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Date : 20201210

Dossier : T‑2064‑18

Référence : 2020 CF 1142

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 10 décembre 2020

En présence de madame la juge Kane

ENTRE :

GÁBOR LUKÁCS

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

défendeur

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]  Le défendeur présente, en vertu des articles 369 et 312 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106 [les Règles], la présente requête demandant l’autorisation de déposer et de signifier l’affidavit supplémentaire de monsieur Neil O’Brien [l’affidavit supplémentaire], souscrit le 21 août 2020. Le défendeur demande également l’autorisation d’utiliser l’affidavit supplémentaire dans son dossier pour l’audition et la décision relatives à la demande sous‑jacente de contrôle judiciaire [la demande] et dans le dossier du défendeur pour l’audience et la décision relative aux requêtes préliminaires pendantes. Le défendeur demande également l’autorisation aux deux parties de présenter, au besoin d’autres observations orales ou écrites concernant l’affidavit supplémentaire dans le cadre de la demande. Le défendeur propose également que la Cour rende une ordonnance pour permettre que l’affidavit supplémentaire soit utilisé dans les requêtes préliminaires, qu’un affidavit supplémentaire caviardé soit utilisé dans le cadre de la demande et qu’un affidavit supplémentaire souscrit par monsieur Arthur Nause soit signifié, déposé et utilisé dans le cadre des requêtes préliminaires et de la demande pour tenir compte de la croyance de M. Nause que la communication des renseignements expurgés causerait un préjudice.

[2]  M. Gábor Lukács, le demandeur, s’oppose en partie à la requête du défendeur.

[3]  Pour les motifs qui suivent, la mesure de redressement subsidiaire demandée par le défendeur est accordée.

I.  Contexte

[4]  Les renseignements suivants fournissent le contexte sans tous les détails.

[5]  M. Lukács demande le contrôle judiciaire de la décision de l’Agence des services frontaliers du Canada [l’ASFC] par laquelle celle‑ci a refusé de lui donner accès à tous les documents qu’il avait demandés en vertu de la Loi sur l’accès à l’information, LRC 1985, c A‑1 [la Loi]. M. Lukács souhaite accéder aux dossiers de trois personnes à qui l’on a refusé l’embarquement sur des vols à destination du Canada en provenance de Budapest (Hongrie), en 2015. M. Lukács a obtenu l’autorisation signée des trois personnes pour demander les documents relatifs à cet événement. L’ASFC a fourni certains documents au M. Lukács en septembre 2015 et s’est appuyée sur les exemptions prévues par la Loi, notamment le paragraphe 16(1), pour refuser de fournir d’autres documents et des documents non expurgés.

[6]  M. Lukács a déposé une plainte auprès de la commissaire à l’information du Canada [la commissaire à l’information] au sujet des documents non communiqués. La commissaire à l’information a examiné la plainte et, en octobre 2018, a informé M. Lukács que sa plainte n’était pas fondée.

[7]  M. Lukács a ensuite présenté la demande en vertu de l’article 41 de la Loi.

[8]  Selon l’article 44.1 de la Loi, une demande présentée en vertu de l’article 41 doit être entendue et tranchée comme une nouvelle procédure. Ce processus est appelé un examen de novo. L’examen de la Cour se concentre sur la décision de fournir ou de refuser de communiquer les documents. Bien que la décision de la commissaire à l’information constitue une étape essentielle du processus, laquelle déclenche le droit de demander un contrôle judiciaire, cette dernière n’est pas assujettie au contrôle. Lors du contrôle judiciaire, la Cour détermine si le décideur initial a correctement appliqué les exemptions prévues par la Loi et si le décideur a raisonnablement exercé son pouvoir discrétionnaire de communiquer ou de refuser de communiquer des documents.

[9]  La Loi exige que la Cour « prenne toutes les précautions raisonnables » pour éviter la communication des documents qui ont été retenus, en attendant la décision de la Cour relativement à la demande. Cela peut comprendre la réception des observations ex parte et la tenue d’audiences à huis clos (article 47). La Cour peut également rendre une ordonnance de confidentialité en vertu de l’article 151 des Règles, lorsqu’une requête en ce sens est présentée et que les critères requis sont satisfaits, et ce, afin de s’assurer que les renseignements non communiqués demeurent protégés en attendant la décision de la Cour sur la demande.

[10]  La Cour est également tenue de statuer sur la demande de manière sommaire (article 45). En l’espèce, la demande n’a pas été traitée par voie sommaire en raison de plusieurs requêtes à l’égard desquelles des décisions doivent être rendues. Le défendeur a présenté une requête en vue d’obtenir une ordonnance de confidentialité en février 2019, parce que les parties n’ont pas été en mesure de s’entendre sur les modalités d’une ordonnance sur consentement. M. Lukács continue de s’opposer à la requête. M. Lukács a procédé au contre‑interrogatoire de deux déposants, soit MM. O’Brien et Nause, qui avaient souscrit des affidavits à l’appui de la requête du défendeur.

