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Date : 20201102


Dossier : T-1880-18

Référence : 2020 CF 1026

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 2 novembre 2020

En présence de monsieur le juge Manson

ENTRE :

SHAW COMMUNICATIONS CANADA INC

demanderesse

et

CHRISTINE AMER

défenderesse

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Introduction

[1]  Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision datée du 25 septembre 2018, rendue à la suite d’un arbitrage visé à la Section XIV, partie III du Code canadien du travail, LRC, 1985, c L-2 [le Code] et ayant déterminé que la défenderesse a été congédiée injustement [la décision].

II.  Contexte

[2]  La demanderesse, Shaw Communications Canada Inc., est un fournisseur de télécommunications sous réglementation fédérale. Elle offre à ses clients des services d’accès internet, de câblodiffusion et de téléphonie. La défenderesse, Mme Christine Amer, travaillait comme agente de soutien technique [AST] pour la demanderesse en juin 2012. Elle avait été recrutée à titre d’agente de service à la clientèle [ASC] par la demanderesse autour de septembre 2008.

[3]  La demanderesse a congédié la défenderesse le 17 avril 2016 au motif qu’elle était censément incapable de satisfaire aux attentes fondamentales de son poste « en dépit d’avertissements de vive voix et par écrit ».

[4]  Au cours des années, différents superviseurs ont procédé à l’évaluation périodique du rendement de la défenderesse. Trois de ces superviseurs [le premier, le deuxième et le troisième] ont témoigné devant l’arbitre. Les évaluations du rendement effectuées par d’autres superviseurs ont aussi été analysées. Les évaluations en général servaient à déterminer si la défenderesse répondait aux attentes sous plusieurs aspects, y compris l’« accent sur le client », les « compétences en ventes », la « connaissance du produit » et la « ponctualité ». La décision a mentionné les « indicateurs de rendement clés » faisant partie des évaluations, à partir de 2014 et 2015, dont la satisfaction des clients, la productivité ou le temps de traitement moyen, le taux de résolution par l’agent, les ventes et l’inscription à la facture électronique. Le travail de la défenderesse a été évalué en partie au moyen de sondages auprès de la clientèle et de l’écoute d’appels, toutes des mesures prises par les superviseurs.

[5]  L’arbitre a pris connaissance des évaluations du rendement de la défenderesse remontant à février 2011. Bien que les évaluateurs se soient attardés au rendement global de la défenderesse dans plusieurs domaines, les problèmes concernaient surtout la présumée incapacité continue de la défenderesse au regard des éléments suivants :

  1. Atteindre les objectifs au titre des ventes et des nouveaux produits ou services;

  2. Verser les notes au dossier après chaque appel [inscription de notes au dossier];

  3. Confirmer les adresses de courriel aux fins de la facturation électronique [factures électroniques];

  4. Obtenir la recommandation de membres de la famille ou d’amis des clients [Recommander-Un-Ami].

[6]  Les compétences techniques de la défenderesse à titre d’AST n’étaient pas en jeu, non plus que sa capacité de répondre aux demandes de soutien technique des clients.

[7]  La défenderesse s’est vu offrir des mesures d’encadrement, qui ont été longuement décrites par le premier et le deuxième superviseurs. Les parties ne sont pas du même avis quant à la volonté de la défenderesse de s’améliorer.

[8]  La demanderesse allègue que les difficultés de la défenderesse à exercer plusieurs de ses fonctions essentielles à titre d’AST se sont aggravées en décembre 2014 ou en janvier 2015, quand la défenderesse a commencé à suivre des cours puis à effectuer un stage connexe de quatre semaines (d’avril à mai 2015) afin d’obtenir un diplôme d’assistante de bureau de médecin. Pendant un certain temps, jusqu’en avril ou mai 2015, elle fréquentait l’école ou effectuait son stage de 8 h à midi puis travaillait comme AST pour la défenderesse de 14 h à 22 h.

[9]  Dans un courriel du 1er octobre 2015, la défenderesse a été avertie que, si elle ne parvenait pas à atteindre ses objectifs, la demanderesse pourrait adopter des mesures disciplinaires pouvant aller jusqu’au congédiement.

[10]  Une note de service du 16 février 2020 intitulée « Avertissement écrit au sujet des attentes relatives au rendement » avait aussi pour but de provoquer une amélioration immédiate et soutenue en ce qui a trait aux ventes, aux nouveaux produits ou services, aux factures électroniques et à l’inscription de notes au dossier. Elle renferme la mise en garde suivante :

Plus précisément, nous avons des préoccupations au sujet de votre rendement dans le domaine des ventes, des nouveaux produits ou services, de l’inscription à la facture électronique étant donné que vous n’avez pas répondu à ces attentes au cours des six derniers mois. Nous avons communiqué avec vous à quelques occasions […] et nous nous attendons à ce que vous parliez constamment des avantages de l’option Recommander-Un-Ami, des forfaits de programmation télévisuelle, de la facture électronique à nos clients, ce qui vous aiderait à atteindre vos objectifs en ventes, nouveaux produits ou services et facture électronique à chaque mois. […]

[…]

Sans une amélioration immédiate et soutenue au 31 mars 2016, nous prendrons d’autres sanctions disciplinaires pouvant aller jusqu’à votre congédiement.

