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Date : 20210210


Dossier : T‑773‑19

Référence : 2021 CF 136

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 10 février 2021

En présence de madame la juge Walker

ENTRE :

CANADIAN STANDARDS ASSOCIATION

demanderesse

et

PHARMA PLASTIC INDUSTRIES INC.

défenderesse

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] Canadian Standards Association (CSA), la demanderesse, s’adresse à la Cour afin d’obtenir contre Pharma Plastic Industries Inc., la défenderesse, un jugement déclaratoire, une injonction et des dommages‑intérêts. Selon la demanderesse, la défenderesse aurait fabriqué, distribué, offert en vente et vendu au Canada des flacons pharmaceutiques et des bouchons arborant les marques de commerce déposées de la demanderesse sans avoir obtenu son autorisation ou une licence. Ces produits ont été vendus à des pharmacies dans la région de Toronto, dont le magasin Shoppers Drug Mart, avant que la défenderesse termine le processus de certification de la demanderesse. La demanderesse s’appuie sur un ensemble de dispositions, soit les articles 7, 19, 20, 22 et 53.2 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T‑13 (la Loi).

[2] La défenderesse ne nie pas les ventes non autorisées et ne conteste pas la demande de jugement déclaratoire et la demande d’injonction. La seule question que les parties n’ont pas réglée porte sur la nature des dommages‑intérêts et sur le montant qui doit être accordé à ce titre à la demanderesse.

[3] La présente affaire a été instruite par vidéoconférence le 10 septembre 2020. La défenderesse n’a pas comparu à l’audience : elle a cessé de participer utilement à l’instance depuis juillet 2019.

I. Les parties

[4] La demanderesse, chef de file mondialement reconnu dans l’élaboration de normes et dans la prestation de services en matière d’essai, d’inspection et de certification fournis à l’égard de produits issus de secteurs fort variés du marché, est une organisation à but non lucratif et la propriétaire inscrite des marques de commerce reproduites à l’annexe A du présent jugement (les marques de commerce ou les marques CSA). Le fait pour un produit d’arborer une marque CSA indique au public qu’il a été confié pour mise à l’essai et inspection à un organisme indépendant qui a certifié sa conformité aux normes applicables. La demanderesse emploie les marques CSA de façon continue au Canada depuis 1944 de manière à ce que les fabricants et les vendeurs puissent distinguer leurs produits de produits semblables qui n’ont pas été soumis au processus de mise à l’essai et de certification de la CSA.

[5] La défenderesse est une entreprise canadienne qui fabrique et vend des flacons, des pots et des plaquettes alvéolaires en plastique à des pharmacies aux fins de la distribution de médicaments d’ordonnance. Les produits en cause sont des flacons de couleurs et de tailles différentes ainsi que les différents mécanismes de fermeture du couvercle des flacons (goulot pour bouchon quart de tour à l’épreuve des enfants et bouchon‑pression).

II. La preuve des parties

[6] Les parties ont fourni en preuve les quatre affidavits suivants, dont trois produits par la demanderesse et un produit par la défenderesse :

  1. L’affidavit (et ses pièces jointes) d’Ammar Bahsoun — directeur, Sécurité et conformité, pour CSA Group Testing & Certification Inc., une filiale de la demanderesse —, souscrit le 1er mai 2019 (l’affidavit de M. Bahsoun).

  2. L’affidavit (et ses pièces jointes) de Daryl Somes — directeur et enquêteur pour Backlit Resource Group Inc., un cabinet de détectives privés agréés dont les services ont été retenus par la demanderesse —, souscrit le 8 mai 2019 (l’affidavit de M. Somes).

  3. L’affidavit (et ses pièces jointes) de Jeff Vansteenkiste — directeur, Enquêtes sur Internet, pour le cabinet d’avocats qui représente la demanderesse —, souscrit le 9 mai 2019 (l’affidavit de M. Vansteenkiste).

  4. L’affidavit (et ses pièces jointes) de Maged Saad — président de la défenderesse à la date de l’affidavit —, souscrit le 15 juillet 2019 (l’affidavit de M. Saad).

III. La relation contractuelle entre les parties

[7] En 2017, la défenderesse a amorcé la mise au point de deux nouveaux flacons en plastique destinés à être commercialisés et vendus à des pharmacies canadiennes (les nouveaux produits) : les flacons à bouchon à l’épreuve des enfants (à goulot pour bouchon quart de tour) et les flacons à bouchon‑pression.

[8] En juin 2017, M. Saad a demandé à la demanderesse de mettre à l’essai et de certifier certains nouveaux produits. Il l’a informée que la défenderesse allait ouvrir une usine pour la production des nouveaux produits.

[9] La demanderesse a transmis à la défenderesse un devis daté du 26 juin 2017 dans lequel elle précisait tous les éléments des nouveaux produits devant être fournis pour la certification, les processus de mise à l’essai et de certification applicables aux nouveaux produits, la norme de certification (Z76.1‑16) ainsi que les droits applicables. Les seuls nouveaux produits fournis aux fins de certification et la norme de certification demandée étaient les suivants :

  1. Emballages à l’épreuve des enfants, type IIA. Flacons à goulot pour bouchon quart de tour non prévus pour les liquides, 8, 13, 16 et 20 DR bleus et ambrés avec bouchon blanc de 32 mm et doublure transparente moyenne; flacons de 30, 40 et 60 DR bleus et ambrés avec bouchon blanc de 50 mm et grande doublure transparente.

  2. Norme : Z76.1‑16.

[10] Aucun flacon à bouchon‑pression ou transparent n’a été fourni à la demanderesse aux fins de certification.

[11] Le 17 juillet 2017, la défenderesse a accepté par écrit le devis daté du 26 juin 2017 et a transmis son bon de commande à la demanderesse. J’emploierai le terme « le contrat de juin 2017 » pour désigner le contrat ainsi conclu entre les parties.

[12] La norme Z76.1‑16 s’applique aux flacons et autres emballages comportant des caractéristiques de sécurité qui limitent la capacité d’un enfant à accéder au contenu des flacons. Les produits peuvent comporter un filetage continu, un goulot pour bouchon quart de tour ou un mécanisme de fermeture à bouchon‑pression. La norme Z76.1‑16 impose des exigences en matière d’étiquetage qui ont pour but d’identifier les produits qui constituent des « emballages de sécurité pour enfants » entièrement certifiés CSA (flacon et bouchon/mécanisme de fermeture). Les exigences en matière d’étiquetage précisent la marque CSA qui doit être appliquée sur le flacon et le bouchon.

[13] Pour obtenir la certification de conformité à la norme CSA Z76.1‑16, il faut passer par quatre étapes : 1) la mise à l’essai du protocole; 2) les essais physiques de la CSA; 3) l’évaluation initiale en usine; 4) l’achèvement du rapport CSA et délivrance du certificat de conformité par la CSA et de l’autorisation d’employer la ou les marques CSA.