[11]  M. Lukács a ensuite présenté en juin 2019 une requête visant à obtenir les réponses aux questions auxquelles M. Nause a refusé de répondre lors du contre‑interrogatoire et à contraindre M. Nause à produire une copie non expurgée d’un bulletin opérationnel dont M. Nause avait fait mention lors de son contre‑interrogatoire, mais qui ne faisait pas partie des documents demandés ou refusés par l’ASFC.

[12]  Le défendeur a également présenté, en juin 2019, une requête visant à radier certaines parties de l’avis de demande de M. Lukács, deux affidavits et une partie d’un troisième affidavit déposé à l’appui de l’avis de demande.

[13]  Les parties ont convenu, et la Cour a ordonné, que la requête de M. Lukács visant à exiger des réponses (dans la mesure où les réponses demandées n’ont pas été données par la suite) et que la requête du défendeur visant à radier certaines parties de l’avis de demande et la totalité ou une partie de trois affidavits soit entendue et tranchée lors d’une audience tenue à la même date et avant qu’une décision quant à la requête du défendeur visant à obtenir une ordonnance de confidentialité ait été rendue. Ces requêtes n’ont pas encore été tranchées.

[14]  Après avoir produit, en février 2020, le bulletin opérationnel caviardé, le défendeur a présenté une requête en vue d’obtenir une deuxième ordonnance de confidentialité visant à protéger le bulletin opérationnel sous sa forme non caviardée et à déposer des documents confidentiels pour examen par la Cour dans le cadre de la requête de M. Lukács visant à exiger des réponses de M. Nause.

[15]  En juillet 2020, le défendeur a abandonné la requête en vue d’obtenir une deuxième ordonnance de confidentialité, et ce, à la suite de la décision rendue dans la décision Kiss c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2020 CF 584 [Kiss], et a fourni à M. Lukács une copie non expurgée du bulletin opérationnel.

[16]  Dans la décision Kiss, dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire de la décision du ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration d’annuler l’autorisation de voyage électronique [AVE] des demandeurs, le ministre a sollicité, en vertu de l’article 87 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27, une ordonnance d’interdiction de communication d’extraits des notes de l’agent d’immigration. La Cour a accueilli la requête en partie en concluant que, à une exception près, il était insoutenable pour le ministre de s’opposer à la communication des « indicateurs » invoqués par l’agent pour annuler l’AVE, soulignant que ces renseignements étaient déjà dans le domaine public.

[17]  Le défendeur a expliqué que, à la lumière de la décision Kiss, l’ASFC a par la suite examiné les documents qui avaient été fournis à M. Lukács et a préparé de nouveaux documents à communiquer. L’affidavit supplémentaire de M. O’Brien, qui fait l’objet de la présente requête, décrit les nouveaux documents communiqués, fournit des renseignements concernant le processus d’examen et de communication des documents en général, et sur la communication des documents demandés par le demandeur. L’affidavit supplémentaire renferme également des renseignements concernant la croyance de M. Nause selon laquelle la communication des renseignements, lesquels sont toujours expurgés, porterait, selon M. O’Brien, préjudice à l’application du droit canadien.

[18]  MM. Nause et O’Brien ont également souscrit des affidavits dans deux autres demandes de contrôle judiciaire présentées par M. Lukács (T‑320‑20 et T‑321‑20). Ces demandes sont en suspens en attendant la décision sur la présente demande sous‑jacente. M. Lukács a contre‑interrogé les deux déposants le 28 août 2020, mais a rejeté la proposition du défendeur de contre‑interroger également en même temps M. O’Brien sur son affidavit supplémentaire. M. Lukács soutient que l’affidavit supplémentaire ne peut lui être signifié que sur autorisation de la Cour. M. Lukács s’oppose à ce qu’une telle autorisation soit accordée.

[19]  En plus des quatre requêtes préliminaires qui doivent être tranchées avant que la demande puisse être traitée, M. Lukács a fait part par lettre de son intention d’introduire une nouvelle requête en vue d’obtenir une autorisation de signifier et de déposer deux affidavits supplémentaires. Il propose que cette requête anticipée soit entendue en même temps que sa requête visant à exiger des réponses de M. Nause et la requête en radiation du défendeur.

[20]  Au cours des deux dernières années, la Cour a convoqué plusieurs conférences de gestion de l’instance afin de faire avancer la demande, mais cela n’a rien donné.

