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Date : 20040426

Dossier : T-1425-01

Référence : 2004 CF 615

AFFAIRE INTÉRESSANT un appel fondé sur l'article 21 de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, L.R.C. 1985, ch. P-33, modifié par l'article 16 de la Loi sur la réforme de la fonction publique, L.C. 1992, ch. 54

ET AFFAIRE INTÉRESSANT l'appel qu'a interjeté Michael K. Warren après un exercice du comité de promotion établi en application de mesures correctives à la suite des appels accueillis à l'encontre de la promotion de quelque 78 agents FS-01 du volet politique et économique au niveau FS-02

ENTRE :

                                                         MICHAEL K. WARREN

                                                                                                                                          demandeur

                                                                             et

                                        LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                           défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE GIBSON

INTRODUCTION


[1]                Les présents motifs font suite à l'audition d'une demande de contrôle judiciaire de la décision par laquelle le comité d'appel de la Commission de la fonction publique (le comité d'appel), présidé par B.A. Monk, a rejeté l'appel de Michael K. Warren (le demandeur) à l'encontre des sélections faites pour la nomination à des postes d'agents du service extérieur (FS-02) au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (MAECI), à Ottawa. La décision qui fait l'objet du présent contrôle judiciaire est datée du 6 juillet 2001.

[2]                L'audition de la présente demande a immédiatement suivi celle d'une demande connexe de contrôle judiciaire dans l'affaire intéressant Gordon L. Hiseler et Michael K. Warren, à titre de demandeurs, et le procureur général du Canada, à titre de défendeur, dans le dossier T-1621-00. Les deux demandes de contrôle judiciaire découlent du même concours d'avancement au MAECI, tenu en 1998. Dans leur demande, MM. Hiseler et Warren sollicitaient le contrôle judiciaire d'une décision antérieure par laquelle le comité d'appel de la Commission de la fonction publique (la décision « Carbonneau » ) avait accordé à M. Warren une réparation dont celui-ci n'était pas satisfait. L'affaire a donc été renvoyée au comité d'appel de la Commission de la fonction publique, qui a rendu la décision à l'examen. En raison de cette série de recours, une bonne partie des faits à l'origine du litige et toutes les dispositions législatives pertinentes qui figurent dans les présents motifs se trouvent aussi dans la décision Hiseler et Warren c. Procureur général du Canada. Les éléments communs des motifs des deux décisions figurent à l'annexe A des présentes.


[3]                À la suite de la décision Carbonneau[1], la demande d'avancement du demandeur à un poste au niveau FS-02 a été renvoyée à la Commission de la fonction publique (la Commission). Celle-ci a de nouveau signalé des mesures correctives et a confié leur mise en oeuvre au comité des mesures correctives dont la décision antérieure avait donné lieu à la décision Carbonneau.

[4]                À ce stade, les membres du comité des mesures correctives avaient pris connaissance de la première décision du comité d'appel de la Commission de la fonction publique (la décision « Nadeau » ). Les trois membres du comité des mesures correctives ont procédé à la vérification des références, chacun se chargeant d'examiner l'un des plus récents rapports d'évaluation du demandeur et de formuler des suggestions de questions. Celles-ci ont été approuvées par l'ensemble du comité et ont apparemment été distribuées au hasard parmi les membres du comité, qui ont ensuite procédé à la vérification des références. L'ensemble des membres du comité des mesures correctives a par la suite effectué une évaluation finale relativement au demandeur au cours d'une téléconférence au sujet de laquelle aucune des notes personnelles des membres n'a été conservée. En raison de ce processus, la note du demandeur a augmenté, passant de 110 à 115, un résultat encore bien inférieur à la note de passage, fixée à 180. En conséquence, le demandeur n'a pas été promu à un poste au niveau FS-02.

[5]                Le demandeur a par conséquent interjeté appel auprès du comité d'appel de la Commission de la fonction publique une troisième fois.

