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Date : 20030530

Dossier : T-990-02

Référence : 2003 CFPI 688

Vancouver (Colombie-Britannique), le vendredi 30 mai 2003

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BLAIS

ENTRE :

                                               DEANE SPEAKMAN HAROLD

                                                                                                                                        demandeur

                                                                            et

                     L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA

                                                                                                                                  défenderesse

                          MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE


[1]                 Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire de la décision par laquelle Joanne Ralla, directrice adjointe au centre fiscal de Surrey, Agence des douanes et du revenu du Canada (l'ADRC), a refusé, le 27 mai 2002, la demande que Deane Speakman Harold (le demandeur) avait faite en vue de la renonciation aux intérêts et pénalités pour production tardive qui avaient été imposés pour les années d'imposition 1998, 1999 et 2000 ou en vue de leur annulation, conformément au paragraphe 220 (3.1) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la Loi) ainsi qu'à la Circulaire d'information 92-2 intitulée : Lignes directrices concernant l'annulation des intérêts et des pénalités [les Lignes directrices].

LES FAITS

[2]                 Le demandeur est un particulier qui réside en Colombie-Britannique.

[3]                 Par une lettre en date du 25 avril 2001, le demandeur a demandé qu'il soit renoncé aux intérêts et aux pénalités pour les années d'imposition 1998, 1999 et 2001 [la première demande fondée sur l'équité] pour les motifs ci-après énoncés :

1)          Son beau-père était décédé le 10 janvier 1994 en Nouvelle-Zélande, de sorte que sa conjointe avait été obligée de se rendre en Nouvelle-Zélande;

2)          Sa belle-mère avait eu un accident cérébrovasculaire au mois d'octobre 1995 et il avait dû la soigner;

3)          Sa conjointe avait subi une opération à l'estomac au mois de septembre 1999 et il avait été obligé de la soigner; et

4)          Il y avait eu un glissement de terrain sur sa propriété le 17 décembre 1999, ce qui avait donné lieu à une poursuite judiciaire contre laquelle il avait dû se défendre.

[4]                 Le 29 août 2001, une agente de l'ADRC, June Leib, Division des demandes de renseignements et des redressements, a examiné la première demande fondée sur l'équité du demandeur. Dans son rapport et sur sa feuille de travail, l'agente a examiné les points suivants et a recommandé le rejet de la première demande fondée sur l'équité :

a)          Le demandeur avait produit ses déclarations en retard de 1996 à 1999;

b)          Il n'y avait pas de circonstances atténuantes indépendantes de la volonté du demandeur. Le demandeur, qui étudiait à l'université à plein temps, avait déclaré un revenu T4 d'au moins 85 000 $ en 1998, en 1999 et en l'an 2000;

c)          Le glissement de terrain sur la propriété du demandeur, en l'an 2000, et la poursuite judiciaire qui en avait résulté n'influaient pas sur la capacité du demandeur de produire ses déclarations à temps pour les années 1996, 1997 ou 1998;

d)          Le demandeur avait aidé les membres de sa famille à produire à temps leurs déclarations de revenu individuelles pour les années en question.

[5]                 Le 18 septembre 2001, le chef d'équipe à l'ADRC, Kari Farmer, Division des demandes de renseignements et des redressements, a examiné le rapport de Mme Leib ainsi que la lettre du demandeur et a refusé la première demande fondée sur l'équité.

[6]                 Par une lettre en date du 10 octobre 2001, Mme Farmer a informé le demandeur de la décision de l'ADRC.

[7]                 Par une lettre en date du 27 novembre 2001, le demandeur a présenté une deuxième demande fondée sur l'équité en vue de la renonciation aux intérêts et aux pénalités pour les années d'imposition 1998, 1999 et 2000.