[21]  La question qui doit maintenant être résolue est la requête du défendeur visant à obtenir le dépôt de l’affidavit supplémentaire.

II.  Observations du défendeur en tant que partie requérante

[22]  Le défendeur soutient que l’affidavit supplémentaire devrait être admis en vertu de l’article 312 des Règles, puisqu’il satisfait au critère établi dans les arrêts Canada (Procureur général) c Oshkosh Defense Canada Inc, 2018 CAF 102 [Oshkosh], et Forest Ethics Advocacy Association c Office national de l’énergie, 2014 CAF 88. Le défendeur soutient que cette preuve est admissible dans le cadre de la demande et qu’elle est pertinente pour une ou plusieurs questions dont la Cour est saisie (dans la demande et dans les requêtes préliminaires).

[23]  Le défendeur soutient en outre que la Cour devrait exercer son pouvoir discrétionnaire d’autoriser la signification et le dépôt de l’affidavit supplémentaire. Le défendeur soutient que les facteurs pertinents, notamment que les éléments de preuve n’étaient pas accessibles lorsque le défendeur a déposé le premier affidavit souscrit par M. O’Brien, que les éléments de preuve seront utiles à la Cour, et que les éléments de preuve ne causeront pas de préjudice grave au demandeur, favorisent l’exercice par la Cour de son pouvoir discrétionnaire.

[24]  Le défendeur soutient que M. O’Brien est le mieux placé pour décrire le processus qui a donné lieu à la communication de documents expurgés au demandeur et à la communication subséquente de documents additionnels comportant moins de caviardages à la suite de la décision Kiss. Le défendeur soutient que M. O’Brien, en sa qualité de directeur adjoint des opérations d’AIPRP à l’ASFC, et compte tenu de son expérience, est en mesure d’attester des renseignements qui sont en grande partie propres à l’entreprise. En outre, M. O’Brien atteste de sa connaissance personnelle et directe des nouveaux documents communiqués. En ce qui concerne l’attestation de M. O’Brien selon laquelle il croit les renseignements transmis par M. Nause, conseiller principal en matière de programmes à l’ASFC, le défendeur soutient que ces renseignements sont les mêmes que ceux que M. Nause a déjà attestés et à l’égard desquels il a été contre‑interrogé par M. Lukács.

[25]  Le défendeur soutient que l’affidavit supplémentaire fournit des éléments de preuve qui sont directement pertinents quant à la question soumise à la Cour, à savoir si les documents non expurgés ne devraient pas être transmis à M. Lukács conformément aux exemptions prévues par la Loi. Le défendeur fait remarquer que la Cour doit examiner tous les documents, y compris ceux qui ont été fournis plus récemment à M. Lukács. Le défendeur fait remarquer que les renseignements inclus dans l’affidavit supplémentaire, qui traite principalement de ce qui s’est produit après la décision Kiss, n’auraient pas pu être fournis dans l’affidavit original. Le défendeur reconnaît que l’affidavit supplémentaire comprend des renseignements généraux sur la communication initiale de documents à M. Lukács et sur le processus habituellement suivi par l’ASFC, qui auraient été accessibles plus tôt, mais il soutient que ces renseignements sont néanmoins pertinents, notamment aux fins de comparaison de la communication initiale et des nouveaux documents communiqués.

[26]  Le défendeur soutient que l’affidavit supplémentaire aidera la Cour en donnant des précisions sur les documents que M. Lukács a maintenant reçus et pourquoi les documents expurgés restants devraient être retenus conformément aux exemptions prévues par la Loi.

[27]  Enfin, le défendeur soutient que les éléments de preuve présentés dans l’affidavit supplémentaire ne causeront pas de préjudice grave à M. Lukács. Le défendeur fait remarquer que M. Lukács a reçu une copie de l’affidavit supplémentaire en août 2020 et qu’à cette époque, il a refusé de contre‑interroger M. O’Brien, malgré le fait qu’il avait un rendez‑vous pour le contre‑interrogatoire et qu’il a ensuite contre‑interrogé M. O’Brien sur l’affidavit souscrit à l’appui des documents T‑320‑20 et T‑321‑20. Le défendeur convient que M. Lukács peut encore contre‑interroger M. O’Brien sur l’affidavit supplémentaire.

[28]  En ce qui concerne les objections de M. Lukács à l’affidavit supplémentaire, notamment le fait qu’il comporte des déclarations fondées sur la croyance de M. O’Brien, le défendeur soutient que le paragraphe 81(1) des Règles autorise le ouï‑dire en ce qui concerne les requêtes, telles que les requêtes préliminaires pendantes en l’espèce. Bien que le paragraphe 81(1) des Règles découragerait, en ce qui concerne la demande, le recours à des affidavits fondés sur ce que croit le déposant, le défendeur soutient que l’inclusion de cette information, qui concerne les renseignements de M. Nause relayés à M. O’Brien, n’est pas problématique dans les circonstances actuelles. Le défendeur souligne que M. Lukács a déjà contre‑interrogé M. Nause au sujet des documents qui ont été refusés.

