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Date : 20201207

Dossier : T‑168‑18

Référence : 2020 CF 1128

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 7 décembre 2020

En présence de madame la protonotaire Mandy Aylen

ACTION SIMPLIFIÉE

ENTRE :

LICKERISH, LTD.

demanderesse

et

AIRG INC.

défenderesse

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Introduction

[1] La présente action, qui a été intentée en vertu de la procédure simplifiée de la Cour, est une action en violation de droit d’auteur concernant l’utilisation prétendument non autorisée de deux photographies de Meghan Markle [les photographies] sur le site Web de la défenderesse.

II. Contexte

[2] La demanderesse, Lickerish Ltd., est une société constituée en corporation sous le régime du droit du Royaume‑Uni qui a des bureaux situés à Londres, en Angleterre. La demanderesse est une agence de syndication de photographies qui propose aux médias des images de beauté, de célébrités, de mannequins et de mode.

[3] La demanderesse fait valoir que les photographies en cause dans la présente instance ont été prises le 16 novembre 2012 par Dimitry Loiseau, un photographe de mode professionnel. Par la suite, la demanderesse et M. Loiseau ont conclu un contrat d’agence exclusif afin que la demanderesse agisse comme agente de M. Loiseau en ce qui concerne la syndication des photographies et d’autres œuvres [le contrat].

[4] La défenderesse, airG Inc., est une entreprise canadienne de logiciel dont le siège social est situé à Vancouver, en Colombie‑Britannique. Parmi les produits de la défenderesse, mentionnons un service de réseautage social conçu pour les appareils mobiles.

[5] La demanderesse allègue que, en novembre 2016, elle a constaté que la défenderesse avait, depuis au moins le 1er octobre 2014, utilisé et reproduit les photographies sur le site Web de la défenderesse, www.buzz.airg.com. La demanderesse fait valoir que la reproduction, qui a été faite sans sa permission ou son autorisation, constitue une violation du droit d’auteur. La défenderesse soutient que la demanderesse n’a pas qualité pour agir et pour intenter la présente action et elle nie avoir publié les photographies sur son site Web.

[6] Conformément à l’article 299 des Règles des Cours fédérales, les parties ont signifié leur preuve par affidavit respective avant le procès. La demanderesse a produit un affidavit fait sous serment par Nigel Williams le 24 février 2020. Dans son affidavit, M. Williams, un administrateur de la demanderesse, donne : a) une description de la nature des activités commerciales et des services de la demanderesse; b) des précisions au sujet du contrat avec M. Loiseau et la présentation d’un exemplaire de celui‑ci; c) une description des compétences, de l’expérience et des activités en photographie de M. Loiseau; d) des précisions sur la captation des photographies en cause et la présentation d’une copie de celles‑ci; e) des renseignements sur l’enregistrement des photographies et des droits de la demanderesse sur celles‑ci au Copyright Office des États‑Unis et la présentation d’une copie de la demande et du certificat d’enregistrement qui en a découlé; f) des précisions sur l’atteinte alléguée au droit d’auteur par la défenderesse et la présentation d’une copie des captations d’écran du site Web de la défenderesse; g) des précisions sur les diverses licences délivrées par la demanderesse à des tiers pour l’utilisation des photographies, et la présentation de factures connexes. M. Williams a comparu pour être contre‑interrogé au procès.

[7] En prévision du procès, la défenderesse a signifié et déposé un avis d’opposition à la recevabilité de la majorité de l’affidavit de M. William au motif qu’il repose sur du ouï‑dire, de l’argumentation, de la spéculation et de l’opinion irrecevables. La défenderesse s’est également opposée aux éléments de preuve en alléguant qu’il s’agissait de ouï‑dire, qu’ils n’étaient pas des copies bel et bien certifiées conformes ou vérifiées, qu’ils n’étaient pas pertinents ou qu’ils étaient incomplets.

[8] Il a été entendu avant le procès que je recevrais en preuve l’affidavit de M. Williams lorsque celui‑ci serait appelé à témoigner, sous réserve de la possibilité que je rejette tout ou partie de son affidavit lorsque je prendrai ma décision sur le fond. Je vais aborder mes décisions au sujet de sa preuve en traitant des questions ci‑dessous.

[9] Avant le procès, la défenderesse a signifié et déposé un affidavit souscrit par Frederick Ghahramani. Cependant, une fois que la demanderesse a eu terminé sa preuve, la défenderesse a choisi de ne pas produire de preuve et la Cour n’est donc pas saisie de l’affidavit de M. Ghahramani.

III. Questions en litige

[10] La présente action soulève quatre questions à trancher :

  1. La demanderesse a‑t‑elle qualité pour agir et alléguer une atteinte au droit d’auteur relativement aux photographies?

  2. B. Dans l’affirmative, la défenderesse a‑t‑elle porté atteinte au droit d’auteur de la demanderesse sur les photographies?

  3. Dans l’affirmative, quels dommages la demanderesse a‑t‑elle subis et la conduite de la demanderesse devrait‑elle influer sur le quantum des dommages‑intérêts susceptibles d’être recouvrés?