LA DÉCISION À L'EXAMEN

[6]                Le comité d'appel a rendu une décision détaillée de 41 pages par laquelle il a rejeté l'appel du demandeur à l'égard de tous les moyens invoqués dans sa demande. La décision fait un résumé des longues observations écrites dont le comité a été saisi, des réactions du MAECI et de la réponse du demandeur. Deux membres du comité des mesures correctives ont été contre-interrogés à l'audience ayant donné lieu à la décision à l'examen.

[7]                Voici la conclusion du comité d'appel :

[traduction]

L'appelant [le demandeur en l'espèce] ne m'a pas convaincu que la décision du comité de promotion était nettement déraisonnable. Le ministère a démontré, à ma satisfaction, que le comité de promotion avait respecté les mesures correctives prévues l'obligeant à effectuer une vérification des références afin de clarifier les incohérences ou combler les lacunes provenant des rapports d'évaluation du rendement et de leurs auteurs. Les membres du comité de promotion ont pris, par consensus, la même décision relativement à l'évaluation de l'appelant, en tenant compte des rapports d'évaluation du rendement, des évaluations narratives et de la vérification des références, qu'une personne raisonnable aurait prise en se fondant sur les renseignements dont elle disposait, et il n'y a aucun motif pour que je modifie leur décision. Il faut bien comprendre que l'appréciation du mérite de différentes personnes, fonction attribuée au comité de sélection [de promotion] , est [...] dans bien des cas, une affaire d'opinion [...] Dans la présente affaire, le comité d'appel n'a aucune raison d'intervenir dans la décision du comité de promotion.

Je suis d'avis que le comité de promotion a agi de bonne foi en effectuant la vérification des références de l'appelant Warren. En général, le comité d'appel n'a pas pour rôle de modifier la décision du jury de sélection si la sélection est fondée sur le mérite. Si cette exigence a été respectée et que le jury de sélection a accompli son devoir conformément à la Loi et à son Règlement et fait des efforts honnêtes pour choisir le candidat le plus méritant [...], alors l'appel doit être rejeté.

                                                                                                               [Deux renvois omis.]   

L'appel du demandeur a donc été rejeté.


QUESTIONS EN LITIGE

[8]                Les questions en litige dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire n'ont pas été véritablement contestées devant la Cour. Celles-ci s'énoncent comme suit. Premièrement, quelle est la norme de contrôle judiciaire appropriée? Deuxièmement, au regard de la norme de contrôle appropriée, la décision à l'examen est-elle entachée d'une erreur donnant lieu à révision? Dans l'affirmative, quelle est la réparation appropriée?

[9]                Bien que l'avocat du demandeur ait traité de la question de l'erreur pouvant donner lieu à contrôle judiciaire en faisant valoir cinq erreurs susceptibles d'un tel contrôle, cette question sera examinée globalement.

DISPOSITIONS LÉGISLATIVES PERTINENTES

[10]            Les dispositions législatives applicables à la présente demande de contrôle judiciaire sont les mêmes que celles de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique[2] sur lesquelles s'appuie la décision Hiseler et Warren, citée plus tôt. Ces dispositions sont reproduites à l'annexe A des présents motifs.


ANALYSE

a)         Norme de contrôle

[11]            Je suis convaincu que mon analyse de cette question dans la décision Hiseler et Warren est applicable en l'espèce. Cette analyse figure à l'annexe B des présents motifs.

b)         Erreur susceptible de contrôle judiciaire - sélection selon le mérite

[12]            Dans la seconde décision du comité d'appel rendue dans le cadre de la série de recours en cause - celle dont le contrôle a été demandé dans la décision Hiseler et Warren -, le comité a rejeté les résultats obtenus par M. Warren à l'issue de la deuxième série du processus de reclassification. Par conséquent, au sens du paragraphe 21(3) de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique et compte tenu du fait que le comité d'appel, dans la « décision Carbonneau » , avait établi que « [traduction] la procédure de sélection de M. Warren avait été entachée d'une irrégularité » , la Commission de la fonction publique a été chargée de « prendre toute mesure qu'elle jugeait indiquée pour remédier à [l]'irrégularité » . La Commission de la fonction publique a décidé de redonner vie au comité des mesures correctives en cause et de lui confier un nouveau mandat spécial. Je suis une fois de plus convaincu que le fait que ce mandat n'a peut-être pas été tout à fait conforme à la décision Carbonneau ou aux souhaits de M. Warren n'est pas pertinent.