[14] Le processus de certification des bouchons et des flacons à goulot pour bouchon quart de tour de la défenderesse s’est poursuivi au cours du premier semestre de 2018. La défenderesse a participé à deux séries d’essais de protocole, à une évaluation initiale en usine et à des essais physiques de la CSA et a obtenu des approbations à différentes étapes du processus.

IV. L’emploi des marques de commerce CSA par la défenderesse avant l’obtention de la certification

[15] Comme point de départ, précisons qu’au Canada la loi exige que les flacons de médicaments d’ordonnance en plastique, les mécanismes de fermeture des flacons et les emballages pharmaceutiques soient conformes à certaines normes. La sécurité des consommateurs et la confiance du public à l’égard de la distribution des médicaments d’ordonnance sont au cœur de ces normes.

[16] Entre le 9 juillet et le 10 août 2018, la défenderesse a vendu une quantité limitée de nouveaux produits estampillés des marques de commerce CSA (les produits non autorisés par la CSA) à treize pharmacies de la région de Toronto. La CSA n’avait pas à l’époque terminé le processus de certification, et la défenderesse n’avait pas obtenu de licence l’autorisant à employer les marques de commerce CSA en liaison avec ses nouveaux produits ou emballages. La plus grande partie des ventes portait sur des produits non autorisés par la CSA et dotés d’un goulot pour bouchon quart de tour, comportant des bouchons‑pression à quatre pharmacies et des flacons transparents à une autre, bien qu’elle n’ait fait aucune demande de certification de ses flacons à bouchon‑pression ou de ses flacons transparents. Le 10 août 2018, la défenderesse a également vendu à M. Vansteenkiste, par le biais de son site Web, des produits non autorisés par la CSA, y compris des flacons transparents et des flacons à bouchon‑pression.

[17] La demanderesse a appris au mois d’août 2018 que la défenderesse vendait des produits non autorisés par la CSA. La défenderesse ne nie pas avoir fait les ventes non autorisées : elle limite ses arguments à l’objet et au volume de ventes.

[18] Après avoir appris que la défenderesse avait employé sans autorisation les marques de commerce CSA, le cabinet d’avocats de la demanderesse a envoyé à la défenderesse une mise en demeure datée du 27 août 2018 (la mise en demeure). La CSA a mis fin au processus de certification, ce qui a entraîné les conséquences suivantes :

  1. Aucun des nouveaux produits (flacons ou mécanismes de fermeture) de la défenderesse n’était certifié conforme à la norme Z76.1‑16.

  2. La défenderesse n’a reçu de certificat de conformité pour aucun de ses nouveaux produits.

  3. Comme la défenderesse n’avait pas terminé le processus de certification de la CSA, elle n’a pas obtenu la licence prévue dans le contrat de juin 2017 et n’a pas été autorisée à employer les marques de commerce CSA en liaison avec ses nouveaux produits.

V. La mise en demeure

[19] L’auteur de la mise en demeure informait la défenderesse que la demanderesse avait appris l’existence de ses ventes de produits non autorisés par la CSA, que l’annonce, l’offre de vente et la vente de ces produits violaient les droits que la demanderesse tire de ses marques de commerce, et que cette violation ne serait pas tolérée. Il ajoutait que le processus de certification de la CSA avait été interrompu.

[20] L’auteur de la mise en demeure demandait à la défenderesse de fournir des renseignements et des documents financiers détaillés concernant ses ventes, à l’échelle mondiale, de produits non autorisés par la CSA, et de lui confirmer par écrit qu’elle avait mis fin à ces activités. Il demandait en outre que tous les produits arborant les marques de commerce CSA en la possession de la défenderesse, sous sa garde ou son contrôle, soient remis aux avocats de la demanderesse, que ces produits soient retirés du site Web de la défenderesse et que la défenderesse retire toutes les marques de commerce CSA des emballages qu’elle utilise.

[21] Selon la demanderesse, la défenderesse ne s’est pas conformée à la mise en demeure et elle a continué de vendre les produits non autorisés par la CSA. Plus particulièrement, en septembre 2018, la défenderesse offrait en vente ces produits et en vendait à Shoppers Drug Mart. Malgré la présence au dossier d’éléments de preuve étayant l’argument de la demanderesse, la défenderesse affirme qu’elle a immédiatement cessé les activités non autorisées et que le 15 juillet 2019, elle s’était conformée aux conditions précisées dans la mise en demeure ou avait accepté de s’y conformer.

VI. L’historique procédural

[22] La demanderesse a produit son avis de demande le 9 mai 2019. Le 4 décembre suivant, la Cour a décidé de poursuivre l’affaire à titre d’instance à gestion spéciale afin qu’un juge planifie les étapes préparatoires nécessaires et qu’il établisse un échéancier pour la mise en état du dossier.

[23] Le 12 mars 2020, les avocats de la défenderesse, le cabinet Shift Law Professional Corporation (le cabinet Shift Law ou le cabinet), ont produit au dossier de la Cour une requête pour cesser d’occuper. La défenderesse n’a produit aucune réponse à la requête. La requête a été accueillie et le cabinet Shift Law a cessé d’occuper le 25 juin 2020, au motif que sa relation avec son client avait été rompue et que les circonstances justifiaient qu’il cesse d’occuper. Le cabinet a plus tard informé la Cour que l’ordonnance n’avait pu être signifiée à personne, car la défenderesse n’exerçait plus ses activités à l’adresse indiquée au dossier. L’ordonnance lui a toutefois été transmise par courriel et par courrier régulier à sa dernière adresse connue. La Cour a autorisé la signification substitutive par courriel et par courrier régulier conformément à l’article 136 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106.

[24] La défenderesse, qui n’a produit aucun dossier ou mémoire, a peu participé à la présente instance. Sa preuve principale au dossier consiste en l’affidavit de M. Saad, souscrit le 15 juillet 2019. Comme je le mentionne plus haut, la défenderesse n’a pas participé à l’audience relative à la présente demande.

VII. Les questions en litige et les réparations demandées

[25] Voici les questions en litige en l’espèce :

  1. La demanderesse a‑t‑elle le droit d’obtenir contre la défenderesse un jugement déclaratoire et une injonction?

  2. La demanderesse a‑t‑elle le droit d’obtenir des dommages‑intérêts en application du paragraphe 53.2(1) de la Loi?

  3. Quelle est l’étendue des dommages‑intérêts auxquels a droit la demanderesse :

  1. Des dommages‑intérêts compensatoires fondés sur l’emploi non autorisé, par la défenderesse, des marques de commerce CSA dont le calcul est effectué en partie à partir des frais qui ont dû être engagés en raison du fait que la défenderesse n’a pas versé les montants qu’elle aurait été tenue de payer conformément au contrat de 2017;

  2. Des dommages‑intérêts punitifs.

[26] Par souci de commodité, les dispositions pertinentes de la Loi sont reproduites à l’annexe B du présent jugement.

