Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20210401


Dossier : T‑1938‑19

Référence : 2021 CF 292

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 1er avril 2021

En présence de monsieur le juge Gleeson

ENTRE :

GRAIN WORKERS’ UNION

LOCAL 333 ILWU

demanderesse

et

VITERRA INC.

défenderesse

ORDONNANCE ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] La défenderesse, Viterra Inc. [Viterra], s’oppose à l’admissibilité en preuve de certains documents dont la production était ordonnée par des assignations à produire [les assignations].

[2] Les assignations ont été délivrées à la suite d’ordonnances datées du 13 octobre 2020 et du 11 mars 2021 dans le contexte d’une instance d’outrage au tribunal au titre des articles 466 et 467 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106 [les Règles]. La demanderesse, Grain Workers’ Union Local 333 ILWU [le syndicat], prétend que Viterra est coupable d’outrage au tribunal relativement à une sentence arbitrale rendue en faveur du syndicat.

[3] Viterra a soulevé son objection quant à l’admissibilité au cours d’une conférence de gestion de l’instance, lors de laquelle le syndicat a demandé un échange de dossiers avant l’audience afin de rendre plus efficaces des dates d’audience prévues. Viterra s’oppose également à ce qu’elle fournisse au syndicat les dossiers faisant l’objet des assignations avant que la Cour ne rende une décision quant à l’admissibilité, en soutenant que lui exiger de fournir ces dossiers irait à l’encontre des valeurs consacrées par la Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, constituant l’annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R‑U), 1982, c 11 [la Charte].

[4] Le syndicat n’a pas examiné les dossiers visés par assignations et n’a pas encore cherché à déposer des documents en preuve. Dans ses observations écrites dans le cadre de son objection à l’admissibilité, Viterra a fourni une description générale des documents et des circonstances entourant leur création, mais l’avocat a souligné que la description ne doit pas être interprétée comme une preuve ou comme une admission de la part de Viterra. La Cour n’est pas saisie des documents en cause ni des éléments de preuve qui décrivent en détail les circonstances entourant leur production, leur contenu, leur stockage ou leur fiabilité.

[5] Pour les motifs qui suivent, j’ai conclu que l’opposition de Viterra quant à l’admissibilité est prématurée. Je conclus également que l’opposition à la production est en fait une tentative de faire annuler les assignations, une question qui a fait l’objet d’une requête antérieure par Viterra, laquelle a été rejetée. Je conclus enfin, dans le contexte de la présente instance, que le fait d’obliger Viterra à produire les documents en cause n’est pas incompatible avec les valeurs de la Charte.

II. L’objection à l’admissibilité est prématurée

[6] Viterra s’oppose à l’admissibilité des documents faisant l’objet des assignations au motif que le syndicat déposera les documents comme preuve des faits qui y sont énoncés, et que ces documents constituent donc du ouï‑dire, et donc présumés inadmissibles en preuve. Viterra soutient en outre que les dossiers ne sont pas nécessaires. Elle soutient que le syndicat a accès à une source préférable d’éléments de preuve, soit le témoignage de vive voix de ses membres, qui est la meilleure preuve accessible. Elle fait valoir, particulièrement dans le contexte d’une instance pour outrage au tribunal, qui est de nature quasi criminelle, que le syndicat devrait être tenu de s’appuyer sur le témoignage de vive voix de ses membres, et non sur les dossiers de l’employeur, pour prouver l’allégation d’outrage.

[7] En common law, le ouï‑dire est présumé inadmissible. Toutefois, cette présomption est assujettie à l’application de la « méthode d’analyse raisonnée » du ouï‑dire adoptée par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt R c Khan, [1990] 2 RCS 531, et à un certain nombre d’exceptions traditionnelles à la règle relative au ouï‑dire, y compris une exception pour les documents commerciaux. La méthode d’analyse raisonnée nécessite la prise en considération de la nécessité et de la fiabilité des éléments de preuve par ouï‑dire. Dans l’arrêt R c Mapara, [2005] 1 RCS 358 aux pages 366 et 367, la Cour suprême a établi le cadre d’examen suivant pour statuer sur l’admissibilité du ouï‑dire en common law :

