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Date : 20050504

Dossier : T-1447-04

Référence : 2005 CF 620

Ottawa (Ontario), le mercredi 4 mai 2005

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE DAWSON

ENTRE :

WILLIAM DAVID GERARD JONES

demandeur

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

                          MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LA JUGE DAWSON

[1]                William Jones est un premier maître de 1re classe à la retraite qui a servi comme ingénieur naval au sein des Forces armées canadiennes (élément mer) pendant une trentaine d'années. Il a été libéré des Forces armées le 5 avril 1998 pour des raisons d'ordre médical (dépression).


[2]                Le 24 août 1998, M. Jones a présenté une demande de pension d'invalidité en rapport avec diverses affections, dont une dépression majeure. La demande a été refusée par le ministère des Anciens combattants le 4 février 1999. M. Jones a été débouté de l'appel qu'il a interjeté de cette décision et, le 14 avril 1999, un comité de révision a confirmé la décision antérieure sur la question de la dépression au motif qu'il n'y avait pas suffisamment d'avis d'experts médicaux objectifs établissant un lien entre l'état de M. Jones et les facteurs de stress associés à son service au sein des Forces régulières. M. Jones a interjeté appel de cette décision devant le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) (le Tribunal).

[3]                Pour ce qui est des prestations réclamées par M. Jones pour sa dépression majeure, le Tribunal a, aux termes de sa décision du 12 mai 2004, accordé à M. Jones [TRADUCTION] « les deux cinquièmes du montant total pour la partie de son invalidité causée par une blessure ou maladie - ou son aggravation - consécutive ou rattachée directement à son service en temps de paix au sein des Forces régulières » . Le paiement de cette pension a, conformément au paragraphe 39(1) de la Loi sur les pensions, L.R.C. 1985, ch. P-6, pris effet le 12 mai 2001, c'est-à-dire à partir de la date précédant de trois ans la date à laquelle la pension était accordée.

[4]                M. Jones a saisi la Cour d'une demande de contrôle judiciaire de cette décision.


DÉCISION DU TRIBUNAL

[5]                Les motifs de la décision du Tribunal sont brefs. Les voici :

[TRADUCTION] Pour en arriver à sa décision, le Tribunal a examiné attentivement l'ensemble de la preuve, des dossiers médicaux et des observations présentées par le représentant et il s'est pleinement acquitté de l'obligation que la loi lui fait de trancher en faveur du demandeur ou de l'appelant toute incertitude quant à la preuve qu'il apprécie, le tout conformément aux articles 3 et 39 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel).

Tout en reconnaissant que le docteur Fraser, qui est psychiatre, opine maintenant que l'affection dont l'appelant affirme être atteint pourrait être entièrement liée à son service militaire, le Tribunal constate que le docteur Fraser semble méconnaître le fait que l'appelant avait par ailleurs des problèmes conjugaux avant le traitement de sa dépression au milieu des années quatre-vingt-dix, à une époque où il semble que l'appelant n'ait pas demandé davantage d'affectations sur terre. Le Tribunal estime donc que sa maladie n'est pas liée exclusivement à son service militaire, et signale, après consultation du Merck Manual, 17e édition, que, dans bien des cas, l'affection est d'origine inconnue, bien qu'elle puisse être exacerbée par une situation de stress persistante. Le Tribunal estime également, au vu des autres pièces versées au dossier, qu'il ne s'agit pas d'une situation de cause à effet mais d'un cas où il y a lieu d'accorder une indemnité pour aggravation.

Conscient de l'obligation que l'article 39 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) lui fait de trancher toute incertitude en faveur du demandeur ou de l'appelant, le Tribunal est d'avis qu'il y a lieu d'accorder une pension d'aggravation correspondant aux deux cinquièmes du montant maximal pour la partie de son incapacité imputable à son service militaire en temps de paix. Plus précisément, il semble que l'appelant ait éprouvé des difficultés dans sa vie personnelle qui ne sont pas liées à son service militaire et qui auraient existé avant le problème qui s'est produit au milieu des années quatre-vingt-dix. Le Tribunal croit aussi comprendre que les causes de la dépression majeure sont normalement inconnues, bien qu'il puisse exister des prédispositions héréditaires chez certains individus.

