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Date : 20020604

Dossier : T-451-01

OTTAWA (ONTARIO), le 4 juin 2002

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE DOLORES M. HANSEN

ENTRE :

                                                              EIKE TEUBERT

                                                                                                                                        demandeur

                                                                            et

                                  LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA et

                              LE MINISTÈRE DES ANCIENS COMBATTANTS

                                                                                                                                        défendeurs

                                                              ORDONNANCE

Une demande de contrôle judiciaire de la décision rendue par le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) le 19 décembre 2000 ayant été présentée;

Les documents qui ont été déposés ayant été lus et les arguments des parties ayant été entendus;


Pour les motifs d'ordonnance prononcés en ce jour;

LA COUR ORDONNE PAR LES PRÉSENTES : la demande de contrôle judiciaire est accueillie et l'affaire est renvoyée pour qu'une formation différemment constituée réexamine l'affaire.

                                                                                                                     « Dolores M. Hansen »                  

                                                                                                                                                    Juge                                   

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


Date : 20020604

Dossier : T-451-01

Référence neutre : 2002 CFPI 634

ENTRE :

                                                              EIKE TEUBERT

                                                                                                                                        demandeur

                                                                            et

                                  LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA et

                              LE MINISTÈRE DES ANCIENS COMBATTANTS

                                                                                                                                        défendeurs

                                               MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE HANSEN


[1]         Le 18 septembre 2000, Monsieur le juge Teitelbaum a annulé la décision par laquelle le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) (le TACRA ou le Tribunal) avait conclu, le 16 juin 1999, que la [TRADUCTION] « sténose du canal rachidien opérée » du demandeur n'était pas consécutive ou rattachée directement au service dans la Gendarmerie royale du Canada (la GRC). Le 19 décembre 2000, une formation différemment constituée a réexaminé l'affaire et est arrivée à la même conclusion. Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire de cette décision.

Les faits

[2]         À l'audition de cette demande de contrôle judiciaire, le demandeur a déclaré qu'il se fondait sur l'exposé détaillé des faits figurant dans les motifs prononcés par le juge Teitelbaum dans le cadre du contrôle judiciaire antérieur. Voici un résumé de ces faits.

[3]         Le demandeur a servi dans la GRC du mois de décembre 1966 jusqu'à son renvoi pour raison médicale, le 16 juillet 1998.

[4]         Dans le cadre de sa formation en cours d'emploi, le demandeur a participé à un programme d'haltérophilie intense au cours duquel il devait lever des poids égaux à son propre poids pendant une heure. Le demandeur a subséquemment eu, au travail, deux accidents de voiture. Le premier accident a eu lieu en 1971 pendant que le demandeur était de service de surveillance par radar. Sa voiture a été heurtée par l'arrière par un véhicule roulant à environ 100 km/h. Une radiographie prise trois jours après n'a révélé aucune blessure visible. Le deuxième accident est survenu en 1972 lorsque la voiture de patrouille du demandeur a été heurtée par l'arrière par une camionnette d'une demi-tonne.


[5]         Au mois de décembre 1977, le demandeur s'est plaint à son médecin de famille, le docteur Boake, de raideurs et de douleurs dans le milieu du dos. Le docteur Boake a effectué un examen et a observé une limitation des mouvements et des spasmes musculaires modérés. Au cours des 25 années suivantes, le demandeur a eu des troubles dorsaux.

[6]         Le demandeur a subi une intervention au mois de mars 1995. Une laminectomie de décompression des L4 et L5 pour une sténose du canal rachidien dans la région lombaire a donné de bons résultats. Le demandeur a pu reprendre son service actif, mais il a néanmoins continué à éprouver des douleurs chroniques dans le milieu du dos. Selon le rapport du docteur Zwimper, neurochirurgien, en date du 15 mai 1996, une station debout prolongée et le port d'un baudrier pesant 20 livres peuvent avoir contribué à ces douleurs.

[7]         Au mois de décembre 1996, il a été observé que les troubles dorsaux du demandeur s'étaient fortement aggravés à la suite de sa participation au transfèrement forcé d'un prisonnier d'un bloc de cellules à un autre. Quelques jours plus tard, le demandeur a encore éprouvé des douleurs dorsales dans une empoignade avec un prisonnier. Une scanographie a subséquemment révélé [TRADUCTION] « une lésion d'une facette vertébrale et deux hernies discales » . Le demandeur s'est alors vu obligé de prendre régulièrement des analgésiques narcotiques pour soulager la douleur.