  4. Les dépens de la cause.

[11] Pour les motifs énoncés ci‑dessous, je conclus que la demanderesse n’a pas qualité pour agir et alléguer une atteinte au droit d’auteur sur les photographies et que la demande fondée sur une atteinte au droit d’auteur est donc rejetée.

IV. La demanderesse a‑t‑elle qualité pour agir et alléguer une atteinte au droit d’auteur sur les photographies?

[12] Comme l’a reconnu la Cour suprême du Canada dans l’arrêt CCH Canadienne Ltée c Barreau du Haut‑Canada, 2004 CSC 13, le droit d’auteur tire son origine de la loi et les droits et les recours sont prévus par la Loi sur le droit d’auteur [la Loi]. Au Canada, un auteur n’est pas tenu d’inscrire son droit d’auteur pour acquérir la protection du droit d’auteur. L’auteur doit plutôt simplement être Canadien ou citoyen de l’un ou l’autre des pays signataires de la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistique le 9 septembre 1886 [Convention de Berne] et l’œuvre doit avoir été publiée à l’origine dans un tel pays, si la publication est pertinente [voir Tremblay c Orio Canada Inc., 2013 CF 109 au para 27].

[13] L’article 3 de la Loi énonce l’étendue du droit d’auteur, qui comprend le droit exclusif de produire ou reproduire l’œuvre. L’article 5 prévoit que le droit d’auteur existe sur toute œuvre artistique « originale » si l’auteur était, à la date de sa création, citoyen ou sujet ou résidant habituel d’un pays signataire. La définition d’« œuvre artistique » à l’article 2 de la Loi englobe les photographies. En ce qui concerne l’exigence selon laquelle l’œuvre artistique doit être « originale », la Cour suprême s statué qu’une œuvre originale est une œuvre qui émane d’un auteur et qui n’est pas une copie d’une autre œuvre. Elle doit en outre être le produit de l’exercice du talent et du jugement d’un auteur [voir CCH, précité, au para 25].

[14] L’alinéa 34.1(1)b) de la Loi établit une présomption selon laquelle dans toute procédure civile engagée en vertu de la présente loi où le défendeur conteste l’existence du droit d’auteur ou la qualité du demandeur, l’auteur est, jusqu’à preuve du contraire, réputé être titulaire de ce droit d’auteur.

[15] L’article 13 de la Loi énonce les éléments qui sont pertinents en ce qui concerne la propriété du droit d’auteur. Le paragraphe 13(1) prévoit que l’auteur d’une œuvre est le premier titulaire du droit d’auteur sur celle‑ci. Toutefois, un auteur peut subséquemment céder le droit d’auteur ou accorder tout intérêt dans le droit par une licence. Voici ce que prévoit le paragraphe 13(4) de la Loi :

Le titulaire du droit d’auteur sur une œuvre peut céder ce droit, en totalité ou en partie, d’une façon générale ou avec des restrictions relatives au territoire, au support matériel, au secteur du marché ou à la portée de la cession, pour la durée complète ou partielle de la protection; il peut également concéder, par une licence, un intérêt quelconque dans ce droit; mais la cession ou la concession n’est valable que si elle est rédigée par écrit et signée par le titulaire du droit qui en fait l’objet, ou par son agent dûment autorisé.

The owner of the copyright in any work may assign the right, either wholly or partially, and either generally or subject to limitations relating to territory, medium or sector of the market or other limitations relating to the scope of the assignment, and either for the whole term of the copyright or for any other part thereof, and may grant any interest in the right by licence, but no assignment or grant is valid unless it is in writing signed by the owner of the right in respect of which the assignment or grant is made, or by the owner’s duly authorized agent.

[16] Voici le libellé du paragraphe 13(7) de la Loi :

Il est entendu que la concession d’une licence exclusive sur un droit d’auteur est réputée toujours avoir valu concession par licence d’un intérêt dans ce droit d’auteur.

For greater certainty, it is deemed always to have been the law that a grant of an exclusive licence in a copyright constitutes the grant of an interest in the copyright by licence.

[17] Donc, le titulaire d’une licence exclusive reçoit un intérêt de propriété dans le droit d’auteur et il a qualité pour agir et intenter une action pour atteinte au droit d’auteur. Pour constituer une licence exclusive au sens du paragraphe 13(7) de la Loi, la licence exclusive doit avoir été faite par écrit et avoir été signée par le titulaire et elle doit remplir les conditions suivantes : a) le titulaire du droit d’auteur (le concédant) permet à une autre personne (le titulaire de la licence) de faire quelque chose avec le droit d’auteur; b) le concédant promet de n’accorder à personne d’autre la même permission pendant la durée de la licence; c) le concédant lui‑même promet de ne pas faire les actes qui ont été octroyés sous licence au titulaire de la licence pendant la durée de la licence [voir Euro‑Excellence Inc. c Kraft Canada Inc., 2007 CSC 37].

[18] Les parties se sont adressées à la Cour pour qu’elle statue sur la question de savoir si la demanderesse a qualité pour agir et alléguer une violation du droit d’auteur sur les photographies, que sous‑tend la question de savoir si M. Loiseau est l’auteur des photographies et le titulaire du droit d’auteur qui s’y rattache, étant donné que la défenderesse n’a fait aucune admission à cet égard.