[13]            Dans la décision Lalonde c. Canada (Procureur général)[3], j'ai écrit au paragraphe 25 :

Je tire une conclusion similaire à l'égard de l'allégation d'erreur de droit pour avoir omis d'accorder trois (3) points supplémentaires, tel qu'admis devant le premier Comité d'appel. L'attribution de trois (3) points supplémentaires en faveur du demandeur n'a pas été, pour quelque motif que ce soit, adoptée comme l'une des mesures correctives imposées par la Commission de la fonction publique. La décision examinée en l'espèce visait à savoir si les mesures correctives ordonnées avaient été mises en oeuvre convenablement. Le Comité d'appel a répondu à cette question. J'estime qu'il n'était pas tenu d'examiner des questions sous-jacentes aux mesures correctives ordonnées.

[14]            Dans la décision Lo c. Canada (Comité d'appel de la Commission de la fonction publique)[4], j'ai formulé la conclusion suivante :

Ainsi, le fait que Mme Steadman ait été mutée et qu'elle ait par la suite pris sa retraite n'a pas rendu la Commission de la fonction publique impuissante à prendre des mesures correctrices qui, dans les circonstances, n'étaient limitées que par son imagination, si le comité concluait que la procédure de sélection de Mme Steadman était entachée d'une irrégularité.

[...]

En conséquence, il aurait été loisible à la Commission de la fonction publique d'invoquer le paragraphe 21[3] pour prendre les mesures qu'elle jugeait indiquées pour remédier à l'irrégularité, malgré le fait que Mme Steadman avait été mutée et qu'elle avait par la suite pris sa retraite.

[15]            La Cour d'appel a tempéré ce qu'elle a semblé tenir pour des propos exagérés de ma part en écrivant, dans la décision Lo[5] :


Nous ne partageons pas l'avis du juge des requêtes selon lequel l'ajout du paragraphe 21(3) en 1993 donnait à la Commission le pouvoir « de prendre des mesures correctrices qui, dans les circonstances, n'étaient limitées que par son imagination » . Le paragraphe 21(3), surtout s'il est lu en même temps que le paragraphe 21(4), également une nouvelle disposition, ne donne à la Commission que le pouvoir de corriger un vice du processus de sélection attaqué; il ne donne pas à la Commission plus de pouvoir qu'elle n'en avait déjà en ce qui concerne la nomination elle-même. Dire, comme le fait le juge des requêtes, que la Commission a maintenant le pouvoir, grâce au processus d'appel, de prendre des mesures correctrices en faveur du candidat non reçu, c'est, à notre humble avis, ignorer l'objet très restreint du mécanisme d'appel. La Commission n'a pas été transformée en un tribunal habilité à prononcer des jugements déclaratoires ou à statuer sur des demandes de dommages-intérêts ou autres présentées par un candidat non reçu.

Je suis convaincu que la Cour d'appel, dans la décision précitée, ne s'est pas écartée du principe selon lequel la Commission de la fonction publique a la discrétion voulue pour déterminer les mesures indiquées, par suite de la décision d'un comité d'appel, pour s'assurer que les nominations soient bien fondées sur le mérite. Par conséquent, ne résiste tout simplement pas à l'analyse l'argument invoqué pour le compte du demandeur, portant que le comité des mesures correctives mis sur pied par la Commission de la fonction publique et mandaté par celle-ci était lié par la décision Nadeau et tenu d'appliquer ses conclusions à la lettre. Je suis convaincu que ce point de vue est confirmé par la décision de mon ancien collègue, le juge McKeown, dans la décision Maassen c. Canada (Procureur général)[6] lorsqu'il écrit au paragraphe 16 :

Les demandeurs soutiennent que le paragraphe 21(3) exige que la Commission prenne des mesures correctrices après avoir révoqué une nomination visée par un appel accueilli par un comité d'appel. Les demandeurs s'appuient sur une décision antérieure d'un comité d'appel [...], qui statuerait que la Commission doit prendre des mesures correctrices en conformité avec la décision du comité d'appel. Je suis néanmoins d'avis que le paragraphe 21(3) confère simplement à la Commission le pouvoir de remédier à une irrégularité signalée par le comité d'appel, sans l'obliger à y remédier. Comme je l'ai déjà mentionné, selon les paragraphes 21(2) et 21(3), la seule mesure que la Commission est tenue de prendre lorsqu'un appel d'une nomination est accueilli consiste à révoquer cette nomination.