[29]  Le défendeur ajoute qu’il ne servirait à rien de permettre à M. Lukács de contre‑interroger à nouveau M. Nause en se fondant sur l’affidavit supplémentaire, car cela reviendrait simplement à poser les mêmes questions que celles posées précédemment et auxquelles il a déjà répondu. De plus, ni M. O’Brien ni M. Nause ne peuvent répondre à des questions qui seraient susceptibles de révéler les renseignements protégés.

[30]  Le défendeur fait remarquer que si la Cour a des doutes quant à l’inclusion des renseignements reçus par M. O’Brien de M. Nause, elle peut en tenir compte pour attribuer le poids approprié aux éléments de preuve.

[31]  En ce qui concerne l’utilisation de l’affidavit supplémentaire dans les requêtes qui doivent encore être tranchées, le défendeur souligne que le paragraphe 81(1) des Règles autorise la réception d’affidavits sur les renseignements et les croyances. Le défendeur soutient en outre que l’affidavit supplémentaire aidera la Cour en fournissant les documents en question sous la forme dans laquelle ils ont été mis à la disposition de M. Lukács, ainsi qu’une chronologie. Le défendeur soutient en outre que le fait d’accorder l’autorisation d’utiliser l’affidavit supplémentaire dans le cadre des requêtes favorisera une décision juste, rapide et économique, sur le bien‑fondé de la demande, conformément à l’article 3 et à l’alinéa 385(1)a) des Règles.

[32]  Le défendeur propose également une solution de rechange si la Cour refuse d’autoriser l’utilisation de l’affidavit supplémentaire dans le cadre des requêtes et de la demande. Le défendeur propose que l’affidavit supplémentaire, présenté avec la présente requête, soit utilisé tel quel pour les requêtes préliminaires. Le défendeur propose qu’un affidavit supplémentaire caviardé (qui expurge les renseignements fondés sur ce que croit le déposant) soit utilisé dans le cadre de la demande. En outre, un affidavit supplémentaire souscrit par M. Nause pourrait être fourni pour être utilisé à la fois dans le cadre des requêtes préliminaires et de la demande pour expliquer la croyance persistante de M. Nause voulant que la communication des documents expurgés porte préjudice à l’application de la loi.

III.  Observations du demandeur en tant que partie intimée

[33]  M. Lukács a déposé un dossier de réponse de plus de 350 pages, comprenant 26 pièces, un affidavit et une liste d’affidavits déposés précédemment et sur lesquels il se fonde également.

[34]  M. Lukács convient que les éléments de preuve présentés à la Cour doivent être mis à jour pour tenir compte de la communication ultérieure de documents supplémentaires, à la suite de la décision Kiss. Toutefois, M. Lukács s’oppose à l’autorisation de signifier et de déposer l’affidavit supplémentaire sous sa forme actuelle. M. Lukács ne consent qu’à certaines parties de l’affidavit supplémentaire; les paragraphes 1 à 3 et 22et la dernière phrase des paragraphes 23 et 26. Il indique qu’il consentira également à la signification, au dépôt et à l’utilisation d’un affidavit supplémentaire souscrit par M. Nause. M. Lukács se réserve également le droit de contre‑interroger les déposants.

[35]  M. Lukács soutient que d’autres parties de l’affidavit supplémentaire devraient être rejetées parce qu’elles sont des ouï‑dire irrecevables, sans rapport avec la décision Kiss, qu’elles déforment les faits et (ou) ne sont pas pertinentes parce que M. O’Brien a fourni des documents supplémentaires expurgés, ce qui indique qu’il a de nouveau exercé son pouvoir discrétionnaire. M. Lukács soutient que l’attestation de M. O’Brien sur le processus suivi par l’ASFC, en ce qui concerne la communication initiale, est fondée sur des spéculations et n’est plus pertinente.

[36]  M. Lukács souligne que l’ASFC a retenu et expurgé les documents qu’il a demandés concernant trois personnes qui étaient en route pour le Canada en 2015 et qui ont fait l’objet d’une interdiction avant l’embarquement à Budapest. Il allègue que cette interdiction était fondée sur les conseils d’un agent de liaison de l’ASFC. Il soutient que, bien que la commissaire à l’information ait conclu que sa plainte concernant la communication des documents par l’ASFC n’était pas fondée, cette décision ne reposait pas sur un dossier incomplet. M. Lukács souligne que l’ASFC a ensuite fourni des documents supplémentaires. Il atteste également qu’il a déposé d’autres plaintes auprès de la commissaire à l’information concernant le fait que l’ASFC n’a pas communiqué les documents supplémentaires plus tôt.