[11]  Un avertissement semblable a été formulé dans une note de service datée du 3 mars 2016, intitulée « Dernier avertissement concernant les attentes relatives au rendement », rédigée par le troisième superviseur :

[…] cela continue d’être une préoccupation sérieuse, et ceci est votre dernier avertissement. Nous nous attendons à ce que vous atteigniez les objectifs plus haut d’ici le 31 mars 2016 et mainteniez le même niveau par après. Si nous ne constatons pas une amélioration immédiate dans vos Attentes relatives au rendement, nous vous congédierons pour un motif valable.

[12]  Le 14 avril 2016, la défenderesse a reçu un courriel du troisième superviseur relativement à une rencontre qui avait eu lieu cette même journée, où des inquiétudes étaient encore exprimées. Afin de déterminer si les objectifs étaient atteints, il y avait eu écoute d’appels choisis au hasard. Ce courriel dont l’objet était « Résumé de la rencontre », précisait ce qui suit :

Le 5 avril 2016, j’ai écouté 14 de vos appels au moyen de l’outil Calabrio, et vous avez constamment négligé de proposer la facture électronique dans vos appels. À sept occasions, vous auriez pu confirmer l’adresse de courriel figurant au dossier auprès du client, mais vous ne l’avez pas fait. Pour cinq autres appels, il n’y avait pas d’adresse de courriel au dossier du tout, et vous n’avez pas proposé au client d’opter pour la facture électronique ou abordé la question avec lui. De plus, je suis tombé sur quatre appels au cours desquels vous avez apporté votre aide à un client et n’avez laissé aucune note au dossier.

J’ai l’impression que vous ne prenez pas la situation au sérieux, et cela m’inquiète étant donné que vous n’avez pas communiqué avec moi pour me faire part de quelque difficulté que vous auriez pour atteindre vos objectifs. […]

[…] Christine, comme il a été dit à la réunion, nous allons revoir votre emploi ici à Shaw, nous prendrons une décision au cours des prochains jours et vous rencontrerons pour parler de la décision que nous avons prise.

[13]  La demanderesse a congédié la défenderesse le 17 avril 2016. Elle a fait connaître à la demanderesse les motifs de son congédiement, datés du 22 juillet 2016, conformément au paragraphe 241(1) du Code [la réponse exigée par le Code]. Elle y précisait ce qui suit :

[traduction]

Le rendement de Mme Amer était constamment inférieur aux attentes en ce qui concerne la qualité de son travail. Elle n’a jamais pu atteindre les objectifs de base d’un agent de soutien technique dans les domaines des ventes, des nouveaux produits ou services et des factures électroniques; en outre, elle n’a pas corrigé cette situation inacceptable même si elle a été avertie très clairement qu’elle devait s’améliorer […]

[…]

Même informée des conséquences, Mme Amer nous a démontré qu’elle n’était pas prête à s’améliorer et à suivre les lignes directrices de l’entreprise. Par conséquent, nous procédons à son congédiement justifié.

[14]  La défenderesse a produit le « Formulaire de plainte – Congédiement injuste » en application de la partie III du Code canadien du travail (Normes du travail) daté du 7 juin 2016. La présente instance fait suite à la décision qui est issue de cette plainte.

I.  Décision faisant l’objet du contrôle

[15]  L’arbitre a conclu que le congédiement était injuste. Elle a ordonné que la défenderesse soit indemnisée pour toute perte de salaire, ce qui comprend les primes, les avantages et les intérêts, à partir du 17 avril 2016 jusqu’à la date où la défenderesse a commencé son nouvel emploi. Elle a également imposé le versement d’une indemnité de départ, prévue à l’article 235 du Code, avec les intérêts applicables à ce montant moins les retenues réglementaires. En dernier lieu, elle a adjugé des dépens sur la base d’une indemnisation complète.