                                                                                                                        [Renvoi omis.]

[16]            Compte tenu de ces décisions, je suis convaincu qu'en ce qui concerne la décision à l'examen, le comité d'appel a eu raison de conclure comme il l'a fait dans les motifs, précités, de sa décision. Autrement dit, je suis convaincu que le comité d'appel n'a pas commis une erreur susceptible de contrôle lorsqu'il a conclu que le comité des mesures correctives, d'où émanait la décision dont il était saisi, n'avait pas donné lieu à une ou des sélections en vue de nominations autrement que selon le principe du mérite.

c)         Réparation appropriée

[17]            Étant donné les résultats de l'analyse à laquelle j'ai procédé, la question de la réparation appropriée à accorder au demandeur ne se pose pas.

CONCLUSION

[18]            Compte tenu de la brève analyse qui précède, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée. L'avocat du défendeur a demandé les dépens. Je suis convaincu que ceux-ci devraient suivre l'issue de la cause. La Cour ordonnera donc au demandeur de payer au défendeur des dépens calculés selon le barème habituel.

                                                                       _ Frederick E. Gibson _             

                                                                                                     Juge                            

Ottawa (Ontario)

Le 26 avril 2004

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                                            ANNEXE A

CONTEXTE

Les deux demandeurs (M. Hiseler et M. Warren) travaillaient à l'époque concernée comme agents du service extérieur auprès du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (MAECI) et ils occupaient, avant le 1er décembre 1998, des postes de niveau FS-01.

En avril 1998, le MAECI a décidé d'éliminer progressivement les postes FS-01, ceux-ci devant devenir en bout de ligne des postes de niveau FS-02. Le MAECI a mis sur pied un « programme de carrière pour postes FS-01 » , de façon à donner aux personnes occupant alors de tels postes l'occasion d'accéder à des postes de niveau FS-02. Les intéressés, s'ils satisfaisaient aux critères de présélection minimaux, pourraient alors participer à un concours d'avancement interne devant décider de l'avancement des candidats en fonction du mérite individuel. On a prévu que le concours aurait lieu en octobre 1998.

Le comité de promotion a recouru à des normes de sélection telles que le nombre d'années de service, l'expérience, le rendement, les compétences, les qualités personnelles et les connaissances. En tout, 54 agents ayant des postes de niveau FS-01 ont accédé à des postes de niveau FS-02, avec prise d'effet le 1er décembre 1998. M. Hiseler était de ceux qui ont obtenu de l'avancement, mais pas M. Warren. Ce dernier et d'autres n'ayant pas eu d'avancement ont fait appel des résultats du concours auprès du comité d'appel de la Commission de la fonction publique (le premier appel et le premier comité d'appel).


Yves Nadeau, président du premier comité d'appel, a accueilli l'appel. En ce qui concerne M. Warren, le président a conclu que le comité de promotion avait dû se fier sur des rapports d'évaluation, à teneur variable, pour procéder à la vérification des références. Le président a enjoint d'élargir la portée de la vérification, de manière à ce que soient demandés des exemples spécifiques et des précisions pour étayer les déclarations générales figurant dans les rapports d'évaluation de M. Warren.

Par suite de la décision du président Nadeau, la Commission de la fonction publique (la CFP) a écrit au MAECI pour enjoindre que soit constitué un nouveau jury de sélection ou comité de promotion (le comité de promotion établi en application des mesures correctives, ou comité des mesures correctives) devant réévaluer, en fonction du mérite relatif, tous les participants au concours initial. On a enjoint au comité des mesures correctives de ne prendre des décisions qu'en s'appuyant sur une preuve concluante et exhaustive; le comité devait donc procéder à des vérifications de références dans les cas où les rapports d'évaluation étaient clairement entachés de lacunes et d'incohérences. Mis à part ces vérifications, il n'était pas enjoint au comité des mesures correctives d'examiner de nouveaux éléments de preuve.


