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Date : 20010820

Dossier : IMM-850-00

Référence neutre : 2001 CFPI 919

ENTRE :

VU SON TRAN

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE ROTHSTEIN, J.C.A.


[1]                 Il s'agit du contrôle judiciaire de la décision d'un agent des visas de rejeter la demande de résidence permanente du demandeur au Canada à titre d'enfant à charge. La demande a été rejetée parce que l'agent des visas a estimé que le demandeur n'était pas âgé de moins de 19 ans lorsque la demande a été faite et n'était pas inscrit à l'école et n'y suivait pas des cours à temps plein depuis qu'il avait atteint l'âge de 19 ans.

[2]                 Quant à l'âge, il s'agit de savoir si le demandeur est né en 1977 ou en 1979. Lorsque la soeur du demandeur est arrivée au Canada, elle a déclaré que l'âge du demandeur était de 14 ans et non pas de 12 ans, ce qui aurait signifié que le demandeur n'avait pas moins de 19 ans lorsqu'il a fait sa demande de résidence permanente. L'agent des visas a cru à l'âge plus élevé parce qu'il a estimé que la soeur devait bien savoir quel était l'âge de son frère et n'avait aucune raison d'inventer sa date de naissance au moment de sa demande.

[3]                 L'agent des visas a rejeté le témoignage de la soeur, à savoir que lorsqu'elle avait fait sa demande, l'âge de son frère n'était pas important, qu'elle avait un certain nombre d'années de plus que son frère et qu'elle s'était trompée. Il a aussi rejeté différents documents, notamment le registre familial, les bulletins scolaires et les registres universitaires parce qu'à son avis, bon nombre de documents vietnamiens, comme les registres familiaux et les certificats scolaires sont frauduleux, inexacts et, en général, peu fiables. Il a aussi signalé que si le demandeur avait terminé l'école secondaire à un âge normal, il aurait terminé en 1996 à l'âge de 17 ans, et non pas à 15 ans comme cela aurait été le cas s'il était né en 1981.

[4]                 Aucune entrevue n'a été menée en l'espèce. L'analyse de crédibilité de l'agent des visas était fondée sur la preuve documentaire qui lui était présentée. Il va sans dire qu'en général, le tribunal ne s'ingère pas dans les évaluations de crédibilité des autres tribunaux. Toutefois, en l'espèce, je ne suis pas convaincu de la fiabilité de l'évaluation de l'agent des visas sur l'âge du demandeur et sa fréquentation de l'université à plein temps.

[5]                 Le défendeur concède que l'agent des visas a eu tort de croire que le demandeur se disait né en 1981, ce qui lui aurait donné l'âge de 15 ans au moment où il a reçu son diplôme secondaire. En fait, le demandeur soutenait être né en 1979 et qu'il aurait eu 17 ans en 1996, soit l'âge normal pour terminer ses études secondaires, comme l'a signalé l'agent des visas.

[6]                 Quant à l'authenticité de la preuve documentaire présentée, il n'est pas déraisonnable qu'un agent des visas s'appuie sur l'expérience d'un haut niveau de fraude à un bureau des visas pour soulever des soupçons sur l'authenticité des documents. En général, cela semble indiquer qu'il convient d'examiner les documents avec beaucoup plus de soin que cela ne serait autrement le cas. Voir, par exemple, Mina c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) , [2000] A.C.F. n ° 1735, le juge Dawson. Dans l'affaire Mina, l'agent des visas a rejeté l'authenticité des documents parce que les documents soumis n'étaient pas des originaux et qu'ils avaient été délivrés plusieurs années plus tard.


[7]                 Je ne suis pas d'avis que l'agent des visas puisse tout simplement rejeter l'authenticité de documents particuliers à cause du niveau élevé de fraude constaté au bureau des visas. Il faut qu'au moins un certain examen soit fait des documents effectivement soumis.

[8]                 Rien n'indique que cela se soit produit en l'espèce. L'agent des visas n'a donné aucune indication comme quoi il aurait examiné les documents soumis pour déterminer leur authenticité. L'examen du dossier ne montre pas si les documents vietnamiens soumis étaient des originaux ou des copies, et il n'est pas non plus facile de voir à quel moment les documents ont été délivrés.

[9]                 Pour ces motifs, je ne suis pas convaincu que l'évaluation de l'âge faite par l'agent des visas en l'espèce ait été fiable.

[10]            Quant à la fréquentation à plein temps de l'école, l'agent des visas a conclu que le demandeur n'avait pas prouvé avoir fréquenté l'école à plein temps après avoir obtenu son diplôme secondaire en 1996, mais seulement avoir suivi un cours à l'université, ce qui ne constituait pas, selon l'agent des visas, une fréquentation à plein temps.