[16]  L’arbitre a analysé soigneusement les éléments de preuve, qu’elle a résumés dans sa décision d’environ 60 pages. Elle a examiné le rendement de la défenderesse à partir de 2008, alors qu’elle était ASC, notamment les évaluations du rendement qui remontaient à février 2011, jusqu’à son congédiement. Elle a constaté ce qui suit :

  1. La défenderesse a assuré les services techniques requis de façon satisfaisante pour le poste d’AST;

  2. La preuve n’a pas établi de façon claire et convaincante que les ventes, la promotion des nouveaux produits ou services et les factures électroniques constituaient des attentes fondamentales pour le poste d’AST;

  3. Les statistiques et les chiffres sur lesquels se fonde la demanderesse ne constituent pas un portrait digne de foi du rendement de la défenderesse en ce qui concerne les ventes, la promotion des nouveaux produits ou services et les factures électroniques, entre autres parce que les appels écoutés ne formaient pas un échantillon représentatif;

  4. La défenderesse n’a pas eu l’occasion de contester ou de vérifier les statistiques et les chiffres de manière indépendante, ni ses propres appels;

  5. Le bien-fondé des inquiétudes relatives à l’inscription de notes au dossier n’a pas été établi à la lumière des comptes examinés;

  6. La fiabilité des résultats du sondage n’a pas été établie.

[17]  Globalement, l’arbitre n’a pas été convaincue que les chiffres et les statistiques qui lui ont été présentés constituaient une représentation exhaustive et exacte du rendement et des comportements de la défenderesse, ni que les évaluations du rendement de la défenderesse par le troisième superviseur, le 3 mars 2016 et le 5 avril 2016, avaient donné lieu à un incident culminant.

II.  Questions en litige

[18]  Les questions à trancher sont les suivantes :

  1. La décision de l’arbitre quant au congédiement injuste et aux réparations accordées est-elle déraisonnable?

  2. Y a-t-il eu atteinte à l’équité procédurale du fait que la demanderesse n’a pas eu l’occasion de présenter des éléments de preuve ou des observations sur les questions déterminantes ou du fait que l’arbitre avait un parti pris?

III.  Norme de contrôle

[19]  Les parties ne s’entendent pas sur la norme de contrôle applicable. Selon la demanderesse, c’est la norme de la décision correcte qui doit régir les questions d’équité procédurale, tandis que la défenderesse plaide que la présomption générale favorisant la norme de la décision raisonnable n’a pas été réfutée en l’occurrence, compte tenu des faits (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 au para 23 [Vavilov]).

[20]  Les décisions des arbitres en droit du travail chargés d’interpréter des lois ou des ententes qui relèvent de leur expertise, particulièrement les dispositions du Code sur le congédiement injuste, appellent l’application de la norme de la décision raisonnable (Wilson c Énergie atomique du Canada Ltée, 2016 CSC 29 aux para 15-16 [Wilson]; Vavilov, précité, aux para 83-87). Le raisonnement sous-tendant l’analyse de l’arbitre en l’espèce en ce qui a trait aux fonctions essentielles d’un AST et le caractère approprié des réparations qu’elle a ordonnées sont examinés selon la norme de la décision raisonnable.

[21]  Les questions relevant de l’équité procédurale appellent l’application de la norme de la décision correcte, ce qui sous-entend que les parties ont la possibilité de présenter des éléments de preuve et des observations sur ce qui constituerait les enjeux déterminants de même que sur la partialité reprochée à l’arbitre. Les exigences procédurales précises, tributaires du contexte, sont examinées ci-dessous (Vavilov, au para 77; Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12 au para 43). La négation du droit à l’équité procédurale rend une décision invalide (Cardinal c Directeur de l’Établissement Kent, [1985] 2 RCS 643 au para 23).

IV.  Analyse

[22]  La demanderesse fait valoir que l’arbitre a fondé sa décision sur des questions qui n’avaient pas été abordées avec les avocats et pour lesquelles aucun élément de preuve n’a été présenté. Par conséquent, les parties n’ont pas eu la possibilité de débattre des enjeux qui constituent le fondement de la décision. Il est allégué que l’arbitre a manifesté un parti pris entachant aussi sa décision. En outre, la demanderesse souligne que l’arbitre a commis des erreurs dans les réparations qu’elle a accordées, en ordonnant des mesures qui se recoupent, en adjugeant des dépens indemnitaires substantiels injustifiés et en procédant à un examen inapproprié des mesures d’atténuation des dommages.

[23]  La défenderesse estime de son côté qu’il était raisonnable de considérer son congédiement injuste, parce que cette conclusion était justifiée et appartenait aux issues acceptables au regard des faits et de la preuve. La décision relative aux réparations entre dans le vaste champ de compétences que le Code confère à l’arbitre, et il n’y a pas eu d’erreur dans l’analyse des mesures d’atténuation. La demanderesse avait été véritablement avisée de l’ampleur des réparations accordées. De plus, l’arbitre n’a pas violé les principes d’équité procédurale, et il n’y a aucune preuve de sa partialité.