[8]         Le docteur Robson a procédé à une évaluation de l'aptitude au travail pour la GRC le 2 avril 1997. Le rapport indique que l'état du demandeur avait [TRADUCTION] « probablement été aggravé par de nombreuses activités professionnelles telles que la station assise, la poursuite et le saut » .


[9]         Le 13 novembre 1997, le demandeur a subi une fusion postérieure L3, L4 et L5 avec une laminectomie dépressive, insertion de tiges dans la colonne vertébrale et greffe osseuse.

[10]       Dans un rapport en date du 15 mai 1999, le docteur Robson déclare que le demandeur est atteint d'une dégénérescence des disques. Il note en particulier qu'en 1994, le demandeur [TRADUCTION] « a[vait] violemment heurté le sol du pied gauche pendant une empoignade avec un prisonnier, et [que] le choc transmis par sa jambe a[vait] dû être suffisant pour provoquer le glissement d'un disque ou pour aggraver l'état d'un disque qui ne lui avait pas donné de souci jusqu'alors » . Le docteur Robson a également noté que ce choc [TRADUCTION] « av[ait] également aggravé l'instabilité associée à son spondylolisthésis, provoquant une compression de la moelle épinière » .

[11]       Avant son renvoi, le demandeur a demandé une pension d'invalidité au ministère des Anciens combattants. Le demandeur a allégué que la sténose du canal rachidien était reliée au service. Il a été jugé que l'état du demandeur [TRADUCTION] « n'ouvrait pas droit à pension » en vertu du paragraphe 32(1) de la Loi sur la pension de retraite de la Gendarmerie royale du Canada, L.R.C. (1985), ch. R-11, art. 1, conformément à la Loi sur les pensions, L.R.C. (1985), ch. P-6.


Contexte législatif

[12]       Paragraphe 21(2) de la Loi sur les pensions :


21(2) En ce qui concerne le service militaire accompli dans la milice active non permanente ou dans l'armée de réserve pendant la Seconde Guerre mondiale ou le service militaire en temps de paix_:

a) des pensions sont, sur demande, accordées aux membres des forces ou à leur égard, conformément aux taux prévus à l'annexe I pour les pensions de base ou supplémentaires, en cas d'invalidité causée par une blessure ou maladie - ou son aggravation - consécutive ou rattachée directement au service militaire;

21(2) In respect of military service rendered in the non-permanent active militia or in the reserve army during World War II and in respect of military service in peace time,

(a) where a member of the forces suffers disability resulting from an injury or disease or an aggravation thereof that arose out of or was directly connected with such military service, a pension shall, on application, be awarded to or in respect of the member in accordance with the rates for basic and additional pension set out in Schedule I;


[13]       Article 32 de la Loi sur la pension de retraite de la Gendarmerie royale du Canada :


32. Sous réserve des autres dispositions de la présente partie, une compensation conforme à la Loi sur les pensions doit être accordée, chaque fois que la blessure ou la maladie - ou son aggravation - ayant causé l'invalidité ou le décès sur lequel porte la demande de compensation était consécutive ou se rattachait directement au service de l'intéressé dans la Gendarmerie, à toute personne, ou à l'égard de celle-ci_:

32. Subject to this Part, an award in accordance with the Pension Act shall be granted to or in respect of

a) visée à la partie VI de l'ancienne loi à tout moment avant le 1er avril 1960, qui, avant ou après cette date, a subi une invalidité ou est décédée;

(a) any person to whom Part VI of the former Act applied at any time before April 1, 1960 who, either before or after that time, has suffered a disability or has died, or


b) ayant servi dans la Gendarmerie à tout moment après le 31 mars 1960 comme contributeur selon la partie I de la présente loi, et qui a subi une invalidité avant ou après cette date, ou est décédée.

(b) any person who served in the Force at any time after March 31, 1960 as a contributor under Part I of this Act and who has suffered a disability, either before or after that time, or has died, in any case where the injury or disease or aggravation thereof resulting in the disability or death in respect of which the application for the award is made arose out of, or was directly connected with, the person's service in the Force.


[14]       Articles 3 et 39 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), L.C. 1995, ch. 18 :


3. Les dispositions de la présente loi et de toute autre loi fédérale, ainsi que de leurs règlements, qui établissent la compétence du Tribunal ou lui confèrent des pouvoirs et fonctions doivent s'interpréter de façon large, compte tenu des obligations que le peuple et le gouvernement du Canada reconnaissent avoir à l'égard de ceux qui ont si bien servi leur pays et des personnes à leur charge.

3. The provisions of this Act and of any other Act of Parliament or of any regulations made under this or any other Act of Parliament conferring or imposing jurisdiction, powers, duties or functions on the Board shall be liberally construed and interpreted to the end that the recognized obligation of the people and Government of Canada to those who have served their country so well and to their dependants may be fulfilled.