[19] Dans ses conclusions finales, la défenderesse a fait valoir que la Cour doit également décider, dans le cadre de la question de la qualité pour agir, si le droit d’auteur subsiste sur les photographies – c’est‑à‑dire à savoir si les photographies sont des œuvres artistiques « originales ». Cette question n’a pas été étudiée en profondeur par la demanderesse dans ses observations écrites et orales. Étant donné que la défense ne contient aucune admission sur le fait que les photographies sont des œuvres artistiques originales, cette question demeure en litige et la Cour devra en disposer. Toutefois, je vais commencer par me pencher sur la propriété du droit d’auteur et sur la question de savoir si la demanderesse est titulaire d’une licence exclusive sur les photographies de telle sorte qu’elle a l’intérêt de propriété dans le droit d’auteur nécessaire pour intenter la présente action.

[20] La demanderesse fait valoir que c’est M. Loiseau, en tant que photographe, qui est titulaire du droit d’auteur sur les photographies. La demanderesse allègue que M. Loiseau a conclu avec elle une licence exclusive pour qu’elle agisse comme son agente pour toute syndication et, comme cela est expressément prévu au contrat, pour la désigner son [traduction] « agente mondiale exclusive pendant le contrat en ce qui concerne la vente du matériel souscrit dans tout média connu ou à être conçu à toutes fins que ce soit ».

[21] En plus du contrat, la demanderesse invoque le certificat d’enregistrement du Copyright Office des États‑Unis pour les photographies, lequel désigne M. Loiseau comme auteur et revendicateur du droit d’auteur et la demanderesse comme ayant des [traduction] « droits et permissions ». La demanderesse fait valoir que l’article 5 de la Loi prévoit que le droit d’auteur existe au Canada si l’œuvre a été créée par un auteur résident d’un pays signataire au sens de la Convention de Berne. Conformément au paragraphe 53(3) de la Loi, un certificat d’enregistrement d’un droit d’auteur fait la preuve que le droit d’auteur existe et que la personne qui y est inscrite en est la titulaire. Étant donné que le Canada, les États‑Unis et le Royaume‑Uni sont tous signataires de la Convention de Berne, la demanderesse allègue que les droits d’auteur protégés dans un pays bénéficient de la même protection dans un autre pays signataire, comme si l’œuvre avait été créée dans l’autre pays signataire. La demanderesse allègue que le certificat d’enregistrement délivré par le Copyright Office des États‑Unis fait donc la preuve de l’existence du droit d’auteur sur les photographies et de la licence exclusive de la demanderesse à leur égard.

[22] Je vais maintenant me pencher sur l’opposition de la défenderesse à la recevabilité de la preuve de la demanderesse en ce qui concerne la question de la qualité pour agir.

[23] Pour examiner l’opposition de la défenderesse à la preuve de M. William, celle‑ci doit être étudiée en tenant compte du paragraphe 81(1) des Règles des Cours fédérales qui prévoit ce qui suit :

Les affidavits se limitent aux faits dont le déclarant a une connaissance personnelle, sauf s’ils sont présentés à l’appui d’une requête – autre qu’une requête en jugement sommaire ou en procès sommaire – auquel cas ils peuvent contenir des déclarations fondées sur ce que le déclarant croit être les faits, avec motifs à l’appui.

. Affidavits shall be confined to facts within the deponent’s personal knowledge except on motions, other than motions for summary judgment or summary trial, in which statements as to the deponent’s belief, with the grounds for it, may be included.

[24] Quand un affidavit est fondé sur ce que croit le déclarant, le paragraphe 81(2) des Règles dispose que des conclusions défavorables peuvent être tirées du fait de ne pas offrir le témoignage de personnes ayant une connaissance personnelle des faits substantiels.

[25] Au paragraphe 1 de son affidavit, M. Williams déclare qu’il a [traduction] « une connaissance personnelle des affaires et des faits mentionnés ci‑dessous, sauf indication contraire selon laquelle il s’est fondé sur des renseignements et des convictions, auquel cas il les croit vrais ». Toutefois, nulle part dans son affidavit fait‑il mention d’un élément de preuve précis qu’il tient pour véridique sans être la source de son information.

[26] Au paragraphe 10 de son affidavit, M. Williams affirme que [traduction] « le 16 novembre 2012, Dimitry a photographié l’actrice vedette Meghan Markle ». Toutefois, en contre‑interrogatoire, M. Williams a admis qu’il n’était pas présent à la séance photo avec Mme Markle et que l’information qui se trouvait dans son affidavit lui avait été transmise par M. Loiseau. Il n’existe aucun affidavit de M. Loiseau qui aurait pu donner une preuve directe en ce qui concerne la prise des photographies. De plus, rien ne donne à penser qu’il aurait été impossible ou même difficile d’obtenir un affidavit de sa part. Au contraire, M. Williams a confirmé en contre‑interrogatoire que M. Loiseau pourrait fournir de la preuve au sujet de la prise des photographies.

