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Date: 20010612

Dossiers : T-1470-99

T-1471-99

Référence neutre : 2001 CFPI 645

Ottawa (Ontario), le mardi 12 juin 2001

EN PRÉSENCE DE :             Madame le juge Dawson

ENTRE :

                                                    NOVOPHARM LIMITED,

                                                                                                                                  demanderesse,

                                                                         - et -

                                                          ASTRAZENECA AB

- et -

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE,

                                                                                                                                         défendeurs.

                          MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE DAWSON

[1]                 Il s'agit de deux appels interjetés par Novopharm Limited (Novopharm), en vertu


du paragraphe 56(1) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13 (la Loi), à l'encontre de décisions de Myer Herzig, membre de la Commission des oppositions des marques de commerce (le registraire), rendues le 14 juin 1999. Dans chacune de ces décisions, le registraire a rejeté l'opposition de Novopharm à la demande d'enregistrement d'une marque de commerce par Astrazeneca AB ou son prédécesseur en titre (désignés ensemble Astra).

[2]                 La Cour a ordonné que les deux demandes soient instruites à la même date. Bien

qu'il n'y ait pas eu d'ordonnance en vertu de la règle 105 des Règles de la Cour fédérale (1998), les avocats des deux parties ont plaidé les appels simultanément sur la base des dossiers déposés dans chaque acte de procédure. La plus grande partie de la preuve était identique. Les deux instances ayant été plaidées conjointement, je prononce un seul ensemble de motifs qui vaut pour les deux instances.

[3]                 Dans le dossier T-1470-99, Novopharm interjette appel de la décision du

registraire visant la demande d'enregistrement de marque de commerce n º 699,918. Dans le dossier T-1471-99, Novopharm interjette appel de la décision du registraire visant la demande d'enregistrement de marque de commerce n º 699,917.

LES ACTES DE PROCÉDURE PRÉSENTÉS AU REGISTRAIRE

i) La demande d'enregistrement n º 699,918 (la procédure 918)

[4]                 Dans la demande d'enregistrement datée du 28 février 1992, Astra cherchait à


obtenir l'enregistrement de la marque [TRADUCTION] DESSIN D'UN COMPRIMÉ ROUGE-BRUN en se fondant sur l'emploi projeté au Canada de cette marque en liaison avec des « préparations pharmaceutiques, nommément la félodipine » . La marque est décrite comme suit dans la demande d'enregistrement :

[TRADUCTION] La marque de commerce illustrée dans le dessin annexé consiste en une couleur rouge-brun appliquée sur l'ensemble de la surface visible du comprimé, comme l'illustrent les spécimens annexés à la demande. Le comprimé représenté par un contour en pointillé ne fait pas partie de la marque de commerce.

[5]                 Le dessin visé comporte deux perspectives, une vue en plan et une vue latérale,

d'un comprimé rond biconvexe, dont le contour est indiqué par une ligne en pointillé. La partie à l'intérieur de chaque contour est ombragée par une trame de points dense.

[6]                 Novopharm a produit une déclaration d'opposition le 14 septembre 1993 en

alléguant les motifs d'opposition suivants :

a)              [TRADUCTION] L'opposante fonde son opposition sur les motifs prévus à l'alinéa 38(2)c) de la Loi sur les marques de commerce (la Loi), à savoir que la demande ne satisfait pas à l'article 30 pour les motifs suivants :

i)              la marque de commerce alléguée n'est pas une marque de commerce;

ii)              la demande ne comporte pas de dessin de la marque de commerce fourni par la requérante.

b)             L'opposante fonde son opposition sur les motifs prévus à l'alinéa 38(2)c) de la Loi, à savoir que, en admettant que la marque de commerce alléguée soit effectivement une marque de commerce, la requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement car, selon le paragraphe 16(3), la marque crée de la confusion avec d'autres marques de commerce, en l'occurrence des comprimés rouge-brun antérieurement employés au Canada par d'autres personnes que la requérante.

c)              L'opposante fonde son opposition sur les motifs prévus à l'alinéa 38(2)d) de la Loi, à savoir que la marque de commerce n'est pas distinctive en ce qu'elle ne distingue pas, ou n'est pas apte à distinguer, les marchandises de la requérante de celles d'autres personnes, notamment les comprimés des fabricants :


Apotex Inc.

