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Date : 20051012

Dossier : IMM-9948-04

Référence : 2005 CF 1390

Toronto (Ontario), le 12 octobre 2005

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE MACTAVISH

ENTRE :

XIAOMIAO CAI,

YING CHEN

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                Xiaomiao Cai et Ying Chen sont tous les deux citoyens de la République populaire de Chine. Ils ont demandé l'asile au motif qu'ils craignaient d'être persécutés pour avoir enfreint la politique de « l'enfant unique » de la Chine.

[2]                La décision rendue par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) était fondée sur l'appréciation, par la Commission, de la crédibilité de la demanderesse. Malgré la très grande retenue dont il faut faire preuve à l'égard de telles conclusions, je suis convaincue que deux des principales conclusions de la Commission étaient fondées sur une interprétation erronée de la preuve et qu'elles étaient donc manifestement déraisonnables. Par conséquent, la décision de la Commission doit être annulée.

                       

Allégations des demandeurs

[3]                Les demandeurs affirment qu'après la naissance de leur premier enfant, les autorités chinoises ont obligé la demanderesse à porter un dispositif intra-utérin à des fins contraceptives. Pour s'assurer que la demanderesse respectait la consigne, les autorités l'obligeaient à se soumettre à un examen de vérification du DIU tous les trois mois.

[4]                La demanderesse prétend qu'elle a continué de porter le DIU, mais qu'en février 2003, elle s'est rendu compte qu'elle était enceinte. La demanderesse a dit que, pour éviter qu'on l'oblige à se faire avorter et qu'on la stérilise de force, son mari et elle se sont cachés. La demanderesse ne s'est pas présentée à l'examen périodique de vérification auprès de l'agent de contrôle des naissances qui devait avoir lieu à la mi-mars 2003. Par la suite, l'agent et les représentants du Bureau de la sécurité publique ont tenté de la retrouver. C'est alors que les demandeurs ont décidé de quitter le pays.

Analyse

[5]                En rejetant les demandes d'asile, la Commission s'est fondée principalement sur le fait qu'elle ne croyait pas que les demandeurs étaient en Chine quand la demanderesse est tombée enceinte. La Commission a tiré cette conclusion en se fondant sur l'appréciation, par le président, de la preuve, à savoir le « carnet d'examen » de la demanderesse dans lequel étaient inscrites les dates auxquelles elle devait se présenter aux autorités de contrôle des naissances.

[6]                Selon la Commission, le dernier examen de la demanderesse inscrit dans le carnet remontait à décembre 2001. En se fondant sur cette preuve, la Commission a conclu que le récit de la demanderesse comportait des lacunes et qu'il n'y avait aucune preuve concernant le lieu où elle se trouvait entre décembre 2001 et mars 2003. Selon la Commission, cela « mine la crédibilité de la demandeure » .

[7]                Un examen de la preuve révèle qu'il est inscrit, dans le carnet, que la demanderesse a été examinée par les autorités de contrôle des naissance en mars, juin, septembre et décembre 2002. Bien entendu, cette page du carnet n'a pas été reproduite dans la traduction anglaise du document. L'omission a été portée à l'attention du commissaire pendant l'audience. Il ressort néanmoins que le commissaire a oublié la preuve des examens de vérification de 2002 ou n'en a pas tenu compte.

[8]                Puisque cette conclusion a été déterminante dans l'analyse de la Commission, je serais disposée à annuler la décision pour ce seul motif. Toutefois, il est clair que la Commission a commis une deuxième erreur grave dans son appréciation des faits.

[9]                La Commission a également conclu que la preuve qui se trouvait dans le passeport de la demanderesse contredisait celle que présentait le carnet d'examen. Selon la Commission, il est inscrit, dans le carnet, que la demanderesse a été examinée le 26 juin 2001, alors que son passeport révèle qu'elle a quitté la Chine la veille, pour se rendre à Singapour. Puisque la demanderesse n'était apparemment pas en Chine le jour en question, la Commission a conclu que « les demandeurs ont présenté un document justificatif frauduleux et ont ainsi compromis leurs chances d'obtenir l'asile puisqu'il est alors possible pour le tribunal de douter de la véracité des autres allégations faites par les demandeurs » .

[10]            Ce raisonnement est problématique puisque l'examen n'a pas du tout eu lieu le 26 juin 2001. Le carnet révèle clairement que l'examen avait lieu le 25 juin. Il aurait donc été tout à fait possible que la demanderesse subisse un examen le 25, juste avant de s'envoler pour Singapour plus tard le même jour.       

Conclusion

[11]            Puisque je suis convaincue que les deux principales conclusions de fait tirées par la Commission en l'espèce étaient fondées sur une interprétation foncièrement erronée de la preuve, la demande de contrôle judiciaire est accueillie.

Certification

[12]            Ni l'une ni l'autre des parties n'a proposé une question aux fins de certification et la présente affaire n'en soulève aucune.

ORDONNANCE

            LA COUR ORDONNE :

                       

            1.          La présente demande de contrôle judiciaire est accueillie et l'affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué pour nouvelle décision.

            2.          Aucune question grave de portée générale n'est certifiée.

« A. Mactavish »

Juge

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                         IMM-9948-04

INTITULÉ :                                        XIAOMIAO CAI,

                                                            YING CHEN

                                                            c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'Immigration

DATE DE L'AUDIENCE :                LE 11 OCTOBRE 2005

LIEU DE L'AUDIENCE :                  Toronto (Ontario)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                        LA JUGE MACTAVISH

COMPARUTIONS :

Hart A. Kaminker                                  POUR LES DEMANDEURS

Marcel Larouche                                   POUR LE DÉFENDEUR

                                                           

                                                                                                                                                               AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :       

Hart A. Kaminker                                  POUR LES DEMANDEURS

Avocat

Toronto (Ontario)                                             

                                                                                                                                                           

John H. Sims, c.r.                                  POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada       

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