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     Date : 19980302

     Dossier : IMM-793-97


OTTAWA (ONTARIO), LE 2 MARS 1998


EN PRÉSENCE DE : MONSIEUR LE JUGE JOYAL


ENTRE

                     WEN HUA ZHOU,

     requérante,


     et


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,


         intimé.


     ORDONNANCE



         La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.



                             L. Marcel Joyal

                                     JUGE




Traduction certifiée conforme



Tan, Trinh-viet





     Date : 19980302

     Dossier : IMM-793-97


ENTRE


                     WEN HUA ZHOU,

     requérante,


     et


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,


         intimé.



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE



LE JUGE JOYAL



[1] Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire de la décision en date du 11 janvier 1997 dans laquelle l'agent des visas a (l'agent) a conclu que la requérante ne remplissait pas les conditions d'immigration au Canada dans la catégorie des requérants indépendants.


Les faits

[2] En avril 1995, la requérante, citoyenne chinoise, a présenté une demande de résidence permanente au Canada dans la catégorie des requérants indépendants. Elle est mariée et a un fils âgé de quinze ans. Elle a indiqué dans sa demande qu'elle était une travailleuse sociale en hygiène mentale, se spécialisant dans la thérapie des abus d'intoxicants. Elle travaille actuellement au Changsha Therapeutic Centre for Drug Addiction (centre thérapeutique pour toxicomanie) en tant que médecin chef adjointe et directeur de pavillon.

[3] La requérante a été interrogée par l'agente le 12 décembre 1996. Plus tard, le 11 janvier 1997, elle a été informée qu'elle ne remplissait pas les conditions d'immigration au Canada.

La décision de l'agente

[4] L'agente a noté que la requérante, contrairement à ce qu'elle avait prétendu dans sa demande, n'avait pas une connaissance linguistique suffisante. Au cours de l'entrevue, l'agente avait l'impression que la requérante revenait à des propos mémorisés lorsqu'on lui posait des questions en anglais. Toutefois, l'agente se préoccupait principalement de ce que la requérante n'avait pas une formation de travailleur social. Après l'entrevue, l'agente était convaincue que la requérante n'était pas une travailleuse sociale, mais un médecin chinois reconnu.

Position des parties :

     L'affidavit de l'agente

[5] La requérante soutient que l'affidavit de l'agente était essentiellement du ouï-dire. Tout d'abord, elle doute que l'agente ait la compétence nécessaire pour déterminer quelles pourraient être les conditions d'un travailleur social. En second lieu, elle prétend que la capacité de l'interprète de l'Ambassade, en ce qui concerne la terminologie technique, est discutable. Et, en dernier lieu, elle soutient que les conclusions de l'agente sur sa capacité linguistique sont purement spéculatives.

[6] L'intimé fait valoir que la requérante n'a pas contre-interrogé l'agente et ne peut contester la véracité des déclarations sous serment de celle-ci. De même, l'agente connaissait personnellement la compétence de l'interprète et, en conséquence, son affidavit ne constitue pas du ouï-dire .

     L'expérience de la requérante     

[7] Selon la requérante, l'agente a commis une erreur de droit et une conclusion de fait déraisonnable en concluant qu'elle n'avait aucune expérience de travailleur social. La requérante compare la définition des fonctions d'un travailleur social donnée dans la Classification canadienne descriptive des professions avec ses fonctions pendant ses 14 années d'expérience décrites dans l'affidavit. La requérante note que l'agente avait effectivement reconnu qu'elle avait la formation nécessaire pour la profession envisagée de travailleuse sociale en lui attribuant 15 points pour la préparation professionnelle spécifique, mais elle prétend que des points auraient dû être attribués pour son autre expérience.

[8] D'après l'intimé, la raison pour laquelle on n'a attribué aucun point pour l'expérience est que la requérante n'avait aucune formation formelle de travailleur social et, par conséquence, aucune partie du travail qu'elle a faite ne vaut expérience dans ce domaine particulier. Quant aux 15 points pour la préparation professionnelle spécifique, l'intimé soutient que le règlement prévoit que ces points sont liés à la profession envisagée et non à la formation réelle de la requérante.

     Entorse à l'équité     

[9] La requérante soutient n'avoir pas eu la possibilité de répondre aux questions du fait de l'attitude de l'agente à l'égard de son anglais. Elle prétend également que l'interprète n'a pu traduire des termes techniques cruciaux.

[10] L'intimé nie que la requérante n'ait pu présenter pleinement ses observations à l'entrevue. Il est particulièrement noté que la requérante a écrit une longue lettre pour son propre compte, qui a été reçue et complètement examinée par l'agent.

     Personnalité     

[11] La requérante soutient que l'agente a commis une erreur de droit en n'appréciant pas la personnalité. Il n'y a pas de preuve qu'une appréciation de la personnalité a été faite par l'agente. Même son affidavit est muet quant à la personnalité de la requérante ou au sujet de l'un quelconque des critères selon lesquels une telle appréciation pourrait être faite. La requérante prétend que l'agente n'a pas tenu compte des lettres de référence parce qu'elle croyait que celles-ci provenaient d'amis.

