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Date : 20010615

Dossier : IMM-4255-00

Référence neutre : 2001 CFPI 662

Ottawa (Ontario), le 15 juin 2001

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE JOHN A. O'KEEFE

ENTRE :

NEUSA MARGARIDA FERRAO BASTOS

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE O'KEEFE

[1]                 Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire présentée conformément à l'article 82.1 de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 (la Loi) à l'encontre de la décision par laquelle la Section du statut de réfugié (la SSR) a conclu, le 13 juillet 2000, que la demanderesse n'était pas une réfugiée au sens de la Convention.


[2]                 La demanderesse sollicite une ordonnance annulant la décision susmentionnée et renvoyant l'affaire à un tribunal différemment constitué pour que celui-ci statue à nouveau sur l'affaire.

Les faits

[3]                 La demanderesse est une citoyenne de l'Angola qui est entrée au Canada le 22 décembre 1999 en vue de revendiquer le statut de réfugiée. Elle a passé toute sa vie en Angola; elle a fait ses études à Benguela, mais l'école qu'elle fréquentait manquait de livres, de pupitres et de matériel. Afin d'améliorer la situation dans son école et de remédier à la qualité de l'enseignement, la demanderesse et un certain nombre d'étudiants ont pris l'initiative de former un groupe pour attirer l'attention du directeur de l'école sur leurs préoccupations. La demanderesse affirme avoir été élue présidente des étudiants parmi les représentants de classe et avoir agi comme porte-parole du groupe. À la réunion publique de fin d'année, la demanderesse a parlé des préoccupations qu'elle avait au sujet du système d'éducation.


[4]                 Le 6 novembre 1999, pendant que la demanderesse était allée rendre visite à des membres de sa famille, deux agents de la [traduction] « sécurité de l'État » se sont rendus chez son père et l'ont [traduction] « interrogé » . Le père de la demanderesse a communiqué avec celle-ci pour l'avertir que, par mesure de sécurité, elle devait se rendre à Luanda, où sa mère vit, en utilisant un faux nom. C'est ce que la demanderesse a fait; elle est restée chez sa mère pendant un mois. Dans l'intervalle, le père a de nouveau été interrogé au sujet des activités de la demanderesse et il a été détenu par la sécurité de l'État pendant que l'on continuait à chercher la demanderesse.

[5]                 La demanderesse est ensuite allée habiter chez une cousine; pendant ce temps, la sécurité de l'État s'est rendue chez sa mère et lui a dit que sa fille était affiliée à [traduction] « l'opposition angolaise à l'étranger » . Sur les instances de sa cousine, la demanderesse a quitté l'Angola le 17 décembre 1999 sous une fausse identité, en prétendant être membre d'une équipe sportive qui se rendait à l'étranger. La demanderesse est arrivée aux États-Unis le 20 décembre 1999; elle serait entrée au Canada deux jours plus tard, à Niagara Falls, et elle a alors exprimé son intention de revendiquer le statut de réfugiée au sens de la Convention.

La décision de la SSR

[6]                 La revendication a été entendue le 12 juin 2000 par deux membres d'un tribunal de la SSR. Par une décision en date du 11 juillet 2000, le SSR a conclu que la demanderesse n'était pas une réfugiée au sens de la Convention. Le tribunal de la SSR était convaincu que la demanderesse était une ressortissante de l'Angola, mais il n'était pas convaincu, selon la prépondérance des probabilités, de la vraisemblance de la version des événements relatés par la demanderesse.


[7]                 Le tribunal avait pris en considération le fait que la demanderesse n'avait produit aucun document montrant qu'elle était à Benguela en 1999, si ce n'est une carte d'identité nationale qui avait expiré en 1994. Le fait que, même si la demanderesse était allée chercher son diplôme d'études secondaires avant la réunion, elle ne l'avait pas apporté avec elle lorsqu'elle était allée rester chez sa mère préoccupait également le tribunal. Les explications que la demanderesse avait fournies pour justifier le fait qu'elle n'avait pas produit son diplôme d'études secondaires préoccupaient le tribunal ainsi que le fait que la déposition figurant dans le Formulaire de renseignements personnels (le FRP) était plus détaillée que le témoignage oral que la demanderesse avait présenté; aux pages 3 et 4 de sa décision, le tribunal a dit ce qui suit :

Nous nous sommes attachés à son comportement pendant son témoignage. Nous avons remarqué qu'elle a fourni beaucoup plus de détails dans la déposition écrite que dans son témoignage oral. Lorsqu'on l'a interrogée à l'audience, on n'a pas retrouvé le même approfondissement que dans le FRP.