Finalement, le Tribunal estime que les facteurs qui ne sont pas liés au service auraient joué un rôle primordial en ce qui concerne l'affection dont l'appelant est atteint et ce, même si les longues périodes de service en mer de l'appelant au début de sa carrière ont contribué jusqu'à un certain point à son état.

Dans ces conditions, il convient d'accorder une pension correspondant aux deux cinquièmes du degré total d'invalidité, cette pension prenant effet trois ans avant la date de l'audience, c'est-à-dire le 12 mai 2001, conformément à l'article 39 de la Loi sur les pensions.


DISPOSITIONS LÉGISLATIVES APPLICABLES

[6]                Les dispositions de la Loi sur les pensions (paragraphes 21(2) et 21(2.1) et articles 2 et 39) et de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), L.C. 1995, ch. 18 (la Loi) (articles 3 et 39), s'appliquent à la présente demande. Elles sont reproduites à l'annexe de la présente décision.

NORME DE CONTRÔLE

[7]                Dans la présente demande, le débat porte notamment sur la conclusion du Tribunal suivant laquelle la preuve médicale n'établit pas que la dépression de M. Jones découle de son service militaire ou est directement liée à celui-ci. Suivant la jurisprudence de notre Cour, lorsque la question en litige porte sur l'appréciation que le Tribunal a faite d'éléments de preuve médicaux contradictoires ou peu concluants et sur la question de savoir si l'incapacité du prestataire a en fait été causée ou aggravée par son service militaire, la décision du Tribunal peut être révisée en fonction de la norme de la décision manifestement déraisonnable (voir les décisions Hall c. Canada (Procureur général), (1998), 152 F.T.R. 58 (C.F. 1re inst.), au paragraphe 18, conf. par (1999), 250 N.R. 93 (C.A.F.); McTague c. Canada (Procureur général), [2000] 1 F.C. 647 (C.F. 1re inst.), aux paragraphes 46 à 48; Cundell c. Canada (Procureur général) (2000), 180 F.T.R. 193 (C.F. 1re inst.), au paragraphe 32, et Comeau c. Canada (Procureur général), [2004] A.C.F. no 1323 (C.F.), au paragraphe 51; Matusiak c. Canada (Procureur général), [2005] A.C.F. no 236 (C.F.), aux paragraphes 32 à 35).


[8]                Ainsi que le juge Evans, maintenant juge à la Cour d'appel, écrivait dans le jugement McTague :

46             Enfin, je devrais noter que la Cour a bien établi que la norme de la décision manifestement déraisonnable, qui est moins exigeante, est applicable lorsque la question litigieuse concerne l'évaluation ou l'interprétation par le Tribunal d'éléments de preuve médicaux souvent contradictoires ou peu concluants et la conclusion qu'il en a tiré quant à savoir si l'invalidité du demandeur a été en fait causée ou aggravée par le service militaire : MacDonald c. Canada (Procureur général), [1999] A.C.F. no 346 (1re inst.) (QL); Weare c. Canada (Procureur général) (1998), 153 F.T.R. 75 (C.F. 1re inst.); Hall c. Canada (Procureur général) (1998), 152 F.T.R. 58 (C.F. 1re inst.); Henderson c. Canada (Procureur général) (1998), 144 F.T.R. 71 (C.F. 1re inst.).

47             De telles décisions touchant les faits se situent au coeur même de la compétence spécialisée du Tribunal. Compte tenu de considérations de rentabilité et de compétence institutionnelle relative, les conclusions de fait doivent faire l'objet de la plus grande retenue judiciaire.

[9]         J'estime qu'il s'agit de la norme de contrôle qui s'applique à la décision dont la Cour est saisie en l'espèce. La décision du Tribunal portait sur la valeur du rapport médical du docteur Fraser et sur l'interprétation que le Tribunal en a donnée.

QUESTION PRÉLIMINAIRE DE PREUVE

[10]       Aux termes d'une ordonnance datée du 8 décembre 2004, le protonotaire Hargrave a autorisé M. Jones à déposer un affidavit soumettant à la Cour un rapport médical signé par le docteur Hoffer le 20 avril 2000. Le protonotaire Hargrave a signalé dans les motifs de son ordonnance qu'il était convaincu que le Tribunal avait en mains ce rapport au moment où il a rendu sa décision, mais que ce rapport n'a pas été versé au dossier du Tribunal.


