avaient reconnu sur les lieux. Sur le conseil de son père, le demandeur s'est caché, de crainte que des membres du MMQ Haqiqi ne tentent de l'impliquer dans le carnage à cause de son affiliation avec la LMP. Le demandeur a affirmé, dans son témoignage que, le jour suivant, il avait appris de son père que la police était venue chez lui pour l'interroger. Environ sept jours plus tard, un coup d'État a occasionné la disparition du gouvernement de la LMP et la mise en place d'une administration militaire au Pakistan. Le demandeur a appris que de nombreux travailleurs de la LMP avaient été pris dans une rafle de la police. Des arrangements ont été faits pour que le demandeur quitte le Pakistan.


[4]         Le demandeur est arrivé au Canada le 26 novembre 1999 et il a indiqué son intention de formuler une revendication du statut de réfugié au sens de la Convention le 6 décembre 1999.

[5]         Dans sa décision, la SSR n'a pas contesté, pour l'essentiel, la crédibilité du témoignage du demandeur en ce qui concerne ses difficultés aux mains du MMQ Haqiqi. Elle a toutefois ajouté que, en ce qui a trait à sa crainte d'être persécuté aux mains du MMQ Haqiqi, le demandeur avait une possibilité de refuge intérieur dans la ville de Lahore. Dans la présente demande de contrôle judiciaire, le demandeur n'a pas contesté cette conclusion de la SSR.

[6]         Au soutien de son allégation, à savoir qu'il craignait avec raison d'être persécuté aux mains des autorités du Pakistan, le demandeur a présenté à la SSR, très peu de temps avant l'audience concernant sa revendication, une preuve documentaire sous la forme de mandats d'arrestation, d'une proclamation et d'un premier rapport de dénonciation. La SSR a noté des divergences entre la proclamation et les mandats d'arrestation présentés par le demandeur et la preuve documentaire qui était disponible en ce qui a trait à la forme et au contenu desdits documents. La SSR a préféré les documents dont elle disposait et qu'elle considérait avoir été fournis par des sources fiables et indépendantes. Elle a conclu ainsi :

[traduction]

Le tribunal préfère la preuve documentaire au motif, mentionné plus haut, qu'elle émane de sources indépendantes n'ayant aucun intérêt dans le résultat de la présente revendication. Il conclut que les divergences, en particulier lorsqu'elles sont prises dans leur ensemble, fournissent un motif valable de douter de la fiabilité de la proclamation et des mandats d'arrestation. Il conclut qu'ils sont faux et qu'ils ont été produits afin d'embellir la revendication du revendicateur.


[7]         La SSR a ensuite examiné la fiabilité du premier rapport de dénonciation présenté par le demandeur. Elle a décidé qu'il n'était pas fiable, en se fondant en partie sur sa conclusion selon laquelle la proclamation et les mandats d'arrestations présentés par le demandeur étaient faux et aussi sur le fait qu'elle considérait peu plausible le témoignage du demandeur au sujet des circonstances ayant conduit à la délivrance du premier rapport de dénonciation. La SSR a fini par conclure :

[traduction]

À la lumière des constatations du tribunal concernant la fiabilité des documents présentés afin de corroborer les prétendues accusations contre le revendicateur ainsi que de ses conclusions selon lesquelles les prétendues circonstances dans lesquelles lesdites accusations avaient été déposées étaient peu plausibles, le tribunal conclut que les éléments de preuve crédibles à sa disposition n'ont pas établi, selon la prépondérance des probabilités, qu'il existe actuellement des accusations pendantes contre le revendicateur au Pakistan.

[8]         La seule question à trancher qui a été soulevée au nom du demandeur concernant la présente demande de contrôle judiciaire consistait à savoir si oui ou non la SSR a erré en décidant que les mandats d'arrestation, qui lui avaient été présentés, étaient faux en se basant sur la preuve documentaire qui, fait-on valoir, était au mieux ambivalente et ne faisait pas autorité.