[8]                 Le 17 janvier 2002, une agente de l'ADRC, Pat Maeda, Division des demandes de renseignements et des redressements, a examiné la deuxième demande fondée sur l'équité. Dans son rapport, l'agente a tenu compte des points ci-après énoncés et a recommandé le rejet de la deuxième demande fondée sur l'équité :

a)          Les déclarations de revenu pour les années 1991 et 1992 ainsi que pour les années 1996 à 1999 du demandeur avaient été produites en retard;

b)          Le glissement de terrain, chez le demandeur, était survenu le 17 décembre 1999, ce qui n'aurait pas influé sur la production des déclarations de revenu de 1998 et de 1999;

c)          Le demandeur a pu produire à temps ses déclarations de revenu de l'an 2000 même si l'on construisait un mur de soutènement chez lui et malgré la poursuite judiciaire dont il faisait l'objet;

d)          Pendant les années en cause, le demandeur étudiait à l'université à plein temps et il travaillait;

e)          Il ne semblait pas y avoir de circonstances atténuantes empêchant le demandeur de produire à temps ses déclarations de revenu pour les années 1998 et 1999; et

f)           Le demandeur n'avait pas donné de renseignements additionnels aux fins du deuxième examen.


[9]                 En examinant la deuxième demande fondée sur l'équité, Mme Ralla a examiné tous les arguments du demandeur ainsi que les rapports préparés par les agents de l'ADRC. Elle a tenu compte des points ci-après énoncés et a recommandé le rejet de la deuxième demande fondée sur l'équité :

a)          Il n'y avait pas de circonstances inhabituelles empêchant le demandeur de produire à temps ses déclarations;

b)          Par le passé, avant les années en question, le demandeur n'avait pas toujours produit ses déclarations à temps; et

c)          Le demandeur n'avait pas fourni de renseignements additionnels aux fins du deuxième examen.

[10]            Par une lettre en date du 6 février 2002, Mme Ralla a informé le demandeur que l'ADRC avait décidé de refuser sa deuxième demande fondée sur l'équité.

[11]            Par une lettre en date du 6 mars 2002, le demandeur a fait une troisième demande fondée sur l'équité en vue de la renonciation aux intérêts et pénalités pour les années d'imposition 1998, 1999 et 2000.


[12]            Mme Maeda a examiné la troisième demande fondée sur l'équité. Dans son rapport, elle a recommandé le rejet de la dernière demande pour le motif que le demandeur n'avait pas fourni de nouveaux renseignements sauf pour donner des précisions au sujet des renseignements déjà soumis.

[13]            Mme Maeda a soumis à Mme Ralla, le 1er mai 2002, un rapport dans lequel elle recommandait le rejet de la troisième demande fondée sur l'équité.

[14]            Par une lettre en date du 27 mai 2002, Mme Ralla a informé le demandeur que l'ADRC avait décidé de rejeter la troisième demande fondée sur l'équité.

[15]            La demande de contrôle judiciaire porte sur cette dernière décision.

[16]            J'aimerais souligner que le demandeur a soumis un nouveau document, à savoir la lettre du docteur Breckenridge, après avoir reçu la décision par laquelle l'ADRC rejetait sa troisième demande fondée sur l'équité.

LE POINT LITIGIEUX

Le ministre a-t-il exercé son pouvoir discrétionnaire de la façon appropriée, conformément au paragraphe 220(3.1) de la Loi, en refusant la demande que le demandeur avait faite en vue de la renonciation aux intérêts et pénalités pour les années d'imposition 1998, 1999 et 2000 ou en vue de leur annulation?


DISPOSITIONS LÉGISLATIVES PERTINENTES

[17]            Le paragraphe 220(1) de la Loi, qui est ainsi libellé, traite de l'obligation qui incombe au ministre :


220(1) Le ministre assure l'application et l'exécution de la présente loi. Le commissaire des douanes et du revenu peut exercer les pouvoirs et fonctions conférés au ministre en vertu de la présente loi.

220(1) The Minister shall administer and enforce this Act and the Commissioner of Customs and Revenue may exercise all the powers and perform the duties of the Minister under this Act.


[18]            Le paragraphe 220(2.01) de la Loi se rapporte à la délégation possible des pouvoirs et fonctions :


220(2.01) Le ministre peut autoriser un fonctionnaire ou une catégorie de fonctionnaires à exercer les pouvoirs et fonctions qui lui sont conférés en vertu de la présente loi.