[11]       Cette ordonnance n'a pas été portée en appel. Le Procureur général a plutôt déposé par la suite l'affidavit de la personne chargée de soumettre le dossier du Tribunal à la Cour. Cette personne a déclaré sous serment que le Tribunal n'avait pas en mains le rapport du 20 avril 2000 du docteur Hoffer au moment où il avait rendu sa décision. L'avocat du Procureur général soutient maintenant qu'il n'y a lieu d'accorder aucun poids au rapport du 20 avril 2000 parce qu'il ne faisait pas partie des éléments de preuve dont disposait le Tribunal lorsqu'il a rendu sa décision maintenant contestée.

[12]       Lors des plaidoiries, j'ai demandé à l'avocat du Procureur général si cet argument ne constituait pas une contestation indirecte inacceptable de l'ordonnance du protonotaire. L'avocat a fait valoir que ce n'était pas le cas, parce que l'ordonnance du protonotaire était fondée sur l'article 312 actuel des Règles de la Cour fédérale et qu'elle n'avait pas été prononcée en vue de préciser le contenu du dossier du Tribunal au sens de l'article 318 des Règles. L'appel qui aurait pu être interjeté de l'ordonnance du protonotaire aurait porté sur les motifs de cette ordonnance et non sur l'ordonnance elle-même.


[13]       Je ne suis pas convaincue qu'il ne s'agit pas d'une contestation indirecte de l'ordonnance du protonotaire. Toutefois, comme je suis persuadée qu'il y a lieu d'accueillir la demande de contrôle judiciaire de M. Jones et ce, même en faisant abstraction du rapport du 20 avril 2000, il n'est pas nécessaire que je tranche cette question. Par mesure de prudence, je ne vais pas tenir compte du rapport du 20 avril 2000.

ANALYSE

[14]       Il est acquis aux débats que la preuve soumise au Tribunal comprenait notamment le rapport du 24 février 2003 soumis par le docteur Fraser, psychiatre, qui est le directeur médical de l'Ottawa Anxiety & Trauma Clinic. Dans son rapport, le docteur Fraser conclut :

[TRADUCTION] Mon avis, en tant qu'ancien psychiatre militaire, est que M. Jones a été soumis à des affectations en mer excessives et qu'on a fait fi recommandations de périodes de congé à terre de 20 mois (qui ne lui ont jamais été accordées, pas même une fois au cours des 23½ ans qu'il a passés en mer). Cette situation a conduit à un stress de plus en plus aigu et à la détérioration irréversible de son mariage. Le stress est incontestablement à l'origine de sa dépression majeure. Il n'a aucun antécédent familial permettant de conclure à une dépression d'origine héréditaire. Il semble que ceux qui étaient responsables de sa carrière n'ont pris la pleine mesure du stress accumulé qu'une fois qu'il était trop tard, c'est-à-dire lorsque la dépression majeure s'était installée. Le mariage de M. Jones a pris fin. La recommandation d'effectifs non disponibles pour raisons de santé formulée par le psychiatre de la base n'a pas été suivie. Alors qu'il était contraint de travailler ailleurs malgré le fait qu'il souffrait toujours de dépression et qu'il prenait encore des médicaments, M. Jones a commencé à avoir des difficultés avec un officier supérieur et il a été subrepticement libéré pour des raisons d'ordre médical dans des circonstances pour le moins étranges qui donnent fortement à penser à une intervention de la part de cadres supérieurs qui n'étaient pas médecins et qui ont fait fi de son droit de continuer à être soigné et de travailler dans son métier.

Je crois fermement que le Ministère n'a pas été mis au courant des faits véritables de cette affaire. J'estime qu'il ne fait guère de doute que le trouble psychiatre dont est atteint M. Jones est directement et pleinement lié aux pressions qu'il a subies dans le cadre de son service militaire.

Je lui recommande donc, après examen approfondi du dossier, de soumettre de nouveau son cas au Ministère, qui dispose maintenant de tous les éléments nécessaires pour se prononcer sur l'admissibilité de M. Jones à une pension sur le fondement d'une dépression majeure causée entièrement par son service régulier et par les fonctions qu'il a exercées au sein des FC et par le fait que les directives claires des CF n'ont pas été appliquées dans son cas. [Non souligné dans l'original.]