39. Le Tribunal applique, à l'égard du demandeur ou de l'appelant, les règles suivantes en matière de preuve_:

a) il tire des circonstances et des éléments de preuve qui lui sont présentés les conclusions les plus favorables possible à celui-ci;

b) il accepte tout élément de preuve non contredit que lui présente celui-ci et qui lui semble vraisemblable en l'occurrence;

c) il tranche en sa faveur toute incertitude quant au bien-fondé de la demande.

39. In all proceedings under this Act, the Board shall

a) draw from all the circumstances of the case and all the evidence presented to it every reasonable inference in favour of the applicant or appellant;    

(b) accept any uncontradicted evidence presented to it by the applicant or appellant that it considers to be credible in the circumstances; and

(c) resolve in favour of the applicant or appellant any doubt, in the weighing of evidence, as to whether the applicant or appellant has established a case.


Décision de la première formation


[15]       Le TACRA a conclu que le demandeur n'avait présenté aucune preuve établissant un lien entre son état et ses fonctions au sein de la GRC. Le Tribunal s'est fondé sur l'absence de documents pour la période allant de 1972 à 1987, permettant de conclure que la sténose du canal rachidien résultait d'une blessure reliée au service. De plus, le Tribunal a fait remarquer qu'il n'avait été saisi d'aucun rapport sur les blessures établissant d'une façon concluante un lien entre l'état du demandeur et l'exercice de ses fonctions. Le Tribunal a dit que, malgré la [TRADUCTION] « conclusion » du docteur Robson, à savoir que l'état du demandeur était relié à l'exécution de ses tâches, le Tribunal n'avait [TRADUCTION] « été saisi d'aucune preuve du lien entre les fonctions de l'appelant et son état » .

Décision du juge Teitelbaum

[16]       Le juge Teitelbaum a noté que le Tribunal avait pris acte des traumatismes subis lors des deux accidents de la circulation, mais qu'il avait conclu qu'il n'y avait aucun document pour la période allant de 1972 à 1987 qui eût permis au Tribunal de conclure que les traumatismes subis au travail étaient la cause ou le facteur aggravant de la sténose du canal rachidien. Le juge se demandait « si le Tribunal a[vait] apprécié les éléments de preuve conformément à l'esprit de l'article 39 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) » .

[17]       Dans un examen détaillé de la preuve, le juge Teitelbaum a déduit de la lettre en date du 15 mai 1999 du docteur Robson que le demandeur avait été blessé dans l'exercice de ses fonctions d'agent de la GRC et que l'état de son dos avait pu s'aggraver de temps à autre en dehors du travail, mais qu'en ces occasions, ce qu'il faisait n'était « pas suffisamment violent pour être la cause de ses problèmes » .


[18]       Le juge Teitelbaum a donc conclu que, dans ces conditions, il n'était pas loisible au Tribunal de rejeter l'avis médical exprimé par le docteur Robson. Le TACRA n'a pas dit que l'avis du docteur Robson n'était pas crédible. Par conséquent, compte tenu de l'évaluation de l'aptitude au travail de la GRC du 9 avril 1997 effectuée par le docteur Robson et des deux notes de service relatives au régime fiscal dans lesquelles la GRC reconnaît que l'invalidité du demandeur est reliée au service, le juge Teitelbaum a statué que le TACRA avait mal appliqué l'article 39 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel).

[19]       Le juge Teitelbaum a donc fait droit au recours en contrôle judiciaire et a « renvo[yé] l'affaire pour nouvelle instruction par un Tribunal de composition différente » .

Décision de la deuxième formation

[20]       Le demandeur a bénéficié d'une nouvelle audience devant le Tribunal le 19 décembre 2000. Le Tribunal a encore une fois conclu que l'état du demandeur n'était pas consécutif ou rattaché directement à son service au sein de la GRC. Le Tribunal a dit que [TRADUCTION] « l'avis médical exprimé par le médecin de famille, le docteur Robson, n'[était] pas suffisamment crédible pour justifier l'octroi d'une pension dans ce cas-ci » .

[21]       Le Tribunal a conclu que l'avis médical exprimé par le docteur Robson n'était pas [TRADUCTION] « suffisamment crédible » pour le motif que le rapport ne renfermait pas un historique et une analyse crédibles de la cause ou des causes de l'affection alléguée. Le Tribunal a dit qu'il n'est pas autorisé à faire tout simplement sienne la conclusion tirée par le médecin.