Boehringer Ingelheim (Canada) Ltée

Merrell Dow Pharmaceuticals (Canada) Inc.

[7]                 Dans sa contre-déclaration, Astra a refusé d'admettre chaque motif d'opposition.

S'agissant du motif d'opposition visé en a), elle a affirmé que [TRADUCTION] « ces motifs d'opposition sont spéculatifs ou incorrects » ; pour le motif visé en b), que [TRADUCTION] « la déclaration d'opposition ne contient pas suffisamment de détails pour permettre à la requérante d'y répondre » ; pour le motif visé en c), Astra a fait valoir que [TRADUCTION] « la forme et le médicament particulier de tout comprimé mentionné [...] ne sont pas exposés de sorte qu'il est impossible d'y répondre pleinement » .

[8]                 Le motif d'opposition visé en b) a été retiré par l'avocate de Novopharm au

moment de l'audience qui s'est tenue devant le registraire.

[9]                 En rejetant l'opposition de Novopharm, le registraire a écrit :

[TRADUCTION] S'agissant du motif d'opposition visé en a)i) ci-dessus, la requérante allègue que l'opposante n'a produit aucun fait pour expliquer que la marque de commerce demandée n'est pas une marque de commerce. La requérante fait donc valoir que les actes de procédure de l'opposante ne satisfont pas à l'alinéa 38(3)a) de la Loi sur les marques de commerce, qui prévoit que le motif d'opposition doit être présenté avec des détails suffisants pour permettre au requérant d'y répondre. Je partage l'avis de la requérante : voir, par exemple, la décision Novopharm Ltd. v. Hoechst Aktiengesellschaft (1997), 76 C.P.R. (3d) 257 à la page 261 (COMC).


S'agissant du motif d'opposition visé en a)ii) ci-dessus, la demande d'enregistrement comporte effectivement un dessin, soit deux perspectives de la marque de commerce faisant l'objet de la demande. En outre, les dessins, accompagnés de la description écrite de la marque et des spécimens figurant au dossier, décrivent adéquatement la marque : voir la décision Novopharm Ltd. v. Bayer 1996, 76 C.P.R. (3d) 560 aux pages 566 et 567 (COMC); Novopharm Ltd. v. Glaxo Wellcome (28 mai 1999, non publiée, à la page 6 (COMC)). Aussi le motif d'opposition visé en a)ii) est-il rejeté.

[...]

S'agissant du troisième motif d'opposition, visé en c)ci-dessus, la requérante soutient ce qui suit au paragraphe 33 de son plaidoyer écrit.

33.            En ce qui concerne l'alinéa 1c), soit que la marque de commerce n'est pas distinctive car elle ne distingue pas, ou n'est pas apte à distinguer, les marchandises de la requérante de celles d'autres personnes, du fait que les comprimés rouge-brun ont été et sont à toutes les époques pertinentes courants dans la profession et ont été utilisés par d'autres personnes, de sorte que les marchandises de la requérante ne peuvent être distinguées des marchandises des autres fabricants pharmaceutiques nommés, l'allégation ne fournit pas non plus de détails suffisants pour permettre à la requérante d'y répondre. Pour les trois sociétés mentionnées, aucune indication ne précise les produits pharmaceutiques spécifiques visés (c'est-à-dire les comprimés rouge-brun dont il s'agit), leurs ingrédients actifs, leur forme ou toute autre circonstance pertinente, ni à quel endroit ou dans quelles quantités ces comprimés rouge-brun ont été utilisés.

Encore une fois, je suis d'accord avec la requérante. À mon avis, il n'incombe pas à la requérante de s'enquérir des produits qui sont vendus par des tiers pour savoir à quels comprimés rouge-brun l'opposante pourrait faire allusion. Ou si je fais erreur, j'estime alors que l'opposante n'a pas étayé les allégations de sa déclaration d'opposition. En d'autres termes, il n'y a pas d'éléments de preuve quantitatifs ni suffisamment d'éléments de preuve qualitatifs de vente ou d'usage de comprimés pharmaceutiques dont la combinaison de couleur et de forme ressemble à la marque faisant l'objet de la demande d'enregistrement.