[12] L'intimé fait valoir que la requérante n'a pas démontré que l'agente avait eu tort de parvenir à sa décision. L'appréciation repose sur la faculté d'adaptation de la requérante, sa motivation, son esprit d'initiative et son ingéniosité, ainsi qu'il est démontré dans l'entrevue. De plus, le fait que les lettres de référence puissent avoir été méconnues n'équivaut pas à une méconnaissance des éléments de preuve.


         But de l'entrevue

[13] La requérante prétend que l'agente a violé son obligation d'équité lorsqu'elle a déformé le but de l'entrevue. Selon la requérante, l'entrevue aurait dû porter uniquement sur sa compétence professionnelle et non sur sa connaissance linguistique. À cet égard, elle fait état de la décision Chen c. Canada (M.E.I.), 13 Imm.L.R. (2d) 172 (C.F.1re inst.), où la Cour a conclu qu'un agent avait manqué à son obligation d'équité en ne révélant pas le véritable but d'une entrevue.

[14] L'intimé soutient que l'allégation de la requérante n'est pas fondée. On a fait subir à la requérante des tests de compréhension de l'écrit et d'expression écrite, qui lui ont été expliqués de façon appropriée.

     Les qualités de psychologue de la requérante     

[15] La requérante prétend que l'agente a tiré une conclusion de fait erronée en concluant qu'elle n'était pas une psychologue compétente. Son expérience professionnelle montre qu'elle a exercé les fonctions d'un psychologue pendant quelque 14 ans. L'agente, d'après la requérante, aurait dû lui attribuer des points pour son expérience et ses responsabilités antérieures. L'omission de le faire constitue également un manquement à l'obligation d'équité.

[16] L'intimé répond que la requérante n'a pas demandé la résidence permanente en tant que psychologue, mais en tant que travailleuse sociale.

     Connaissance linguistique

[17] La requérante prétend que l'agente a commis une erreur de fait en concluant qu'elle ne pouvait parler l'anglais. Elle prétend ne pas avoir été autorisée à s'exprimer en anglais et avoir été forcée de recourir à un interprète au cours de l'entrevue.

[18] D'après l'intimé, il est vrai que la requérante lisait et écrivait bien l'anglais, mais elle le parlait avec difficulté. Les réponses qu'elle a données à l'agente démontraient un manque de compréhension de l'anglais.

Analyse

[19] J'ai examiné la totalité des nombreuses allégations faites par la requérante. J'ai relu l'exposé de celle-ci, qui contenait 95 paragraphes figurant dans 35 pages. De même, j'ai relu l'affidavit de l'agent des visas, ainsi que les lignes directrices applicables au processus d'évaluation.

[20] Il ne fait pas de doute qu'il existe des risques inhérents à ce système d'évaluation. Le processus est un processus discrétionnaire, mais s'il penche trop vers le propre pouvoir discrétionnaire d'un agent, il risque de devenir un processus reposant sur des choix personnels. D'une façon comme de l'autre, il suffit de dire qu'il ne reste guère de sujets qui ne soient l'objet d'allégations et de voies de recours.

[21] Dans l'affaire dont je suis saisi, certains des griefs soulevés par la requérante relativement à la décision sur sa demande sont appropriés et légitimes. D'autres, à mon avis, sont fallacieux et ne reposent pas sur des faits. En fait, certaines allégations sont complètement inopportunes.

[22] Pour ce qui est des griefs qui sont, en fait, quelque peu fondés, je dois décider si, individuellement ou collectivement, ils sont de nature à inviter l'intervention de la Cour par voie de contrôle judiciaire.

[23] À mon avis, les griefs en l'espèce ne sont pas suffisamment fondés pour que je touche à la décision. De l'aveu de tous, le processus de sélection peut être très difficile et décevant. Parfois un tribunal peut être tenté d'accorder réparation, mais il ne doit pas céder trop facilement à ce genre de tentation. Je me permets de dire que les arguments invoqués pour le compte de la requérante, bien qu'ils soient conçus en des termes particulièrement convaincants et détaillés, ne suffisent pas à faire pencher la balance en sa faveur. C'est pour dire que quelles que soient les erreurs qu'on peut attribuer à la décision de l'agente sur l'affaire, celles-ci ne suffisent pas à saper la validité essentielle de la décision.

Conclusion :

[24] La demande de contrôle judiciaire est en conséquence rejetée.

                             L. Marcel Joyal

                                     JUGE


OTTAWA (Ontario)

Le 2 mars 1998





Traduction certifiée conforme


Tan, Trinh-viet

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER




No DU GREFFE :                      IMM-793-97

INTITULÉ DE LA CAUSE :              Wen Hua Zhou c. Le ministre de
                             la Citoyenneté et de
                             l'Immigration

LIEU DE L'AUDIENCE :              Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :              Le 7 janvier 1998

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE MONSIEUR LE JUGE JOYAL


EN DATE DU                      2 mars 1998


ONT COMPARU :


M. Max Chaudhary                  pour la requérante

Lori Hendriks                      pour l'intimé


PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :


Chauhary Law Office                  pour la requérante
North York (Ontario)

George Thomson
Sous-procureur général
du Canada                      pour l'intimé
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