[37]  M. Lukács décrit l’historique des procédures et souligne les requêtes préliminaires pendantes (comme l’ont également souligné le défendeur et la Cour). Parmi ses observations concernant les autres requêtes pendantes, M. Lukács soutient que le défendeur a retardé jusqu’en juillet l’abandon de la requête visant l’obtention d’une deuxième ordonnance de confidentialité, bien que la Cour ait rendu sa décision dans l’affaire Kiss en mai 2020.

[38]  M. Lukács reconnaît que, le 24 août 2020, M. O’Brien lui a fourni des documents supplémentaires qui n’avaient pas été communiqués auparavant, avec des caviardages fondés sur l’alinéa 16(1)c) de la Loi.

[39]  En ce qui concerne les facteurs que la Cour devrait prendre en considération pour déterminer s’il convient d’autoriser, en vertu de l’article 312 des Règle, la signification et le dépôt de l’affidavit supplémentaire, M. Lukács fait valoir que les parties qu’il conteste ne sont ni pertinentes ni recevables.

[40]  M. Lukács soutient que la description, par M. O’Brien, du processus suivi par le décideur qui a communiqué des documents caviardés et retenu d’autres documents en 2015‑2016, n’est pas pertinente, car ce processus a été dépassé par les nouveaux documents communiqués. Il soutient que la demande ne portera que sur la dernière communication de l’ASFC et l’exercice de son pouvoir discrétionnaire.

[41]  En ce qui concerne la recevabilité, M. Lukács soutient que certaines parties de l’affidavit supplémentaire, qui attestent des renseignements et de ce que croit M. O’Brien, enfreignent le paragraphe 81(1) des Règles. Il soutient que ce ouï‑dire n’est ni fiable ni nécessaire. Premièrement, il soutient que le témoignage de M. Nause n’est pas fiable parce que M. Nause a précédemment omis de partager des renseignements avec M. O’Brien et que, par conséquent, M. O’Brien ne peut pas fonder ses déclarations sur des renseignements qu’il estime vrais, si ces derniers ont été relayés par M. Nause. Deuxièmement, M. Lukács soutient que M. O’Brien n’atteste pas de renseignements sur l’entreprise parce que M. Nause n’est pas le subordonné de M. O’Brien et que son expertise est différente.

[42]  En ce qui concerne la question de savoir si la Cour devrait exercer son pouvoir discrétionnaire d’autoriser le défendeur à signifier et à déposer l’affidavit supplémentaire, M. Lukács fait valoir que le défendeur s’engage dans un fractionnement de la preuve en décrivant à présent un processus suivi en ce qui concerne la communication initiale de documents qui auraient pu être fournis dans le premier affidavit. Il fait également valoir qu’il sera lésé par les efforts déployés par le défendeur pour protéger les déclarations litigieuses d’un contre‑interrogatoire.

[43]  M. Lukács allègue qu’il a proposé par lettre un compromis raisonnable à la Cour et au défendeur pour éviter la présente requête et d’autres requêtes, ce que le défendeur a refusé. Il soutient que la requête en instance était inutile et demande le remboursement des dépens.

IV.  La requête visant à obtenir une mesure de redressement subsidiaire demandée par le défendeur est accueillie

[44]  Le contrôle judiciaire des décisions rendues en vertu de l’article 41 de la Loi devrait être relativement simple. Comme il a été mentionné précédemment, même si la décision de la commissaire à l’information déclenche la capacité d’une partie à demander un contrôle judiciaire, la Cour ne révise pas la décision de la commissaire à l’information; elle révise plutôt la décision, en l’espèce, de l’ASFC, de communiquer ou de refuser de communiquer les documents demandés. L’examen de la Cour permettra de déterminer si les documents en question, qui doivent être fournis à la Cour et conservés sous scellés par la Cour, devraient être communiqués ou si des exemptions prévues par la Loi permettent de ne pas les communiquer et si l’ASFC a raisonnablement exercé son pouvoir discrétionnaire de refuser de communiquer les documents.

[45]  Comme il a été mentionné précédemment, la demande sous‑jacente n’a pas été traitée parce que de nombreuses requêtes préliminaires sont pendantes. Les conférences de gestion de l’instance, conçues pour régler des différends, ont également permis de réexaminer des différends qu’on croyait déjà réglés.

[46]  En l’espèce, M. Lukács a reçu des documents supplémentaires comportant moins de caviardages, ce qui le rapproche de son objectif d’obtenir tous les documents qu’il demandait. Compte tenu de la multiplication des requêtes contestées et des conditions demandées par M. Lukács, relativement à son acceptation de certaines requêtes, la Cour se demande si l’objectif est toujours d’obtenir les documents dont la communication a été refusée.