A.  Paramètres applicables aux congédiements injustes aux termes du Code

[24]  Les articles 240 à 246 du Code permettent aux employés admissibles de contester leur congédiement s’ils l’estiment injuste. Le critère applicable à la décision rendue par l’arbitre saisi d’une plainte pour congédiement injuste est énoncé dans l’arrêt McKinley c BC Tel, 2001 CSC 38 [McKinley]. L’examen factuel en l’occurrence nécessite que soit analysé soigneusement l’ensemble des circonstances et que les éléments suivants soient soupesés : (1) La preuve démontre-t-elle, selon la prépondérance des probabilités, que l’inconduite à la base du congédiement s’est véritablement produite? (2) Dans l’affirmative, la nature et la gravité de l’inconduite justifiaient-elles un congédiement? (McKinley, précité, au para 49). Il s’agit d’une question de proportionnalité où « [il] faut établir un équilibre utile entre la gravité de l’inconduite d’un employé et la sanction infligée » (McKinley, aux para 53-54).

[25]  Bien que ce critère ait été formulé dans un contexte de common law, il a été jugé également applicable quand il s’agit de déterminer si le congédiement d’un employé est injuste aux fins du Code (Payne c Banque de Montréal, 2013 CAF 33 au para 45).

[26]  À titre préliminaire, la défenderesse demande à notre Cour d’attribuer peu de poids au contre-interrogatoire auquel a été soumise la défenderesse relativement au premier affidavit qu’elle a déposé dans la présente instance. Il est allégué que ce contre-interrogatoire est peu représentatif de ce qui s’est déroulé à l’audience et qu’il ne rend pas compte de tous les éléments de preuve contradictoires. Qui plus est, il n’est pas reconnu dans les Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, qui ne permettent pas la tenue d’un réinterrogatoire après le contre-interrogatoire. La défenderesse a eu la possibilité de s’opposer au contre-interrogatoire supplémentaire mais ne l’a pas fait. Cette preuve sera prise en considération.

B.  La décision de l’arbitre quant au congédiement injuste et aux réparations accordées est-elle déraisonnable?

(1)  Congédiement injuste

[27]  La défenderesse a plaidé que son rendement était bon à de nombreux égards quand elle travaillait comme AST, y compris pour ce qui était de résoudre les problèmes techniques des clients. Elle satisfaisait apparemment aux attentes globales et s’est montrée désireuse d’obtenir un encadrement. Elle a donc fait valoir que l’arbitre avait le pouvoir de tirer les conclusions de fait figurant dans sa décision, soit que la demanderesse n’était pas parvenue à démontrer qu’elle avait des motifs justifiant le congédiement.

[28]  La demanderesse allègue que l’arbitre a limité abusivement les « fonctions essentielles » d’un AST à des exigences techniques, même si la liste des fonctions essentielles énumérées dans la réponse exigée par le Code n’a pas été contestée.

[29]  L’arbitre, dans sa décision, s’exprime comme suit :

Je conclus, selon les éléments de preuve dont je dispose, et selon la prépondérance des probabilités, que Mme Amer répondait de façon satisfaisante aux « attentes fondamentales » de son poste d’agente de soutien technique quand il s’agissait de régler les problèmes techniques des clients. Il se peut qu’elle n’ait pas répondu aux « cinq attentes non négociables » de Shaw au chapitre des ventes, des nouveaux produits ou services et de la facture électronique, mais j’ai conclu que les éléments de preuve, particulièrement l’échantillon très limité d’appels écoutés, n’étayent pas de façon claire et convaincante les conclusions tirées par Shaw. De plus, en l’absence d’une description d’emploi, je ne peux pas conclure que les « cinq attentes non négociables » étaient les mêmes que les « attentes fondamentales » de Shaw pour un agent de soutien technique. En l’absence d’une description d’emploi et du poids que le document aurait probablement accordé aux compétences, aux capacités et aux comportements requis pour traiter les problèmes techniques des clients, comparativement à ceux requis pour les ventes et pour la promotion des nouveaux produits ou services et de la facture électronique, je ne peux pas conclure que les éléments de preuve produits par Shaw ont établi le « niveau requis » et « une incapacité » de la part de Mme Amer qui l’aurait rendue « incapable d’effectuer le travail ».

[30]  Le dossier montre qu’il était déraisonnable pour l’arbitre de conclure que l’inscription de notes au dossier, les ventes, les nouveaux produits ou services et la facture électronique ne constituaient pas des attentes fondamentales rattachées au poste d’AST. Ces éléments représentaient clairement des paramètres constants dans les évaluations du rendement de la défenderesse. Celle-ci a reçu un encadrement, une formation et des communications périodiques relativement à ces paramètres. Des préoccupations ont été soulevées mois après mois à partir de l’embauche de la défenderesse par la demanderesse et ont donné lieu à plusieurs avertissements. La défenderesse a admis elle-même qu’elle savait que son emploi était en péril si elle ne parvenait pas à atteindre les objectifs fixés par la demanderesse. L’ensemble de la preuve montre que ces éléments formaient une partie essentielle du rôle de la défenderesse au poste d’AST. La décision était déraisonnable dans la mesure où elle se fonde sur cette conclusion. De plus, l’importance accordée à l’absence d’une description d’emploi qui préciserait quelles sont ces fonctions essentielles est déraisonnable à la lumière de l’intégralité du dossier.