J'ajouterai qu'à l'audience, l'avocat de l'opposante a vigoureusement soutenu la thèse du caractère non distinctif de la marque demandée en se fondant sur l'usage dans le marché de comprimés pharmaceutiques non désignés ou évoqués dans la déclaration d'opposition, et sur des allégations de licence illicite de la marque faisant l'objet de la demande à Hoechst-Roussell Canada Inc., qui ne figurent pas non plus dans les actes de procédure de l'opposante. À cet égard, les arguments de l'opposante reposaient sur la preuve par affidavit de M. Stephen Wilton produite pour le compte de la requérante et sur le témoignage de M. Wilton dans son contre-interrogatoire. L'opposante aurait naturellement pu demander l'autorisation de modifier sa déclaration d'opposition, en vertu de l'article 40 du Règlement sur les marques de commerce, après avoir pris connaissance de la preuve par affidavit et/ou du témoignage oral de M. Wilton, mais elle ne l'a pas fait. Dans les circonstances, je ne puis prendre en considération des motifs d'opposition qui n'on pas été plaidés : voir le jugement Imperial Developments Ltd. c. Imperial Oil Limited (1984), 79 C.P.R. (2d) 12 aux pages 19 à 21 (C.F.1re inst.).

Compte tenu des motifs qui précèdent, l'opposition est rejetée.


ii) La demande d'enregistrement n º 699,917 (la procédure 917)

[10]            Dans la présente demande d'enregistrement, également datée du 28 février 1992,

Astra cherchait à obtenir l'enregistrement de la marque [TRADUCTION] Dessin d'un COMPRIMÉ ROSE en se fondant sur l'emploi projeté au Canada de cette marque en liaison avec des « préparations pharmaceutiques, nommément la félodipine » . La marque est décrite comme suit dans la demande d'enregistrement :

[TRADUCTION] La marque de commerce illustrée dans le dessin annexé consiste en une couleur rose appliquée sur l'ensemble de la surface visible du comprimé, comme l'illustrent les spécimens annexés à la demande. Le comprimé représenté par un contour en pointillé ne fait pas partie de la marque de commerce.

[11]            Le dessin reproduisait identiquement celui de la procédure 918.

[12]            Novopharm a produit une déclaration d'opposition le 16 février 1993 en alléguant

les motifs d'opposition suivants :

a)              [TRADUCTION] L'opposante fonde son opposition sur les motifs prévus à l'alinéa 38(2)c) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13 (la Loi), à savoir que la demande ne satisfait pas à l'article 30 pour les motifs suivants :

i)              la marque de commerce alléguée n'est pas une marque de commerce;

ii)              la marque de commerce alléguée n'a pas été employée en liaison avec les marchandises mentionnées dans la demande d'enregistrement depuis la date alléguée;

iii)             la demande ne comporte pas de dessin de la marque de commerce alléguée par la requérante.


b)             L'opposante fonde son opposition sur les motifs prévus à l'alinéa 38(2)c) de la Loi, à savoir que, en admettant que la marque de commerce alléguée par la requérante soit effectivement une marque de commerce, la requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement car, selon le paragraphe 16(1), la marque à la date de son premier emploi créait de la confusion avec d'autres marques de commerce, en l'occurrence des comprimés roses antérieurement employés au Canada par l'opposante.

c)              L'opposante fonde son opposition sur les motifs prévus à l'alinéa 38(2)d) de la Loi, à savoir que la marque de commerce n'est pas distinctive en ce qu'elle ne distingue pas, ou n'est pas apte à distinguer, les marchandises de la requérante de celles d'autres personnes. Les comprimés roses ont été et sont à toutes les époques pertinentes courants dans la profession et ont été utilisés par d'autres personnes, de sorte que les marchandises de la requérante ne peuvent être distinguées des marchandises d'autres personnes, notamment des comprimés des fabricants :

[liste de 26 sociétés]

[13]            Dans sa contre-déclaration, Astra a refusé d'admettre chaque motif d'opposition.