La méthode d’analyse raisonnée de l’admissibilité de la preuve par ouï‑dire, qu’a développée la Cour depuis une vingtaine d’années, tente de conférer une certaine souplesse à la règle du ouï‑dire pour éviter ces conséquences négatives. Il convient d’appliquer le cadre d’analyse suivant, tiré de Starr, pour déterminer l’admissibilité de la preuve par ouï‑dire :

a) La preuve par ouï‑dire est présumée inadmissible à moins de relever d’une exception à la règle du ouï‑dire. Les exceptions traditionnelles continuent présomptivement de s’appliquer.

b) Il est possible de contester une exception à l’exclusion du ouï‑dire au motif qu’elle ne présenterait pas les indices de nécessité et de fiabilité requis par la méthode d’analyse raisonnée. On peut la modifier au besoin pour la rendre conforme à ces exigences.

c) Dans de « rares cas », la preuve relevant d’une exception existante peut être exclue parce que, dans les circonstances particulières de l’espèce, elle ne présente pas les indices de nécessité et de fiabilité requis.

d) Si la preuve par ouï‑dire ne relève pas d’une exception à la règle d’exclusion, elle peut tout de même être admissible si l’existence d’indices de fiabilité et de nécessité est établie lors d’un voir‑dire.

(Voir, de façon générale, D. M. Paciocco et L. Stuesser, The Law of Evidence (3e éd. 2002), p. 95‑96.)

[8] La Loi sur la preuve au Canada, LRC 1985, c C‑5, art 30 [la LPC] prévoit également l’admission en preuve dans une instance judiciaire de documents établis dans le cours ordinaire des affaires.

[9] Selon ce que je comprends de l’objection de Viterra, cette dernière a essentiellement adopté la position selon laquelle le ouï‑dire potentiellement admissible peut être inadmissible dans le cadre de l’instance d’outrage au tribunal, qui est de nature quasi criminelle, au seul motif qu’une preuve directe pourrait être accessible. Bien que l’équilibre entre la nécessité et la fiabilité ou les exigences de l’article 30 de la LPC puisse mener à ce résultat dans certaines circonstances, il ne s’agit pas là d’une inévitabilité.

[10] La disponibilité d’une preuve directe ne rend pas inadmissible la preuve par ouï‑dire qui serait autrement admissible. La jurisprudence a reconnu qu’il existe des cas où, même lorsqu’un déclarant est disponible pour témoigner, la meilleure preuve est la preuve par ouï‑dire — par exemple, lorsque la personne ayant constitué un dossier n’a pas un souvenir indépendant la constitution de ce dossier (R v Shea, 2011 NSCA 107 aux para 69 et 75).

[11] Conclure que la personne ayant constitué le dossier d’entreprise ou la source de l’information contenue dans un tel dossier doit témoigner serait également contraire à la justification sous‑jacente de l’exception relative aux dossiers d’entreprise, à savoir que les documents produits dans le cours ordinaire des affaires sont admis pour éviter le coût et les inconvénients de faire témoigner la personne responsable de la gestion du dossier et celle qui l’a constituée. L’exception en common law et l’article 30 de la LPC ne serviraient pas à grand‑chose si la personne ayant constitué un dossier d’entreprise était tenue, lorsque cela est possible, de témoigner directement (R v Martin, [1997] SJ no 172 (CA Sask) aux para 49 et 50).

[12] Les grands principes juridiques régissant l’admission du ouï‑dire ne permettent pas de déterminer l’admissibilité dans un vide factuel et en l’absence de preuve. L’admissibilité suivant la common law ou l’article 30 de la LPC est une question mixte de fait et de droit. En l’absence des documents et des éléments de preuve pertinents relatifs à ces documents, l’objection de Viterra quant à l’admissibilité est prématurée.

III. La question de la production de dossiers a été examinée et tranchée

[13] Viterra reconnaît que la Charte ne s’applique pas directement dans la présente affaire; toutefois, elle s’appuie sur l’arrêt Retail, Wholesale and Department Store Union, Local 580 c Dolphin Delivery Ltd, [1986] 2 RCS 573 [Dolphin Delivery] pour faire valoir que les valeurs consacrées par la Charte doivent éclairer les décisions en matière d’admissibilité et de production dans la présente affaire. Viterra soutient que le fait de l’obliger à fournir au syndicat les documents faisant l’objet des assignations avant que la Cour ne rende une décision sur l’admissibilité irait à l’encontre des valeurs consacrées à l’article 8 de la Charte, soit le droit d’être protégé contre les fouilles, les perquisitions et les saisies abusives, à l’alinéa 11c) de la Charte, soit le droit de ne pas témoigner contre soi‑même, et à l’alinéa 11d) de la Charte, soit la présomption d’innocence, et que cela irait à l’encontre des principes de justice fondamentale à l’article 7 de la Charte.