VIII. Analyse

1. La demanderesse a‑t‑elle le droit d’obtenir un jugement déclaratoire et une injonction?

[27] La demanderesse appuie sa demande sur les articles 19 et 20, sur les alinéas 7b), c) et d) ainsi que sur le paragraphe 22(1) de la Loi. Elle fait valoir que la défenderesse a, en vendant des produits non autorisés par la CSA, violé son droit à l’emploi exclusif des marques de commerce CSA au Canada et a usurpé ces marques de commerce, contrevenant ainsi aux articles 19 et 20 de la Loi. La demanderesse affirme en outre que la défenderesse : 1) a appelé l’attention du public sur les produits non autorisés par la CSA de manière à vraisemblablement causer de la confusion au Canada entre ces produits et les produits certifiés par la CSA d’autres fournisseurs, et a ainsi contrevenu à l’alinéa 7b); 2) a fait passer les produits non autorisés par la CSA pour ceux qui sont commandés ou demandés, et a ainsi contrevenu à l’alinéa 7c); 3) a faussement employé les marques de commerce CSA sous un rapport essentiel et de nature à tromper le public en ce qui regarde leurs caractéristiques, leur qualité, quantité ou composition, contrevenant ainsi à l’alinéa 7d); et 4) a diminué la valeur de l’achalandage attaché aux marques de commerce CSA, contrevenant ainsi au paragraphe 22(1) de la Loi.

[28] La propriété des marques de commerce CSA, l’enregistrement de ces marques et l’emploi continu de ces marques depuis longtemps par la demanderesse ne sont pas en cause en l’espèce, et la défenderesse ne nie pas non plus l’emploi non autorisé des marques de commerce CSA allégué par la demanderesse. La défenderesse reconnaît au moyen de l’affidavit de M. Saad que [traduction] « la seule question qui n’est pas réglée porte sur le montant que la CSA continue de lui réclamer ». Pour l’essentiel, M. Saad explique dans son affidavit les raisons pour lesquelles la défenderesse s’est livrée à des activités qu’elle juge promotionnelles auprès de pharmacies en Ontario avant la fin du processus de certification de la CSA.

[29] Voici les éléments établis par la demanderesse :

  1. La défenderesse sait parfaitement, et elle le savait à toutes les dates pertinentes, que les marques de commerce CSA contribuent nécessairement et éminemment au succès commercial des nouveaux produits. Elle savait qu’elle devait terminer le processus de certification de la CSA et obtenir l’autorisation d’employer les marques de commerce CSA en liaison avec les nouveaux produits et l’emballage avant de vendre ces produits aux pharmacies.

  2. La défenderesse a conclu le contrat de juin 2017 pour la certification de la conformité à la norme Z76.1‑16 de ses flacons bleus et ambrés à l’épreuve des enfants, non prévus pour les liquides de 8, 13, 16, 20, 30, 40 et 60 DR et dotés d’un goulot pour bouchon quart de tour.

  3. La défenderesse n’a terminé le processus de certification de la CSA pour aucun des nouveaux produits, y compris ceux qui sont visés par le contrat de juin 2017. Elle n’a jamais présenté de demande de certification pour des flacons ou d’autres produits à utiliser avec des bouchons‑pression, et n’a pas obtenu la certification de tels produits. Monsieur Bahsoun souligne ces points dans son affidavit.

  4. La défenderesse a vendu, distribué et fabriqué au Canada les produits non autorisés par la CSA. Elle a vendu ces produits à des pharmacies dans la région de Toronto, et M. Saad a fourni des échantillons à M. Somes. Dans son affidavit, M. Somes explique s’être présenté dans les bureaux de la défenderesse le 10 août 2018 à titre de client potentiel, dans le but d’effectuer une enquête pour la demanderesse. Il fournit les détails de sa conversation avec M. Saad, énumère les échantillons qui lui ont été remis et fournit des photographies des échantillons qui arborent les marques de commerce CSA. La défenderesse n’admet que les ventes faites aux pharmacies, au moyen de l’affidavit de M. Saad auquel est joint la pièce B (un rapport comportant le détail de ses ventes des produits non autorisés par la CSA, les pharmacies concernées, les numéros des factures, le nombre et le type de produits vendus, et les montants facturés).

  5. La pièce B jointe à l’affidavit de M. Saad donne le détail des ventes de « flacons à bouchon‑pression à l’épreuve des enfants » réalisées par la défenderesse pour quatre pharmacies. Comme je l’indique plus haut, aucun flacon muni d’un bouchon‑pression n’a été fourni à la demanderesse aux fins de certification. La défenderesse a aussi vendu des flacons transparents à l’une des pharmacies et à M. Vansteenkiste. Là encore, aucun flacon transparent n’a été fourni à la demanderesse aux fins de certification.

  6. Avant d’avoir obtenu la certification des produits non autorisés par la CSA, la défenderesse en a fait la promotion et la vente en ligne, et l’emballage qu’elle a utilisé arborait les marques de commerce CSA.

  7. Les pièces I et J jointes à l’affidavit de M. Vansteenkiste comportent des photographies des produits non autorisés par la CSA tels que M. Vansteenkiste les a reçus de la part de la défenderesse après les avoir achetés en ligne le 10 août 2018. Les photographies montrent un flacon conçu pour une fermeture à goulot pour bouchon quart de tour, sur lequel est estampillée la marque de commerce CSA ainsi que le bouchon‑pression vendu avec celui‑ci. La défenderesse n’a pas inclus dans son tableau des ventes – la pièce B à l’affidavit de M. Saad –la vente en ligne des produits non autorisés par la CSA faite à M. Vansteenkiste.

  8. La défenderesse a reçu la mise en demeure et ne s’y est pas conformée. Dans son affidavit et lors de son contre‑interrogatoire, M. Saad nie la non‑conformité reprochée à la défenderesse, mais son témoignage ne me convainc pas. La preuve de la demanderesse montre que la défenderesse a conclu avec une pharmacie de la région de Toronto, après avoir reçu la mise en demeure, au moins une vente de neuf boîtes de produits non autorisés par la CSA (dans lesquelles se trouvaient plus de 1 000 flacons à bouchon à l’épreuve des enfants) dont l’emballage arborait les marques de commerce CSA. Signalons qu’il y a dans la preuve de la demanderesse une lettre que les avocats de la demanderesse ont transmise au pharmacien en question pour l’informer du fait qu’il avait acheté des produits non autorisés par la CSA. Le pharmacien a confirmé dans sa réponse avoir reçu les produits en question et y a joint la facture.

  9. La défenderesse ne s’est pas conformée aux engagements pris lors du contre‑interrogatoire de M. Saad, lesquels consistaient notamment à fournir des dossiers financiers complets concernant ses ventes et/ou sa distribution des produits non autorisés par la CSA et à produire les 2 000 boîtes arborant les marques de commerce CSA qui sont toujours en la possession de la défenderesse.

[30] J’estime que la demanderesse a établi qu’il y a eu violation à son droit exclusif à l’emploi des marques de commerce CSA. La défenderesse a sciemment vendu des produits non autorisés par la CSA avant et après avoir reçu la mise en demeure, contrevenant ainsi aux articles 19 et 20 de la Loi. Son argument selon lequel elle ne s’est livrée qu’à des activités promotionnelles n’est pas convaincant. Elle a agi de manière transgressive, d’autant plus que certains produits vendus n’ont jamais été fournis à la CSA aux fins du processus de certification.

