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Date : 20210325


Dossier : IMM‑3268‑20

Référence : 2021 CF 264

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 25 mars 2021

En présence de madame la juge Simpson

ENTRE :

SURINDER SINGH KHABRA,

RINKY KHABRA, REET KHABRA,

SACH KHABRA

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

(Prononcés à l’audience par vidéoconférence

à Vancouver (Colombie‑Britannique), le 8 février 2021)

I. L’instance

[1] La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire de la décision rendue le 6 mars 2020, par laquelle la Section d’appel des réfugiés [la SAR] de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié [la Commission] a rejeté l’appel interjeté par les demandeurs à l’encontre de la décision de la Section de la protection des réfugiés [la SPR] de rejeter leur demande d’asile. La commissaire de la SAR a rejeté l’appel au motif que les demandeurs disposent d’une possibilité de refuge intérieur [PRI] à Delhi ou à Mumbai, en Inde.

[2] Les demandeurs sont un homme, son épouse et leurs deux enfants mineurs. Ils sont des citoyens de l’Inde de religion sikhe. Avant de quitter l’Inde, ils habitaient au Pendjab.

[3] Les demandeurs ont présenté une demande d’asile à la suite du vol des terres ancestrales de la famille du demandeur principal par un homme fortuné, un dénommé M. Singh, et des efforts faits par le demandeur principal et les membres de sa famille pour tenter de reprendre la propriété de leurs terres.

[4] Le père du demandeur principal a d’abord tenté de récupérer les terres. Il a par la suite été empoisonné sur l’ordre de M. Singh et est décédé en 1999. Onze ans plus tard, le frère du demandeur principal a été assassiné, également sur l’ordre de M. Singh, parce qu’il a lui aussi tenté de récupérer les terres.

[5] En 2010, après le décès de son frère, le demandeur principal a tenté de dénoncer M. Singh à la police, qui a refusé de l’aider, pour le meurtre de son frère. Le demandeur principal a commencé à recevoir des menaces par téléphone de la part de personnes non identifiées qui lui disaient qu’il avait fait une erreur en s’adressant à la police et qu’il paierait pour avoir agi ainsi.

[6] Sept ans plus tard, le demandeur principal a été agressé par plusieurs inconnus. La famille s’est donc enfuie et est arrivée au Canada en octobre 2017.

II. La décision de la SAR

[7] La commissaire de la SAR a conclu que la SPR n’a pas commis d’erreur en concluant que les demandeurs n’avaient pas démontré que M. Singh avait la motivation de les rechercher dans les PRI proposées. La commissaire de la SAR a reconnu que M. Singh a les moyens et les relations nécessaires pour retrouver les demandeurs, mais a conclu qu’il n’avait aucune raison de le faire. Elle a également a conclu que, si les demandeurs n’essayaient pas de récupérer leurs terres familiales, M. Singh ne constituerait pas une menace pour eux.

III. Les questions en litige

[8] Il y a deux questions en litige :

  1. La commissaire de la SAR a‑t‑elle omis de tenir compte de directives du président?

  2. La commissaire de la SAR a‑t‑elle omis de tenir compte de documents pertinents concernant le programme d’enregistrement des locataires?

IV. Analyse et conclusions

A. Première question en litige

[9] Les demandeurs soutiennent que la commissaire de la SAR aurait dû annuler la décision de la SPR parce que le demandeur principal a affirmé qu’il craignait pour la [traduction] « vie et l’honneur » de son épouse si la famille devait retourner en Inde. Les demandeurs font valoir que la commissaire de la SAR n’a pas fait référence aux Directives concernant la persécution fondée sur le sexe [les Directives] et n’a donc pas tenu compte d’un lien avec l’un des motifs prévus par la Convention.

[10] Cet argument ne me convainc pas. La SPR a mentionné les Directives, mais a conclu que les éléments de preuve n’étaient pas suffisants pour démontrer l’existence de menaces fondées sur le sexe à l’encontre de l’épouse. Par conséquent, la SPR a conclu à l’absence de lien avec un motif prévu par la Convention. De plus, les demandeurs n’ont pas contesté cette conclusion en appel. Dans ces circonstances, je suis d’avis qu’il était raisonnable que la commissaire de la SAR n’ait pas mentionné les Directives.

B. Deuxième question en litige

[11] Les demandeurs font également valoir que la commissaire de la SAR n’a pas tenu compte du document 14.8 du cartable national de documentation. Ce document décrit le processus par lequel la police transmet des demandes d’identification des locataires aux services de police du village natal des locataires éventuels. Les demandeurs soutiennent que c’est dans le cadre de ce processus que des policiers corrompus pourraient informer M. Singh de l’endroit où ils ont déménagé.

[12] Cet argument n’est pas convaincant pour plusieurs raisons.

[13] En premier lieu, la commissaire de la SAR a bel et bien fait référence au document 14.8. En effet, il en est question à la note 8 en bas de page au paragraphe 15 de la décision de la SAR.

[14] En deuxième lieu, il appert clairement de la décision de la SAR que, même si M. Singh pouvait retrouver les demandeurs, il n’avait aucune raison d’essayer de le faire après que les demandeurs eurent cessé de se montrer intéressés à récupérer leurs terres. Cette conclusion concernant l’absence de motivation de M. Singh était raisonnable, car les seuls moments où il a été l’instigateur d’actes de violence étaient en 1999 et en 2010, lorsque le père et le frère du demandeur principal ont essayé de récupérer leurs terres.

[15] Enfin, les demandeurs n’ont été victimes d’aucun acte de violence au cours des sept années qui ont précédé leur départ de l’Inde, période pendant laquelle ils n’ont pas fait valoir leurs droits relativement aux terres qui leur avaient été volées. Dans ces circonstances, il était raisonnable que la commissaire de la SAR conclue que les demandeurs n’ont pas démontré qu’ils risquaient d’être persécutés par M. Singh dans les villes proposées comme PRI.

[16] Pour tous ces motifs, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

[17] Aucune question n’a été proposée aux fins de certification en vue d’un appel.

 


JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM‑3268‑20

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est par les présentes rejetée.

« Sandra J. Simpson »

Juge

Traduction certifiée conforme

Caroline Tardif, traductrice


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑3268‑20

INTITULÉ :

SURINDER SINGH KHABRA, RINKY KHABRA, REET KHABRA, SACH KHABRA c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE À VANCOUVER (COLOMBIE‑BRITANNIQUE)

DATE DE L’AUDIENCE :

le 8 février 2021

jugement et motifs :

la juge SIMPSON

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

le 25 mars 2021

COMPARUTIONS :

Aman Sandhu

pour les demandeurs

Hilla Aharon

pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Sandhu Law Office

Avocats

Vancouver (Colombie‑Britannique)

pour les demandeurs

Procureur général du Canada

Vancouver (Colombie‑Britannique)

pour le défendEUR

 

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