[11]            Sur sa demande, le demandeur a indiqué qu'il avait fréquenté l'université Can Tho du 19 septembre 1997 au 19 mai 1998 et du 19 septembre 1998 jusqu'à présent (le 4 novembre 1998). La période scolaire 1997-1998 était indiquée comme étant la « première année » , et la deuxième période était indiquée comme étant la « deuxième année » . Il indiquait comme occupation « étudiant » . Dans sa demande de confirmation, le demandeur a dit être un étudiant dans un « cours de gestion des affaires et d'économie 23-Université Can Tho » . Dans une demande de certification, la mention dit « période scolaire 23 » .

[12]            D'après cette preuve documentaire, l'agent des visas a conclu que le demandeur n'était pas un étudiant à plein temps. Il n'appartient pas à la Cour d'établir qu'il l'a été ou non. Toutefois, à mon humble avis, les documents présentés à l'agent des visas n'appuient pas les conclusions qu'il en a tirées. Les conclusions doivent être fondées sur des faits avérés. Le renvoi au « cours 23 » dans un document traduit du vietnamien vers l'anglais ne suffit tout simplement pas pour conclure que la personne ne fréquentait pas l'université à plein temps à la lumière de toutes les autres preuves documentaires et, en particulier, du renvoi qui est fait dans un autre document à la « période scolaire 23 » .

[13]            Pour ces motifs, le contrôle judiciaire sera accueilli et l'affaire renvoyée à un agent des visas différent pour un réexamen fondé sur une évaluation plus complète des documents qui sont versés au dossier et des autres documents que pourra soumettre le demandeur et si un agent des visas la juge nécessaire ou souhaitable, une entrevue avec le demandeur.

[14]            L'avocat du demandeur a attiré l'attention sur l'alinéa 11(5)b) du Règlement sur l'immigration qui prévoit qu'un visa ne saurait être délivré à la personne à charge qui accompagne un immigrant que si elle répond aux critères concernant le statut d'étudiant au moment où le visa est délivré. Il déclare que le demandeur peut ne plus fréquenter l'université à plein temps. Si cette demande avait été accordée à l'origine, il déclare que le demandeur aurait été étudiant à plein temps au moment de la délivrance du visa. D'après lui, s'il est jugé que le demandeur n'avait pas 19 ans quand il a fait sa demande mais qu'il était encore un étudiant à plein temps à cette époque-là, alors ce dernier ne devrait pas être privé d'un visa en vertu de l'alinéa 11(5)b). Je comprends certes les inquiétudes de l'avocat, mai s comme la question de savoir si le demandeur répond aux critères énoncés dans la définition de fils à charge et, si tel est le cas, sur quels fondements, reste encore à déterminer, il serait prématuré pour la Cour de traiter de la pertinence de l'alinéa 11(5)b) ou de la question que le demandeur soulève à cet égard.

« Marshall Rothstein »

                                                                                                                                                    Juge                          

Toronto (Ontario)

Le 20 août 2001

Traduction certifiée conforme

Richard Jacques, LL.L.


                                                                           

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

Avocats inscrits au dossier

No DE DOSSIER :                                               IMM-850-00

INTITULÉ DE LA CAUSE :                            VU SON TRAN

demandeur

et

                                                                            

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

DATE DE L'AUDIENCE :                                LE JEUDI 16 AOÛT 2001

LIEU DE L'AUDIENCE :                                   TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR :          LE JUGE ROTHSTEIN, J.C.A.

DATE DES MOTIFS :                           LE LUNDI 20 AOÛT 2001

ONT COMPARU :                                            Cecil L. Rotenberg, c.r.

pour le demandeur

Matthew Oommen

                                                                             pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Cecil L. Rotenberg, c.r.

Avocats

255, Duncan Mill Road, bureau 808

Toronto (Ontario)

M3B 3H9

pour le demandeur

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

pour le défendeur


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

Date : 20010820

Dossier : IMM-850-00

ENTRE :

VU SON TRAN

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                         défendeur

                                                                            

                                                                           

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                                                                          


Date : 20010820

Dossier : IMM-850-00

Toronto (Ontario), le lundi 20 août 2001

EN PRÉSENCE DE Monsieur le juge Rothstein

                                                                                                                                                          

ENTRE :

VU SON TRAN

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

ORDONNANCE

Le contrôle judiciaire est accueilli et l'affaire est renvoyée à un agent des visas différent pour réexamen.

« Marshall Rothstein »

                                                                                                                                                    Juge                                

Traduction certifiée conforme

Richard Jacques, LL.L.

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