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Date : 20201019


Dossier : IMM-4252-19

Référence : 2020 CF 978

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Toronto (Ontario), le 19 octobre 2020

En présence de madame la juge Simpson

ENTRE :

REMA HARRACKSINGH-MOORE

demanderesse

et

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

(Rendus oralement à l’audience à Toronto (Ontario), le 19 octobre 2020)

I.  Contexte

[1]  Le 17 mars 2017, une mesure de renvoi a été prise contre la demanderesse parce qu’elle ne s’était pas conformée à l’obligation de résidence exigeant que le résident permanent soit présent au Canada pour au moins 730 jours pendant une période quinquennale et parce qu’un agent a conclu qu’aucun motif d’ordre humanitaire ne compensait le fait qu’il lui manquait plusieurs centaines de jours pour se conformer à cette obligation. En appel devant la Section d’appel de l’immigration [la SAI et l’appel], la demanderesse a soulevé, à titre préliminaire, la question de la validité de la mesure de renvoi. La SAI a accepté d’entendre les arguments sur cette question au motif que, si la mesure était jugée valide, la SAI réunirait à nouveau les parties pour établir s’il conviendrait de surseoir à la mesure de renvoi pour des motifs d’ordre humanitaire.

[2]  Dans sa décision du 13 juin 2017, qui a trait à la question préliminaire, la SAI a conclu que la mesure de renvoi était valide et qu’elle n’avait pas été prise en violation du principe de l’équité procédurale. Par conséquent, elle a demandé au greffier de convoquer les parties à nouveau en vue d’examiner les motifs d’ordre humanitaire invoqués par la demanderesse. La demanderesse sollicite le contrôle judiciaire de cette décision.

II.  Questions en litige

[3]  À mon avis, la première question en litige est celle de savoir si la demande de contrôle judiciaire devrait être instruite à ce stade‑ci étant donné que l’appel n’a pas été instruit dans son intégralité et qu’il n’a pas encore été tranché.

[4]  La deuxième question est celle de savoir s’il convient de radier l’affidavit supplémentaire souscrit par la demanderesse le 13 janvier 2020 (l’affidavit) parce qu’il renferme des avis juridiques et des conclusions.

[5]  La troisième question est celle de savoir si le défendeur a droit à ses dépens.

III.  Analyse

A.  Première question

[6]  La Cour peut trancher cette question en déterminant si des circonstances exceptionnelles justifient une intervention judiciaire dans le processus administratif. La Cour d’appel fédérale a établi ce critère dans l’arrêt Canada (Agence des services frontaliers) c CB Powell Limited, 2010 CAF 61 [CB Powell].

[7]  Dans l’arrêt CB Powell, la Cour a décrit le principe de non‑intervention des tribunaux dans les processus administratifs en cours et a souligné, au paragraphe 33, que ce principe s’applique de façon rigoureuse. Elle a poursuivi en expliquant que la portée étroite de l’exception relative aux circonstances exceptionnelles fait foi de ce principe. Le critère permettant de qualifier une circonstance d’exceptionnelle est élevé et les questions relatives à la compétence, la partialité, l’équité ainsi que les questions d’ordre constitutionnel et juridique ne permettent pas de contourner le processus administratif dès lors que ces questions peuvent être soulevées et réglées.

[8]  À mon avis, aucune circonstance exceptionnelle ne justifie que la présente demande de contrôle judiciaire soit instruite à ce stade. Si la SAI donne raison à la demanderesse et accueille son appel pour des motifs d’ordre humanitaire, la question de la validité deviendra théorique, puisqu’il sera sursis à la mesure de renvoi et qu’il n’y aura pas lieu de solliciter un contrôle judiciaire.

[9]  Cependant, si la SAI rejette l’appel et conclut qu’aucun motif d’ordre humanitaire ne compense son manquement à l’obligation de résidence, cette décision pourra faire l’objet d’un contrôle judiciaire. À ce moment‑là, les demandes de contrôle judiciaire à l’encontre des décisions relatives à la question préliminaire de la validité et aux motifs d’ordre humanitaire pourront être instruites conjointement.

[10]  Lors de l’audience, les avocats des deux parties ont consenti au premier paragraphe du présent jugement. Pour tous ces motifs, la présente demande sera rejetée au motif qu’elle est prématurée.

B.  Deuxième question

[11]  L’affidavit de la demanderesse comporte 47 paragraphes parmi lesquels de longs passages sont rédigés comme un mémoire des faits et du droit. À la rigueur, seuls les paragraphes 1 à 6, 13, 23 à 28, 32 à 37 et 42 jusqu’à la fin, ainsi que la première phrase du paragraphe 20 et les pièces justificatives, contiennent des éléments de preuve. Pour ce motif, l’affidavit en entier sera radié avec autorisation de déposer un autre affidavit qui comprendra uniquement des éléments de preuve.

C.  Troisième question

[12]  L’avocat du défendeur a sollicité des dépens de 500 $. Cependant, en l’absence de preuve pour étayer les motifs de la demande, aucuns dépens ne seront adjugés.

IV.  Certification

[13]  Aucune question n’a été proposée aux fins de certification en vue de l’appel.


JUGEMENT dans le dossier IMM-4252-19

LA COUR STATUE que :

  1. Sur consentement des parties, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée au motif qu’elle est prématurée. Si la SAI rejette l’appel interjeté pour des motifs d’ordre humanitaire, la demanderesse pourra solliciter le contrôle judiciaire de la décision du 13 juin 2017 et demander qu’elle soit instruite conjointement avec la demande de contrôle judiciaire de la décision défavorable relative aux motifs d’ordre humanitaire.

  2. L’affidavit supplémentaire de la demanderesse est radié dans son intégralité, avec autorisation de déposer un autre affidavit qui comprendra uniquement des éléments de preuve.

  3. Aucuns dépens ne sont adjugés.

« Sandra J. Simpson »

Juge

Traduction certifiée conforme

Mylène Boudreau, traductrice


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-4252-19

INTITULÉ :

REMA HARRACKSINGH-MOORE c MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 19 OCTOBRE 2020

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE SIMPSON

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

LE 19 OCTOBRE 2020

COMPARUTIONS :

Philton Moore

POUR LA DEMANDERESSE

Charles Jubenville

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

MOORES LAW AND DISPUTE RESOLUTION PRACTICE

Avocats

Fenwick (Ontario)

POUR LA DEMANDERESSE

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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