[15]       L'article 39 de la Loi oblige le Tribunal à accepter tout élément de preuve non contredit qui lui a été présenté et qui lui semble vraisemblable en l'occurrence. L'avis du docteur Fraser n'a pas été contredit. Ainsi, pour pouvoir écarter l'avis du docteur Fraser, le Tribunal doit invoquer des motifs solides pour expliquer pourquoi il juge non crédible un avis médical non contredit.

[16]       L'avocat du Procureur général cite deux passages de ses motifs dans lesquels le Tribunal a motivé son rejet de l'avis du docteur Fraser. Le premier passage est celui dans lequel le Tribunal explique que le docteur Fraser [TRADUCTION] « semble méconnaître le fait que l'appelant avait par ailleurs des problèmes conjugaux avant le traitement de sa dépression au milieu des années quatre-vingt-dix. » La seconde raison invoquée pour écarter l'avis du docteur Fraser était l'affirmation du Tribunal suivant laquelle [TRADUCTION] « au vu des autres pièces versées au dossier [...] il ne s'agit pas d'une situation de cause à effet mais d'un cas où il y a lieu d'accorder une indemnité pour aggravation » .

[17]       Si on lit le rapport du docteur Fraser dans son ensemble, on constate que, contrairement à ce qu'affirme le Tribunal, le docteur Fraser n'a pas méconnu [TRADUCTION] « le fait que l'appelant avait par ailleurs des problèmes conjugaux avant le traitement de sa dépression au milieu des années quatre-vingt-dix » . Dans son rapport, le docteur Fraser signale :


i)           [TRADUCTION] « Pour bien comprendre l'évolution du trouble psychologique de M. Jones, il est impératif que le Ministère consulte, comme je l'ai fait, le CPCNS MP, partie III, service en mer des militaires du rang AL/89, qui précise ce qui suit : [TRADUCTION] « Les membres du GPO du génie maritime (à partir du rang de sergent) seront les seuls GPO en mer à bénéficier d'une période garantie à terre en raison de l'incidence élevée de service en mer chez les gens de ce métier. Une affectation à terre doit être d'une durée minimale de 20 mois (ou de 24 mois dans le cas d'une affectation à l'ÉNFC). » Si l'on consulte la liste des affectations en mer du premier maître de 1re classe Jones entre le 29 mars 1975 et le 7 mars 1995, on constate qu'il n'a obtenu qu'une seule affectation à terre de 12 mois (du 2 juillet 1984 au 5 juillet 1985) en 20 ans. Cette situation est contraire à l'esprit de cette politique (essentiellement un rapport mer/terre de 50/50) et elle doit être considérée comme un des facteurs ayant contribué à l'échec de son mariage et au stress émotionnel subséquent (documenté en 1986) et à la dépression dont il a par la suite souffert. Même lorsque les navires sont en rade, l'effectif est maintenu jour et nuit. Le personnel à quai n'est pas considéré comme étant alors en affectation à terre. » [Soulignements omis.]


ii)          « Sa dépression a été découverte en 1986; elle n'a pas commencé en 1994, contrairement à ce que le Ministère a été amené à croire. »

iii)          « Il semble que l'aggravation de son stress, son éventuelle dépression et la détérioration irréversible de son mariage soient directement liées au fait qu'il n'a pu bénéficier de la période garantie à terre prévue par les directives des FC. »

iv)         « Il est évident qu'à partir de ce moment-là, une série d'événements ont provoqué une dépression majeure et la détérioration irréversible de son mariage, à savoir son service en mer prolongé, le mépris du temps à terre garanti par la politique militaire et l'accumulation de stress. Il semble aussi qu'avant 1994, M. Jones n'ait pas reçu de soins médicaux suffisants et que les dossiers médicaux soient incomplets. »


v)          « Pour revenir à la décision que le Ministère a rendue dans son évaluation du 4 février 1999, il est évident qu'on a méconnu l'ampleur des difficultés émotionnelles dont M. Jones souffrait depuis longtemps et qui se sont soldées par sa libération. Le Ministère a relevé que l'état de M. Jones [TRADUCTION] « s'est détérioré rapidement à compter de janvier 1994, à la suite de problèmes familiaux » . C'est inexact. Les problèmes familiaux en question remontaient à plusieurs années et ils étaient liés au stress à l'origine de sa dépression. »