[8]                 Le fait qu'au cours du témoignage oral, la demanderesse n'avait pas cité les dates mentionnées dans son FRP et qu'elle se mêlait au sujet de la suite des événements préoccupait également le tribunal. Le tribunal n'était pas convaincu que la demanderesse ait été présidente des étudiants comme elle le prétendait parce qu'elle ne lui avait pas semblé être une oratrice enthousiaste ou volubile.

[9]                 De l'avis du tribunal, il n'était pas vraisemblable que les autorités angolaises se soient intéressées à la demanderesse à cause du discours qu'elle avait fait à la réunion ou qu'elles se soient données autant de mal pour la chercher. Enfin, le tribunal n'a pas jugé vraisemblable que les autorités aient associé la demanderesse à l'opposition angolaise à l'étranger.


Arguments de la demanderesse

[10]            La demanderesse soutient qu'il est manifestement déraisonnable de s'attendre à ce qu'un revendicateur réunisse nécessairement des documents d'identité lorsqu'il fuit un danger. La demanderesse a également témoigné qu'elle craignait que tout autre contact avec sa famille mette celle-ci en danger. Par conséquent, la demanderesse n'aurait pas nécessairement pu obtenir des documents de sa famille simplement en communiquant avec elle. La demanderesse soutient que la SSR a donc commis une erreur parce que son raisonnement est [traduction] « opaque » et qu'il va à l'encontre de l'obligation qui lui incombe de lui expliquer pourquoi la revendication était rejetée. Les décisions Mehterian c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (17 juin 1992) dossier A-717-90 (C.A.F.) et Takhar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), (19 février 1999) dossier IMM-1961-98 (C.F. 1re inst.) sont mentionnées à l'appui des arguments susmentionnés.


[11]            À l'audition de la revendication, l'avocat de la demanderesse a soutenu que la déposition figurant dans le FRP renfermait un plus grand nombre de détails que le témoignage oral parce qu'il avait rédigé la déposition en se fondant sur une conversation qu'il avait eue avec sa cliente. La SSR est libre d'accepter ou de rejeter cette explication, mais l'avocat est un officier de justice et la demanderesse soutient que la SSR n'était pas libre d'omettre entièrement d'en tenir compte. La demanderesse cite la décision Papsouev c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1999), 168 F.T.R. 99 (C.F. 1re inst.) à l'appui de la thèse selon laquelle la décision de la SSR devrait être annulée parce qu'on a omis de fournir de solides motifs à l'appui du rejet de l'explication donnée par l'avocat à l'audience.

[12]            La demanderesse signale que le tribunal a de fait accepté l'explication donnée par l'avocat, comme le montre la page 152 du dossier de la demanderesse. Partant, la SSR est revenue sur sa décision et a commis un déni de justice naturelle.

[13]            La demanderesse affirme qu'on lui a uniquement posé des questions au sujet des dates précises auxquelles elle s'était présentée aux examens. Elle soutient que la preuve qu'elle a fournie sur ce point n'était pas particulièrement essentielle à sa revendication. La SSR doit fonder une conclusion de non-crédibilité sur des éléments essentiels ou sur des points cruciaux plutôt que sur des incohérences ou sur des éléments de preuve invraisemblables qui n'ont rien à voir avec la revendication. Des arrêts sont mentionnés à l'appui de la prétention de la demanderesse selon laquelle une conclusion défavorable de crédibilité, qui est fondée sur des contradictions, doit être fondée sur des contradictions réelles qui ont de l'importance. Un témoignage présenté sous serment doit être retenu en l'absence d'un motif juridique justifiant qu'on omette d'en tenir compte. Il n'existe aucune exigence indépendante voulant qu'il y ait corroboration.


[14]            En outre, la SSR a commis une erreur en remettant en question la crédibilité de la demanderesse parce qu'elle n'avait pas mentionné de dates de son propre chef, puisqu'aucune question n'était soulevée au sujet du moment où les événements s'étaient produits (à l'exception du moment où la demanderesse avait terminé ses études).