[31] Les arguments des parties concernant les éléments qui doivent être prouvés pour que la Cour accueille une demande fondée sur l’article 7 de la Loi étaient limités en l’espèce. Toutefois, la défenderesse admet avoir agi de manière transgressive et ne s’oppose pas aux conclusions recherchées dans l’avis de demande quant au jugement déclaratoire et à l’injonction, y compris celles qui concernent l’article 7, et la preuve révèle que la défenderesse a contrevenu aux alinéas 7b), c) et d) de la Loi. Une conclusion portant que la vente, par la défenderesse, des produits non autorisés par la CSA constitue une violation des alinéas 7b), c) et d) ne sera pas nécessaire, mais la nature de ses agissements justifie amplement que la Cour fasse droit à toutes les réparations sollicitées par la demanderesse quant au jugement déclaratoire et à l’injonction, y compris celles qui sont fondées sur l’article 7.

[32] La preuve de la demanderesse porte principalement sur la dépréciation de l’achalandage attaché aux marques de commerce CSA en raison de l’emploi non autorisé de ces marques par la défenderesse. La preuve est convaincante. La valeur des marques de commerce CSA est inextricablement liée à la confiance qu’a le public dans les normes de sécurité et de qualité de la demanderesse et dans la rigueur de ses protocoles d’essai. Je conclus que la défenderesse a employé, sans y être autorisée, les marques de commerce CSA d’une manière susceptible d’entraîner la diminution de la valeur de l’achalandage attaché à ces marques, et qu’elle a ainsi contrevenu au paragraphe 22(1) de la Loi.

[33] Par conséquent, je ferai droit aux conclusions recherchées quant au jugement déclaratoire et à l’injonction conformément au paragraphe 53.2(1) de la Loi. Le jugement déclaratoire de la Cour et la réparation par voie d’injonction qu’elle accorde correspondent aux conclusions recherchées dans l’avis de demande et sont exposés dans son dispositif.

2. La demanderesse a‑t‑elle droit d’obtenir des dommages‑intérêts en application du paragraphe 53.2(1) de la Loi?

[34] La demanderesse affirme qu’elle a le droit d’obtenir des dommages‑intérêts dans le cadre de la présente demande, et je suis d’accord avec elle. Elle demande des dommages‑intérêts compensatoires ou la restitution des profits, des dommages‑intérêts se rattachant au défaut de la défenderesse de payer le montant auquel elle s’était engagée dans le contrat de juin 2017, ainsi que des dommages‑intérêts punitifs ou exemplaires se rattachant à l’emploi illicite des marques de commerce CSA fait volontairement, et de façon continue, par la défenderesse.

[35] Pour les motifs exposés ci‑après, je conclus que la somme de 50 000 $, au titre des dommages‑intérêts compensatoires, est appropriée. Pour calculer ce montant, j’ai tenu compte des services et des droits de licence impayés, payables à la demanderesse en vertu du contrat de juin 2017. Je conclus en outre que la non‑divulgation, de la part de la défenderesse, du volume total de ses ventes de produits non autorisés par la CSA et son refus de se conformer à la mise en demeure justifient l’octroi de dommages‑intérêts punitifs de l’ordre de 25 000 $.

[36] La restitution des profits ne permet pas une évaluation adéquate des dommages‑intérêts en l’espèce. Premièrement, les bénéfices que la défenderesse a tirés de la vente des produits non autorisés par la CSA ont logiquement bien peu à voir avec la diminution de la valeur des marques de commerce CSA et avec le préjudice éventuel causé au public. Deuxièmement, le barème appliqué dans la jurisprudence pour le calcul des dommages‑intérêts compensatoires n’est pas adapté à la situation de la demanderesse — un organisme de normalisation — ni aux activités limitées que la défenderesse consacre aux nouveaux produits, qu’il s’agisse de la fabrication ou de la vente. Le volume de ventes non autorisées de la défenderesse permet une meilleure évaluation des dommages‑intérêts compensatoires et/ou punitifs, étant donné que le total des ventes et le nombre de flacons vendus ont une incidence sur le préjudice qui peut découler de l’emploi de contenus non certifiés dans lesquels les médicaments d’ordonnance sont remis aux clients et sur la diminution de l’achalandage et la confiance du public à l’égard des marques de commerce CSA.

[37] Dans la décision Louis Vuitton Malletier S.A. c Wang, 2019 CF 1389 (Louis Vuitton) — une décision fouillée qui examine l’évolution de la méthode utilisée par la Cour pour l’octroi de dommages‑intérêts minimums —, le juge Roy s’est arrêté au principe selon lequel les dommages‑intérêts ont pour but d’être purement compensatoires. Dans chaque affaire, la Cour évalue de son mieux les dommages‑intérêts, mais elle ne doit pas simplement appliquer une formule. Les paramètres fournis par la jurisprudence relative aux dommages‑intérêts calculés sur la base des occurrences de violation doivent être appliqués en fonction de la preuve, de la nature des produits et de l’ampleur des activités de la défenderesse dans chaque cas. Mon examen de la preuve et des activités de la demanderesse et de la défenderesse m’amène à conclure que l’octroi d’un montant minimum à titre des dommages‑intérêts compensatoires n’est pas ce qui traduit le mieux au principe de l’indemnisation. L’argument de la demanderesse selon lequel les agissements de la défenderesse justifient l’utilisation du barème de 30 000 $ par occurrence de violation (pour un total de 480 000 $) pour calculer les dommages‑intérêts compensatoires minimums n’est étayé ni par la preuve ni par les extrapolations raisonnables fondées sur la preuve.

3. L’étendue des dommages‑intérêts auxquels a droit la demanderesse

A. Les dommages‑intérêts compensatoires

[38] Mon évaluation des dommages‑intérêts compensatoires sollicités par la demanderesse repose sur les deux facteurs suivants : 1) l’incidence potentielle des ventes, par la défenderesse, de produits non autorisés par la CSA sur l’achalandage attaché aux marques de commerce CSA; et 2) les dépenses que la demanderesse a dû débourser et les droits de licence qui étaient prévus au contrat de 2017.

[39] La demanderesse souligne l’existence et l’importance de l’achalandage attaché aux marques de commerce CSA dans l’affidavit de M. Bahsoun. Monsieur Bahsoun dit que la demanderesse a obtenu l’enregistrement des marques de commerce CSA, qu’elle les emploie depuis longtemps et qu’elle s’est vouée à l’élaboration de normes de sécurité et de qualité qui font consensus et à la prestation de services d’essais, d’inspection et de certification de produits. Il insiste sur la confiance du public et sur le préjudice qui pourrait découler de l’emploi des marques en liaison avec des produits qui n’ont pas franchi toutes les étapes du processus de certification de la CSA. Voici comment M. Bahsoun décrit la qualité des marques de commerce CSA :

[traduction]

La présence de certaines marques CSA sur un produit fait savoir aux consommateurs et aux autorités de réglementation compétentes que des échantillons de ce produit ont fait l’objet d’essais et ont été inspectés par un organisme indépendant qui a conclu qu’il pouvait être certifié conformément aux normes de l’industrie pertinente.