220(2.01) The Minister may authorize an officer or a class of officers to exercise powers or perform duties of the Minister under this Act.


[19]            Le paragraphe 220(3.1) se rapporte à la renonciation aux pénalités et aux intérêts :

220(3.1) Le ministre peut, à tout moment, renoncer à tout ou partie de quelque pénalité ou intérêt payable par ailleurs par un contribuable ou une société de personnes en application de la présente loi, ou l'annuler en tout ou en partie. Malgré les paragraphes 152(4) à (5), le ministre établit les cotisations voulues concernant les intérêts et pénalités payables par le contribuable ou la société de personnes pour tenir compte de pareille annulation.

220(3.1) The Minister may at any time waive or cancel all or any portion of any penalty or interest otherwise payable under this Act by a taxpayer or partnership and, notwithstanding subsections 152(4) to 152(5), such assessment of the interest and penalties payable by the taxpayer or partnership shall be made as is necessary to take into account the cancellation of the penalty or interest.

[20]            Les Lignes directrices donnent des exemples de circonstances indépendantes de la volonté du contribuable :


5. Il sera convenable d'annuler la totalité ou une partie des intérêts ou des pénalités, ou de renoncer à ceux-ci, si ces intérêts ou ces pénalités découlent de situations indépendantes de la volonté du contribuable ou de l'employeur. Voici des exemples de situations extraordinaires qui pourraient empêcher un contribuable, un agent d'un contribuable, l'exécuteur d'une succession ou un employeur de faire un paiement dans les délais exigés ou de se conformer à d'autres exigences de la Loi de l'impôt sur le revenu :

5. Penalties and interest may be waived or cancelled in whole or in part where they result from circumstances beyond a taxpayer's control. For example, one of the following extraordinary circumstances may have prevented a taxpayer, a taxpayer's agent, the executor of an estate, or an employer from making a payment when due, or otherwise complying with the Income Tax Act:

a) une calamité naturelle ou une catastrophe provoquée par l'homme comme une inondation ou un incendie;

(a) natural or human-made disasters such as, flood or fire;

b) des troubles civils ou l'interruption de services comme une grève des postes;

(b) civil disturbances or disruptions in services such as, a postal strike;

c) une maladie grave ou un accident grave;

(c) a serious illness or accident; or

d) des troubles émotifs sérieux ou une souffrance morale grave comme un décès dans la famille immédiate.

(d) serious emotional or mental distress such as, death in the immediate family.

6. L'annulation des intérêts ou des pénalités ou la renonciation à ceux-ci peuvent également être justifiées si ces intérêts ou pénalités découlent principalement d'actions attribuables au Ministère comme dans les cas suivants :

6. Cancelling or waiving interest or penalties may also be appropriate if the interest or penalty arose primarily because of actions of the Department, such as:

a) des retards de traitement, ce qui a eu pour effet que le contribuable n'a pas été informé, dans un délai raisonnable, de l'existence d'une somme en souffrance;

(a) processing delays which result in the taxpayer not being informed, within a reasonable time, that an amount was owing;

b) des erreurs dans la documentation mise à la disposition du public, ce qui a amené des contribuables à soumettre des déclarations ou à faire des paiements en se fondant sur des renseignements erronés;

[...]

(b) material available to the public contained errors which led taxpayers to file a return or make payments based on incorrect information;

...

d) des erreurs de traitement;

e) des renseignements fournis en retard comme dans le cas où un contribuable n'a pu faire les paiements voulus d'acomptes provisionnels ou d'arriérés parce qu'il n'avait pas les renseignements nécessaires.

(d) errors in processing; or

(e) delays in providing information such as the case where the taxpayer could not make the appropriate instalment or arrears payments because the necessary information was not available.

