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Date : 20210401


Dossier : T-2008-19

Référence : 2021 CF 291

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 1er avril 2021

En présence de monsieur le juge Ahmed

ENTRE :

NINTENDO OF AMERICA INC.

demanderesse

et

KING OF WINDOWS HOME IMPROVEMENTS INC. ET

WAYNE MACKENNEY

défendeurs

ORDONNANCE ET MOTIFS

VU la requête ex parte présentée par la demanderesse en vertu de l’article 210 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 (les Règles), en vue d’obtenir un jugement par défaut contre les défendeurs;

VU que la Cour est convaincue que les défendeurs n’ont ni signifié ni déposé101 leur défense dans le délai prévu à l’article 204 des Règles;

ET VU la preuve et les observations orales de la demanderesse;

LA COUR ORDONNE que la requête en jugement par défaut de la demanderesse soit accueillie.

[1] La demanderesse, Nintendo of America Inc., est propriétaire des enregistrements canadiens des marques de commerce énumérées à la pièce A (les marques de commerce NINTENDO et POKEMON).

[2] Je conclus que les défendeurs ont violé les droits de la demanderesse sur les marques de commerce NINTENDO et POKEMON, au sens des articles 19 et 20 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13. Plus précisément, les défendeurs ont importé au Canada des consoles de jeux vidéo dont les emballages arboraient un dessin qui ressemble aux marques de commerce déposées NES Design (Color) (LMC964700) et NES Controller Design (LMC1016852) de la demanderesse au point de créer de la confusion. La liste de jeux imprimée à l’intérieur des emballages de consoles de jeux vidéo arborait également des marques qui ressemblent aux marques de commerce déposées PIKACHU (LMC565112) et PIKACHU (LMC565335) de la demanderesse au point de créer de la confusion. Compte tenu des facteurs énumérés au paragraphe 6(5) de la Loi sur les marques de commerce, je conclus qu’un consommateur ordinaire plutôt pressé confondrait probablement les marques figurant sur les produits en cause avec les marques de commerce NINTENDO et POKEMON (Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23 au para 20).

[3] La demanderesse est propriétaire des œuvres protégées par le droit d’auteur énumérées à la pièce B (les œuvres NINTENDO).

[4] Je conclus que les défendeurs ont violé les droits de la demanderesse sur les œuvres NINTENDO, au sens du paragraphe 27(2) de la Loi sur le droit d’auteur, LRC 1985, c C-42. Plus précisément, les défendeurs ont importé au Canada des consoles de jeux vidéo qui contenaient des exemplaires non autorisés d’au moins trois œuvres protégées par les droits d’auteur enregistrés de la demanderesse, soit TETRIS 2 (450098), TETRIS 2 (450099) et MARIO (1052603). Étant donné que les défendeurs ont importé 120 consoles de jeux vidéo contrefaites, je conclus qu’ils ont probablement importé les produits en vue de la vente ou de la mise en circulation, en violation de l’alinéa 27(2)e) de la Loi sur le droit d’auteur.

[5] Compte tenu des conclusions tirées ci-dessus, j’ordonne qu’il soit interdit de façon permanente aux défendeurs, à leurs dirigeants, administrateurs, préposés, employés, mandataires, successeurs et ayants droit, ainsi qu’à toute autre personne sous leur autorité ou leur contrôle :

  1. de violer les droits exclusifs de la demanderesse sur les marques de commerce NINTENDO et POKEMON;

  2. d’annoncer, de mettre en circulation, d’offrir en vente ou de vendre leurs produits en liaison avec les marques de commerce NINTENDO et POKEMON ou toute autre marque de commerce similaire au point de créer de la confusion;

  3. de violer les droits de la demanderesse sur les œuvres NINTENDO.

[6] Les défendeurs remettront ou détruiront sous serment, à leurs frais, l’ensemble des produits, étiquettes, emballages, matériels publicitaires, affiches, imprimés, y compris l’ensemble des planches, moules, matrices et autres matériaux utilisés pour les fabriquer ou les imprimer, ainsi que tout autre objet ou matériel en leur possession ou contrôle collectif ou individuel qui enfreindrait l’injonction accordée.

[7] Les défendeurs doivent divulguer les noms officiels complets et les coordonnées complètes de toute source connue des produits contrefaits, tels qu’ils sont définis dans la déclaration de la demanderesse.

[8] Les défendeurs doivent remettre à la demanderesse 32 000 $ en dommages-intérêts pour leurs activités illégales liées aux marques de commerce NINTENDO et POKEMON. Plus précisément, j’adjuge 8 000 $ en dommages-intérêts symboliques à la demanderesse pour chacune des quatre marques de commerce qui, d’après mes conclusions, ont été usurpées (Popsockets LLC c Case World Enterprises Ltd, 2019 CF 1154 au para 42, citant Kwan Lam c Chanel S. de R.L., 2016 CAF 11 aux para 17-18).

[9] De plus, les défendeurs doivent verser à la demanderesse 60 000 $ en dommages-intérêts pour la violation des œuvres NINTENDO. Plus précisément, j’adjuge à la demanderesse 20 000 $ en dommages-intérêts préétablis, conformément à l’alinéa 38.1(1)a) de la Loi sur le droit d’auteur, pour chacune des trois œuvres protégées qui, d’après mes conclusions, ont été contrefaites. La présente ordonnance est rendue en tenant compte des facteurs énumérés au paragraphe 38.1(5) de la Loi sur le droit d’auteur, y compris l’absence de négociations de bonne foi au nom des défendeurs avant le début de la présente instance, et vise à dissuader les défendeurs et d’autres personnes de se livrer à des activités illicites similaires (Nintendo of America Inc c King, 2017 CF 246 aux para 162-166).