[47]  M. Lukács a présenté, relativement à cette requête, des arguments qui pourraient être plus pertinents quant aux autres requêtes pendantes ou quant à la demande. La seule question à trancher dans la présente requête est de savoir s’il convient d’autoriser le défendeur à signifier et à déposer l’affidavit supplémentaire et d’utiliser l’affidavit supplémentaire dans le cadre des requêtes qui n’ont pas encore été tranchées et dans la demande, ou s’il convient d’accorder la mesure de redressement subsidiaire demandée.

[48]  Je conviens avec le défendeur et M. Lukács que les éléments de preuve doivent être mis à jour pour tenir compte de ce qui s’est produit récemment et qui a entraîné la communication de documents supplémentaires.

[49]  Je conviens également avec le défendeur que l’affidavit supplémentaire répond en grande partie aux critères établis dans l’arrêt Oshkosh.

[50]  L’affidavit supplémentaire, avec les caviardages proposés par le défendeur, est admissible dans le cadre de la demande. Ces éléments de preuve sont clairement pertinents quant à une ou plusieurs des questions dont la Cour est saisie relativement à la demande. Je ne suis pas d’accord avec M. Lukács pour dire que ce qui s’est passé, avant que les nouveaux documents n’aient été communiqués, n’est pas pertinent. L’« affaire » dont la Cour est saisie dans la présente demande découle de la plainte déposée auprès de la commissaire à l’information concernant la communication initiale de documents. Bien que la Cour ne soit pas limitée à l’examen de cette communication initiale, elle demeure l’« affaire » en litige et les éléments de preuve relatifs à cette communication sont pertinents.

[51]  L’affidavit supplémentaire, tel qu’il a été caviardé, aidera la Cour dans la mesure où il décrit le processus qui est habituellement entrepris et le processus plus récent qui a été entrepris pour communiquer des documents supplémentaires, même avec des caviardages fondés sur des exemptions prévues par la Loi.

[52]  Il n’est pas contesté que certains renseignements fournis dans l’affidavit supplémentaire n’étaient pas accessibles avant la communication de documents supplémentaires qui a été faite après la décision Kiss. Bien que d’autres renseignements dans l’affidavit supplémentaire auraient pu être fournis dans le premier affidavit, ils aideront quand même la Cour. Néanmoins, je ne considère pas cela comme un « fractionnement de la preuve ». Je conclus également que ce concept n’est pas applicable dans les présentes circonstances, étant donné que le « litige » est un examen de novo de la décision de l’ASFC décrite ci‑dessus.

[53]  Dans la décision O’Grady c Canada (Procureur général), 2016 CF 9, conf. par 2016 CAF 221 [O’Grady], la Cour a souligné, aux paragraphes 18 à 21, les principes pertinents quant aux affidavits fondés sur des renseignements et des croyances, y compris le fait que la jurisprudence a confirmé que, dans certaines circonstances, un déposant peut s’appuyer sur une preuve par ouï‑dire et une preuve fondée sur une croyance. La Cour a conclu que le déposant, à savoir le directeur général du groupe responsable des données citées, était en mesure de savoir que les faits attestés dans son affidavit étaient véridiques. Au paragraphe 19, la Cour souligne ce qui suit :

19  La Cour suprême du Canada a élaboré une méthode fondée sur des principes pour se pencher sur la recevabilité de la preuve par ouï‑dire, laquelle a été adoptée par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Éthier c Canada, [1993] 2 CF 659, 63 FTR 29 ainsi que par la Cour fédérale dans la décision Twentieth Century Fox Home Entertainment Canada Limited c Canada (Procureur général), 2012 CF 823, 414 FTR 291 [Twentieth Century Fox] en ce qui a trait à l’admissibilité de la preuve par ouï‑dire produite par affidavit. Dans la décision Twentieth Century Fox, le juge Phelan a statué qu’un déposant est en mesure de savoir que les faits sont véridiques lorsque la preuve s’apparente à une preuve « relative à l’entreprise », en ce sens que le déposant exerce des fonctions de supervision et qu’il est responsable de ses subalternes (au paragraphe 22).

[54]  M. O’Brien, en vertu de son poste de directeur adjoint, Opérations de l’AIPRP, est le mieux placé pour décrire le processus habituellement entrepris à l’ASFC. Je ne considère pas que les directives fournies dans la décision O’Grady se limitent aux personnes qui occupent des fonctions à des échelons particuliers dans une organisation, car toutes les organisations sont différentes. Le fait est que lorsque le déposant est en mesure de fournir des renseignements de nature organisationnelle, ces derniers peuvent être acceptés dans des circonstances appropriées. La Cour déterminera au cas par cas en fonction du poste, des responsabilités du déposant et d’autres facteurs pertinents, qui varieront selon les circonstances, si le déposant est en mesure de faire une déposition sur les déclarations en cause sans en avoir personnellement connaissance.