[21]            L'article 10 des Lignes directrices énumère les facteurs à prendre en considération pour déterminer s'il faut renoncer aux intérêts et pénalités ou les annuler :


10. Le Ministère tiendra compte des points suivants dans l'étude de demandes d'annulation des intérêts ou des pénalités ou de renonciation à ceux-ci :

10. The following factors will be considered when determining whether or not the Department will cancel or waive interest or penalties:

a) si le contribuable ou l'employeur a respecté, par le passé, ses obligations fiscales;

(a) whether or not the taxpayer or employer has a history of compliance with tax obligations;

b) si le contribuable ou l'employeur a, en connaissance de cause, laissé subsister un solde en souffrance qui a engendré des intérêts sur arriérés;

(b) whether or not the taxpayer or employer has knowingly allowed a balance to exist upon which arrears has accrued;

c) si le contribuable ou l'employeur a fait des efforts raisonnables et s'il n'a pas fait preuve de négligence ni d'imprudence dans la conduite de ses affaires en vertu du régime d'autocotisation;

(c) whether or not the taxpayer or employer has exercised a reasonable amount of care and has not been negligent or careless in conducting their affairs under the self-assessment system;

d) si le contribuable ou l'employeur a agi avec diligence pour remédier à tout retard ou à toute omission.

(d) whether or not the taxpayer or employer has acted quickly to remedy any delay or omission.


ANALYSE

Norme de contrôle


[22]            Dans la décision Edwards c. Canada (Agence des douanes et du revenu du Canada), (2002) CFPI 618, [2002] A.C.F. no 841, Monsieur le juge Pinard a confirmé la norme de contrôle à appliquer lorsque l'on demande à la Cour d'examiner une décision rendue conformément à un pouvoir discrétionnaire :

[10]          Dans la décision Boudreault c. Canada (ADRC), [2002] A.C.F. no 126 (1re inst.) (QL), Monsieur le juge Blais a confirmé la norme de contrôle établie par Monsieur le juge Rouleau dans la décision Kaiser c. Ministre du Revenu national (1995), 93 F.T.R. 66, lorsque les cours ont à examiner l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire tel que celui dont il est ici question. Voici ce qui a été dit, page 68 :

L'objet de cette disposition législative est de permettre à Revenu Canada, Impôt, de gérer plus équitablement le régime fiscal, en faisant la place au bon sens dans le traitement des contribuables qui, en raison de leur infortune ou de situations indépendantes de leur volonté, sont incapables de respecter des délais ou de se conformer aux règles propres au régime fiscal. Le libellé de l'article confère au ministre un large pouvoir discrétionnaire de renoncer aux intérêts en tout temps. Pour le guider dans l'exercice de ce pouvoir, des lignes directrices ont été formulées; elles sont exposées dans la circulaire 92-2.

La jurisprudence a établi une norme que sont tenus d'appliquer les tribunaux lorsqu'ils doivent contrôler l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire comme celui dont il est question en l'espèce. Dans l'arrêt Maple Lodge Farms Ltd. c. Gouvernement du Canada, [1982] 2 R.C.S. p. 2; 44 N.R. 354; 137 D.L.R. (3d) 558 (C.S.C.), le juge McIntyre a dit aux pages 7 et 8 :

En interprétant des lois semblables à celles qui sont visées en l'espèce et qui mettent en place des arrangements administratifs souvent compliqués et importants, les tribunaux devraient, pour autant que les textes législatifs le permettent, donner effet à ces dispositions de manière à permettre aux organismes administratifs ainsi créés de fonctionner efficacement comme les textes le veulent. À mon avis, lorsqu'elles examinent des textes de ce genre, les cours devraient, si c'est possible, éviter les interprétations strictes et formalistes et essayer de donner effet à l'intention du législateur appliquée à l'arrangement administratif en cause. C'est aussi une règle bien établie que les cours ne doivent pas s'ingérer dans l'exercice qu'un organisme désigné par la loi fait d'un pouvoir discrétionnaire simplement parce que la cour aurait exercé ce pouvoir différemment si la responsabilité lui en avait incombé. Lorsque le pouvoir discrétionnaire accordé par la loi a été exercé de bonne foi et, si nécessaire, conformément aux principes de justice naturelle, si on ne s'est pas fondé sur des considérations inappropriées ou étrangères à l'objet de la loi, les cours ne devraient pas modifier la décision.

[...]


[12] À l'audience qui a eu lieu devant moi, les avocats des deux parties ont soutenu que la norme de contrôle applicable à la décision discrétionnaire qui a été prise en l'espèce est celle de la décision manifestement déraisonnable. Je suis d'accord.