[40] Selon M. Bahsoun, le préjudice causé au rôle assumé par la demanderesse et à l’achalandage dans l’éventualité où les marques de commerce CSA seraient employées en liaison avec des produits et services non certifiés serait incalculable. J’estime que son observation n’est guère exagérée. La demanderesse dépend de la confiance que lui accordent les organes de réglementation, les fabricants, les vendeurs et les consommateurs pour continuer les activités qu’elle exerce à titre d’organisme de normalisation. Cette confiance est très manifestement exprimée par le fait que le public compte sur la présence des marques de commerce CSA sur les produits certifiés.

[41] La demanderesse sollicite des dommages‑intérêts pour le non‑paiement, par la défenderesse, des montants visés par le contrat de 2017 (25 526,70 $). La demanderesse fait valoir que la question du non‑paiement des services rendus dans le cadre du processus de certification est subordonnée à l’emploi non autorisé, par la défenderesse, des marques de commerce CSA, en violation de la Loi. Par conséquent, la Cour a compétence pour accorder de tels dommages‑intérêts et ne devrait pas obliger la demanderesse à intenter un recours en indemnisation distinct devant un autre tribunal pour les mêmes transgressions.

[42] Dans l’arrêt Salt Canada Inc. c Baker, 2020 CAF 127 (Salt), la Cour d’appel fédérale s’est récemment prononcée sur la compétence de la Cour en matière d’interprétation d’ententes. Était en cause dans cette affaire une demande en vue d’obtenir une ordonnance enjoignant au commissaire des brevets de modifier les registres du Bureau des brevets afin de tenir compte du fait que l’appelante était la propriétaire du brevet en question. Compte tenu de la nature de la demande, la Cour devait interpréter une entente dans laquelle le propriétaire initial cédait son titre au brevet à l’intimé, sous réserve d’une clause de réversion. La demande a été présentée en application de l’article 52 de la Loi sur les brevets, LRC 1985, c P‑4, lequel dispose : « La Cour fédérale est compétente […] pour ordonner que toute inscription dans les registres du Bureau des brevets concernant le titre à un brevet soit modifiée ou radiée. » L’article 26 de la Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c F‑7, confère à la Cour fédérale, en première instance, la compétence pour toute question lui « ressortissant aux termes d’une loi fédérale ». Le juge Stratas a dit que suivant les termes clairs de ces deux dispositions, la Cour fédérale avait compétence pour instruire la demande (Salt, au para 5).

[43] Le juge Stratas cite l’arrêt Kellogg Co. v Kellogg, [1941] SCR 242, [1941] DLR 545 (Kellogg), de la Cour suprême du Canada, ainsi que la décision Titan Linkabit Corp. et al v S.E.E. See Electronic Engineering Inc. et al. (1992), 44 CPR (3d) 469, 58 FTR 1 (CF, 1re inst.) où notre Cour a appliqué l’arrêt Kellogg (Salt, au para 24) :

[24] La règle établie dans l’arrêt Kellogg est simple : la Cour de l’Échiquier (maintenant la Cour fédérale) peut interpréter des contrats entre particuliers pour autant que cette interprétation soit faite dans l’exercice d’une compétence fédérale valide conférée à la Cour fédérale. Il est vrai qu’en l’absence d’une attribution en vertu de la loi d’une compétence précise à la Cour fédérale, une partie ne peut faire valoir une réclamation contractuelle devant la Cour fédérale contre un autre particulier afin d’obtenir une réparation sous forme de dommages‑intérêts. L’arrêt Kellogg nous enseigne toutefois qu’en présence d’une telle attribution, les parties peuvent demander réparation même si leur droit repose sur l’interprétation d’une entente ou d’un autre instrument, par exemple, une réparation sous forme de correction des registres du Bureau des brevets visant à reconnaître le titre à un brevet aux termes de l’article 52 de la Loi sur les brevets.

[44] Mon collègue, le juge Gascon, a appliqué l’arrêt Salt à une requête visant à faire appliquer un accord de règlement censément intervenu dans le cadre d’une action en usurpation de marque de commerce intentée devant la Cour (SSE Holdings, LCC c Le Chic Shack Inc., 2020 CF 983 au para 60 (SSE Holdings)) :

[60] Il est de nos jours bien établi en droit que la Cour peut trancher des questions de nature contractuelle qui sont accessoires à une affaire qui relève autrement de sa compétence légale, notamment la question de savoir si les parties ont conclu un accord de règlement (Salt Canada Inc. c Baker, 2020 CAF 127 [Salt Canada] aux paras 14‑20; Apotex Inc. c Allergan, Inc., 2016 CAF 155 [Apotex] aux paras 12‑14). La Cour « a compétence lorsque la question du droit des contrats dont la Cour est saisie s’inscrit dans une question sur laquelle la Cour fédérale a compétence légale, il existe des règles de droit fédéral essentielles pour se prononcer sur l’affaire qui sont valides aux termes du partage constitutionnel des pouvoirs » (Apotex au para 13). L’objet de l’action de Shake Shack, c’est‑à‑dire une usurpation de marque de commerce, relève clairement de la compétence de la Cour (Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c F‑7, art 20; LMC, art 55).

[45] En l’espèce, la demanderesse invoque l’article 55 de la Loi :

Compétence de la Cour fédérale

Jurisdiction of Federal Court

55 La Cour fédérale connaît de toute action ou procédure liée à l’application de la présente loi — à l’exception de l’article 51.01 — ou liée à l’exercice d’un droit ou recours conféré ou défini par celle‑ci.

55 The Federal Court has jurisdiction to entertain any action or proceeding, other than a proceeding under section 51.01, for the enforcement of any of the provisions of this Act or of any right or remedy conferred or defined by this Act.

[46] L’inexécution du contrat que dénonce la demanderesse est une question différente de celles qui ont été examinées dans l’arrêt Salt et dans la décision SSE Holdings. Dans ces affaires et d’autres encore citées par le juge Stratas, le pouvoir de statuer conféré à la Cour nécessitait qu’elle tranche un différend contractuel sous‑jacent. L’interprétation de l’entente portant cession du titre au brevet dans l’arrêt Salt constituait une étape importante inextricablement liée à l’exercice de la compétence de la Cour. L’existence d’un accord de règlement dans l’affaire SSE Holdings était une question qui pouvait être tranchée isolément, mais l’accord lui‑même avait été négocié dans le cadre de l’instance devant la Cour.

[47] Or, les conclusions sur les questions de violation et de dépréciation de l’achalandage que la Loi me permet de tirer ne dépendent pas de l’interprétation du contrat de 2017. En d’autres termes, même si les parties n’avaient jamais conclu le contrat de 2017, le moyen que la demanderesse tire des articles 19 et 20 de la Loi pour invoquer la violation de son droit exclusif d’employer les marques de commerce CSA serait tout de même retenu étant donné que la preuve démontre l’emploi non autorisé, par la défenderesse, des marques en liaison avec la vente des produits non autorisés par la CSA.