[15]            La demanderesse soutient qu'il était manifestement déraisonnable pour la SSR d'apprécier sa crédibilité en se fondant sur la question de savoir si elle était une oratrice enthousiaste et volubile. En outre, la SSR a clairement tenu compte de l'idée occidentale qu'elle avait au sujet d'étudiants qui agissent comme présidents. La Cour a donné à maintes reprises des avertissements au sujet des pièges que présente l'interprétation d'éléments de preuve selon des « concepts occidentaux » , selon des « critères canadiens » ou selon la « logique et l'expérience nord-américaines » : Bains c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1993), 20 Imm. L.R. (2d) 296 (C.F. 1re inst.), Rahnema c. Canada (Solliciteur général) (1993), 22 Imm. L.R. (2d) 127 (C.F. 1re inst.) et Sun c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1993), 24 Imm. L.R. (2d) 226 (C.F. 1re inst.).

[16]            La demanderesse soutient que la SSR a apprécié sa crédibilité d'une façon défavorable parce qu'elle n'avait pas un « profil politique » , expression que la SSR n'a pas expliquée. La demanderesse affirme que, quoi qu'il en soit, elle avait un profil politique : celui d'une représentante d'étudiants qui s'adressait aux autorités gouvernementales au sujet des plaintes portées par les étudiants en ce qui concerne le financement insuffisant attribuable à l'effort de guerre.


[17]            Rejeter la preuve fournie par un intéressé pour le motif qu'elle n'est pas vraisemblable, sans fournir d'explications, constitue une erreur de droit. La décision Arumugam c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), (20 janvier 1994) dossier IMM-1406-93 (C.F. 1re inst.), est citée à l'appui de cette prétention.

[18]            En outre, la SSR n'a pas tenu compte de la question de l'agent persécuteur et elle a donc commis une erreur. La SSR aurait dû indiquer pourquoi le gouvernement angolais ne considérerait pas les actions et les paroles de la demanderesse comme étant antigouvernementales. La demanderesse soutient que la SSR a plutôt simplement qualifié sa preuve d'invraisemblable, ce qui, en l'absence de mention de la preuve, est arbitraire : Alfred c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1994), 76 F.T.R. 231 (C.F. 1re inst.) et Dykon c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1994), 87 F.T.R. 98 (C.F. 1re inst.).

[19]            Enfin, la demanderesse affirme que si la preuve qu'elle a fournie était conforme à la preuve documentaire, on doit lui laisser le bénéfice du doute au sujet des éléments de preuve qu'elle n'a pas été en mesure de fournir : Chan c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1995] 3 R.C.S. 593. En omettant de mentionner quelque élément de preuve à l'appui de la conclusion tirée au sujet de la conduite des autorités angolaises, la SSR a omis d'appliquer le principe du bénéfice du doute énoncé dans l'arrêt Chan, précité.


Arguments du défendeur

[20]            Le défendeur soutient que la Cour ne devrait pas modifier l'appréciation que la SSR a faite au sujet de la crédibilité de la demanderesse à moins d'être convaincue que la SSR a fondé sa conclusion sur des considérations non pertinentes ou qu'elle a omis de tenir compte de la preuve. Le défendeur affirme que si, au vu du dossier, il est avec raison loisible à la SSR de faire les inférences qu'elle a faites et de tirer les conclusions qu'elle a tirées, la Cour ne devrait pas intervenir, et ce, peu importe qu'elle souscrive ou non à pareilles inférences.

[21]            Le défendeur affirme que la SSR pouvait à bon droit faire une inférence défavorable à partir du fait que la preuve orale que la demanderesse avait présentée n'était pas aussi détaillée que la déposition écrite. Dans ses explications, la demanderesse n'a pas tenu compte du fait que les renseignements qui sont consignés dans le FRP proviennent du demandeur et non de l'avocat. Le défendeur soutient qu'il est donc tout à fait raisonnable de s'attendre à ce que le demandeur qui a raconté une histoire que son avocat a consignée par écrit raconte à peu près la même histoire à l'audience.

[22]            Le défendeur déclare qu'il existe une exigence générale voulant qu'on laisse le bénéfice du doute à l'intéressé, mais qu'en l'espèce, la SSR a fourni des motifs détaillés afin d'expliquer pourquoi elle ne croyait pas la demanderesse.