S'agissant du motif d'opposition visé en a), elle a affirmé que [TRADUCTION] « ces motifs d'opposition sont spéculatifs ou incorrects » ; pour le motif visé en b), que [TRADUCTION] « la déclaration d'opposition ne contient pas suffisamment de détails pour permettre à la requérante d'y répondre » ; pour le motif visé en c), Astra a fait valoir que [TRADUCTION] « la forme et le médicament particulier de tout comprimé mentionné [...] ne sont pas exposés de sorte qu'il est impossible d'y répondre pleinement » .

[14]            En rejetant l'opposition de Novopharm, le registraire a écrit :


[TRADUCTION] S'agissant du motif d'opposition visé en a)i) ci-dessus, la requérante allègue que l'opposante n'a produit aucun fait pour expliquer que la marque de commerce demandée n'est pas une marque de commerce. La requérante fait donc valoir que les actes de procédure de l'opposante ne satisfont pas à l'alinéa 38(3)a) de la Loi sur les marques de commerce, qui prévoit que le motif d'opposition doit être présenté avec des détails suffisants pour permettre au requérant d'y répondre. Je partage l'avis de la requérante : voir, par exemple, la décision Novopharm Ltd. v. Hoechst Aktiengesellschaft (1997), 76 C.P.R. (3d) 257 à la page 261 (COMC). S'agissant du motif d'opposition visé en a)ii) ci-dessus, la demande est fondée sur l'emploi projeté au Canada et le motif allégué en a)ii) n'est donc pas un motif d'opposition correct. Pour le motif d'opposition visé en a)iii) ci-dessus, l'opposante soutient de nouveau que les actes de procédure ne satisfont pas à l'alinéa 38(3)a) de la Loi. J'en conviens. Ou si je fais erreur, je suis alors tenu de prendre en considération les observations de la requérante qui déclare que 1) le dessin de la marque n'est pas un dessin ligné qui représente la couleur rose conformément au tableau des couleurs figurant dans le Règlement sur les marques de commerce et que 2) les inscriptions sur les comprimés de la requérante forment partie intégrante du comprimé pour l'identification du comprimé. À mon avis, comme la demande d'enregistrement produite décrit clairement le rose comme une caractéristique de la marque, la requérante n'est pas tenue de suivre le tableau des couleurs figurant au Règlement : voir l'article 28 du Règlement. S'agissant des inscriptions sur les comprimés de la requérante, un examen minutieux des spécimens montre que les comprimés portent les lettres AFM sur une face du comprimé. Toutefois, cet élément ne suffit pas à lui seul à établir que les dessins (et la description de la marque) présentés dans la demande d'enregistrement ne comportent pas les éléments suffisants : voir l'arrêt Novopharm Ltd. v. Bayer 1996, 76 C.P.R. (3d) 560 aux pages 566 et 567 (COMC). Par conséquent, les motifs d'opposition visés de a)i) à a)iii) sont rejetés.

Aux paragraphes 38 et 39 de son plaidoyer écrit, reproduits ci-dessous, la requérante aborde les prétentions qu'elle expose dans sa contre-déclaration, à savoir que les autres motifs d'opposition, visés en b) et c) ci-dessus, ne comportent pas de détails suffisants pour permettre à la requérante d'y répondre de manière adéquate :

38.            S'agissant du motif d'opposition visé à l'alinéa 1b), en l'occurrence que même si la marque alléguée de la requérante était effectivement une marque de commerce, la requérante n'était pas la personne ayant droit à l'enregistrement conformément au paragraphe 16(1) [sic] dans la mesure où à la date de premier emploi, la marque créait de la confusion avec une autre marque de commerce, soit des comprimés roses employés antérieurement au Canada par l'opposante, l'allégation est également absurde, sans fondement et ambiguë. La demande d'enregistrement est fondée sur l'emploi projeté. En outre, tout en alléguant son propre emploi des comprimés roses, l'opposante n'a fourni aucun fait étayant sur quels produits pharmaceutiques spécifiques elle s'appuie (de quels comprimés roses il s'agit), leurs ingrédients actifs, leur forme ainsi que la date de leur emploi. Soumis à un examen objectif, ce paragraphe ne fournit pas de détails suffisants pour permettre à la requérante d'y répondre et il doit par conséquent être rejeté.