[9]         La SSR a un large pouvoir discrétionnaire pour décider des éléments de preuve qui lui ont été présentés sur lesquels elle décide de se fier. Le paragraphe 68(3) de la Loi sur l'immigration prévoit ce qui suit :



(3) La section du statut n'est pas liée par les règles légales ou techniques de présentation de la preuve. Elle peut recevoir les éléments qu'elle juge crédibles ou dignes de foi en l'occurrence et fonder sur eux sa décision.


(3) The Refugee Division is not bound by any legal or technical rules of evidence and, in any proceedings before it, it may receive and base a decision on evidence adduced in the proceedings and considered credible or trustworthy in the circumstances of the case.

[10]       Il n'a pas été contesté, devant moi, qu'une preuve documentaire considérable révélait que des faux éléments de preuve documentaire étaient assez facilement accessibles pour appuyer les revendications de statut de réfugié et les autres procédures d'immigration provenant du Pakistan. En fait, en toutes circonstances, il incombe aux personnes, comme le demandeur dans la présente espèce, qui invoquent des éléments de preuve documentaire provenant du Pakistan au soutien de leurs revendications, d'être prêtes à démontrer l'authenticité de la documentation présentée. En l'espèce, le demandeur n'a pas été en mesure de démontrer l'authenticité de sa documentation. La SSR avait accès à des éléments de preuve documentaire indépendants qu'elle avait le droit de prendre en considération et qui justifiaient une conclusion selon laquelle la preuve documentaire du demandeur n'était pas authentique. Malgré que certains des éléments de preuve documentaire indépendants accessibles à la SSR faisaient peut-être moins autorité qu'ils auraient pu, en l'absence de quelque élément de preuve présenté par le demandeur pour appuyer l'authenticité de la documentation qu'il a produite, je suis convaincu que la SSR pouvait raisonnablement en venir à la conclusion de fait que la documentation du demandeur n'était pas fiable.

[11]       En conséquence, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée.


[12]       Bien que l'avocat du demandeur ait été quelque peu équivoque devant moi quant à savoir si la présente demande de contrôle judiciaire soulevait une question grave de portée générale qui justifiait la certification, il n'a produit aucune question pour certification. L'avocat du défendeur a soutenu que la décision faisant l'objet du contrôle était fondée sur les faits et ne soulevait aucune question à certifier. Je suis d'accord avec la position de l'avocat du défendeur. Aucune question ne sera certifiée.

« FREDERICK E. GIBSON »

   Juge

Ottawa (Ontario)

Le 26 avril 2002

Traduction certifiée conforme

                                                         

Richard Jacques, LL.L.


Date : 20020426

Dossier : IMM-895-01

OTTAWA (Ontario), le vendredi 26 avril 2002

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE GIBSON

ENTRE :

                                           NIZAM UDDIN

                                                                                                  Demandeur

                                                         et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                   Défendeur

                                           ORDONNANCE

La demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question n'est certifiée.

« FREDERICK E. GIBSON »

   Juge

Traduction certifiée conforme

                                                         

Richard Jacques, LL.L.


             COUR FÉDÉRALE DU CANADA

           SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

            AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                       IMM-895-01

INTITULÉ :                   NIZAM UDDIN

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :          CALGARY (ALBERTA)

DATE DE L'AUDIENCE :          LE 17 AVRIL 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : MONSIEUR LE JUGE GIBSON

DATE DES MOTIFS :             LE 26 AVRIL 2002

COMPARUTIONS :

G. MICHAEL SHERRITT                                POUR LE DEMANDEUR

W. BRAD HARDSTAFF                           POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

G. MICHAEL SHERRITT                                POUR LE DEMANDEUR

CALGARY (ALBERTA)

MORRIS ROSENBERG                           POUR LE DÉFENDEUR

SOUS-PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA



[1]            L.R.C. 1985, ch. I-2.

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