Les dispositions législatives pertinentes

[23]            L'expression « réfugié au sens de la Convention » est définie comme suit dans la Loi sur l'immigration :


« réfugié au sens de la Convention » Toute personne_ :

a) qui, craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

(i) soit se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

(ii) soit, si elle n'a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ou, en raison de cette crainte, ne veut y retourner;

b) qui n'a pas perdu son statut de réfugié au sens de la Convention en application du paragraphe (2).

Sont exclues de la présente définition les personnes soustraites à l'application de la Convention par les sections E ou F de l'article premier de celle-ci dont le texte est reproduit à l'annexe de la présente loi.

2(1) "Convention refugee" means any person who

(a) by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

(i) is outside the country of the person's nationality and is unable or, by reason of that fear, is unwilling to avail himself of the protection of that country, or

(ii) not having a country of nationality, is outside the country of the person's former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, is unwilling to return to that country, and

(b) has not ceased to be a Convention refugee by virtue of subsection (2),

but does not include any person to whom the Convention does not apply pursuant to section E or F of Article 1 thereof, which sections are set out in the schedule to this Act;


Les points litigieux

[24]            1.          La SSR a-t-elle commis une erreur susceptible de révision en concluant à l'absence de crédibilité parce qu'elle estimait que la demanderesse n'était pas présidente des étudiants étant donné qu'elle n'était pas une oratrice enthousiaste et volubile?


2.          La SSR a-t-elle commis une erreur en concluant qu'il n'était pas vraisemblable que les autorités angolaises : a) s'intéressent à la demanderesse; b) se soient donné autant de mal pour chercher la demanderesse; et c) aient associé la demanderesse à l'opposition à l'étranger?

3.          La Commission a-t-elle commis une erreur en concluant au manque de crédibilité parce que le FRP renfermait plus de détails que le témoignage oral?

4.          La Commission a-t-elle commis une erreur susceptible de révision en concluant au manque de crédibilité du fait que la demanderesse n'avait pas mentionné de dates précises dans son témoignage oral?

5.          La Commission a-t-elle commis une erreur susceptible de révision en concluant au manque de crédibilité du fait que la demanderesse n'avait pas produit de documents montrant qu'elle était en Angola en 1999?

Analyse et décision

[25]            Première question

La SSR a-t-elle commis une erreur susceptible de révision en concluant à l'absence de crédibilité parce qu'elle estimait que la demanderesse n'était pas présidente des étudiants étant donné qu'elle n'était pas une oratrice enthousiaste et volubile?


La SSR ne croyait pas que la demanderesse eût été présidente des étudiants parce que celle-ci ne lui avait pas semblé être une oratrice enthousiaste et volubile. La Commission a donc conclu que la demanderesse n'était pas digne de foi. Je ne puis trouver aucun fondement à l'appui de cette conclusion. Je puis fort bien concevoir que certains présidents d'étudiants ne sont pas des orateurs enthousiastes et volubiles. Cette conclusion de non-crédibilité est dénuée de fondement. La SSR a commis une erreur susceptible de révision lorsqu'elle a tiré cette conclusion.

[26]            Deuxième question

La SSR a-t-elle commis une erreur en concluant qu'il n'était pas vraisemblable que les autorités angolaises : a) s'intéressent à la demanderesse; b) se soient donné autant de mal pour chercher la demanderesse; et c) aient associé la demanderesse à l'opposition à l'étranger?

J'ai examiné le dossier et, encore une fois, je n'ai pu trouver aucun élément de preuve à l'appui de cette conclusion. Un tribunal ne peut pas simplement conclure que quelque chose n'est pas vraisemblable sans fournir d'explications; s'il agissait ainsi, il commettrait une erreur de droit (voir Arumugam, précité). La seule explication qui a été donnée était que la demanderesse n'avait pas un profil politique. Si la demanderesse était présidente des étudiants et si elle a fait les déclarations qu'elle a faites, elle pouvait avoir un profil politique pour certaines gens. La Commission a commis une erreur de droit susceptible de révision en tirant cette conclusion sans donner une explication fondée sur les faits.

[27]            Troisième question

La Commission a-t-elle commis une erreur en concluant au manque de crédibilité parce que le FRP renfermait plus de détails que le témoignage oral?