[14] En plus de cette position, Viterra fait valoir que, dans les motifs de rejet de la requête visant à annuler l’assignation, le juge des requêtes a laissé au juge qui préside l’audience de justification le soin de trancher deux questions : soit la production des documents visés par les assignations et l’admissibilité (2021 CF 187). Viterra s’appuie sur le paragraphe de conclusion des motifs du juge de la requête où il est énoncé que « [b]ien que la question de la production des documents ait été déférée au juge présidant l’audience, le syndicat a obtenu gain de cause dans le cadre de la requête » (2021 CF 187 au para 53).

[15] Le syndicat soutient que Viterra a confondu les questions de production et d’admissibilité. Elle soutient que la question de la production a été tranchée dans le contexte de la requête de Viterra visant à annuler les assignations. Elle soutient également qu’en cherchant à faire annuler les assignations, Viterra a avancé des arguments liés aux valeurs consacrés par la Charte à l’article 7 (justice fondamentale) et à l’alinéa 11c) (le droit de ne pas être contraint à témoigner contre soi‑même).

[16] Le syndicat reconnaît que Viterra n’a pas avancé l’argument selon lequel la production avant la détermination de l’admissibilité serait contraire aux valeurs consacrées à l’article 8. Cependant, le syndicat soutient que ce manquement ne signifie pas que Viterra peut maintenant invoquer un argument relatif à la production dans le cadre d’une objection à l’admissibilité. Le syndicat soutient qu’en s’opposant aux assignations, notamment à l’obligation de produire certains documents, Viterra était tenue de présenter son argumentation sous son meilleur jour. Les principes de la question déjà tranchée et de la contestation indirecte l’empêchent maintenant de présenter des arguments qui auraient pu être présentés lors de la requête en annulation (Danyluk c Ainsworth Technologies Inc, 2001 CSC 44 au para 18 [Danyluk]).

[17] Une lecture des motifs du juge de la requête dans leur ensemble et dans leur contexte m’amène à conclure que le juge de la requête a abordé et tranché la question de la production.

[18] Dans sa requête en annulation, Viterra a sollicité des ordonnances en vue d’obtenir (1) l’annulation des assignations et (2) l’interdiction au syndicat de la contraindre à témoigner dans l’instance pour outrage au tribunal par l’entremise de ses employés ou de la production de documents en sa possession.

[19] Viterra a expressément demandé, par voie de requête, une ordonnance interdisant la production; cette requête a été rejetée par la Cour. La question de l’admissibilité, que Viterra n’a pas soulevée dans le cadre de la requête, a été laissée sans surprise au juge de l’audience, en partie parce que le juge de l’audience serait en mesure « d’entendre tous les arguments, d’examiner les documents en question et de se prononcer ensuite sur l’admissibilité de tout document particulier » (2021 CF 187 au para 46). Ce libellé envisage la production conformément aux assignations.

[20] De plus, le juge de la requête a expressément déclaré que la « requête de [Viterra] en vue de faire annuler la production de documents par les employés est rejetée au motif qu’il est préférable que le juge présidant l’audience pour outrage examine la question de savoir si l’un quelconque des documents produits est admissible » (2021 CF 187 au para 51). Encore une fois, ce libellé envisage la production conformément aux assignations.

[21] Je reconnais qu’il est mentionné, au dernier paragraphe des motifs du juge de la requête, que « la question de la production des documents [a] été déférée » (2021 CF 187 au para 53). Cela est incompatible avec les passages des motifs qui examinent la question de la production, reproduits dans les deux paragraphes précédents. Cela va également à l’encontre de la réparation demandée dans le cadre de la requête et du résultat de la requête. Le juge de la requête conclut que le syndicat a eu gain de cause, et la requête est rejetée. Par conséquent, les assignations ordonnant la production n’ont été ni annulées ni modifiées. En examinant les motifs dans l’ensemble de leur contexte, je ne suis pas en mesure de conclure que l’ordonnance du juge de la requête n’a pas tranché la question de la production du dossier, comme l’exigeaient les assignations.

[22] La requête visait à interdire la production de documents, et le juge de la requête a examiné et tranché cette question. À mon avis, cette décision clôt la question de la production, à moins qu’elle ne soit infirmée en appel (Danyluk au para 19).