[18]       Le Tribunal n'aime peut-être pas l'avis du docteur Fraser et ne le partage peut-être pas. Mais l'article 39 de la Loi exige du Tribunal qu'il invoque des motifs plus solides pour justifier son rejet d'un avis médical non contredit. À la lumière des extraits précités du rapport du docteur Fraser, ce rapport ne peut être écarté au motif que le docteur Fraser n'a pas tenu compte du fait que M. Jones avait des problèmes conjugaux avant le traitement de sa dépression au milieu des années quatre-vingt-dix.

[19]       Quant à la mention par le Tribunal du fait qu' « au vu des autres pièces versées au dossier » , il ne s'agit pas d'une situation de cause à effet, il est reconnu qu'il n'y avait aucune preuve médicale qui contredisait l'avis du docteur Fraser. Le docteur Fraser affirmait catégoriquement que les troubles psychiatriques de M. Jones étaient entièrement et directement liés à son service militaire. La vague mention par le Tribunal d'autres documents non identifiés ne permet pas d'écarter l'avis du docteur Fraser.


[20]       Par conséquent, en n'examinant pas de façon régulière et suffisante les raisons pour lesquelles le Tribunal avait écarté l'avis du docteur Fraser, le Tribunal a manqué aux obligations que l'article 39 de la Loi mettait à sa charge et il a rendu une décision manifestement déraisonnable. Cette décision sera donc annulée et l'appel de M. Jones sera porté devant une autre formation du Tribunal pour qu'une nouvelle décision conforme aux présents motifs soit rendue.

[21]       Avant cette audience, M. Jones ou son avocat-conseil des pensions devrait s'assurer que le Tribunal dispose de tous les éléments de preuve médicaux pertinents, ce qui devrait vraisemblablement comprendre le rapport du 12 avril 2000 du docteur Hoffer ainsi que les autres rapports médicaux qui n'ont pas été admis en preuve dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire. Lors de cette autre audience, il y aurait lieu d'examiner l'opportunité de demander au Tribunal d'exercer le pouvoir discrétionnaire que lui confère le paragraphe 39(2) de la Loi sur les pensions relativement à la date du droit à pension.

DÉPENS

[22]       Rien ne justifie de ne pas ordonner que les dépens suivent le sort du principal.


[23]       M. Jones se représentait lui-même. Il n'a donc pas droit aux honoraires d'un avocat. Il a produit une liste de ses débours, qui s'élèvent à 1 533,13 $ et dont deux postes sont, à mon avis, contestables. Le premier est la somme de 194,63 $ réclamée pour du ruban et de la poudre imprimante (alors qu'il réclame aussi une somme pour les frais de frappe et de copie). Le second est la somme de 300 $ payée pour un rapport médical que M. Jones n'a pas été autorisé à déposer en preuve dans le cadre de la présente instance. Ces deux montants sont donc retranchés des débours.

ORDONNANCE

[24]       LA COUR ORDONNE :

1.          La demande de contrôle judiciaire est accueillie et la décision du Tribunal en date du 12 mai 2004 est annulée. L'affaire est renvoyée devant une autre formation du Tribunal pour qu'une nouvelle décision conforme aux présents motifs soit rendue.

2.          Le Procureur général est condamné à payer les dépens de M. Jones, qui sont fixés à la somme de 1 038,50 $.

« Eleanor R. Dawson »

______________________________

Juge

Traduction certifiée conforme

Thanh-Tram Dang, B.C.L., LL.B


ANNEXE

Loi sur les pensions : article 2, paragraphes 21(2) et 21(2.1), article 39, et Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), articles 3 et 39 :



2. Les dispositions de la présente loi s'interprètent d'une façon libérale afin de donner effet à l'obligation reconnue du peuple canadien et du gouvernement du Canada d'indemniser les membres des forces qui sont devenus invalides ou sont décédés par suite de leur service militaire, ainsi que les personnes à leur charge.

[...]