(2)  Réparation

[31]  L’arbitre a ordonné en l’espèce les réparations suivantes :

[…] j’ordonne à l’employeur, Shaw Communications Inc., d’indemniser sur-le-champ Mme Amer pour toute perte de salaire, ce qui comprend les primes, les avantages sociaux et les intérêts, à partir du 17 avril 2016 jusqu’à la date où elle a commencé son nouvel emploi, et de lui verser une indemnité de départ aux termes de l’article 235 du Code canadien du travail, précité, avec les intérêts applicables à ce montant, moins les retenues réglementaires, et les dépens sur une base d’indemnité complète.

[32]  Elle souligne également ceci dans sa décision :

De plus, au lieu de congédier sommairement Mme Amer, sans préavis ni salaire tenant lieu de préavis et d’indemnité de départ, Shaw aurait pu délivrer à Mme Amer un « préavis travaillé » dans le cadre duquel elle aurait pu continuer de travailler à titre d’AST pendant une période donnée, p. ex. deux ou trois mois, avant de la congédier, pour lui donner le temps de se retourner et de trouver un autre emploi tout en touchant son revenu habituel.

[33]  Selon la défenderesse, les réparations ordonnées par l’arbitre reflètent les larges pouvoirs dont elle est investie au paragraphe 242(4) du Code. Les dépens peuvent jouer un rôle important pour contrebalancer les effets d’un congédiement injuste, car ils permettent que les sommes accordées par l’arbitre ne soient pas amputées des frais judiciaires et des honoraires à payer. Comme ce montant est lié à l’indemnité de départ, l’arbitre avait le pouvoir d’accorder l’équivalent de ce qu’elle aurait pu adjuger directement en application de l’article 235 du Code, conformément au paragraphe 242(4) du Code. De surcroît, la demanderesse n’a apparemment pas réussi à s’acquitter de son fardeau, soit prouver que les efforts d’atténuation des dommages de la défenderesse étaient déraisonnables, de sorte que l’argument de la demanderesse relatif à l’atténuation des dommages est dénué de fondement.

[34]  Je suis d’avis que l’arbitre a commis une erreur en accordant les réparations précitées pour les deux motifs suivants :

  1. Elle a adjugé des dépens d’indemnisation substantiels qui n’étaient pas justifiés par ses motifs;

  2. Elle a accordé des réparations qui se recoupent en ordonnant le dédommagement au titre de la perte de salaire et le versement d’une indemnité de départ.

[35]  Le Code confère un vaste pouvoir discrétionnaire en matière de réparations, dont des mesures équitables non limitatives (Wilson, précité, au para 63). Si un arbitre conclut qu’un congédiement est injuste, il est investi de larges pouvoirs lui permettant d’accorder la réparation convenable, en vertu du paragraphe 242(4) du Code, y compris celui d’enjoindre à l’employeur :

a) de payer au plaignant une indemnité équivalant, au maximum, au salaire qu’il aurait normalement gagné s’il n’avait pas été congédié;

b) de réintégrer le plaignant dans son emploi;

c) de prendre toute autre mesure qu’il juge équitable de lui imposer et de nature à contrebalancer les effets du congédiement ou à y remédier.

(Wilson, au para 6; Code, art 242(4))

[36]  Malgré l’étendue de ces pouvoirs, je ne crois pas que le résultat, eu égard aux réparations, soit raisonnablement justifié (Vavilov, aux para 86-87), plus précisément parce que l’arbitre n’a pas motivé l’octroi de dépens sur la base d’une indemnisation complète ni le dédommagement au titre de la perte de salaire conjugué à une indemnité de départ.

[37]  La décision met en lumière une certaine incohérence interne puisque l’arbitre explique dans ses motifs pourquoi les faits ne justifient pas l’octroi de dommages-intérêts majorés et/ou punitifs et qu’elle précise en même temps que la demanderesse n’a pas agi de mauvaise foi tout en adjugeant des dépens d’indemnisation (Banque de Nouvelle-Écosse c Randhawa, 2018 CF 487 aux para 60-63 [Randhawa]) :

[60]  Il existe deux principes directeurs concernant l’adjudication de dépens sur une base procureur-client. D’abord, comme l’a affirmé la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Young c. Young, [1993] 4 RCS 3, à la page 134 : « Les dépens comme entre procureur et client ne sont généralement accordés que s’il y a eu conduite répréhensible, scandaleuse ou outrageante d’une des parties. » […]