Par conséquent, la norme de contrôle applicable à la décision ici en cause est celle de la décision manifestement déraisonnable.

Le ministre a-t-il exercé son pouvoir discrétionnaire d'une façon appropriée conformément au paragraphe 220(3.1) de la Loi en refusant la demande que le demandeur avait faite en vue de la renonciation aux intérêts et pénalités pour les années d'imposition 1998, 1999 et 2000 ou en vue de leur annulation?

[23]            Le premier point à examiner se rapporte à l'admissibilité de la lettre du docteur Breckenridge que le demandeur a soumise après que la décision ici en cause eut été prise. Pendant l'audience, j'ai informé le demandeur qu'étant donné qu'elle ne faisait pas partie de la documentation examinée par le décideur, ladite lettre ne devait pas être prise en considération.

[24]            Le ministre devait se demander si les événements invoqués par le demandeur constituaient des circonstances extraordinaires ayant empêché celui-ci de déclarer d'une façon régulière et correcte son revenu personnel imposable pour les années 1998, 1999 et 2000.

[25]            Mme Maeda a soumis à Mme Ralla un rapport en date du 1er mai 2002. Mme Ralla a examiné les documents suivants en ce qui concerne la troisième demande fondée sur l'équité :

(1)         Le rapport préparé par Mme Maeda;

(2)         La feuille de travail relative à l'équité préparée par Mme Maeda;

(3)         La lettre du demandeur relative à la première demande fondée sur l'équité;

(4)         Le rapport préparé par Mme Leib;

(5)         La feuille de travail relative à l'équité préparée par Mme Leib;

(6)         La lettre du demandeur relative à la deuxième demande fondée sur l'équité, accompagnée de pièces;

(7)         La lettre du demandeur relative à la troisième demande fondée sur l'équité; et

(8)         Le rapport préparé par Mme Maeda.

[26]            Après avoir examiné les documents susmentionnés, Mme Ralla a appliqué l'article 10 des Lignes directrices; elle s'est demandé :

a)          Si le contribuable avait respecté, par le passé, ses obligations fiscales;

b)          Si le contribuable avait en connaissance de cause laissé subsister un solde en souffrance qui avait engendré des intérêts;

c)          Si le contribuable avait fait des efforts raisonnables et s'il n'avait pas fait preuve de négligence ni d'imprudence dans la conduite de ses affaires en vertu du régime d'autocotisation;


d)          Si le contribuable faisait face à des difficultés qui influaient sur sa capacité de payer les montants fixés; et

e)          Si le contribuable avait agi avec diligence pour remédier à tout retard ou à toute omission.

[27]            En décidant de refuser la troisième demande fondée sur l'équité, Mme Ralla a tenu compte des points suivants :

a)          Pendant les années en question, le demandeur avait réussi à s'acquitter d'un certain nombre d'obligations, notamment à l'égard de ses immeubles à usage locatif, et il avait aidé d'autres personnes à préparer leurs déclarations;

b)          Le demandeur s'était acquitté de toutes ses autres obligations; il avait notamment suivi des cours, de sorte qu'il aurait dû être en mesure de produire à temps ses déclarations de revenu; et

c)          Il n'existait aucune situation extraordinaire empêchant le demandeur de produire à temps ses déclarations.

[28]            Je comprends bien les difficultés auxquelles le demandeur a fait face, mais je ne crois pas que le représentant du ministre ait exercé son pouvoir discrétionnaire d'une façon inéquitable. En outre, je conclus qu'il n'existe absolument aucun fondement permettant de conclure que le représentant du ministre n'a pas tenu compte de tous les renseignements soumis par le demandeur avant d'arriver à la décision ici en cause.


[29]            À mon avis, étant donné que le demandeur a pu aider des membres de sa famille à produire leurs déclarations de revenu au cours des années d'imposition 1998, 1999 et 2000, il aurait dû être en mesure de veiller à ce que ses propres déclarations de revenu soient produites à temps ces années-là.