39.            En ce qui concerne l'alinéa 1c), soit que la marque de commerce n'est pas distinctive car elle ne distingue pas, ou n'est pas apte à distinguer, les marchandises de la requérante de celles d'autres personnes, du fait que les comprimés roses ont été et sont à toutes les époques pertinentes courants dans le secteur pharmaceutique et ont été utilisés par d'autres personnes, de sorte que les marchandises de la requérante ne peuvent être distinguées des marchandises des autres fabricants pharmaceutiques nommés, l'allégation ne fournit pas non plus de détails suffisants pour permettre à la requérante d'y répondre. Pour l'ensemble des sociétés mentionnées, aucune indication ne précise les produits pharmaceutiques spécifiques visés (c'est-à-dire les comprimés roses dont il s'agit), leurs ingrédients actifs, leur forme ou toute autre circonstance pertinente, ni à quel endroit ou dans quelles quantités ces comprimés roses ont été utilisés.

Encore une fois, je suis d'accord avec la requérante. À mon avis, il n'incombe pas à la requérante de s'enquérir des produits qui sont vendus par des tiers pour savoir à quels comprimés roses l'opposante pourrait faire allusion. Ou si je fais erreur, j'estime alors que l'opposante n'a pas étayé les allégations de sa déclaration d'opposition. En d'autres termes, il n'y a pas d'éléments de preuve quantitatifs ni suffisamment d'éléments de preuve qualitatifs de vente ou d'usage de comprimés pharmaceutiques dont la combinaison de couleur et de forme ressemble à la marque faisant l'objet de la demande d'enregistrement.

Compte tenu des motifs qui précèdent, l'opposition est rejetée.

[15]            Alors que, dans la procédure 917, la décision du registraire ne porte aucune

indication que le motif d'opposition visé en b) ait été retiré à l'audience (comme l'a noté le registraire dans sa décision relative à la procédure 918), le présent appel n'allègue aucune erreur dans la décision du registraire eu égard au motif d'opposition visé en b).

[16]            De la même façon, en ce qui concerne le motif visé en a)ii) dans la

procédure 917, il n'est allégué aucune erreur dans la conclusion du registraire au sujet du fait que l'absence d'usage ne constitue pas un motif d'opposition correct à l'égard d'une demande fondée sur un emploi projeté.


LES QUESTIONS SOULEVÉES

[17]            Dans chacune des demandes dont est saisie la Cour, Novopharm a soulevé les

questions suivantes :

1.          La marque qui fait l'objet de la demande d'enregistrement est-elle une marque de commerce, au sens de la Loi?

2.          Astra a-t-elle satisfait aux dispositions de l'alinéa 30h) de la Loi en fournissant un dessin approprié?

3.          La marque est-elle distinctive à l'égard d'Astra?

[18]            Pour sa part, Astra a résumé quelque peu différemment les questions soulevées,

déclarant que la question cruciale à résoudre en premier lieu était de savoir si Novopharm avait démontré que les conclusions du registraire au sujet de l'insuffisance de sa déclaration d'opposition étaient entachées d'erreur et, le cas échéant, si Novopharm avait établi le bien-fondé de ses motifs d'opposition.