[55]  L’affidavit supplémentaire, s’il est utilisé dans son intégralité dans le cadre de la demande, dépasserait les limites du paragraphe 81(1) des Règles, en ce sens qu’il comprend des déclarations fondées sur des renseignements et des croyances formulés par M. Nause. Je partage, dans une certaine mesure, le point de vue du défendeur selon lequel un autre affidavit et un contre‑interrogatoire de M. Nause sur les mêmes questions qu’il a attestées et sur lesquelles il a été contre‑interrogé précédemment, conjugué au fait que les déposants ne peuvent pas fournir des renseignements susceptibles de communiquer des renseignements qui doivent être protégés en attendant qu’une décision soit prononcée sur la demande, ne serviraient probablement à aucune autre fin. Si l’affidavit supplémentaire était accepté dans son intégralité pour utilisation dans le cadre de la demande, la Cour accorderait le poids approprié aux déclarations en se fondant sur les renseignements et les croyances, car elle attribuerait le poids approprié à l’ensemble des éléments de preuve. Toutefois, il ne serait pas dans l’intérêt de la justice de priver le demandeur de la possibilité de sonder la croyance actuelle de M. Nause, dans les limites convenables du contre‑interrogatoire sur un affidavit. En outre, je prévois que cette approche pourrait entraîner d’autres procédures, ce qui retarderait encore la décision relative aux requêtes préliminaires et, plus important encore, la demande sous‑jacente.

[56]  Toutefois, l’affidavit supplémentaire, dans son intégralité, aux fins des requêtes préliminaires, ne contrevient pas au paragraphe 81(1) des Règles et peut faire partie des dossiers de requête du défendeur et être utilisé dans le cadre des requêtes préliminaires.

[57]  L’allégation de M. Lukács selon laquelle il subira un préjudice du fait de ne pas être en mesure de contester les « déclarations hautement litigieuses » ne reconnaît pas que le défendeur, dans la proposition de rechange, convient qu’il peut y avoir un autre contre‑interrogatoire. La Cour souligne également que M. Lukács a contre‑interrogé MM. O’Brien et Nause à plusieurs reprises, y compris dans le cadre d’autres litiges qui soulèvent des questions semblables. Tout contre‑interrogatoire futur ne pourra pas chercher à approfondir le contenu des documents non communiqués en raison des exemptions prévues par la Loi et dont la communication dépendra de la décision prise par la Cour relativement à la demande.

[58]  La mesure de redressement subsidiaire proposée par le défendeur est accordée.

[59]  L’affidavit supplémentaire, tel qu’il a été soumis avec la présente requête, peut être signifié, déposé et utilisé dans les dossiers du défendeur relatifs aux requêtes en attente d’une décision (la requête du défendeur visant à obtenir une ordonnance de confidentialité, la requête de M. Lukács visant à exiger d’autres réponses de M. Nause, la requête du défendeur visant à obtenir la radiation de parties de l’avis de demande et de trois affidavits déposés à l’appui de celle‑ci).

[60]  L’affidavit supplémentaire sous forme caviardée, qui expurge les déclarations en se fondant sur les renseignements et les croyances de M. O’Brien, peut être signifié et déposé et utilisé dans le dossier du défendeur relatif à la demande.

[61]  Le défendeur peut signifier, déposer et utiliser, dans le dossier des requêtes préliminaires et de la demande, un affidavit supplémentaire souscrit par M. Nause afin d’expliquer sa propre croyance voulant que la communication des documents expurgés porte préjudice à l’application de la loi.

[62]  Je reconnais qu’il peut être fastidieux d’obtenir l’affidavit supplémentaire dans son intégralité pour les dossiers du défendeur relatifs aux requêtes et un affidavit supplémentaire caviardé pour le dossier du défendeur relatif à la demande, ainsi qu’un affidavit supplémentaire souscrit par M. Nause, si le défendeur choisit cette option, pour les deux. Quoi qu’il en soit, la Cour veillera à ce que les éléments de preuve soient examinés uniquement quant à l’instance à laquelle ils se rapportent.

[63]  M. Lukács a également informé la Cour qu’il entend demander l’autorisation de déposer des affidavits supplémentaires. La Cour ne peut pas anticiper le contenu des affidavits ni leur pertinence et ne peut pas accorder d’autorisation à l’avance, mais elle s’efforcera de rendre une décision rapide sur les requêtes anticipées.