[27] Comme la Cour d’appel fédérale l’a précisé dans sa décision Pfizer Canada Inc. c Teva Canada Limited, 2016 CAF 161 aux para 79 à 81 et 84 [Pfizer], les faits doivent être établis par une preuve recevable. Cette règle souffre de rares exceptions, comme dans le cas des faits qui relèvent de la connaissance judiciaire, des faits qui sont réputés ou présumés exister selon un texte législatif, des faits qui ont été établis lors de procédures antérieures dans des circonstances où ils lient la Cour ou des faits qui ont été stipulés et qui sont constants. Sauf en présence de l’une de ces rares exceptions, la Cour doit statuer en premier lieu sur la recevabilité lorsqu’une opposition a été soulevée. Par conséquent, avant que la Cour puisse s’en remettre à tout élément de preuve produit par la demanderesse et lui accorder une valeur probante ou en tirer des inférences, elle doit en premier lieu établir sa recevabilité.

[28] La preuve par ouï‑dire est en principe irrecevable au procès. Le ouï‑dire a été défini comme « une déclaration verbale ou écrite faite par une personne autre que celle qui témoigne lors de l’instance, hors du tribunal, que le témoin répète ou produit devant le tribunal dans le but d’établir la véracité ce qui a été dit ou écrit » [voir Pfizer, ci‑dessus, aux para 87 et 89]. La loi admet certaines exceptions précises à la règle de l’exclusion du ouï‑dire ainsi qu’une exception plus générale de principe qui permet à un tribunal d’admettre en preuve des ouï‑dire s’ils sont nécessaires et fiables [voir Pfizer, ci‑dessus, au para 103].

[29] Je conclus que le témoignage offert par M. Williams au paragraphe 10 de son affidavit constitue une preuve par ouï‑dire, car la demanderesse tente d’invoquer la véracité de l’affirmation de M. Loiseau à M. Williams. Je ne suis pas convaincue que l’une ou l’autre des exceptions générales ou particulières à la règle de l’exclusion du ouï‑dire permette son admission, en particulier en raison du fait que rien ne donne à penser qu’il aurait été impossible ou même difficile d’obtenir un affidavit de M. Loiseau. Par conséquent, je conclus que le paragraphe 10 de l’affidavit de M. Williams est irrecevable.

[30] En outre, la Cour peut tirer une inférence défavorable lorsqu’un témoin (en l’occurrence M. Loiseau) qui aurait logiquement dû être appelé ne l’a pas été. Il est permis d’inférer que la preuve serait préjudiciable pour la cause de la partie en question [voir Aga Khan c Tajdin, 2011 CF 14 au para 65]. Aucune explication n’a été donnée quant à la question de savoir pourquoi M. Loiseau n’a pas pu produire un affidavit et comparaître pour être contre‑interrogé. Dans les circonstances, je puis à bon escient tirer une inférence défavorable à la demanderesse et je le fais.

[31] La demanderesse allègue qu’elle n’est pas tenue de présenter à la Cour une preuve directe de M. Loiseau, étant donné que le certificat d’enregistrement délivré par le Copyright Office des États‑Unis est une preuve valable de l’existence du droit d’auteur de M. Loiseau sur les photographies. Voici ce qu’affirme M. Williams dans son affidavit :

[traduction]

13. Le 3 novembre 2016, Dimitry a déposé une demande pour enregistrer les photographies de Markle ainsi que onze autres photographies de Markle afin d’obtenir un droit d’auteur du Copyright Office des États‑Unis (« USCO »).

14. Le 3 novembre 2016, l’USCO a accordé à Dimitry l’enregistrement des photographies de Markle et a par la suite remis à Dimitry un certificat d’enregistrement des œuvres intitulées « Enregistrement d’un groupe de photographies, Meghan Markle, publiées aux alentours du 15 décembre 2012; 13 photos.

15. Les droits et les permissions exclusifs octroyés à Lickerish ont également été enregistrés. Le numéro d’enregistrement des photographies de Markle est le VA 2‑023‑447. On trouvera à l’annexe des présentes, sous la cote de preuve B, une copie du certificat d’enregistrement qui en fait foi.

[32] En contre‑interrogatoire, M. Williams a admis qu’il n’avait pas personnellement connaissance de la demande d’enregistrement elle‑même auprès du Copyright Office des États‑Unis ni de la délivrance par celui‑ci du certificat d’enregistrement joint en annexe à son affidavit. Il a plutôt déclaré que M. Loiseau avait autorisé la demanderesse à déposer la demande et que M. Williams avait ensuite autorisé une tierce partie, ImageRights International, à procéder au dépôt de la demande. Il n’a pas déposé la demande lui‑même et il n’était pas présent lorsqu’elle a été déposée par ImageRights International. M. Williams a ensuite affirmé qu’une fois que le certificat d’enregistrement a été obtenu par ImageRights International, il ne lui a pas été transmis, mais il a été envoyé à une autre personne au sein de l’organisation de la demanderesse. En préparant son affidavit, il n’a pas fait de copie du certificat d’enregistrement joint à son affidavit à titre d’élément de preuve et il n’a pas comparé la copie à la version du certificat d’enregistrement qu’ImageRights International a fournie à la demanderesse. M. Williams a admis que la copie du certificat d’enregistrement jointe à son affidavit à titre d’élément de preuve n’est pas une copie certifiée conforme.

[33] M. Williams a également confirmé en contre‑interrogatoire que les photographies n’ont pas été inscrites auprès du registraire des droits d’auteur du Canada.