En conformité avec les directives de la CFP, le MAECI a mis sur pied un comité des mesures correctives et fixé son mandat. Chaque membre du comité devait, après une présélection initiale, examiner les trois évaluations du rendement les plus récentes de chaque candidat, et lui attribuer une note pour le rendement, les connaissances et le potentiel. Les membres du comité devaient ensuite se réunir pour établir par consensus les notes de chaque candidat. On a fixé à 180 points sur 300, selon un système de points d'appréciation, le seuil requis pour l'avancement.

Par suite des travaux du comité des mesures correctives, 64 agents ont été promus à des postes de niveau FS-02. Ni M. Hiseler ni M. Warren n'ont obtenu suffisamment de points pour être admissibles à l'avancement. Quatre agents, dont MM. Hiseler et Warren, ont de nouveau interjeté appel, cette fois auprès du comité d'appel présidé par Gaston Carbonneau.

[...]

DISPOSITIONS LÉGISLATIVES PERTINENTES

Voici l'article 10 et les extraits pertinents de l'article 21 de la Loi de l'emploi dans la fonction publique[7] :


10. (1) Les nominations internes ou externes à des postes de la fonction publique se font sur la base d'une sélection fondée sur le mérite, selon ce que détermine la Commission, et à la demande de l'administrateur général intéressé, soit par concours, soit par tout autre mode de sélection du personnel fondé sur le mérite des candidats que la Commission estime le mieux adapté aux intérêts de la fonction publique.

10. (1) Appointments to or from within the Public Service shall be based on selection according to merit, as determined by the Commission, and shall be made by the Commission, at the request of the deputy head concerned, by competition or by such other process of personnel selection designed to establish the merit of candidates as the Commission considers is in the best interests of the Public Service.


(2) Pour l'application du paragraphe (1), la sélection au mérite peut, dans les circonstances déterminées par règlement de la Commission, être fondée sur des normes de compétence fixées par celle-ci plutôt que sur un examen comparatif des candidats.

[...]

(2) For the purposes of subsection (1), selection according to merit may, in the circumstances prescribed by the regulations of the Commission, be based on the competence of a person being considered for appointment as measured by such standard of competence as the Commission may establish, rather than as measured against the competence of other persons.



21. (1) Dans le cas d'une nomination, effective ou imminente, consécutive à un concours interne, tout candidat non reçu peut, dans le délai fixé par règlement de la Commission, en appeler de la nomination devant un comité chargé par elle de faire une enquête, au cours de laquelle l'appelant et l'administrateur général en cause, ou leurs représentants, ont l'occasion de se faire entendre.

[...]

21. (1) Where a person is appointed or is about to be appointed under this Act and the selection of the person for appointment was made by closed competition, every unsuccessful candidate may, within the period provided for by the regulations of the Commission, appeal against the appointment to a board established by the Commission to conduct an inquiry at which the person appealing and the deputy head concerned, or their representatives, shall be given an opportunity to be heard.

[...]

(2) Sous réserve du paragraphe (3), la Commission, après avoir reçu avis de la décision du comité visé aux paragraphes (1) ou (1.1), doit en fonction de celle-ci :

a) si la nomination a eu lieu, la confirmer ou la révoquer;

b) si la nomination n'a pas eu lieu, y procéder ou non.

[...]

(2) Subject to subsection (3), the Commission, on being notified of the decision of a board established under subsection (1) or (1.1), shall, in accordance with the decision,

(a) if the appointment has been made, confirm or revoke the appointment; or

(b) if the appointment has not been made, make or not make the appointment.

[...]

(3) La Commission peut prendre toute mesure qu'elle juge indiquée pour remédier à toute irrégularité signalée par le comité relativement à la procédure de sélection.

(3) Where a board established under subsection (1) or (1.1) determines that there was a defect in the process for the selection of a person for appointment under this Act, the Commission may take such measures as it considers necessary to remedy the defect.