[23] Je suis de plus d’avis, dans le contexte de la présente instance d’outrage au tribunal, que la communication des documents en cause n’est pas contraire aux valeurs énoncées aux articles 7, 8 et 11 de la Charte, et j’aborderai brièvement cette question.

IV. La production des dossiers visés par les assignations n’est pas contraire aux valeurs de la Charte.

[24] L’argument de Viterra relatif aux valeurs de la Charte repose principalement sur l’article 8. L’article 8 prévoit que « [c]hacun a droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives. » L’article 8 ne protège pas contre toutes les fouilles, perquisitions et saisies; il protège plutôt contre les fouilles, les perquisitions et les saisies abusives.

[25] En général, une fouille ou une perquisition raisonnable conforme à l’article 8 de la Charte est une fouille ou une perquisition qui a fait l’objet d’un processus d’autorisation au préalable. Le processus d’autorisation préalable doit faire appel à un arbitre neutre et impartial capable d’agir de façon judiciaire et, ayant une preuve sous serment, de concilier des intérêts divergents. L’arbitre doit également être en mesure d’examiner toutes les circonstances pertinentes et d’imposer toutes les conditions nécessaires (Hunter c Southam Inc, [1984] 2 RCS 145 aux p 160 à 168 [Southam]).

[26] Une instance d’outrage au tribunal au titre des Règles, y compris la délivrance d’une assignation exigeant la production de documents, n’est pas incompatible avec le processus exigé par l’article 8 de la Charte. Le processus pour outrage en l’espèce a été enclenché par une requête ex parte (article 467 des Règles). Un officier de justice a ordonné la tenue d’une audience de justification après avoir été convaincu, au moyen d’une preuve donnée sous serment, que l’outrage au tribunal avait été démontré à première vue (paragraphe 467(2) des Règles). Les assignations ont été délivrées de nouveau avec l’autorisation de la Cour au moment du dépôt de la requête ex parte par écrit, appuyée par une preuve sous serment, conformément au paragraphe 41(4) des Règles.

[27] En supposant, sans toutefois rendre de décision en ce sens, que les valeurs consacrées par la Charte doivent être examinées au regard de l’opposition à la production, je suis convaincu que la production ordonnée en l’espèce n’est pas contraire aux valeurs énoncées à l’article 8 de la Charte. Le processus d’assignation engagé au titre du paragraphe 41(4) est analogue au processus d’autorisation au préalable envisagé dans l’arrêt Southam et permet l’examen judiciaire de la requête d’une partie en vue de la délivrance d’assignations. Au‑delà de ce processus, Viterra avait accès à un examen judiciaire plus approfondi des assignations, ce qu’elle a demandé en présentant une requête en annulation.

[28] Ayant conclu que la production de documents conformément aux assignations n’est pas incompatible avec les valeurs consacrées par l’article 8 de la Charte, je conclus de la même façon que la production de ces documents et, s’ils sont admissibles, le fait de s’appuyer sur ces derniers dans une instance, ne serait pas incompatible avec les valeurs consacrées par les alinéas 11c), 11d) et l’article 7 de la Charte. Plus précisément, je tire cette conclusion en présumant, sans toutefois rendre de décision en ce sens, que les valeurs consacrées par la Charte sont en cause.

V. Qui commence?

[29] Dans le contexte de son opposition à l’admissibilité, l’avocat de Viterra a soutenu que le syndicat devait d’abord présenter des arguments sur l’admissibilité, parce que c’est lui qui a le fardeau de preuve en ce qui concerne l’admissibilité. Le syndicat a soutenu qu’il n’était pas en mesure de présenter des observations en l’absence d’arguments énonçant l’opposition de Viterra.

[30] J’ai demandé à Viterra de présenter ses arguments en premier. Elle l’a fait, mais elle a expressément demandé que cette question soit abordée.

[31] Dans le contexte de son argument portant que c’est le syndicat qui a le fardeau de preuve et que celui‑ci aurait dû présenter ses arguments en premier, Viterra cite une série de décisions à titre instructif (White Burgess Langille Inman c Abbott and Haliburton Co, 2015 CSC 23 au para 48 [White Burgess]; R v Morin, [1991] OJ No 2528 (Div Gén Ont) au para 123 [Morin] et R v Kutynec, [1992] OJ No 347 (CA Ont) au para 17). Viterra soutient que lui demander de présenter ses arguments en premier présuppose l’admissibilité et revient qu’à mettre la charrue devant les bœufs.