[34] Quand un document est produit au procès, son authentification est une condition préalable à sa réception en preuve. La défenderesse n’a pas admis l’authenticité du certificat d’enregistrement et, en tant que tel, il revient à la demanderesse d’en établir l’authenticité.

[35] Selon la demanderesse, le certificat d’enregistrement indique que [traduction] « [c]e certificat délivré sous le sceau du Copyright Office en vertu du titre 17, United States Code, atteste que l’œuvre décrite ci‑dessous a été inscrite. L’information que contient le présent certificat a été produite pour faire partie intégrante des dossiers du Copyright Office ». La demanderesse allègue que l’original du certificat d’enregistrement se trouve au Copyright Office des États‑Unis à titre de document gouvernemental, qu’il est un document officiel du Registre et du directeur des droits d’auteurs des États‑Unis et qu’il est consultable à titre de dossier public. Il est donc recevable sous forme de copie comme le sont les documents officiels ou publics du Canada en vertu de l’article 24 de la Loi sur la preuve au Canada.

[36] Contrairement aux allégations de la demanderesse, je ne suis pas convaincue que le certificat d’enregistrement devrait être reçu en preuve. En premier lieu, M. Williams n’a aucune connaissance directe de la délivrance ou de la réception du certificat d’enregistrement et il est donc mal placé pour authentifier le document. Deuxièmement, comme l’a admis M. Williams, le document lui‑même n’est pas une copie certifiée conforme de l’original du certificat d’enregistrement.

[37] Même si le document pouvait être considéré comme une copie certifiée conforme (ce qui n’est pas le cas), l’article 24 de la Loi sur la preuve au Canada ne paraît pas, à sa face même, s’appliquer à des documents étrangers et la demanderesse n’a présenté à la Cour aucun précédent qui donnerait à penser le contraire :

24 Sont admissibles en preuve, dans tous les cas où la pièce originale pourrait l’être sans qu’il soit nécessaire de prouver le sceau de la personne morale, non plus que la signature et le caractère officiel de la ou des personnes qui paraissent l’avoir signée, et sans autre preuve de ces actes :

a) la copie de tout document officiel ou public du Canada ou d’une province, donnée comme attestée sous la signature du fonctionnaire compétent ou de la personne qui a la garde de ce document officiel ou public;

b) la copie d’un document, règlement administratif, règle, règlement ou procédure, ou la copie d’une écriture dans un registre ou dans un autre livre d’une municipalité ou autre personne morale, créée par une charte ou par une loi fédérale ou provinciale, donnée comme attestée sous le sceau de cette municipalité ou autre personne morale et revêtue de la signature du fonctionnaire présidant, du greffier ou du secrétaire de celle‑ci.

[38] Comme l’a admis la défenderesse, il se peut que le certificat d’enregistrement soit recevable en application de l’article 25 de la Loi sur la preuve au Canada. Toutefois, l’article 25 s’appliquerait uniquement à une copie certifiée conforme du certificat d’enregistrement, ce qui n’est pas ce dont la Cour est saisie.

[39] Même si j’avais tort, je n’accepte pas l’allégation de la demanderesse selon laquelle le certificat d’enregistrement délivré par le Copyright Office des États‑Unis constitue une preuve prima facie de l’existence du droit d’auteur de M. Loiseau sur les photographies, en application du paragraphe 53(2) de la Loi et de la Convention de Berne. Voici ce que prévoit l’article 53 de la Loi :

53 (1) Le registre des droits d’auteur, de même que la copie d’inscriptions faites dans ce registre, certifiée conforme par le commissaire aux brevets, le registraire des droits d’auteur ou tout membre du personnel du Bureau du droit d’auteur, fait foi de son contenu.

(2) Le certificat d’enregistrement du droit d’auteur constitue la preuve de l’existence du droit d’auteur et du fait que la personne figurant à l’enregistrement en est le titulaire.

(2.1) Le certificat d’enregistrement de la cession d’un droit d’auteur constitue la preuve que le droit qui y est inscrit a été cédé et que le cessionnaire figurant à l’enregistrement en est le titulaire.

(2.2) Le certificat d’enregistrement de la licence accordant un intérêt dans un droit d’auteur constitue la preuve que l’intérêt qui y est inscrit a été concédé par licence et que le titulaire de la licence figurant au certificat d’enregistrement détient cet intérêt.

(3) Les copies certifiées conformes et les certificats censés être délivrés selon les paragraphes (1) ou (2) sont admissibles en preuve sans qu’il soit nécessaire de prouver l’authenticité de la signature qui y est apposée ou la qualité officielle du signataire.

(1) The Register of Copyrights is evidence of the particulars entered in it, and a copy of an entry in the Register is evidence of the particulars of the entry if it is certified by the Commissioner of Patents, the Registrar of Copyrights or an officer, clerk or employee of the Copyright Office as a true copy.

(2) A certificate of registration of copyright is evidence that the copyright subsists and that the person registered is the owner of the copyright.

(2.1) A certificate of registration of an assignment of copyright is evidence that the right recorded on the certificate has been assigned and that the assignee registered is the owner of that right.

(2.2) A certificate of registration of a licence granting an interest in a copyright is evidence that the interest recorded on the certificate has been granted and that the licensee registered is the holder of that interest.

