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Date : 20020415

Dossier : IMM-4563-00

Ottawa (Ontario), le 15 avril 2002.

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE LAYDEN-STEVENSON

ENTRE :

                                                                         LI ER NAN

                                                                                                                                                     demandeur

                                                                              - et -

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                      défendeur

                                                                     ORDONNANCE

La demande de contrôle judiciaire de la décision de l'agente des visas refusant la résidence permanente au Canada est rejetée.

                                                                                                                 « Carolyn A. Layden-Stevenson »    

                                                                                                                                                                 Juge                              

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


Date : 20020415

Dossier : IMM-4563-00

Référence neutre : 2002 CFPI 429

ENTRE :

                                                                         LI ER NAN

                                                                                                                                                     demandeur

                                                                              - et -

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                      défendeur

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE LAYDEN-STEVENSON

[1]              Li Er Nan, dans sa demande de contrôle judiciaire, demande que la décision du 25 juillet 2000 d'une agente des visas à l'ambassade du Canada à Beijing, refusant sa demande de résidence permanente au Canada, soit cassée et que la demande soit renvoyée à l'ambassade du Canada pour être examinée par un autre agent des visas.


[2]             Le demandeur est un citoyen de la République populaire de Chine. Il détient un diplôme en réparation de machines et de matériel électrique et un certificat du centre de formation du département d'informatique de l'Université de Jilin. Il travaillait depuis 1991 en tant qu'analyste du traitement électronique des données (TED) pour l'Industrial and Commercial Bank àTonghua.

[3]                 Le 11 août 1999, Li Er Nan a formulé une demande de résidence permanente au Canada dans la catégorie des travailleurs qualifiés. Sa demande comprenait son épouse à titre de personne à charge. Le demandeur s'est rendu à l'ambassade, avec son épouse, le 21 mars 2000 pour son entrevue avec l'agente des visas. L'entrevue est résumée dans les notes du Système de traitement informatisé des dossiers d'immigration (STIDI) de l'agente des visas, qui fait partie du dossier du tribunal. Bien que le demandeur ait indiqué, dans sa demande, une capacité de parler anglais, il est rapidement devenu évident au cours de l'entrevue qu'il avait besoin de traduction. Après que les examens de langue anglaise aient été passés, l'entrevue s'est déroulée par l'entremise d'un interprète.

[4]                 Le demandeur a été avisé par lettre datée du 25 juillet 2000 qu'il n'avait pas obtenu suffisamment de points d'appréciation pour se qualifier pour l'immigration. L'agente des visas, dans sa correspondance, a décrit les points d'appréciation accordés au demandeur. Le total de 68 ne satisfaisait pas à l'exigence minimale de 70 points. Le demandeur conteste l'attribution, par l'agente des visas, de 4 points d'appréciation pour les qualités personnelles et il affirme que l'agente des visas a erré en n'attribuant que 4 points d'appréciation sur une possibilité de 10.


[5]                 Le demandeur soutient qu'une décision d'un agent des visas doit être prise équitablement (Lowe c. Minister of Employment and Immigration (1987), 16 F.T.R. 124) et devrait être révisée suivant la norme de la décision raisonnable simpliciter (Hao c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2000), 184 F.T.R. 246), qui est définie dans l'arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, au paragraphe 63. Plus particulièrement, le demandeur soutient qu'une évaluation plus vaste des qualités personnelles d'un candidat est requise lorsque, comme ici, il manque seulement 1 ou 2 points d'appréciation au demandeur par rapport au total requis. (Maniruzzaman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1999), 167 F.T.R. 139).

[6]                 Le demandeur note la déclaration dans l'affidavit de l'agente des visas selon laquelle elle a tenu compte [traduction] « du fait qu'il avait appris l'anglais dans des cours du soir pendant un an et demi sans améliorer ses compétences linguistiques jusqu'à un niveau lui permettant de tenir une conversation normale en anglais » . Le demandeur réfère à la décisionTing c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1996), 122 F.T.R. 238 dans laquelle la Cour, en annulant la décision d'une agente des visas, commentait l'existence d'une grande communauté chinoise à Vancouver alors qu'elle révisait l'évaluation de la faculté d'adaptation de la candidate. Par analogie, le demandeur soutient que le raisonnement dans Ting s'applique à Toronto, la destination projetée du demandeur, où vit également une grande communauté asiatique.