La Commission a conclu que la demanderesse n'était pas digne de foi en ce qui concerne la version des événements qu'elle avait donnée parce que le FRP écrit était plus détaillé que son témoignage oral. On ne saurait s'attendre à ce qu'une personne se rappelle dans les moindres détails ce qui a été consigné par écrit dans ce cas-ci, étant donné que le FRP a été rempli par l'avocat, qui avait recueilli les renseignements par l'entremise d'un interprète. Quoi qu'il en soit, même si le défendeur a affirmé que telle était l'histoire de la demanderesse, je ne crois pas que dans ce cas-ci, il y avait lieu de croire que la version des événements donnée par la demanderesse n'était pas crédible.

[28]            Quatrième question

La Commission a-t-elle commis une erreur susceptible de révision en concluant au manque de crédibilité du fait que la demanderesse n'avait pas mentionné de dates précises dans son témoignage oral?


J'ai lu les motifs que la SSR a fournis au sujet des dates et j'ai lu la transcription du témoignage de la demanderesse. Je ne partage pas les préoccupations de la Commission. La demanderesse a de fait donné des explications en ce qui concerne les dates au sujet desquelles des questions lui avaient été posées. Il n'existe aucune exigence voulant que toutes les dates soient mentionnées dans le FRP. Quant au fait que les examens ont eu lieu au mois d'octobre et que la demanderesse a terminé ses études secondaires au mois de novembre, la demanderesse a expliqué qu'elle avait obtenu son diplôme une fois les examens terminés. Il y a fort peu de temps entre la fin du mois d'octobre et le début du mois de novembre. Il ne s'agit pas d'une contradiction véritable, mais uniquement d'une légère incohérence. Une conclusion de crédibilité défavorable ne peut pas être fondée sur pareille conclusion. La Commission a donc commis une erreur lorsqu'elle a conclu au manque de crédibilité en se fondant sur ce facteur.

[29]            Cinquième question

La Commission a-t-elle commis une erreur susceptible de révision en concluant au manque de crédibilité du fait que la demanderesse n'avait pas produit de documents montrant qu'elle était en Angola en 1999?

La Commission a conclu que l'explication que la demanderesse avait donnée au sujet du fait qu'elle n'avait pas de carte d'identité nationale valide et qu'elle n'avait pas son diplôme d'études secondaires n'était pas satisfaisante. La demanderesse a déclaré qu'elle avait perdu la nouvelle carte d'identité lors de l'examen et que son père lui avait remis son ancienne carte. Elle a affirmé qu'elle n'avait pas apporté le diplôme parce qu'elle n'avait pas eu le temps de le faire. La SSR n'a fourni absolument aucune explication au sujet du rejet des explications fournies par la demanderesse. Elle s'est contentée de dire que la demanderesse n'était pas crédible. La Commission ne peut pas agir ainsi. Quoi qu'il en soit, il arrive souvent que des personnes qui s'enfuient n'aient pas tous leurs documents (voir Takhar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (19 février 1999), dossier IMM-1961-98 (C.F. 1re inst.)).

[30]            Le 1999 Country Reports on Human Rights Practices in Angola tend à étayer la façon dont la demanderesse a relaté ses problèmes.


[31]            Je conclus que les conclusions que la SSR a tirées au sujet de la crédibilité sont manifestement déraisonnables et qu'elles doivent être annulées.

[32]            La demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision de la SSR est annulée et l'affaire est renvoyée à un autre tribunal de la SSR pour qu'il statue à nouveau sur l'affaire.

[33]            Je ne suis pas prêt à certifier la question grave de portée générale qui m'a été soumise.

ORDONNANCE

[34]            LA COUR ORDONNE :

La demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision de la SSR est annulée et l'affaire est renvoyée à un autre tribunal de la SSR pour qu'il statue à nouveau sur l'affaire.

                                                                                              « John A. O'Keefe »             

Juge

Ottawa (Ontario)

Le 15 juin 2001

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


                                 COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                          SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                            IMM-4255-00

INTITULÉ :                                           Neusa Margarida Ferrao Bastos

c.

MCI

LIEU DE L'AUDIENCE :                  Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                 le 1er mai 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                        Monsieur le juge O'Keefe

DATE DES MOTIFS :                       le 15 juin 2001

COMPARUTIONS :

M. Micheal Crane                                               POUR LA DEMANDERESSE

M. David Tyndale                                                POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

M. Micheal Crane                                               POUR LA DEMANDERESSE

Toronto (Ontario)

M. Morris Rosenberg                           POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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