LA NORME DE CONTRÔLE

[19]            Dans l'arrêtNovopharm Ltd. c. Bayer Inc. (2000), 9 C.P.R. (4th) 304 (C.A.F.), la

Cour d'appel a confirmé que la norme de contrôle applicable à une décision du registraire est celle que la Cour a retenue majoritairement dans l'arrêt Les Brasseries Molson, Société en nom collectif c. John Labatt Limitée (2000), 5 C.P.R. (4th) 180 (C.A.F.). La norme de contrôle y est formulée comme suit :


Même si la Loi sur les marques de commerce prévoit expressément le droit d'appel devant la Cour fédérale, il a été reconnu que les connaissances spécialisées du registraire méritent une certaine déférence. En l'absence de preuve supplémentaire devant la Section de première instance, les décisions du registraire qui relèvent de son champ d'expertise, qu'elles soient fondées sur les faits, sur le droit ou qu'elles résultent de l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, devraient être révisées suivant la norme de la décision raisonnable simpliciter. Toutefois, lorsqu'une preuve additionnelle est déposée devant la Section de première instance et que cette preuve aurait pu avoir un effet sur les conclusions de fait du registraire ou sur l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, le juge doit en venir à ses propres conclusions en ce qui concerne l'exactitude de la décision du registraire.

[20]            Dans le cas où une preuve supplémentaire est produite en appel, la Cour d'appel a

indiqué que la Cour, pour décider de la norme de contrôle appropriée, doit d'abord déterminer si la preuve supplémentaire aurait pu avoir un effet sur les conclusions de fait du registraire ou sur l'exercice de son pouvoir discrétionnaire.

[21]            Dans les appels interjetés auprès de la Cour, une preuve supplémentaire a été

produite. Cette preuve a été qualifiée par l'appelante comme des faits quantitatifs et qualitatifs importants concernant les ventes et l'usage des comprimés pharmaceutiques dont la combinaison de couleur et de forme, allègue-t-elle, ressemblait aux marques faisant l'objet de la demande d'enregistrement. Novopharm a fait valoir que ces éléments de preuve valaient pour les points a)i) et c) qui sont communs aux procédures 917 et 918.

[22]            La première question à trancher est de savoir si la preuve supplémentaire aurait pu

avoir un effet sur les conclusions du registraire. Ces conclusions peuvent se résumer comme suit.


[23]            Dans la procédure 918, le registraire a rejeté le motif d'opposition visé en a)i) au

motif que les actes de procédure de Novopharm ne satisfaisaient pas à l'alinéa 38(3)a) de la Loi; il a rejeté le motif d'opposition visé en a)ii) parce que la demande contenait un dessin qui, accompagné de la description écrite de la marque et des spécimens fournis au dossier, décrivaient adéquatement la marque; il a rejeté le motif d'opposition visé en c) parce que l'allégation de Novopharm ne donnait pas de détails suffisants pour permettre à Astra d'y répondre.

[24]            S'agissant du motif d'opposition visé en c), le registraire s'est ensuite demandé si

Novopharm avait étayé les allégations de sa déclaration d'opposition et il a jugé qu'elle ne l'avait pas fait, mais il a procédé à cette analyse et tiré cette conclusion pour le cas, a-t-il souligné, où il aurait commis une erreur appelant un contrôle judiciaire en concluant au caractère suffisant des actes de procédure. Il s'agissait donc là d'un motif subsidiaire qui ne doit être examiné que si le registraire a commis une erreur appelant un contrôle judiciaire dans sa conclusion sur la suffisance des actes de procédure.

[25]            Si l'on écarte cette conclusion subsidiaire pour s'en tenir aux motifs du registraire


et à la nature de la preuve supplémentaire, je conclus au sujet de la procédure 918 que la preuve supplémentaire n'aurait pas eu d'effet sur les conclusions de fait du registraire ni sur l'exercice de son pouvoir discrétionnaire. Par conséquent, dans la mesure où les décisions du registraire étaient dans son champ d'expertise, elles doivent être révisées selon la norme du caractère raisonnable simpliciter.

[26]            Cette norme impose à la Cour de soumettre les motifs du registraire à un examen assez poussé en vue de décider si la décision du registraire peut être qualifiée de manifestement erronée : Canada (Directeur des enquêtes et recherches) c. Southam Inc., [1997] 1 R.C.S. 748 aux paragraphes 56 à 60.