[7]                 Le demandeur ajoute qu'il a démontré de la motivation et de l'initiative en téléchargeant des documents de recherche à partir d'Internet, ce qui comprend des recherches d'emploi et des renseignements relatifs aux niveaux de rémunération, de même qu'au coût de la vie au Canada et qu'il a répondu à des questions sur ces sujets durant son entrevue.


[8]                 Enfin, le demandeur soutient qu'en évaluant ses qualités personnelles, l'agente des visas aurait dû tenir compte de la profession de conseillère en voyages de l'épouse du demandeur (une profession énumérée dans la liste des professions offrant des possibilités d'emploi) et de son aisance en anglais. À cet égard, le demandeur invoque la décision Wen c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1999), 164 F.T.R. 144 dans laquelle la Cour a conclu que l'employabilité de la femme du demandeur était un facteur pertinent dans l'évaluation des qualités personnelles de ce dernier. Appliquant la décision Wen à l'espèce, le demandeur affirme que l'agente des visas a commis une erreur susceptible de révision en ignorant des renseignements pertinents.

[9]             Le défendeur, invoquant les décisions To c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1996] A.C.F. no 696 (C.A.F.) et Bhatti c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. no 1889 (C.F. 1re inst.), affirme que la norme de contrôle pour les conclusions de fait est celle de la décision manifestement déraisonnable. Quant aux questions mixtes de droit et de fait, la norme est celle de la décision raisonnable simpliciter. Canada (Directeur des enquêtes et recherches) c. Southam Inc., [1997] 1 R.C.S. 748, Dhillon c. Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 684 (C.F. 1re inst.), Negriy c. Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration) (2000), 182 F.T.R. 290, Gupta c. Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration) (2000), 186 F.T.R. 232 et Lu c. Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration) (1999), 176 F.T.R. 263. Quant àla décision discrétionnaire relativement au facteur de la personnalité, la norme est celle de la décision manifestement déraisonnable. Kompanets c. Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration) (2000), 196 F.T.R. 61, Arora c. Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 389 (C.F. 1re inst.), Ali c. Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration), [1998] A.C.F. no 1080 (C.F. 1re inst.) et Suniara c. Canada (Minister of Citizenship and Immigration), [2000] A.C.F. no 989 (C.F. 1re inst.).


[10]            Le défendeur affirme que le demandeur a fait défaut de démontrer que l'agente des visas avait erré dans l'évaluation des qualités personnelles.

[11]            Les dispositions législatives pertinentes se retrouvent dans la Loi sur l'immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2,


6. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente loi et de ses règlements, tout immigrant, notamment tout réfugié au sens de la Convention, ainsi que toutes les personnes à sa charge peuvent obtenir le droit d'établissement si l'agent d'immigration est convaincu que l'immigrant satisfait aux normes réglementaires de sélection visant à déterminer s'il pourra ou non réussir son installation au Canada, au sens des règlements, et si oui, dans quelle mesure.

8. (1) Il incombe à quiconque cherche à entrer au Canada de prouver qu'il en a le droit ou que le fait d'y être admis ne contreviendrait pas à la présente loi ni à ses règlements.

9. (2) Le cas du demandeur de visa d'immigrant est apprécié par l'agent des visas qui détermine si le demandeur et chacune des personnes à sa charge semblent répondre aux critères de l'établissement.

9. (4) Sous réserve du paragraphe (5), l'agent des visas qui est convaincu que l'établissement ou le séjour au Canada du demandeur et des personnes à sa charge ne contreviendrait pas à la présente loi ni à ses règlements peut délivrer à ce dernier et aux personnes à charge qui l'accompagnent un visa précisant leur qualité d'immigrant ou de visiteur et attestant qu'à son avis, ils satisfont aux exigences de la présente loi et de ses règlements.