[32] La règle générale selon laquelle le fardeau d’établir l’admissibilité de la preuve incombe à la partie qui en demande l’admission n’est pas contestée. Toutefois, la jurisprudence n’exige pas qu’une partie qui cherche à faire admettre des éléments de preuve devine la nature et la portée d’une opposition à l’admissibilité.

[33] Dans l’arrêt R v Yacoob (1981), 72 Cr App R 313 (CA Angl), cité dans la décision Morin, il est souligné que le fardeau de prouver l’admissibilité ou, dans ce cas, la compétence, se pose [traduction] « une fois que la question de la compétence est soulevée ».

[34] Dans l’arrêt White Burgess, le juge Binnie traite de l’admissibilité de la preuve d’expert et déclare qu’un expert doit être juste, objectif et impartial et que le critère d’admissibilité découle de cette obligation. Bien que les circonstances diffèrent considérablement, dans l’arrêt White Burgess, le juge Binnie a conclu qu’une partie s’opposant à l’admission en preuve du témoignage d’un expert au motif que l’expert n’était pas juste et objectif devait démontrer l’existence d’un motif réaliste de le juger inadmissible. Si elle y parvenait, le fardeau de la preuve incombait alors à la partie qui cherchait à faire admettre le témoignage. Ce processus n’a pas eu pour effet de déplacer ou de remplacer des fardeaux, mais plutôt de faciliter le déroulement efficace de l’instance.

[35] Une opposition poursuit un objectif. La partie qui s’oppose est tenue de formuler une opposition qui soulève une préoccupation en ce qui a trait à l’admissibilité. Ce faisant, la partie qui demande l’admission en preuve conserve le fardeau d’établir l’admissibilité dans le contexte de la préoccupation relevée. Il ne s’agit pas d’un transfert du fardeau de la preuve, et cela n’équivaut pas à mettre la charrue devant les bœufs, comme l’a fait valoir l’avocat de Viterra.

[36] La question de l’ordre des observations n’a pas été soulevée en raison du défaut de reconnaître qu’il incombait au syndicat de démontrer que la preuve était admissible. Elle a été soulevée en raison du fait que l’opposition à l’admissibilité a été avancée de façon prématurée, en l’absence d’un contexte factuel et probatoire, et qu’elle est étroitement liée à la question distincte de la production.

VI. Conclusion

[37] L’admissibilité des dossiers faisant l’objet des assignations sera examinée au cours de l’audience. L’opposition de Viterra à la production des dossiers avant l’audience au motif que la production avant l’audience serait contraire aux valeurs de la Charte est rejetée.

[38] Au cours de l’audience relative à l’opposition, l’avocat de Viterra a informé la Cour que Viterra avait relevé et colligé les dossiers faisant l’objet des assignations. Viterra doit fournir les dossiers visés par les assignations à la demanderesse avant l’audience.

[39] Les dépens suivront l’issue de l’instance.

 


ORDONNANCE DANS LE DOSSIER T‑1938‑19

LA COUR ORDONNE ce qui suit :

  1. Toute opposition à l’admissibilité sera examinée au cours de l’audience relative à la preuve;

  2. Les parties se transmettront, au plus tard le vendredi 9 avril 2021, tous les dossiers et documents sur lesquels elles prévoient se fonder au cours de l’audience de justification, y compris tous les dossiers et documents correspondant aux descriptions des dossiers à produire dans les assignations à produire délivrées conformément aux ordonnances de la Cour datées du 13 octobre 2020 et du 11 mars 2021;

  3. Les dépens suivront l’issue de l’instance.

« Patrick Gleeson »

Juge

Traduction certifiée conforme

M. Deslippes


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T‑1938‑19

 

INTITULÉ :

GRAIN WORKERS’ UNION LOCAL 333 ILWU c VITERRA INC.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

VIDÉOCONFÉRENCE PAR ZOOM DEPUIS VANCOUVER, COLOMBIE‑BRITANNIQUE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 24 mars 2021

 

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LE JUGE GLEESON

 

DATE DES MOTIFS :

Le 1er avril 2021

 

COMPARUTIONS :

William Clements

Lily Hassall

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Donald J. Jordan, c.r.

Natalie Tzemis

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Koskie Glavin Gordon

Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Harris and Co. LLP

Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.