21(2) En ce qui concerne le service militaire accompli dans la milice active non permanente ou dans l'armée de réserve pendant la Seconde Guerre mondiale ou le service militaire en temps de paix :

a) des pensions sont, sur demande, accordées aux membres des forces ou à leur égard, conformément aux taux prévus à l'annexe I pour les pensions de base ou supplémentaires, en cas d'invalidité causée par une blessure ou maladie - ou son aggravation - consécutive ou rattachée directement au service militaire;

b) des pensions sont accordées à l'égard des membres des forces, conformément aux taux prévus à l'annexe II, en cas de décès causé par une blessure ou maladie - ou son aggravation - consécutive ou rattachée directement au service militaire;

c) sauf si une compensation est payable aux termes du paragraphe 34(8), la pension supplémentaire que reçoit un membre des forces en application de l'alinéa a), du paragraphe (5) ou de l'article 36 continue d'être versée pendant l'année qui suit la fin du mois du décès de l'époux ou du conjoint de fait avec qui il cohabitait alors ou, le cas échéant, jusqu'au versement de la pension supplémentaire accordée pendant cette année à l'égard d'un autre époux ou conjoint de fait;d) d'une part, une pension égale à la somme visée au sous-alinéa (ii) est payée au survivant qui vivait avec le membre des forces au moment du décès au lieu de la pension visée à l'alinéa b) pendant une période d'un an à compter de la date depuis laquelle une pension est payable aux termes de l'article 56 - sauf que pour l'application du présent alinéa, la mention « _si elle est postérieure, la date du lendemain du décès_ » à l'alinéa 56(1)a) doit s'interpréter comme signifiant « _s'il est postérieur, le premier jour du mois suivant celui au cours duquel est survenu le décès_ » - d'autre part, après cette année, la pension payée au survivant l'est conformément aux taux prévus à l'annexe II, lorsque, à l'égard de celui-ci, le premier des montants suivants est inférieur au second_ :

(i) la pension payable en application de l'alinéa b),

(ii) la somme de la pension de base et de la pension supplémentaire pour un époux ou conjoint de fait qui, à son décès, est payable au membre en application de l'alinéa a), du paragraphe (5) ou de l'article 36.        

21(2.1) En cas d'invalidité résultant de l'aggravation d'une blessure ou maladie, seule la fraction - calculée en cinquièmes - du degré total d'invalidité qui représente l'aggravation peut donner droit à une pension.

[...]

39(1) Le paiement d'une pension accordée pour invalidité prend effet à partir de celle des dates suivantes qui est postérieure à l'autre :

a) la date à laquelle une demande à cette fin a été présentée en premier lieu;

b) une date précédant de trois ans la date à laquelle la pension a été accordée au pensionné.

39(2) Malgré le paragraphe (1), lorsqu'il est d'avis que, en raison soit de retards dans l'obtention des dossiers militaires ou autres, soit d'autres difficultés administratives indépendantes de la volonté du demandeur, la pension devrait être accordée à partir d'une date antérieure, le ministre ou le Tribunal, dans le cadre d'une demande de révision ou d'un appel prévus par la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), peut accorder au pensionné une compensation supplémentaire dont le montant ne dépasse pas celui de deux années de pension.

[...]

Tribunal des anciens combattants (révision et appel)

3. Les dispositions de la présente loi et de toute autre loi fédérale, ainsi que de leurs règlements, qui établissent la compétence du Tribunal ou lui confèrent des pouvoirs et fonctions doivent s'interpréter de façon large, compte tenu des obligations que le peuple et le gouvernement du Canada reconnaissent avoir à l'égard de ceux qui ont si bien servi leur pays et des personnes à leur charge.

[...]

39. Le Tribunal applique, à l'égard du demandeur ou de l'appelant, les règles suivantes en matière de preuve :

a) il tire des circonstances et des éléments de preuve qui lui sont présentés les conclusions les plus favorables possible à celui-ci;

b) il accepte tout élément de preuve non contredit que lui présente celui-ci et qui lui semble vraisemblable en l'occurrence;

c) il tranche en sa faveur toute incertitude quant au bien-fondé de la demande.

2. The provisions of this Act shall be liberally construed and interpreted to the end that the recognized obligation of the people and Government of Canada to provide compensation to those members of the forces who have been disabled or have died as a result of military service, and to their dependants, may be fulfilled.

[...]