6. (1) Subject to this Act and the regulations, any immigrant, including a Convention refugee, and all dependants, if any, may be granted landing if it is established to the satisfaction of an immigration officer that the immigrant meets the selection standards established by the regulations for the purpose of determining whether or not and the degree to which the immigrant will be able to become successfully established in Canada, as determined in accordance with the regulations.

8. (1) Where a person seeks to come into Canada, the burden of proving that that person has a right to come into Canada or that his admission would not be contrary to this Act or the regulations rests on that person.

9. (2) An application for an immigrant's visa shall be assessed by a visa officer for the purpose of determining whether the person making the application and every dependant of that person appear to be persons who may be granted landing.

9. (4) Subject to subsection (5), where a visa officer is satisfied that it would not be contrary to this Act or the regulations to grant landing or entry, as the case may be, to a person who has made an application pursuant to subsection (1) and to the person's dependants, the visa officer may issue a visa to that person and to each of that person's accompanying dependants for the purpose of identifying the holder thereof as an immigrant or a visitor, as the case may be, who, in the opinion of the visa officer, meets the requirements of this Act and the regulations.


et dans le Règlement sur l'immigration de 1978, DORS/78-172, dans sa forme modifiée.



8. (1) Sous réserve de l'article 11.1, afin de déterminer si un immigrant et les personnes à sa charge, à l'exception d'un parent, d'un réfugié au sens de la Convention cherchant à se réinstaller et d'un immigrant qui entend résider au Québec, pourront réussir leur installation au Canada, l'agent des visas apprécie l'immigrant ou, au choix de ce dernier, son conjoint :

a) dans le cas d'un immigrant qui n'est pas visé aux alinéas b) ou c), suivant chacun des facteurs énumérés dans la colonne I de l'annexe I;

    2) Un agent des visas doit donner à l'immigrant qui est apprécié suivant les facteurs énumérés dans la colonne I de l'annexe I le nombre voulu de points d'appréciation pour chaque facteur, en s'en tenant au maximum fixé à la colonne III, conformément aux critères visés dans la colonne II de cette annexe vis-à-vis de ce facteur.

8. (1) Subject to section 11.1, for the purpose of determining whether an immigrant and the immigrant's dependants, other than a member of the family class, a Convention refugee seeking resettlement or an immigrant who intends to reside in the Province of Quebec, will be able to become successfully established in Canada, a visa officer shall assess that immigrant or, at the option of the immigrant, the spouse of that immigrant

(a) in the case of an immigrant, other than an immigrant described in paragraph (b) or (c), on the basis of each of the factors listed in column I of Schedule I;

    2) A visa officer shall award to an immigrant who is assessed on the basis of factors listed in Column I of Schedule I the appropriate number of units of assessment for each factor in accordance with the criteria set out in Column II thereof opposite that factor, but he shall not award for any factor more units of assessment than the maximum number set out in Column III thereof opposite that factor.


L'annexe I, colonne II prescrit :


Personnalité

Des points d'appréciation sont attribués au requérant au cours d'une entrevue qui permettra de déterminer si lui et les personnes à sa charge sont en mesure de réussir leur installation au Canada, d'après la faculté d'adaptation du requérant, sa motivation, son esprit d'initiative, son ingéniosité et autres qualités semblables.

Personal suitability

Units of assessment shall be awarded on the basis of an interview with the person to reflect the personal suitability of the person and his dependants to become successfully established in Canada based on the person's adaptability, motivation, initiative, resourcefulness and other similar qualities.


[12]            L'agente des visas a attribué quatre points d'appréciation au demandeur pour la personnalité. Les paragraphes 13 et 14 de l'affidavit de l'agente déclarent ce qui suit :

[traduction]