[10] Enfin, j’adjuge 10 000 $ au titre des dépens, payables immédiatement par les défendeurs. La demanderesse a donné aux défendeurs plusieurs occasions de régler la présente action sans dépens. Après avoir accepté de le faire, les défendeurs ont refusé de signer l’entente contenant les conditions dont ils avaient convenu en principe. Plus précisément, les avocats de la demanderesse ont envoyé aux défendeurs une entente de règlement le 18 juin 2020, puis de nouveau le 22 juin 2020 à la demande des défendeurs. Dans le message ultérieur, les avocats de la demanderesse ont déclaré que, si les défendeurs ne signaient pas l’entente au plus tard le 24 juin 2020, la demanderesse présenterait une requête en jugement par défaut. Le 26 juin 2020, les avocats de la demanderesse ont informé les défendeurs que l’entente de règlement signée n’avait pas été reçue et que, par conséquent, la demanderesse demanderait un jugement par défaut. Compte tenu des facteurs prévus au paragraphe 400(3) des Règles, je conclus donc que la demande de la demanderesse visant à obtenir 10 000 $ au titre des dépens est appropriée.

[11] J’accueille la demande de la demanderesse visant à obtenir une ordonnance de confidentialité en vertu de l’article 151 des Règles, en ce qui a trait aux pièces HH, II et JJ de l’affidavit de Jacinta De Abreu. Je conclus que la demanderesse a un intérêt légitime à préserver la confidentialité de ses négociations en vue d’un règlement avec les défendeurs et que les effets bénéfiques de la restriction demandée par la demanderesse sont plus importants que ses effets préjudiciables sur le principe de la publicité des débats judiciaires (Adeleye c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 681 au para 9, citant R c Mentuck, 2001 CSC 76 au para 32; Dagenais c Société Radio-Canada, [1994] 3 RCS 835; Sierra Club du Canada c Canada (Ministre des Finances), 2002 CSC 41).


ORDONNANCE DANS LE DOSSIER T-2008-19

LA COUR ORDONNE :

  1. La requête en jugement par défaut de la demanderesse est accueillie.

  2. Il est interdit aux défendeurs de continuer de violer les droits de la demanderesse sur les marques de commerce NINTENDO et POKEMON et sur les œuvres NINTENDO. Les défendeurs remettront ou détruiront tout produit qui contreviendrait à la présente injonction.

  3. Les défendeurs divulgueront les noms officiels complets et les coordonnées complètes de toute source des produits contrefaits.

  4. La demanderesse a droit à des dommages-intérêts de 92 000 $, plus les intérêts avant et après jugement.

  5. La demanderesse a droit à des dépens de 10 000 $, incluant les débours.

  6. Les pièces HH, II et JJ de l’affidavit de Jacinta De Abreu, tel qu’il figure dans le dossier de requête de la demanderesse, sont traitées comme confidentielles.

« Shirzad A. »

Juge

Traduction certifiée conforme

Julie Blain McIntosh


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-2008-19

 

INTITULÉ :

NINTENDO OF AMERICA INC. c KING OF WINDOWS HOME IMPROVEMENTS INC. ET WAYNE MACKENNEY

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE ENTRE TORONTO (ONTARIO) ET OTTAWA (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 23 février 2021

 

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LE JUGE AHMED

 

DATE DES MOTIFS :

Le 1er avril 2021

 

COMPARUTIONS :

Mark G. Biernacki

Graham A. Hood

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Aucune comparution

POUR LES DÉFENDEURS

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Smart & Biggar S.E.N.C.R.L., srl

Avocats

Toronto (Ontario)

POUR LA DEMANDERESSE

 


Pièce A

 

Marque de commerce

Numéro de l’enregistrement

LMC300921

NINTENDO ENTERTAINMENT SYSTEM

LMC337914

SUPER MARIO BROS. 2

LMC394062

BALLOON FIGHT

LMC409150

SUPER MARIO BROS.

LMC428733

SUPER MARIO BROS 3

LMC439665

NINTENDO ENTERTAINMENT SYSTEM

LMC445890

SUPER MARIO

LMC544526

PIKACHU

LMC565112

PIKACHU

LMC565335

LMC964700

LMC1008069

LMC1016852

 


 

Pièce B

 

Titre de l’œuvre

Catégorie de l’œuvre

Numéro de l’enregistrement

NES SUPER MARIO BROS. 3

Appareil mécanique

409676

NES SUPER MARIO BROS. 2

Appareil mécanique

409678

TETRIS

Appareil mécanique

410511

TETRIS 2

Littéraire/Musicale/Artistique/Dramatique

450098

TETRIS 2

Littéraire/Musicale/Artistique/Dramatique

450099

MARIO

Artistique

1052603

YOSHI (a.k.a. YOSSHI)

Artistique

1052603

LUIGI (a.k.a. RUIGI)

Artistique

1052604

PRINCESS PEACH (a.k.a. PEACH)

Artistique

1052605

DONKEY KONG (a.k.a. DK)

Artistique

1052607

BOWSER (a.k.a. KING BOWSER)

Artistique

1052608

TOAD (a.k.a. KINOPIO)

Artistique

1106199

 

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