[48] Le contrat de 2017 étaye les moyens invoqués par la demanderesse principalement parce qu’il confirme que la défenderesse connaissait l’importance des marques de commerce CSA et parce qu’il constitue le point de départ pour l’évaluation des dommages‑intérêts. Les droits pour la prestation des services et les droits de licence reflètent les dépenses que la demanderesse a dû débourser ainsi que la valeur partielle de la licence autorisant l’emploi des marques de commerce CSA, bien que chaque partie des droits de licence impayés ne représente qu’une fraction de la valeur du droit d’employer les marques. En l’absence d’un débat exhaustif sur la question de la compétence de la Cour pour octroyer des dommages‑intérêts se rapportant au non‑paiement des droits prévus par un contrat qui se rattache – mais qui n’est pas nécessaire – à l’exercice des pouvoirs que la Loi confère à la demanderesse, j’estime que les droits impayés découlant du contrat de 2017 constituent un facteur dont il faut tenir compte dans l’évaluation des dommages‑intérêts compensatoires à octroyer à la demanderesse.

[49] La défenderesse a réalisé au moins 15 ventes de produits non autorisés par la CSA. Indépendamment de la question de savoir si les ventes étaient de nature promotionnelle et de la marge bénéficiaire de la défenderesse, les ventes récurrentes ont vraisemblablement diminué la valeur de l’achalandage attaché aux marques de commerce CSA. Qui plus est, les activités en ligne de la défenderesse pour la promotion des produits non autorisés par la CSA ne sauraient être qualifiées de « promotionnelles » comme l’explique M. Saad. La demanderesse sollicite des dommages‑intérêts compensatoires de l’ordre de 50 000 $. J’estime que le montant demandé constitue une approximation raisonnable des dommages subis par la demanderesse, compte tenu des avantages relatifs au marché et des avantages pécuniaires tirés par la défenderesse, des effets préjudiciables éventuels que les agissements de la défenderesse auront sur l’achalandage attaché aux marques de commerce CSA, des frais que la demanderesse a dû débourser pour les services et de la perte des droits de licence.

[50] J’accorderai à la demanderesse la somme globale de 50 000 $ à titre de dommages‑intérêts compensatoires.

B. Les dommages‑intérêts punitifs

[51] Selon la demanderesse, la Cour devrait lui accorder des dommages‑intérêts punitifs compte tenu du [traduction] « mépris flagrant », de la part de la défenderesse, de ses droits dans les marques de commerce CSA. La demanderesse fait valoir que l’emploi des marques de commerce CSA en liaison avec des produits non certifiés met en danger la sécurité du public et qu’il faut l’empêcher (Louis Vuitton, au para 191).

[52] Les principes applicables à l’octroi et à évaluation des dommages‑intérêts punitifs sont énoncés dans l’arrêt Whiten c Pilot Insurance Co., 2002 CSC 18 (Whiten), de la Cour suprême du Canada. Les dommages‑intérêts punitifs sont une mesure réparatrice qui doit être exceptionnellement accordée lorsqu’une partie adopte une conduite malveillante, opprimante et abusive qui choque le sens de la dignité de la Cour (Whiten, au para 36, 94) et lorsque les autres mesures ne permettraient pas de réaliser les objectifs de châtiment, dissuasion et dénonciation (Young c Thakur, 2019 CF 835 au para 52). Dans l’arrêt Lam c Chanel S. de R.L., 2017 CAF 38, la Cour d’appel fédérale a confirmé le montant accordé au titre des dommages‑intérêts punitifs et elle a décrit les éléments dont le juge de première instance avait tenu compte pour évaluer la conduite justifiant l’octroi des dommages‑intérêts punitifs (Lam, au para 11; voir également Rallysport Direct LLC v 2424508 Ontario Ltd., 2020 CF 794 au para 47) :

[11] Je relève, entre autres points, les conclusions du juge selon lesquelles les défenderesses étaient motivées par le profit; la vulnérabilité des demanderesses et l’érosion de la réputation de leurs marques découlant de la contrefaçon de celles‑ci; les efforts déployés par les défenderesses pour induire la Cour en erreur; le transfert frauduleux de la propriété de leur société qu’elles ont opéré après le dépôt de la déclaration afin d’éviter la responsabilité; le récidivisme des défenderesses, révélé par les ordonnances antérieures sur la même conduite; le fait qu’elles savaient que leurs activités étaient illicites; l’importance quantitative de la violation des droits; la continuation de la vente des produits contrefaits après le dépôt et la signification de la déclaration; le fait que les défenderesses n’aient produit aucune trace écrite de leur activité et la conclusion du juge selon laquelle la contrefaçon était continue et délibérée. Le juge a en outre situé sa décision sur les dommages‑intérêts punitifs dans le contexte de la jurisprudence applicable.

[53] La défenderesse connaissait le processus de certification de la CSA et savait qu’il lui fallait obtenir la certification pour pouvoir vendre les nouveaux produits. Monsieur Saad a souligné l’importance des marques de commerce CSA à M. Somes. Dans son affidavit, M. Saad a dit pour justifier les ventes non autorisées que la défenderesse avait dû investir de l’argent pour entreprendre le processus de certification et qu’elle souhaitait établir rapidement des contacts avec les pharmaciens. Il s’attendait à ce que la défenderesse termine rapidement le processus de certification, mais rien dans la preuve n’indique qu’elle a signalé aux pharmacies que les produits non autorisés par la CSA n’étaient vendus qu’à des fins promotionnelles et qu’ils ne pouvaient servir à des fins de distribution au public.

[54] Je tire les conclusions suivantes : 1) la défenderesse était parfaitement consciente de l’importance des marques de commerce CSA et du fait que ses ventes des produits non autorisés par la CSA étaient prématurées et illicites; 2) parmi les produits non autorisés par la CSA, il y avait de nouveaux produits arborant la ou les marques de commerce CSA que la défenderesse n’a jamais fournis à la demanderesse aux fins de certification; 3) la défenderesse a agi avec préméditation et de manière délibérée, et entendait améliorer sa situation financière; 4) elle a continué à agir de manière transgressive après avoir reçu la mise en demeure; et 5) elle n’a pas divulgué l’ampleur de ses transgressions et a même fourni des renseignements financiers erronés par l’entremise de l’affidavit de M. Saad.

[55] La confiance du public et l’achalandage attaché aux marques de commerce CSA découlent directement des normes et des essais rigoureux auxquels la demanderesse soumet les produits fournis aux fins de certification. Le public se fie à ces processus et à ces normes pour acheter ou utiliser les produits certifiés par la CSA. Le fait pour la défenderesse d’avoir délibérément et d’une manière transgressive offert en vente et vendu des produits non autorisés par la CSA nuit au rôle crucial que jouent les marques de commerce CSA sur le marché, et il faut empêcher de tels agissements. Le refus de la défenderesse de se conformer à la mise en demeure, les ventes de produits jamais fournis aux fins de certification et sa non‑divulgation de l’ampleur de ses agissements non autorisés contredisent sa thèse selon laquelle elle s’est livrée de façon prématurée à des activités promotionnelles.