[61]  Le deuxième principe directeur veut que lorsque de telles adjudications extraordinaires ont lieu, le décideur doit expliquer le fondement de sa décision en vertu des principes établis dans l’arrêt Lee-Shanok; le fait de ne pas offrir une telle explication peut constituer une erreur susceptible de révision […]

[62]  J’estime que même si l’arbitre avait compétence pour adjuger des dépens, y compris des dépens procureur-client, le fait qu’il n’ait pas expliqué ses motifs pour ordonner une adjudication aussi extraordinaire rend cet aspect de l’adjudication déraisonnable. C’est précisément le type de situation où l’absence de motifs est fatale, parce que je ne puis que spéculer sur les raisons ayant amené l’arbitre à ordonner une telle adjudication (Newfoundland Nurses; Leahy c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CAF 227, au paragraphe 121).

[63]  L’absence de motifs laisse encore plus perplexe, compte tenu de la décision de l’arbitre de rejeter la demande de la défenderesse en vue d’obtenir des dommages-intérêts majorés et punitifs, comme il l’explique au paragraphe 113 de sa décision […]

[38]  Il est possible d’analyser le caractère raisonnable d’une décision même en l’absence de motifs, ce qui est le cas en l’espèce selon moi :

[138]  Il existe néanmoins des situations dans lesquelles aucuns motifs n’ont été fournis et où ni le dossier ni le contexte général ne permettent de discerner le fondement de la décision en cause. En pareil cas, la cour de révision doit tout de même examiner la décision à la lumière des contraintes imposées au décideur afin de déterminer s’il s’agit d’une décision raisonnable. Toutefois, il est peut-être inévitable que faute de motifs, l’analyse soit alors centrée sur le résultat plutôt que sur le raisonnement du décideur. Il ne s’ensuit pas pour autant que le contrôle selon la norme de la décision raisonnable est moins rigoureux dans ces circonstances; il prend seulement une forme différente.

(Vavilov au para 138)

[39]  Je conviens avec la demanderesse qu’il y a double recouvrement en l’espèce, ce qui rend la décision déraisonnable. Comme l’a énoncé la Cour suprême dans l’arrêt Wilson au paragraphe 47 :

[47]  Les modifications de 1978 avaient pour effet de restreindre l’application du par. 230(1) (préavis) et du par. 235(1) (indemnité de départ minimale) aux situations non visées par les dispositions sur le congédiement injuste. Par exemple, les prescriptions en matière de préavis et d’indemnité de départ prévues aux par. 230(1) et 235(1) s’appliquent aux directeurs, à ceux qui sont mis à pied en raison d’un manque de travail ou d’une suppression de poste et, dans le cas du par. 230(1), aux employés ayant travaillé pour l’employeur pour plus de 3 mois consécutifs, mais moins de 12 mois. Autrement dit, les par. 230(1) et 235(1) n’offrent pas une alternative aux dispositions sur le congédiement injuste; elles s’appliquent seulement à ceux qui ne se prévalent pas des art. 240 à 246 ou ne peuvent s’en prévaloir (Redlon Agencies, par. 38-39; Wolf Lake First Nation c. Young, 1997 CanLII 5057 (C.F. 1re inst.), par. 50).

[40]  La défenderesse a choisi de se prévaloir des dispositions du Code sur le congédiement injuste. À cet égard, l’ordonnance de l’arbitre relativement à l’article 235 du Code et ses commentaires concernant le « préavis travaillé » qui aurait pu être donné à la défenderesse posent problème. Même si je ne suis pas prêt à conclure que ces réparations, pour l’essentiel, ne font pas partie des mesures équitables prévues à l’alinéa 242(4)c) du Code, elles offrent néanmoins sans raison une mesure de rechange aux dispositions sur le congédiement injuste dans le cadre de la décision en l’espèce, et aucun motif n’est donné pour relier ces réparations à l’alinéa 242(4)c) du Code.

[41]  Quant à l’atténuation des dommages, je constate que l’arbitre a fourni des motifs complets, et aucune erreur rendant la décision déraisonnable à cet égard ne m’a été signalée. La demanderesse se fonde sur des listes d’emplois qui montrent, selon elle, une abondance de postes disponibles en centres d’appels, et elle estime problématique que la défenderesse ait postulé à quelques reprises seulement à ces endroits. La défenderesse souhaitait se trouver un emploi dans un centre médical, ce qui aurait prolongé sa recherche. À mon avis, la demanderesse demande à notre Cour de soupeser à nouveau les éléments de preuve factuels qui avaient été présentés à l’arbitre.

[42]  Je ne crois pas qu’il s’agisse en l’espèce d’un cas où les réparations accordées sont justifiées à la lumière du dossier, particulièrement en ce qui concerne les dépens d’indemnisation, le dédommagement pour la perte continue de salaire et l’indemnité de départ. En conséquence, la décision eu égard aux réparations, sauf pour ce qui concerne l’atténuation des dommages, est déraisonnable.