[22]       De plus, en ce qui concerne les notes de service relatives au Régime fiscal de la GRC, le Tribunal a dit que la GRC suivait une procédure d'évaluation inconnue et qu'il n'était pas autorisé à adopter tout simplement la position de la GRC.

Points litigieux

[23]       Le demandeur affirme qu'il était manifestement déraisonnable pour le Tribunal de rejeter la demande étant donné la décision rendue par le juge Teitelbaum et les articles 3 et 39 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel). Plus précisément, le demandeur soulève les deux questions ci-après énoncées :

1. Le Tribunal a-t-il commis une erreur en rejetant l'avis médical du docteur Robson?

2. Le Tribunal a-t-il commis une erreur en ne tenant pas compte des notes de service relatives au Régime fiscal?

Analyse

1. Le Tribunal a-t-il commis une erreur en rejetant l'avis médical du docteur Robson?

[24]       Le demandeur affirme que le Tribunal a commis une erreur en rejetant l'avis médical exprimé par le docteur Robson pour le motif qu'il n'était pas suffisamment crédible.


[25]       La position prise par le défendeur est que le Tribunal a clairement énoncé les motifs pour lesquels il rejetait l'avis du docteur Robson et qu'il peut à bon droit conclure qu'un avis médical n'est pas crédible s'il ne fait pas une analyse ou un historique exacts et complets de la cause ou des causes du trouble en question. Le défendeur affirme que la décision rendue par le Tribunal sur ce point est rationnelle.

[26]       En outre, le défendeur dit que le Tribunal avait à sa disposition des éléments de preuve faisant état de [TRADUCTION] « blessures contradictoires non reliées au travail » . Le Tribunal a noté que, dans le dossier, il était fait mention d'une entorse dorso-lombaire attribuable au fait de s'essuyer avec une serviette, de peindre ou de déplacer du bois.

[27]       La preuve d'événements [TRADUCTION] « contradictoires » non reliés au travail a été expressément examinée par le docteur Robson dans son rapport, dont le Tribunal n'a pas fait état. Le docteur Robson dit ce qui suit :[TRADUCTION] Il ne fait aucun doute que l'état de son dos a pu s'aggraver de temps à autre en dehors de son travail, mais je ne trouve nulle part dans mes notes mention d'un traumatisme suffisamment grave pour avoir provoqué les problèmes mentionnés ci-dessus.

[...]

En résumé, chaque individu souffre plus ou moins de douleurs dorsales, mais cet homme a subi des blessures invalidantes qui l'ont amené par deux fois en chirurgie pour un total de trois interventions, et les seuls traumatismes de ce niveau de gravité subis pendant cette période l'ont été pendant son travail [...].


[28]       À mon avis, le Tribunal ne disposait pas d'éléments de preuve contradictoires dans ce cas-ci. Le Tribunal n'avait devant lui aucune preuve médicale indiquant que l'invalidité du demandeur était de fait attribuable à une blessure que ce dernier aurait subie pendant qu'il n'était pas de service. Il n'y avait pas non plus de preuve médicale indiquant que l'invalidité n'était probablement pas reliée au service. Par conséquent, la seule question qui se pose en ce qui concerne l'avis médical exprimé par le docteur Robson est de savoir s'il était loisible au Tribunal de conclure que l'avis n'était pas crédible.

[29]       Le Tribunal a fait remarquer [TRADUCTION] qu' « un avis médical ne peut pas être jugé crédible s'il ne renferme pas un historique exact complet » et [TRADUCTION] qu' « [i]l doit également comprendre des explications au sujet des circonstances dans lesquelles le trouble en question s'est manifesté compte tenu de tous les facteurs étiologiques » . Le Tribunal a rejeté l'avis médical du docteur Robson parce qu'il ne satisfaisait pas à ces deux critères. Le Tribunal n'a pas donné de précisions au sujet des insuffisances constatées dans l'avis médical.

[30]       À mon avis, la critique que le Tribunal a faite au sujet du rapport du docteur Robson ne résiste pas à l'examen. En exprimant son avis, le docteur Robson a mentionné les nombreux rapports médicaux soumis au fil des ans en ce qui concerne les [TRADUCTION] « faits pertinents et la chronologie » . Je ne connais aucune décision faisant autorité étayant la thèse selon laquelle un avis médical ne peut pas être considéré comme crédible lorsqu'il y est dit qu'il est fondé sur les renseignements versés au dossier, mais que cet historique n'y figure pas. S'il est démontré que l'historique figurant dans le dossier est inexact et que l'avis est fondé sur les renseignements versés au dossier, le Tribunal pourrait à bon droit rejeter l'avis. Toutefois, le Tribunal n'a pas mentionné d'inexactitudes dans les renseignements versés au dossier.