[56] J’estime que des dommages‑intérêts punitifs de l’ordre de 25 000 $ sont, dans le contexte et les circonstances de la présente demande, raisonnables et qu’ils dissuaderont quiconque d’employer des marques de commerce CSA avant d’avoir terminé toutes les étapes de certification et d’y être pleinement autorisé. Les 500 000 $ sollicités par la demanderesse ne se concilient pas avec les actes reprochés qu’elle a établis et constitue un montant nettement supérieur à la fourchette des montants antérieurement accordés à titre de dommages‑intérêts punitifs.

IX. Les dépens

[57] Comme elle a gain de cause, la demanderesse a droit aux dépens. Elle a présenté des observations sur les dépens à l’audience ainsi qu’un mémoire de frais. J’ai examiné son mémoire, dans lequel elle demande que les dépens soient taxés conformément au tarif B des Règles des Cours fédérales. J’estime que les dépens sollicités pour les honoraires ne rendent pas compte de la simplicité relative de la présente affaire étant donné que la défenderesse a admis avoir agi de manière transgressive et qu’elle n’a pas participé à la présente instance après le dépôt de l’affidavit de M. Saad et le contre‑interrogatoire de celui‑ci. Néanmoins, les étapes initiales de la demande ont imposé aux avocats de la demanderesse un travail préparatoire important. J’adjugerai à la demanderesse une somme globale pour les dépens relatifs aux honoraires d’avocat que je fixe à 14 500 $ (plus taxes).

[58] Les débours précisés dans le mémoire de frais sont raisonnables et sont conformes aux étapes qui se sont succédé dans la présente instance. J’allouerai le plein montant demandé qui s’élève à 4 031,20 $ (plus taxes) et d’autres débours non taxables de 50 $.

[59] Le total des dépens adjugés à la demanderesse s’élève à 20 990,26 $ (toutes taxes et tous débours compris).


JUGEMENT dans le dossier T‑773‑19

LA COUR STATUE comme suit:

  1. La demanderesse, Canadian Standards Association (CSA), est la propriétaire des marques de commerce CSA reproduites à l’Annexe A du présent jugement et ces marques sont valides.

  2. La défenderesse, Pharma Plastic Industries Inc., a usurpé et est réputée avoir usurpé une ou plusieurs marques de commerce CSA, elle a employé les marques de commerce CSA, et cet emploi est de nature à tromper le public et à diminuer la valeur de l’achalandage attaché aux marques de commerce CSA, en contravention des articles 19 et 20 et au paragraphe 22(1) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T‑13.

  3. La Cour ordonne à la défenderesse de s’abstenir:

    1. de fabriquer, d’offrir en vente, de vendre et/ou d’annoncer des flacons, bouteilles, bouchons, couvercles et/ou autre produits qui ne sont pas fabriqués conformément à l’autorisation, une licence ou la permission de la demanderesse et qui arborent une ou plusieurs marques de commerce CSA et/ou des marques de commerce ou noms commerciaux, des mots ou combinaisons de mots, ou tout autre dessin, qui crée de la confusion avec ceux‑ci, sans avoir obtenu l’autorisation, une licence ou la permission de la demanderesse (produits non autorisés par la CSA);

    2. d’appeler l’attention du public au Canada sur ses produits de manière à causer ou à vraisemblablement causer de la confusion entre ses produits et services et l’entreprise de la demanderesse;

    3. de faire passer les produits non autorisés par la CSA pour ceux de la demanderesse;

    4. de faussement employer les marques de commerce CSA sous un rapport essentiel et de nature à tromper le public en ce qui regarde les caractéristiques, la qualité, quantité ou composition des produits non autorisés par la CSA et/ou leur mode de fabrication ou de production;

    5. d’appeler l’attention du public sur les produits non autorisés par la CSA de manière susceptible d’entraîner la diminution de la valeur de l’achalandage attaché aux marques de commerce CSA;

    6. de faire au public une déclaration fausse ou trompeuse en vue de faire directement ou indirectement la promotion de l’approvisionnement ou de l’emploi des produits non autorisés par la CSA et des intérêts commerciaux de la défenderesse.

  4. La Cour ordonne à la défenderesse de restituer à la demanderesse :

    1. tous les produits non autorisés par la CSA qui sont en sa possession, sous son autorité ou sous son contrôle;

    2. tous les documents non protégés qui concernent :

      1. la conception et la fabrication des produits non autorisés par la CSA ainsi que leur emballage et leurs étiquettes;

      2. la fabrication de moules utilisés pour fabriquer les produits non autorisés par la CSA.

  5. La Cour ordonne à la défenderesse de procéder immédiatement, à ses frais, au rappel de tous les produits non autorisés par la CSA, notamment en donnant un préavis à toute personne intéressée qui a directement ou indirectement acquis ou a pris d’une autre manière possession des produits non autorisés par la CSA auprès de la défenderesse, dans lequel elle devra exiger que la personne intéressée :

    1. cesse immédiatement de vendre les produits non autorisés par la CSA;

    2. remette tout produit non autorisé par la CSA invendu;

et elle lui ordonne de fournir à la demanderesse la preuve que ces préavis ont été donnés.

  1. La Cour ordonne à la défenderesse d’afficher immédiatement sur son site Web une mise en garde pour alerter le public du danger d’utiliser les produits non autorisés par la CSA. La demanderesse devra approuver le texte de cette mise en garde.

  2. La défenderesse consentira à ce que la demanderesse affiche immédiatement sur son site Web une mise en garde pour alerter le public du danger d’utiliser les produits non autorisés par la CSA.

  3. La demanderesse pourra disposer, comme elle l’entend, des produits non autorisés par la CSA que la défenderesse lui aura restitués et/ou subsidiairement, la demanderesse pourra enjoindre à la défenderesse de détruire, aux frais de la défenderesse, dans les dix jours de la date du présent jugement, tous les produits non autorisés par la CSA qui sont en sa possession, sous sa garde ou sous son contrôle, quel que soit l’endroit où ils se trouvent, de manière à ce qu’ils ne puissent plus être utilisés aux fins auxquelles ils étaient destinés, et elle donnera à la demanderesse la possibilité d’observer la destruction.

  4. La défenderesse versera à la demanderesse des dommages‑intérêts compensatoires s’élevant à 50 000 $, pour avoir a usurpé ou être réputée avoir usurpé les marques de commerce CSA, pour avoir agi de manière transgressive et pour avoir employé subrepticement les marques de commerce CSA, pour avoir diminué la valeur de l’achalandage attaché aux marques de commerce CSA et pour avoir causé la perte de confiance du public à l’égard de ces marques, en contravention des articles 19 et 20 et du paragraphe 22(1) de la Loi sur les marques de commerce.