C.  Y a-t-il eu atteinte à l’équité procédurale du fait que la demanderesse n’a pas eu l’occasion de présenter des éléments de preuve ou des observations sur les questions déterminantes ou du fait que l’arbitre avait un parti pris?

(1)  Présentation d’éléments de preuve et d’observations

[43]  J’abonde dans le même sens que la demanderesse quand elle soutient que l’arbitrage en cas de congédiement injuste met en jeu des intérêts importants et suppose la tenue d’une audience relativement formelle fondée sur le principe du débat contradictoire (Randhawa, précité, au para 44). Je suis d’accord également pour dire que les deux exigences suivantes doivent être satisfaites : il faut que l’arbitre soit impartial et que les parties bénéficient d’un préavis adéquat et de l’occasion de se faire entendre :

Il importe de souligner dès le début que les arguments de l’appelante soulèvent des questions relativement à deux règles importantes, mais distinctes, de justice naturelle. On a souvent dit que ces règles peuvent se répartir en deux catégories, savoir [TRADUCTION] « que le décideur doit être désintéressé et impartial (nemo judex in causa sua) et que les parties doivent recevoir un préavis suffisant et avoir la possibilité d’être entendues (audi alteram partem) » […]

(Sitba c Consolidated-Bathurst Packaging Ltd, [1990] 1 RCS 282 à la p 322)

[44]  Les parties doivent avoir la possibilité raisonnable de répondre à tout nouveau moyen sur lequel elles n’ont pas soumis de plaidoiries. À cet égard, je conviens que les parties auraient dû être informées que l’enjeu tournait autour de la portée des fonctions essentielles rattachées au poste d’AST et autour des preuves statistiques sur lesquelles s’est appuyée la demanderesse pour démontrer que la défenderesse n’est jamais parvenue à atteindre ses objectifs. Ces points n’ont pas été débattus par les parties, mais ils constituent néanmoins le fondement sur lequel s’appuie l’arbitre pour conclure qu’il n’y a pas eu d’incident culminant, en l’absence d’une représentation exhaustive et exacte du rendement de la défenderesse, ce qui l’a amenée à conclure que le congédiement était injuste.

[45]  L’arbitre s’est attardée aux données chiffrées et aux statistiques dont s’est servie la demanderesse pour évaluer le rendement de la défenderesse dans plusieurs parties en italiques de sa décision. Elle en a conclu, par exemple, en ce qui a trait aux résultats du sondage, que « la preuve n’a pas établi la fiabilité des résultats du sondage ».

[46]  Elle s’exprime comme suit concernant les objectifs relatifs à l’inscription de notes au dossier :

[…] Les éléments de preuve n’ont pas établi que la personne qui avait conclu qu’il n’y avait pas de notes au dossier dans quatre de ses comptes le 2 mars 2016 n’avait vérifié que le compte lui-même ou avait cherché si une note de service se rapportant au compte avait été créée dans le système.

[47]  Pour ce qui est du nombre d’appels écoutés, par exemple, l’arbitre a constaté ce qui suit :

Les éléments de preuve n’établissent pas que M. Waseem [le deuxième superviseur] a écouté plus de deux des appels traités par Mme Amer par semaine […]. Mme Amer ne savait pas qu’elle pouvait demander comment l’employeur était arrivé à ses chiffres ou « statistiques » et si les sondages ou les échantillonnages réalisés étaient représentatifs de ses appels et de son rendement en général.

[48]  Les parties n’ont pas contesté les fonctions essentielles rattachées au poste d’AST ni le caractère suffisant des preuves statistiques présentées. À cet égard, l’arbitre a « réorienté » l’analyse. Les parties n’en ont pas reçu un préavis adéquat et n’ont pas eu non plus la possibilité d’être entendues sur ce qui est devenu des questions déterminantes.

[49]  J’ai déjà conclu que la décision portant sur les réparations, sauf pour ce qui est de l’atténuation des dommages, était déraisonnable. Il est donc inutile de me prononcer sur la question du préavis.

(2)  Partialité

[50]  La demanderesse allègue que l’arbitre a fait preuve de parti pris quand elle est intervenue brusquement au tout début du contre-interrogatoire de la défenderesse pour demander à l’avocat de la demanderesse de « baisser le ton ». Aucune objection n’a été formulée par l’avocat de la défenderesse à ce sujet. L’arbitre aurait également pris la peine à plusieurs reprises de statuer contre la demanderesse sur des points non contestés. La demanderesse soutient par ailleurs que l’arbitre a adjugé des dépens d’indemnisation substantiels sans avoir conclu qu’il y avait eu mauvaise foi de la part de la défenderesse.