(3) A certified copy or certificate appearing to have been issued under this section is admissible in all courts without proof of the signature or official character of the person appearing to have signed it

[40] L’article 53 ne fait pas mention de certificats d’inscription étrangers et la demanderesse n’a produit à la Cour aucune jurisprudence qui étayerait son allégation voulant que les certificats d’inscription étrangers soient traités de la même manière que les certificats d’enregistrement canadiens sous le régime de l’article 53. Étant donné qu’il n’existe aucune preuve devant la Cour d’un enregistrement canadien quelconque, je conclus que la demanderesse ne peut pas se prévaloir de l’article 53 de la Loi pour établir que M. Loiseau est le titulaire du droit d’auteur sur les photographies.

[41] En plus, bien que la demanderesse allègue que M. Loiseau bénéficie des mécanismes de protection offerts par le paragraphe 5(1) de la Loi en raison du fait qu’il est « citoyen, sujet ou résident habituel d’un pays signataire », la demanderesse n’a produit aucune preuve de la citoyenneté ou de la résidence de M. Loiseau. Je ne suis pas disposée à conclure qu’il est citoyen ou résident des États‑Unis à la seule lumière d’une adresse correspondant à son nom dans le certificat d’enregistrement (que, de toute manière, j’ai jugé irrecevable).

[42] Compte tenu des conclusions auxquelles je suis arrivée en ce qui concerne l’irrecevabilité du paragraphe 10 de l’affidavit de M. Williams et du certificat d’enregistrement, je constate que la demanderesse n’a pas établi que M. Loiseau est titulaire du droit d’auteur sur les photographies. En formulant ce constat, je laisse ouverte la possibilité que M. Loiseau soit le titulaire du droit d’auteur. Toutefois, il n’existe aucune preuve admissible devant la Cour sur laquelle je pourrais tirer une conclusion de cette nature en l’espèce. En l’absence d’une décision statuant que M. Loiseau est le titulaire du droit d’auteur, la demanderesse ne peut pas établir, par prépondérance des probabilités, qu’elle a obtenu une licence exclusive du titulaire du droit d’auteur sur les photographies de sorte à avoir qualité pour agir et à pouvoir intenter la présente action.

[43] Toutefois, si j’avais tort sur la propriété du droit d’auteur, je vais me pencher sur la question de savoir, en tenant pour acquis que M. Loiseau est le titulaire du droit d’auteur, si la demanderesse a une licence exclusive qui lui accorde un intérêt dans le droit d’auteur sur les photographies.

[44] En ce qui concerne le contrat, M. William a témoigné en contre‑interrogatoire qu’il avait négocié le contrat avec M. Loiseau. Le contrat est un contrat type qui a été préparé par la demanderesse (et non par M. Williams personnellement) et qui a été envoyé à M. Loiseau pour sa signature. M. Williams a affirmé qu’il a reçu le contrat signé de M. Loiseau par courriel, même si le courriel n’a pas été produit par la demanderesse. M. Williams a ensuite imprimé et signé le contrat et il l’a fait parvenir par voie électronique au bureau de la demanderesse à Londres.

[45] Lorsqu’il a préparé son affidavit, M. Williams a admis qu’il n’avait pas fait de copie du contrat joint comme élément de preuve à son affidavit (la copie a été faite par une personne du bureau de Londres) et qu’il n’a pas passé en revue la copie jointe à son affidavit en tant qu’élément de preuve en la comparant à l’original du contrat (c’est‑à‑dire la copie qu’il avait signée et envoyée par voie électronique à Londres).

[46] M. Williams a admis que le nom de M. Loiseau ne figure nulle part dans le contrat. Il y a un espace en blanc réservé à l’insertion du nom des « Titulaires de droit », mais aucun nom n’y a été inscrit. La ligne de signature sur la dernière page du contrat ne contient pas non plus le nom du titulaire du droit au‑dessus de la signature du titulaire présumé du droit. La clause 16 du contrat prévoit que les avis qui doivent être envoyés au titulaire du droit ne sont pas transmis à M. Loiseau, mais bien à Emma Carlsen, une employée de la demanderesse.

[47] M. Williams a admis en contre‑interrogatoire qu’il n’avait pas été témoin de la signature du contrat par M. Loiseau et qu’il ignore si la signature qui figure dans le contrat est celle de M. Loiseau. Comme je l’ai fait remarquer précédemment, il n’existe pas d’affidavit de M. Loiseau, ni d’affidavit de quiconque aurait été témoin de sa signature ou prétendrait la reconnaître.

[48] Compte tenu de ce qui précède, la preuve dont je suis saisie ne parvient pas à établir que le contrat est authentique et je ne puis donc pas conclure que la demanderesse a obtenu une licence exclusive par écrit et revêtue de la signature de M. Loiseau lui accordant un intérêt dans le droit d’auteur sur les photographies. Je remarque que notre Cour est arrivée à une conclusion semblable dans la décision J.L. De Ball Canada Inc. c 421254 Ontario Ltd, [1999] ACF no 1977, dans laquelle la juge Sharlow a statué que la preuve devant elle ne réussissait pas à établir qu’un accord de cession était authentique, étant donné qu’il n’y avait aucune preuve de l’auteur qui était censé céder le droit d’auteur en vertu du contrat, que le témoin devant la Cour n’avait pas vu l’auteur signer le contrat et ne pouvait pas reconnaître la signature de l’auteur, qu’il n’existait aucune preuve d’une personne quelconque prétendant avoir été témoin de la signature de l’auteur ou reconnaître la signature de l’auteur.

