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                                                                                                                               Date : 20050201

                                                                                                                      Dossier : IMM-963-04

                                                                                                                 Référence : 2005 CF 128

ENTRE :

                                                       ANA MARIA SOSA VILLA

                                                                                                                    partie demanderesse

                                                                          - et -

                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                         ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                       partie défenderesse

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PINARD

[1]         Il s'agit ici d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié(la CISR) rendue le 12 janvier 2004, statuant que la demanderesse n'est pas une « réfugiée » au sens de la Convention, ni une « personne à protéger » selon les définitions données aux articles 96 et 97 respectivement de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. (2001), ch. 27.


[2]         Ana Maria Sosa Villa (la demanderesse) est citoyenne de la République dominicaine depuis sa naissance en février 1980. Depuis septembre 2001, elle est aussi citoyenne de l'Espagne. Elle allègue une crainte bien fondée de persécution dans chacun de ces pays en raison d'opinions politiques imputées et en raison de son appartenance à un groupe social particulier, celui des homosexuelles.

[3]         La CISR a conclu que généralement la demanderesse est crédible et que les raisons psychologiques invoquées par cette dernière justifiaient son attente de plus de six semaines après son arrivée au Canada avant de demander l'asile. Bien que la preuve permet de conclure à une crainte fondée de persécution en République dominicaine, la CISR souligne que la demanderesse, qui a le fardeau de démontrer une crainte fondée de persécution dans chacun de ses pays de nationalité, n'a pas réussi à le faire en ce qui concerne l'Espagne, un pays en mesure de la protéger.

[4]         Il existe une présomption générale suivant laquelle ltat est en mesure de fournir une protection à ses citoyens; une preuve claire et convaincante est nécessaire lorsque le demandeur veut établir que ce n'est pas le cas (voir Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689, à la page 724). Dans Canada (M.E.I.) c. Villafranca (1992), 150 N.R. 232, [1992] A.C.F. no 1189 (QL), la Cour d'appel fédérale dit, au paragraphe [6] :

Il n'est pas facile de se décharger de l'obligation de prouver que l'on ne peut pas se réclamer de la protection de son propre pays. Le test applicable est objectif, le demandeur étant tenu de démontrer qu'il lui est physiquement impossible de rechercher l'aide de son gouvernement (ce n'est clairement pas le cas ici) ou que le gouvernement lui-même ne peut d'une façon quelconque la lui accorder.

[5]         Je suis d'avis que la demanderesse n'a pas réussi à renverser cette présomption pour deux raisons. La première, c'est que le Country Reports américain pour l'année 2002 indique que l'Espagne est un pays démocratique, est signataire de nombreux traités relatifs aux droits humains, que son système judiciaire est indépendant et efficace, et, surtout, que le gouvernement respecte les droits fondamentaux de ses citoyens. La demanderesse n'a présenté aucune preuve sérieuse pour renverser cette présomption.


[6]         La seconde raison, c'est que la crainte de la demanderesse repose sur le fait que la police et les autorités de ltat n'interviennent pas de manière adéquate; toutefois, elle n'a jamais sollicité la protection des autorités espagnoles. Il n'est pas sérieux, dans les circonstances, d'alléguer que ltat n'est pas en mesure de vous protéger si vous n'avez pas tenté d'obtenir son aide.

[7]         Je conclus donc que la demanderesse ne s'est pas déchargée du fardeau de démontrer que la décision de la CISR, un tribunal spécialisé, est fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments à sa disposition (alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7). Je ne vois rien de manifestement déraisonnable dans la décision en cause.

[8]         En conséquence, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                                                     

       JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 1er février 2005


                                                              COUR FÉDÉRALE

                                               AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                     IMM-963-04

INTITULÉ :                                                       Ana MARIA SOSA VILLA c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                               Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                             Le 14 décembre 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :                 Le juge Pinard

DATE DES MOTIFS :                                   Le 1er février 2005     

COMPARUTIONS :

Me Lenya Kalepdjian                                                 POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Me Mario Blanchard                                       POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lenya Kalepdjian                                           POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Montréal (Québec)

John H. Sims, c.r.                                           POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

Sous-procureur général du Canada

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