[51]  Pour trancher une allégation de partialité, il faut se demander à quelle conclusion en arriverait une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique. Croirait-elle que le décideur, consciemment ou non, ne rendra pas une décision juste? (Committee for Justice and Liberty c L’Office national de l’énergie, [1978] 1 RCS 369 à la p 394).

[52]  J’estime que cette condition minimale n’est pas remplie en l’espèce. La longueur et les détails de la décision montrent que l’arbitre a soupesé les éléments de preuve soigneusement. En outre, un seul incident où l’arbitre demande à l’avocat de « baisser le ton » n’amène pas à penser que l’arbitre rendrait une décision injuste contre la demanderesse.

V.  Conclusion

[53]  Pour ces motifs, j’accueille la présente demande en partie et je renvoie la décision à un autre arbitre pour une nouvelle décision. Je rejette la demande sur les questions de la partialité et de l’atténuation des dommages.

[54]  J’accorde des dépens en faveur de la demanderesse pour un montant fixe de 25 000 $, toutes taxes incluses. Le mémoire de frais que la demanderesse a déposé a été réduit à la discrétion de la Cour pour exclure les frais liés au dépôt de la demande modifiée et aux procédures préalables à l’audience ayant trait spécifiquement à la conférence de gestion d’instance.


JUGEMENT dans le dossier T-1880-18

LA COUR ORDONNE :

  1. La demande est accueillie en partie et l’affaire est renvoyée à un autre arbitre pour une nouvelle décision.

  2. La demande est rejetée sur les questions de la partialité et de l’atténuation des dommages seulement.

  3. Des dépens sont accordés à la demanderesse pour un montant fixe de 25 000 $, taxes incluses.

« Michael D. Manson »

Juge


ANNEXE A

Paragraphes 240(1), 241(1) et 242(4) du Code :

Congédiement injuste

Plainte

240 (1) Sous réserve des paragraphes (2) et 242(3.1), toute personne qui se croit injustement congédiée peut déposer une plainte écrite auprès d’un inspecteur si :

a) d’une part, elle travaille sans interruption depuis au moins douze mois pour le même employeur;

b) d’autre part, elle ne fait pas partie d’un groupe d’employés régis par une convention collective.

Unjust Dismissal

Complaint to inspector for unjust dismissal

240 (1) Subject to subsections (2) and 242(3.1), any person

(a) who has completed twelve consecutive months of continuous employment by an employer, and

(b) who is not a member of a group of employees subject to a collective agreement,

may make a complaint in writing to an inspector if the employee has been dismissed and considers the dismissal to be unjust.

Motifs du congédiement

241 (1) La personne congédiée visée au paragraphe 240(1) ou tout inspecteur peut demander par écrit à l’employeur de lui faire connaître les motifs du congédiement; le cas échéant, l’employeur est tenu de lui fournir une déclaration écrite à cet effet dans les quinze jours qui suivent la demande.

Reasons for dismissal

241 (1) Where an employer dismisses a person described in subsection 240(1), the person who was dismissed or any inspector may make a request in writing to the employer to provide a written statement giving the reasons for the dismissal, and any employer who receives such a request shall provide the person who made the request with such a statement within fifteen days after the request is made.

Cas de congédiement injuste

(4) S’il décide que le congédiement était injuste, le Conseil peut, par ordonnance, enjoindre à l’employeur :

a) de payer au plaignant une indemnité équivalant, au maximum, au salaire qu’il aurait normalement gagné s’il n’avait pas été congédié;

b) de réintégrer le plaignant dans son emploi;

c) de prendre toute autre mesure qu’il juge équitable de lui imposer et de nature à contrebalancer les effets du congédiement ou à y remédier.

Unjust dismissal

242 (4) If the Board decides under subsection (3) that a person has been unjustly dismissed, the Board may, by order, require the employer who dismissed the person to

(a) pay the person compensation not exceeding the amount of money that is equivalent to the remuneration that would, but for the dismissal, have been paid by the employer to the person;

(b) reinstate the person in his employ; and

(c) do any other like thing that it is equitable to require the employer to do in order to remedy or counteract any consequence of the dismissal.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1880-18

 

INTITULÉ :

SHAW COMMUNICATIONS CANADA INC c CHRISTINE AMER

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 22 OCTOBRE 2020

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE MANSON

 

DATE DES MOTIFS :

LE 2 NOVEMBRE 2020

 

COMPARUTIONS :

Howard Levitt

Maxwell Radway

POUR LA DEMANDERESSE

Wesley Jamieson

POUR LA DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

LEVITT LLP

Toronto (Ontario)

POUR LA DEMANDERESSE

ROSS & MCBRIDE LLP

Hamilton (Ontario)

POUR LA DÉFENDERESSE

 

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