  5. La défenderesse versera à la demanderesse des dommages‑intérêts punitifs s’élevant à 25 000 $.

  6. Les dépens, adjugés à la demanderesse, sont fixés à une somme globale de 20 990,26 $ (toutes taxes et tous débours compris).

« Elizabeth Walker »

Juge

Traduction certifiée conforme

Linda Brisebois


ANNEXE A

Marque de commerce

Pays dans lequel a eu lieu l’enregistrement de la marque de commerce et no de l’enregistrement

CSA

Canada – LCD38989, LMC818276

Chine – 5432616, 4076533

MC de l’Union européenne – 003337136

Mexique – 465577

É.‑U. – 0971065

CSA GROUP

Canada – LMC611738

Chine – 4076532

Hong Kong – 303728377

Inde – 3225845

Corée (Sud) – 4103845060000

Mexique – 1792078

Singapour – 40201605672W

Suisse – 690065

Taïwan – 01825054

Turquie – 2016 28739

É.‑U. – 3102524

GROUPE CSA

Canada – LMC628545

CSA CERTIFIE

Canada – LMC 818944

É.‑U. – 4326237, 4211947

Canada – LMC899134

Chine – 10695558, 10695555, 10695556, 10695557

MC de l’Union européenne – 0170760941

Hong Kong – 302205459

Inde – 2395930

Japon – 5619931

Mexique – 1304619, 1308344, 1506311, 1675127, 1398540, 1355318, 1469196, 1525115, 1525116, 1525117, 1525118, 1538434, 1770962

Corée (Sud) – 4010137910000, 4102961550000

Suisse – 650185

Taïwan – 1721433

Turquie – 2012 30274

É.‑U. – 4455766, 4463349, 4515205, 4515206, 4463350

Canada – LMC830597, LCD024619

Chine – 1388997, 1388998, 9116930, 10830438, 10830439, 10830440, 10817385, 10830437, 17681020, 17681021

MC de l’Union européenne – 003337623

Hong Kong – C00382

Japon – 0001270939, 627134, 2145807

Corée ( Sud) – 4008636710000

Mexique – 479926, 455505, 1792506, 1792507, 1911866, 1841844

Taïwan – 27855, 1876430

R.‑U. – UK00001451928, UK00001417314

É.‑U. – 0967896

Canada – LMC535572

Chine – 5069811, 5584928, 5069812, 5069810

MC de l’Union européenne – 003339579, 017893253

É.‑U. ‑ 2498742

Canada LMC535575

Chine – 5069802, 5069801, 5069800

MC de l’Union européenne – 003337185

Mexique – 1899211, 1841843

É.‑U. – 2470248

Taïwan ‑ 1876429

 


ANNEXE B

Interdictions Prohibitions

Interdictions

7 Nul ne peut :

7 No person shall

a) faire une déclaration fausse ou trompeuse tendant à discréditer l’entreprise, les produits ou les services d’un concurrent;

(a) make a false or misleading statement tending to discredit the business, goods or services of a competitor;

b) appeler l’attention du public sur ses produits, ses services ou son entreprise de manière à causer ou à vraisemblablement causer de la confusion au Canada, lorsqu’il a commencé à y appeler ainsi l’attention, entre ses produits, ses services ou son entreprise et ceux d’un autre;

(b) direct public attention to his goods, services or business in such a way as to cause or be likely to cause confusion in Canada, at the time he commenced so to direct attention to them, between his goods, services or business and the goods, services or business of another;

c) faire passer d’autres produits ou services pour ceux qui sont commandés ou demandés;

(c) pass off other goods or services as and for those ordered or requested; or

d) employer, en liaison avec des produits ou services, une désignation qui est fausse sous un rapport essentiel et de nature à tromper le public en ce qui regarde :

(d) make use, in association with goods or services, of any description that is false in a material respect and likely to mislead the public as to

(i) soit leurs caractéristiques, leur qualité, quantité ou composition,

(i) the character, quality, quantity or composition,

(ii) soit leur origine géographique,

(ii) the geographical origin, or

(iii) soit leur mode de fabrication, de production ou d’exécution.

 

(iii) the mode of the manufacture, production or performance

of the goods or services.

Droits conférés par l’enregistrement

Rights conferred by registration

19 Sous réserve des articles 21, 32 et 67, l’enregistrement d’une marque de commerce à l’égard de produits ou services, sauf si son invalidité est démontrée, donne au propriétaire le droit exclusif à l’emploi de celle‑ci, dans tout le Canada, en ce qui concerne ces produits ou services.

19 Subject to sections 21, 32 and 67, the registration of a trademark in respect of any goods or services, unless shown to be invalid, gives to the owner of the trademark the exclusive right to the use throughout Canada of the trademark in respect of those goods or services.


Dépréciation de l’achalandage

Depreciation of goodwill

22 (1) Nul ne peut employer une marque de commerce déposée par une autre personne d’une manière susceptible d’entraîner la diminution de la valeur de l’achalandage attaché à cette marque de commerce

22 (1) No person shall use a trademark registered by another person in a manner that is likely to have the effect of depreciating the value of the goodwill attaching thereto

Pouvoir du tribunal d’accorder une réparation

Power of court to grant relief

53.2 (1) Lorsqu’il est convaincu, sur demande de toute personne intéressée, qu’un acte a été accompli contrairement à la présente loi, le tribunal peut rendre les ordonnances qu’il juge indiquées, notamment pour réparation par voie d’injonction ou par recouvrement de dommages‑intérêts ou de profits, pour l’imposition de dommages punitifs, ou encore pour la disposition par destruction ou autrement des produits, emballages, étiquettes et matériel publicitaire contrevenant à la présente loi et de tout équipement employé pour produire ceux‑ci.

53.2 (1) If a court is satisfied, on application of any interested person, that any act has been done contrary to this Act, the court may make any order that it considers appropriate in the circumstances, including an order providing for relief by way of injunction and the recovery of damages or profits, for punitive damages and for the destruction or other disposition of any offending goods, packaging, labels and advertising material and of any equipment used to produce the goods, packaging, labels or advertising material.

Autres personnes intéressées

Notice to interested persons

(2) Sauf s’il estime que l’intérêt de la justice ne l’exige pas, le tribunal, avant d’ordonner la disposition des biens en cause, exige qu’un préavis soit donné aux personnes qui ont un droit ou intérêt sur ceux‑ci.

(2) Before making an order for destruction or other disposition, the court shall direct that notice be given to any person who has an interest or right in the item to be destroyed or otherwise disposed of, unless the court is of the opinion that the interests of justice do not require that notice be given.

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T‑773‑19

 

INTITULÉ :

CANADIAN STANDARDS ASSOCIATION c PHARMA PLASTIC INDUSTRIES INC.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TENUE PAR VIDÉOCONFÉrence ENTRE Ottawa (Ontario) (LA COUR) et toronto (ontario) (LES PARTIES)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 10 SeptembrE 2020

 

MoTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT :

LA JUGE WALKER

 

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

Le 10 FÉVRIER 2021

 

COMPARUTIONS :

David S. Lipkus

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Personne n’a comparu

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Kestenberg Siegal Lipkus LLP

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

 

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