[30]            Dans sa troisième demande fondée sur l'équité, le demandeur dit ce qui suit :

[TRADUCTION] Il a été dit que le fait que j'ai produit à temps les déclarations de ma famille pour les années 1996 à 2000 montre que j'aurais pu produire mes propres déclarations à temps, mais je me suis efforcé, compte tenu du temps dont je disposais, de veiller à ce que leurs déclarations soient produites à temps pour les années en question, et le fait que je suivais des cours à plein temps à l'université, que j'exerçais deux emplois à temps partiel, que j'avais des responsabilités familiales, à cause des malencontreux événements dont il a ci-dessus été fait mention; que j'agissais comme conseiller et que je m'occupais de l'administration d'immeubles de rapport et de l'aliénation de biens immobilisés a créé un cauchemar sur le plan de la tenue de livres.

[31]            Que la tenue de livres ait été un cauchemar ou non, il reste que chaque particulier doit veiller à ce que ses déclarations de revenu soient produites avant l'expiration du délai imparti.

[32]            Dans la décision ici en cause, le représentant du ministre informe le demandeur que si ses [TRADUCTION] « registres ou livres comptables n'étaient pas à jour au moment où il devait produire sa déclaration, il aurait pu produire une déclaration de revenu dans laquelle il estimait son revenu, et il aurait pu demander par la suite un rajustement en vue de faire corriger la déclaration initiale » .


[33]            Par conséquent, je crois que le demandeur aurait pu faire de plus grands efforts dans la conduite de ses affaires en vertu du régime d'autocotisation.

[34]            Un autre point pertinent est le fait que le demandeur n'avait pas respecté, par le passé, ses obligations fiscales. De fait, la feuille de travail de Mme Maeda (pièce H) semble montrer que le demandeur a produit en retard ses déclarations de revenu pour les années d'imposition 1991, 1992, 1996, 1997, 1998 et 1999.

[35]            Quant au seul argument que le demandeur a invoqué, à savoir que les Lignes directrices justifient d'une façon raisonnable la renonciation aux intérêts et aux pénalités, je conclus que l'article 3 desdites Lignes directrices est tout à fait pertinent :

Ce qui est énoncé ici ne constitue que des lignes directrices. La présente circulaire n'est donc pas exhaustive et ne doit pas être interprétée comme limitant l'esprit ou l'intention des mesures législatives. Ces lignes directrices seront modifiées au besoin suivant l'expérience acquise.

[36]            Encore une fois, comme il en a été fait mention dans l'arrêt Maple Lodge Farms Ltd. c. Gouvernement du Canada, [1982] 2 R.C.S. 2, à la page 7 :

[...] Lorsque le pouvoir discrétionnaire accordé par la loi a été exercé de bonne foi et, si nécessaire, conformément aux principes de justice naturelle, si on ne s'est pas fondé sur des considérations inappropriées ou étrangères à l'objet de la loi, les cours ne devraient pas modifier la décision. [...]


[37]            En tranchant la question en litige, il faut se rappeler les remarques qui précèdent. Par conséquent, je suis convaincu que le ministre a exercé de la façon appropriée son pouvoir discrétionnaire, conformément au paragraphe 220(3.1) de la Loi, en refusant la demande que le demandeur avait faite en vue de la renonciation aux intérêts et pénalités pour les années d'imposition 1998, 1999 et 2000 ou en vue de leur annulation.

ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

La demande de contrôle judiciaire est rejetée, les dépens étant adjugés à la défenderesse.

« Pierre Blais »

Juge

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                                      T-990-02

INTITULÉ :                                                                     Deane Speakman Harold

c.

Agence des douanes et du revenu du Canada

LIEU DE L'AUDIENCE :                                             Vancouver (C.-B.)

DATE DE L'AUDIENCE :                                           le 29 mai 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :                           Monsieur le juge Blais

DATE DES MOTIFS :                                                  le 30 mai 2003

COMPARUTIONS :

M. Deane Speakman Harold                                           POUR SON PROPRE COMPTE

M. J.S. (Bill) Basran                                                          POUR LA DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

M. Morris Rosenberg                                                        POUR LA DÉFENDERESSE

Sous-procureur général du Canada                                 

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