(4) Une nomination, effective ou imminente, consécutive à une mesure visée au paragraphe (3) ne peut faire l'objet d'un appel conformément aux paragraphes (1) ou (1.1) qu'au motif que la mesure prise est contraire au principe de la sélection au mérite.

[...]

(4) Where a person is appointed or is about to be appointed under this Act as a result of measures taken under subsection (3), an appeal may be taken under subsection (1) or (1.1) against that appointment only on the ground that the measures so taken did not result in a selection for appointment according to mûrit.

[...]



                                            ANNEXE B

ANALYSE

a)        Norme de contrôle judiciaire

J'ai déclaré ce qui suit, aux paragraphes 11 à 15 de ma décision dans Le Procureur général du Canada c. Bormais[8] :

Les avocats conviennent que la question de savoir si, par ses agissements, le jury de sélection a contrevenu au principe du mérite constitue une question de droit et qu'en conséquence, la norme de contrôle de la décision prise par le comité d'appel à cet égard devrait être celle de la décision correcte. Dans l'arrêt Boucher c, Canada (Procureur général) [...], le juge Strayer a écrit ce qui suit au nom de la Cour, au paragraphe [7] :

Quant à la première question en litige, celle du traitement du facteur des connaissances par le comité de sélection, nous sommes d'avis qu'elle constitue une question de droit en ce qui a trait aux exigences du principe du mérite et nous considérons par conséquent que la décision du CACFP de confirmer ce procédé constituait également une question de droit. Nous ne sommes pas convaincus que nous devrions considérer que le CACFP est un tribunal qui possède une telle expertise en matière d'interprétation de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique que nous devrions faire preuve d'un haut degré de retenue à son égard quant à cette question. Le comité de sélection est un comité ad hoc. Nous concluons à cet égard que la norme de révision que la Section de première instance [maintenant la Cour fédérale] aurait dû appliquer est celle de la décision correcte.

Je suis convaincu qu'on pourrait dire la même chose en ce qui concerne la question soumise à la Cour en l'espèce.

L'avocate des défenderesses principales affirme que les considérations que je viens d'évoquer ne mettent pas un terme au débat entourant la question de la norme de contrôle. Elle soutient que les conclusions de fait tirées par le comité d'appel qui sont à la base de sa décision sur la question de savoir si le principe du mérite a été respecté ont droit à un degré de retenue élevé. À l'appui de cette proposition, elle cite l'alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur la Cour fédérale [...]. Voici les dispositions pertinentes du paragraphe 18.1(4) de la Loi sur la Cour fédérale :



18.1(4) Les mesures prévues au paragraphe (3) sont prises par la Section de première instance si elle est convaincue que l'office fédéral, selon le cas :

[...]

18.1(4) The Trial Division may grant relief under subsection (3) if it is satisfied that the federal board, commission or other tribunal

[...]

d) a rendu une décision ou une ordonnance fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il dispose;

[...]

(d) based its decision or order on an erroneous finding of fact that it made in a perverse or capricious manner or without regard for the material before it;

[...]


Bien que je sois convaincu que l'avocate des défenderesses a raison sur ce point, je suis également persuadé que les conclusions de fait tirées par le comité d'appel ne soulèvent aucune question en l'espèce. La question de la norme de contrôle applicable aux conclusions de fait ne se pose donc pas en l'espèce.

En outre, je suis convaincu qu'aucune des conclusions qui précèdent sur la norme de contrôle appropriée ne serait modifiée par l'application de l'analyse pragmatique et fonctionnelle, que je n'ai pas l'intention d'aborder ici, s'agissant de déterminer la norme de contrôle applicable conformément aux directives récentes de la Cour suprême du Canada en la matière [...].                                           [Citations omises.]                               