V.  Dépens

[64]  M. Lukács soutient que la requête du défendeur était inutile, car il avait proposé un processus simplifié, ce que le défendeur a refusé. Toutefois, la proposition de M. Lukács comprenait des conditions que le défendeur ne pouvait pas accepter à ce moment‑là sans renseignements complémentaires.

[65]  De toute évidence, M. Lukács a consacré du temps et des efforts à répondre à la requête du défendeur. Toutefois, on ne voit pas pourquoi M. Lukács a choisi de déposer un dossier de requête de plus de 350 pages, y compris des affidavits supplémentaires qui n’abordent pas les questions soulevées dans la présente requête et qui ont trait à sa théorie concernant les raisons pour lesquelles la communication des documents qu’il a demandés a été refusée et (ou) a été faite sous forme expurgée. Comme il a été mentionné précédemment, la demande déterminera si la communication des documents demandés doit être refusée en vertu des dispositions pertinentes de la Loi et si l’ASFC a exercé de façon raisonnable son pouvoir discrétionnaire de ne pas communiquer les documents. Les documents déposés par M. Lukács dans le cadre de la présente requête, et dans d’autres requêtes, semblent être conçus pour fournir des renseignements contextuels et des arguments sur la validité des politiques de l’ASFC, dont la pertinence reste à déterminer.

[66]  D’autres documents ont été communiqués à M. Lukács, ce qui le rapproche de son objectif initial. La demande déterminera si d’autres documents doivent être communiqués, auquel cas ce processus devrait être accéléré une fois que les requêtes pendantes auront été tranchées.

[67]  Le défendeur a proposé une solution raisonnable pour permettre l’utilisation de l’affidavit supplémentaire dans le cadre des requêtes préliminaires et pour signifier et déposer un affidavit supplémentaire caviardé aux fins de la demande. Je pense que cela conduira finalement à un autre contre‑interrogatoire sur l’affidavit supplémentaire et sur tout affidavit supplémentaire qui sera souscrit par M. Nause. Compte tenu des circonstances actuelles, ce processus peut prendre plus de temps, mais devrait être accéléré dans la mesure du possible. Tout autre contre‑interrogatoire de MM. O’Brien et Nause doit se limiter au contenu de leurs affidavits et ne pas soulever de questions au sujet des renseignements qui ont été expurgés et que la Cour traitera dans le cadre de la demande.

[68]  Bien que le défendeur ait proposé la mesure de redressement subsidiaire que la Cour a accordée, l’accueil de la requête du défendeur se caractérise plutôt comme étant partagé. Cependant, la question des dépens relève du pouvoir discrétionnaire de la Cour et, dans les présentes circonstances, la Cour refuse d’adjuger des dépens relativement à la présente requête.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

  1. Le défendeur peut déposer et signifier l’affidavit supplémentaire souscrit par M. Neil O’Brien, lequel affidavit peut être utilisé dans le cadre de son dossier relatif aux requêtes préliminaires à trancher.

  2. Le défendeur peut déposer et signifier un affidavit supplémentaire caviardé souscrit par M. Neil O’Brien, lequel affidavit expurge les déclarations fondées sur les renseignements communiqués et les croyances exprimées par M. O’Brien que M. Arthur Nause a présentés, aux fins du dossier du défendeur relatif à la demande.

  3. Le défendeur peut, pour utilisation tant dans le cadre des requêtes préliminaires que dans le cadre de la demande, déposer et signifier un affidavit supplémentaire souscrit par M. Arthur Nause, lequel affidavit porte sur sa croyance persistante voulant qu’un préjudice soit causé à l’application de la loi si certains renseignements sont communiqués.

  4. Le défendeur signifie et dépose les affidavits susmentionnés dans les 30 jours suivant la date où la présente ordonnance est rendue.

  5. Le défendeur et le demandeur peuvent présenter, au besoin, dans le cadre de la demande, des observations orales ou écrites supplémentaires concernant l’affidavit supplémentaire.

  6. Aucuns dépens ne sont adjugés.

« Catherine M. Kane »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T‑2064‑18

 

INTITULÉ :

GÁBOR LUKÁCS c LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

REQUÊTE ÉCRITE EXAMINÉE À OTTAWA (ONTARIO) EN VERTU DES ARTICLES 369 ET 312 DES RÈGLES DES COURS FÉDÉRALES

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE :

La juge KANE

 

DATE DES MOTIFS :

Le 10 décembre 2020

 

OBSERVATIONS ÉCRITES :

Gábor Lukács

 

Pour le demandeur

 

Jan Jensen

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Aucun

 

Pour le demandeur

 

Procureur général du Canada

Halifax (Nouvelle‑Écosse)

 

Pour le défendeur

 

 

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