[49] Pour arriver à cette conclusion, je tiens aussi compte de l’absence totale de toute preuve corroborant l’existence d’une relation contractuelle entre M. Loiseau et la demanderesse. M. Williams a admis en contre‑interrogatoire que la demanderesse n’avait produit dans la présente action ni déposé devant la Cour, aucune correspondance ni documents échangés entre la demanderesse et M. Loiseau au sujet de l’administration du contrat et expressément prévue au contrat lui‑même, comme la mise à disposition de la demanderesse par M. Loiseau [traduction] « d’œuvres potentielles » (selon la définition du contrat), la confirmation par la demanderesse que les photographies seraient assujetties au contrat ou tout relevé de compte ou paiement versé à M. Loiseau pour la syndication de ses photographies.

[50] Étant donné que j’ai jugé irrecevable le certificat d’enregistrement délivré par le Copyright Office des États‑Unis, il ne peut pas aider la demanderesse à établir sa qualité pour agir et intenter cette action.

[51] Par conséquent, je conclus que la demanderesse n’a pas établi, par prépondérance des probabilités, qu’elle a la qualité pour agir et intenter la présente action en violation du droit d’auteur contre la défenderesse.

[52] Compte tenu de mes conclusions, je n’ai pas à me pencher sur la question de savoir si les photographies constituent des œuvres artistiques « originales ».

V. Si la demanderesse a la qualité pour agir, la défenderesse a‑t‑elle porté atteinte au droit d’auteur de la demanderesse sur les photographies?

[53] Au cas où j’aurais tort sur la question de la qualité pour agir, je conclus que la preuve de la demanderesse en ce qui concerne la violation souffre de lacunes semblables à celles que j’ai relevées dans mon examen de la question de la qualité pour agir.

[54] Voici ce qu’affirme M. Williams au paragraphe 16 de son affidavit :

[traduction]

Le ou vers le 30 novembre 2016, Lickerish a découvert qu’AirG avait commencé à utiliser et à reproduire les photographies de Markle au moins depuis le 1er octobre 2014 sur son site Web : www.buzzairg.com. Jointes à la présente sous la cote de pièce C, on trouvera des exemplaires originaux des photographies de Markle qui sont en cause ainsi que des captures d’écran provenant du site Web d’AirG qui en font la preuve.

[55] En contre‑interrogatoire, M. Williams a admis qu’il n’avait pas découvert l’utilisation des photographies sur le site Web de la défenderesse et qu’il n’avait pas non plus pris les captures d’écran qui accompagnent son affidavit. C’est plutôt quelqu’un d’ImageRights International qui a fait la découverte et qui a pris les captures d’écran jointes à son affidavit. M. Williams ne sait pas qui chez ImageRights International a fait la découverte ou les captures d’écran et il ne sait pas non plus où le représentant d’ImageRights International se trouvait quand il a fait les captures d’écran, reconnaissant au passage qu’ImageRights International possède des bureaux partout dans le monde.

[56] La preuve offerte par M. Williams au paragraphe 16 de son affidavit constitue du ouï‑dire et je ne suis pas convaincue qu’une exception particulière ou générale en permettrait l’admission, en particulier en raison du fait que rien ne donne à penser qu’il aurait été impossible ou même difficile d’obtenir un affidavit du ou des représentants d’ImageRights International qui ont fait la découverte et les captures d’écran. Par conséquent, le paragraphe 16 de l’affidavit de M. Williams est irrecevable.

[57] En ce qui concerne les captures d’écran elles‑mêmes, la demanderesse allègue qu’elles sont recevables en tant que documents électroniques en vertu de la Loi sur la preuve au Canada. Comme le tribunal l’a reconnu dans la décision R v Bernard, 2016 NSSC 358 [Bernard], pour faire admettre en preuve un document électronique, le plaideur doit se conformer à la fois à la Loi sur la preuve au Canada et aux règles coutumières qui régissent l’admission de la preuve documentaire. Il incombe à la demanderesse d’établir qu’elle s’y conforme. La demanderesse doit prouver l’authenticité au moyen d’une preuve susceptible de justifier la conclusion selon laquelle le document électronique est bien ce qu’on prétend qu’il est. Dans ce contexte, on peut satisfaire à la règle de la meilleure preuve au moyen d’une présomption législative. La demanderesse invoque la présomption législative énoncée à l’alinéa 31.3b), qui prévoit qu’en l’absence d’une preuve contraire, l’intégrité d’un système d’archivage électronique dans lequel ou au moyen duquel un document électronique a été enregistré ou mis en mémoire est prouvée s’il est établi que le document électronique a été enregistré ou mis en mémoire par une partie adverse à l’intérêt de la partie qui demande à l’invoquer. La demanderesse allègue que les captures d’écran relèvent de cet article avec les photographies gérées et mises en mémoire par la défenderesse (la partie adverse) dans son site Web et que l’alinéa 31.3b) devrait s’appliquer afin de recevoir en preuve les captures d’écran.