En regard du dernier paragraphe, j'ai cité Dr Q. c. College of Physicians and Surgeons of British Columbia[9]. Voici un extrait du paragraphe [21] de cet arrêt :

[...] Chaque fois que la loi délègue un pouvoir à une instance administrative décisionnelle, le juge de révision doit commencer par déterminer la norme de contrôle applicable selon l'analyse pragmatique et fonctionnelle. Dans Pushpanathan, la Cour a accepté sans équivoque la primauté de la méthode pragmatique et fonctionnelle dans la détermination de la norme de contrôle judiciaire applicable aux décisions administratives. Le juge Bastarache affirme que « [l]a détermination de la norme de contrôle que la cour de justice doit appliquer est centrée sur l'intention du législateur qui a créé le tribunal dont la décision est en cause » . [...] Cependant, cette méthode tient aussi dûment compte des « conséquences qui découlent aussi d'un octroi de pouvoir » [...] et, tout en sauvegardant « [l]e rôle des cours supérieures dans le maintien de la légalité » [...], renforce le principe selon lequel il ne faut pas recourir sans nécessité à ce pouvoir de surveillance. La méthode pragmatique et fonctionnelle implique aussi l'examen de l'intention du législateur, mais sur l'arrière-plan de l'obligation constitutionnelle des tribunaux de protéger la légalité.

                                                                    [Non souligné dans l'original; citations omises.]                          

Compte tenu des motifs précités, je vais maintenant brièvement procéder à une analyse pragmatique et fonctionnelle.


La Loi sur l'emploi dans la fonction publique ne renferme pas de clause privative ni ne confère un droit d'appel à l'égard des décisions des comités d'appel. L'article 21.1, d'ailleurs, prévoit expressément la possibilité d'un contrôle judiciaire de ces décisions. En outre, aucune disposition de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique ne laisse croire à sa face même que les présidents des comités d'appel jouissent d'une expertise particulière.

L'examen de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique révèle que son objet consiste à préserver l'intégrité de la fonction publique et à veiller à l'application du principe de la sélection au mérite, exprimé à son article 10. Un élément fondamental de l'objet de la Loi est énoncé à son article 21, qui prévoit l'existence de comités d'appel et fixe leur mandat. On peut déduire de l'objet de la Loi et de son article 21, en l'inscrivant dans le contexte général de celle-ci, qu'une grande retenue judiciaire est de mise. Cela étant dit, la question sous examen, soit celle de savoir si les mesures prises par le comité des mesures correctives ont donné lieu à des nominations faites au mérite, est de nature judiciaire; cela milite en défaveur de la retenue. L' « analyse fondée sur l'objet » ne fait donc pencher la balance ni du côté d'une grande retenue, ni du côté d'un examen rigoureux.


Par suite de la brève analyse qui précède et tel qu'il a été décidé dans Bormais, j'en viens à la conclusion que la norme de contrôle appropriée en l'espèce est celle de la décision correcte. J'ai en effet la conviction, pour des motifs que je préciserai plus tard, que la seule question en litige en l'espèce qui soit concernée par le choix de la norme de contrôle est celle de savoir si la décision sous examen a donné lieu ou non à des nominations faites au mérite.

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                                     COUR FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                       T-1425-01

INTITULÉ :                      Michael K. Warren c. Le Procureur général du Canada

LIEU DE L'AUDIENCE :                           Ottawa (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                         Le 5 avril 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :             Le juge Gibson

DATE DES MOTIFS

DE L'ORDONNANCE :                              Le 26 avril 2004

COMPARUTIONS:

Joseph W. Griffiths                                          POUR LE DEMANDEUR

Derek Rasmussen                                            POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Goldberg, Kronick & Stroud s.r.l.                      POUR LE DEMANDEUR

Ottawa (Ontario)

Morris Rosenberg                                            POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada



[1]         Se reporter à l'annexe A ci-jointe.

[2]         L.R.C. ch. P-32.

[3]         [2003] A.C.F. no 868, (Q.L.), (décision non citée par les parties).

[4]         [1997] A.C.F. no 198, (Q.L.), (décision non citée par les parties).

[5]         [1997] A.C.F. no 1784, (Q.L.),(C.A.F.), (arrêt non cité par les parties).

[6]         [2001] A.C.F. no 961, (Q.L.), (décision non citée par les parties).

[7]         L.R.C., ch. P-32.

[8] [2204] A.C.F. no 253 (QL) (décision non citée par les parties).

[9] [2003] 1 R.C.S. 226.


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