[31]       En ce qui concerne le lien de causalité entre une blessure reliée au travail et l'état du demandeur, dans une évaluation de l'aptitude au travail en date du mois d'avril 1997, le docteur Robson déclare que l'état du demandeur avait [TRADUCTION] « probablement été aggravé par de nombreuses activités professionnelles telles que la station assise, la poursuite et le saut » . Au mois de mai 1998, le docteur Robson a signalé que le demandeur était atteint d'une [TRADUCTION] « sténose du canal rachidien par suite de traumatismes cumulatifs à la colonne vertébrale [...] [qui] remonte à 1971 quand sa voiture a été heurtée par l'arrière, [qu']il a eu un autre "coup de fouet cervical" en 1972 et [qu']il s'est blessé en soulevant les poids en 1975, etc. » . Enfin, dans le rapport du 15 mai 1999, le docteur Robson a déclaré que les seuls événements qui lui avaient été signalés et qui étaient suffisamment graves pour causer ou aggraver les troubles dorsaux étaient ceux qui s'étaient produits au travail.

[32]       Je conclus donc que l'avis du docteur Robson renfermait une analyse du lien de causalité entre le service accompli par le demandeur au sein de la GRC et les blessures que celui-ci avait subies. Cela étant, le Tribunal a commis une erreur en rejetant l'avis médical du docteur Robson.


2. Le Tribunal a-t-il commis une erreur en ne tenant pas compte des « notes de services relatives au Régime fiscal » ?

[33]       Le demandeur affirme que le juge Teitelbaum a reconnu l'importance des notes de service relatives au Régime fiscal, mais que le Tribunal n'a pas tenu compte de la valeur de ces documents sur le plan de la preuve.

[34]       Le défendeur affirme que la décision du Tribunal de rejeter les notes de service relatives au Régime fiscal de la GRC était raisonnable. Il affirme que le Tribunal a fourni un motif valable à l'appui du rejet. En effet, il ne connaissait pas la procédure d'évaluation par laquelle la GRC tirait ses conclusions et il ne pouvait donc pas faire tout simplement siennes ces conclusions.

[35]       À mon avis, la conclusion du Tribunal selon laquelle il renoncerait à son pouvoir décisionnel s'il [TRADUCTION] « adoptait tout simplement la position de la GRC » n'est pas fondée. Le Tribunal a raison de dire que les notes de service relatives au Régime fiscal ne peuvent pas être considérées comme déterminantes aux fins de l'admissibilité à une pension, mais ces notes de services constituent néanmoins une preuve de l'existence d'un lien de causalité entre les accidents reliés au service et l'état du demandeur. En outre, ces documents étayent la preuve non contredite soumise par le docteur Robson.


Conclusion

[36]       J'estime donc que le TACRA a commis une erreur en concluant que l'avis médical du docteur Robson n'était pas [TRADUCTION] « suffisamment crédible » . L'avis exprimé par le docteur Robson établissait l'existence d'un lien de causalité entre les blessures reliées au travail et l'état du demandeur. Le Tribunal ne disposait d'aucun élément de preuve contredisant cet avis. De fait, les notes de service relatives au Régime fiscal étayent cet avis. Si, malgré l'avis exprimé par le docteur Robson, il subsistait certains doutes au sujet de la cause de l'affection dont le demandeur est atteint, en l'absence d'éléments de preuve contradictoires, l'article 39 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) exige que l'on tranche toute incertitude en faveur du demandeur. En l'espèce, on n'a pas laissé le demandeur tirer parti de l'article 39.

[37]       Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est accueillie et l'affaire est renvoyée pour qu'une formation différemment constituée du TACRA réexamine l'affaire d'une façon compatible avec les présents motifs.

                                                                                           « Dolores M. Hansen »                         

                                                                                                                          Juge                                             

Ottawa (Ontario)

Le 4 juin 2002

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                  T-451-01

INTITULÉ :                                                 Eike Teubert

c.

le procureur général du Canada

LIEU DE L'AUDIENCE :                         Edmonton (Alberta)

DATE DE L'AUDIENCE :                      le 17 avril 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :         Madame le juge Hansen

DATE DES MOTIFS :                           le 4 juin 2002

COMPARUTIONS :

M. Michael D. Keyes                                    POUR LE DEMANDEUR

Mme Tracy King                                              POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Sisson Warren Sinclair                                   POUR LE DEMANDEUR

Avocats

Red Deer (Alberta)

M. Morris Rosenberg                                   POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

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