21(2) In respect of military service rendered in the non-permanent active militia or in the reserve army during World War II and in respect of military service in peace time,

(a) where a member of the forces suffers disability resulting from an injury or disease or an aggravation thereof that arose out of or was directly connected with such military service, a pension shall, on application, be awarded to or in respect of the member in accordance with the rates for basic and additional pension set out in Schedule I;

(b) where a member of the forces dies as a result of an injury or disease or an aggravation thereof that arose out of or was directly connected with such military service, a pension shall be awarded in respect of the member in accordance with the rates set out in Schedule II;

(c) where a member of the forces is in receipt of an additional pension under paragraph (a), subsection (5) or section 36 in respect of a spouse or common-law partner who is living with the member and the spouse or common-law partner dies, except where an award is payable under subsection 34(8), the additional pension in respect of the spouse or common-law partner shall continue to be paid for a period of one year from the end of the month in which the spouse or common-law partner died or, if an additional pension in respect of another spouse or common-law partner is awarded to the member commencing during that period, until the date that it so commences; and

(d) where, in respect of a survivor who was living with the member of the forces at the time of that member's death,

(i) the pension payable under paragraph (b)

is less than

(ii) the aggregate of the basic pension and the additional pension for a spouse or common-law partner payable to the member under paragraph (a), subsection (5) or section 36 at the time of the member's death, a pension equal to the amount described in subparagraph (ii) shall be paid to the survivor in lieu of the pension payable under paragraph (b) for a period of one year commencing on the effective date of award as provided in section 56 (except that the words "from the day following the date of death" in subparagraph 56(1)(a)(I) shall be read as "from the first day of the month following the month of the member's death"), and thereafter a pension shall be paid to the survivor in accordance with the rates set out in Schedule II.

21(2.1) Where a pension is awarded in respect of a disability resulting from the aggravation of an injury or disease, only that fraction of the total disability, measured in fifths, that represents the extent to which the injury or disease was aggravated is pensionable.

[...]

39(1) A pension awarded for disability shall be made payable from the later of

(a) the day on which application therefor was first made, and

(b) a day three years prior to the day on which the pension was awarded to the pensioner.

39(2) Notwithstanding subsection (1), where a pension is awarded for a disability and the Minister or, in the case of a review or an appeal under the Veterans Review and Appeal Tribunal Act, the Veterans Review and Appeal Tribunal is of the opinion that the pension should be awarded from a day earlier than the day prescribed by subsection (1) by reason of delays in securing service or other records or other administrative difficulties beyond the control of the applicant, the Minister or Veterans Review and Appeal Tribunal may make an additional award to the pensioner in an amount not exceeding an amount equal to two years pension.

[...]

Veterans Review and Appeal Tribunal Act

3. The provisions of this Act and of any other Act of Parliament or of any regulations made under this or any other Act of Parliament conferring or imposing jurisdiction, powers, duties or functions on the Tribunal shall be liberally construed and interpreted to the end that the recognized obligation of the people and Government of Canada to those who have served their country so well and to their dependants may be fulfilled.

[...]

39. In all proceedings under this Act, the Tribunal shall

(a) draw from all the circumstances of the case and all the evidence presented to it every reasonable inference in favour of the applicant or appellant;

(b) accept any uncontradicted evidence presented to it by the applicant or appellant that it considers to be credible in the circumstances; and

(c) resolve in favour of the applicant or appellant any doubt, in the weighing of evidence, as to whether the applicant or appellant has established a case.



                                                       COUR FÉDÉRALE

                                        AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                     T-1447-04

INTITULÉ :                                                    William David Gerard Jones c. Procureur général du Canada

LIEU DE L'AUDIENCE :                              Victoria (Colombie-Britannique)

DATE DE L'AUDIENCE :                            7 avril 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

DATE DES MOTIFS :                                   4 mai 2005

COMPARUTIONS:

William Gerard Jones                             LE DEMANDEUR

POUR SON PROPRE COMPTE

Ward Bansley                                                    POUR LE DÉFENDEUR

Vancouver (Colombie-Britannique)

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

William Gerard Jones                             LE DEMANDEUR

Victoria (Colombie-Britannique)                        POUR SON PROPRE COMPTE

John H. Sims, c.r.                                              POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada


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