13. J'ai expliqué au requérant que, vu les renseignements disponibles par l'entremise d'Internet et de ses contacts au Canada plus les possibilités offertes pour améliorer la langue, d'une part, et le niveau de connaissances et de préparation démontré par les réponses durant l'entrevue d'autre part, je lui ai attribué un total de quatre points d'appréciation pour la personnalité.14. En particulier, afin d'évaluer la faculté d'adaptation du requérant, sa motivation, son ingéniosité et son esprit d'initiative, je lui ai posé des questions sur la façon de trouver une maison et un travail au Canada. J'ai également tenu compte du fait qu'il avait appris l'anglais par des cours du soir pendant la moitié d'une année sans améliorer ses compétences linguistiques à un niveau lui permettant de tenir une conversation normale en anglais. Je lui ai posé des questions au sujet des plans de son épouse au Canada. Les réponses étaient vagues et générales, les recherches d'emploi que le requérant avaient présentées afin d'appuyer sa recherche d'emploi au Canada n'étaient pas pertinentes par rapport à la profession qu'il envisageait et/ou le requérant ne satisfaisait pas aux exigences énoncées dans les annonces. Vu ces facteurs, j'ai estimé que les quatre points pour la personnalité reflétaient correctement les chances du requérant (et des personnes àcharge) de réussir (économiquement) son installation au Canada.

[13]            En ce qui a trait aux arguments du demandeur, je ne suis pas d'accord que la décision Maniruzzaman puisse s'appliquer à la proposition selon laquelle chaque fois qu'un demandeur est près du nombre de points d'appréciation nécessaires, une évaluation plus vaste du facteur des qualités personnelles est requise. Dans la décision Maniruzzaman, le juge Reed a annulé la décision de l'agente des visas en raison du fait qu'on avait accordé une valeur démesurée à des facteurs pertinents mais non essentiels. Dans la décision Ting, on a décidé que l'agente des visas n'avait pas appliqué correctement le critère de la faculté d'adaptation. Le demandeur, dans cette cause, avait démontré de nombreuses qualités indiquant un niveau de faculté d'adaptation élevé qui avaient été ignorées par l'agente des visas. Dans la décision Wen, le juge Tremblay-Lamer a identifié trois erreurs dans la décision de l'agente des visas, notamment une infraction aux règles de l'équité procédurale. Dans la décision Luo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2000), 185 F.T.R. 170, le juge Tremblay-Lamer a limité la décision Wen aux faits de ladite cause relativement à la profession de l'épouse. De plus, en l'espèce, l'affidavit de l'agente des visas, de même que les notes du STIDI établissent que l'agente a abordé la question de la profession envisagée de l'épouse.


[14]         Lors de l'audience, une bonne partie de l'argumentation de l'avocat se rapportait à la norme de contrôle appropriée à appliquer à l'évaluation des qualités personnelles par un agent des visas. Je conclus que, en l'espèce, les facteurs sur lesquels s'est appuyée l'agente des visas étaient pertinents aux qualités personnelles du demandeur et que l'évaluation a été faite sur la base de la preuve qui était devant elle. La pondération des facteurs pertinents demeure l'apanage du ministre ou de son délégué. Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration) c. Legault, 2002 C.A.F. 125, au paragraphe 11.

[15]         Dans les circonstances, l'évaluation des qualités personnelles de la part de l'agente des visas était raisonnable, que l'on applique la norme de la décision raisonnable simpliciter, ou celle de la décision manifestement déraisonnable. Par conséquent, pour les motifs mentionnés aux présentes, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[16]            Les avocats n'ayant pas suggéré de question grave de portée générale, il n'y a donc pas de question certifiée en vertu du paragraphe 83(1) de la Loi sur l'immigration.

  

                                                                                                                 « Carolyn A. Layden-Stevenson »    

                                                                                                                                                                 Juge                              

  

Ottawa (Ontario)

Le 15 avril 2002

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


                                                                                   

COUR FÉDÉ RALE DU CANADA

                        SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                         AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :           IMM-4563-00

INTITULÉ :              LI ER NAN c. M.C.I.

LIEU DE L'AUDIENCE :    TORONTO

DATE DE L'AUDIENCE :    LE 3 AVRIL 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR MADAME LE JUGE LAYDEN-STEVENSON

DATE DES MOTIFS :       LE 15 AVRIL 2002

COMPARUTIONS :

Ravi Jain                                           POUR LE DEMANDEUR

Marcel Larouche                                    POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Green et Spiegel        

Toronto (Ontario)                                  POUR LE DEMANDEUR

Morris Rosenberg                          

Sous-procureur général du Canada                        POUR LE DÉFENDEUR

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