[58] Si on tient pour acquis que les captures d’écran sont des documents électroniques, la Cour doit concentrer sa recherche de la vérité autour de la question de savoir si la présomption de l’alinéa 31.3b) est satisfaite sur les captures d’écran elles‑mêmes et non sur le site Web de la défenderesse. Les captures d’écran n’ont pas été prises par une partie adverse à l’intérêt de la demanderesse, ce qui fait en sorte que la présomption de l’alinéa 31.3b) ne s’applique pas. Quoiqu’il en soit, je n’ai été saisie d’aucune preuve sur l’identité de la personne qui a enregistré et mis en mémoire les originaux des captures d’écran ni sur la façon dont les captures d’écran ont été portées à la connaissance de M. Williams pour qu’il en fasse mention dans son affidavit, et il n’existe pas de preuve non plus que les captures d’écran devant la Cour témoignent avec exactitude de ce qui paraissait sur le site Web de la défenderesse quand les captures d’écran ont été prises. Rien dans la preuve devant la Cour ne donne à penser que M. Williams a déjà vu le site Web de la défenderesse de sorte qu’il aurait même pu être bien placé pour authentifier les captures d’écran [voir Bernard, ci‑dessus]. Dans les circonstances, il ne me reste aucun fondement pour satisfaire la présomption de l’alinéa 31.3b). Par conséquent, je conclus que les captures d’écran sont irrecevables.

[59] Même si les captures d’écran avaient été recevables, je ne suis pas convaincue que la demanderesse a fait la preuve d’un « lien réel et important » entre le site Web de la défenderesse et le ressort du Canada [voir Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique c Association canadienne des fournisseurs d’Internet, [2004] 2 RCS 427; Miguna v Walmart Canada et al, 2015 ONSC 5744, conf. 2016 ONCA 174]. La Cour n’est saisie d’aucune preuve selon laquelle le site Web www.buzz.airg.com serait géré par la défenderesse, le site Web serait hébergé sur un serveur au Canada ou ImageRights International ou n’importe qui d’autre aurait eu accès au site Web de la défenderesse de l’intérieur du Canada. La demanderesse a affirmé dans ses observations écrites que les photographies étaient également situées dans les services Web d’Amazon au lien s3‑us‑west‑2.amazonaws.com/airgbuzz/media/d0b19fb9db44e1a0417bbc715fc78e.jpg (dont une capture d’écran était jointe en preuve à l’affidavit de M. Williams). La demanderesse fait valoir dans ses observations écrites que les services Web d’Amazon sont un fournisseur de plateformes de stockage infonuagique dont la défenderesse s’est servie comme système de gestion infonuagique et que, en tant que propriétaire du compte des services Web d’Amazon, la défenderesse gérait le contenu stocké dans le compte des services Web d’Amazon. Toutefois, il n’y a absolument aucune preuve devant la Cour au sujet de la nature des services Web d’Amazon, de la possibilité que la défenderesse l’ait utilisé ou qu’elle en gérait le contenu. L’affidavit de M. Williams est muet au sujet de cette preuve, qui n’a pas été étudiée non plus pendant le contre‑interrogatoire de M. Williams.

[60] Par conséquent, je conclus que la demanderesse n’a pas établi, par prépondérance des probabilités, que la défenderesse a violé son droit d’auteur sur les photographies.

VI. Si la défenderesse a porté atteinte au droit d’auteur de la demanderesse, quels dommages la demanderesse a‑t‑elle subis et la conduite de la demanderesse devrait‑elle influer sur le quantum des dommages‑intérêts susceptibles d’être recouvrés?

[61] Compte tenu de ma conclusion ci‑dessus, je n’ai pas à me prononcer sur cette question.

VII. Dépens

[62] Sur consentement des parties, il a été entendu qu’il serait disposé des dépens de la présente action à une date ultérieure à la suite du dépôt du présent jugement et des motifs, au cas où les parties ont été incapables de s’entendre à ce sujet.


JUGEMENT dans le dossier T‑168‑18

LA COUR ORDONNE :

  1. La demande contre la défenderesse pour violation du droit d’auteur est rejetée.
  2. Si les parties sont incapables de s’entendre sur la question des dépens, les parties devront, au plus tard le 18 décembre 2020, produire un projet de calendrier pour le dépôt de toute observation écrite supplémentaire sur les dépens et faire état de leurs disponibilités pour de brèves observations orales sur les dépens.

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« Mandy Aylen »

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Protonotaire

 

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, traducteur


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T‑168‑18

 

INTITULÉ :

LICKERISH, LTD. c. AIRG INC.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TENUE PAR vidÉoconfÉrence EN LIGNE SOUS LES AUSPICES DU registrE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LES 17 ET 19 NOVEMBRE 2020

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA PROTONOTAIRE AYLEN

 

DATE DES MOTIFS :

LE 7 DÉCEMBRE 2020

 

COMPARUTIONS :

MADISON STEENSON

POUR LA DEMANDERESSE

 

JOHN SHIELDS

POUR LA DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

KNIGHT LLP

POUR LA DEMANDERESSE

 

JOHN DOUGLAS SHEILDS,

LAW CORPORATION

POUR LA DÉFENDERESSE

 

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