[27]            S'agissant de la procédure 917, le registraire a rejeté le motif d'opposition visé en

a)i) parce que les actes de procédure de Novopharm ne satisfaisaient pas à l'alinéa 38(3)a) de la Loi; il a rejeté le motif d'opposition visé en a)ii) parce qu'il ne constituait pas un motif d'opposition pertinent; il a rejeté le motif d'opposition visé en a)iii) parce que les actes de procédure ne satisfaisaient pas à l'alinéa 38(3)a) de la Loi; il a rejeté le motif d'opposition visé en c) parce que l'allégation de Novopharm ne donnait pas de détails suffisants pour permettre à Astra d'y répondre. De nouveau, le registraire a fourni des conclusions subsidiaires pour étayer son rejet des motifs visés en a)iii) et en c), mais ces motifs subsidiaires ne doivent être examinés que si le registraire a commis une erreur appelant un contrôle lorsqu'il a donné ses raisons fondamentales de rejet des deux motifs d'opposition.


[28]            À l'examen des raisons fondamentales de la décision du registraire et compte tenu

des motifs du registraire et de la nature de la preuve supplémentaire, je suis encore une fois persuadée que la preuve supplémentaire n'aurait pas eu d'effet sur les conclusions de fait du registraire ni sur l'exercice de son pouvoir discrétionnaire. Par conséquent, au vu de la décision du registraire dans la procédure 917 et dans la mesure où les décisions du registraire étaient dans son champ d'expertise, ces décisions doivent être révisées selon la norme du caractère raisonnable simpliciter.

[29]            En ce qui concerne la nature du champ d'expertise du registraire, dans la décision

Novopharm Ltd. c. Bayer Inc., [2000] 2 C.F. 553 (C.F.1re inst.),confirmée par (2000), 9 C.P.R. (4th) 304 (C.A.F.), le juge Evans, tel était alors son titre, a fait remarquer au paragraphe 35 qu'il accorderait beaucoup de poids à l'opinion du registraire sur l'interprétation du dessin et de la description verbale de la marque de commerce projetée. Dans l'affaire Les Brasseries Molson, Société en nom collectif c. John Labatt Limitée, précitée, le juge Rothstein, s'exprimant au nom de la Cour, a noté que le registraire possède des connaissances spécialisées et qu'il faut faire preuve de retenue à l'égard de l'opinion du registraire sur l'interprétation de la Loi. L'expertise du registraire toutefois ne s'étend pas à l'interprétation correcte de l'article 45 de la Loi, selon le juge Rothstein, qui s'est exprimé au nom de la Cour dans l'arrêt Lang Michener c. United Grain Growers Ltd., [2001] A.C.F. n º 437, 2001 CAF 66 (C.A.F.) au paragraphe 9.


[30]            En l'espèce, les décisions du registraire portaient en substance sur l'appréciation

du caractère suffisant du contenu de la déclaration d'opposition de Novopharm et sur l'interprétation du dessin et de la description verbale de la marque projetée.

[31]            Pour décider du caractère adéquat de la déclaration d'opposition, il faut interpréter

les dispositions de l'alinéa 38(3)a) de la Loi et déterminer, en fonction des faits dont était saisi le registraire, si les motifs d'opposition fournissent des détails suffisants pour permettre au requérant d'y répondre. Il s'agit d'une question mixte de fait et de droit qui, dans chaque cas, est très liée aux faits et a peu de valeur jurisprudentielle. La décision est au coeur de la pratique et de la procédure des instances d'opposition. J'estime donc que les questions relatives au caractère suffisant de la déclaration d'opposition relèvent du champ d'expertise du registraire.

[32]            D'une façon analogue, comme l'a noté le juge Evans dans l'arrêt Bayer, précité,

l'interprétation du dessin et de la description verbale d'une marque de commerce relèvent de la pratique et de la procédure suivie par le Bureau des marques de commerce relativement aux demandes de marques de commerce. Je conclus que ces éléments tombent également dans le champ d'expertise du registraire.

[33]            Il s'ensuit, à mon avis, que les raisons fondamentales des décisions du registraire

doivent être révisées selon la norme du caractère raisonnable simpliciter.


ANALYSE

[34]            Comme ces affaires ont été instruites conjointement et qu'elles soulèvent

essentiellement les mêmes questions et du fait que j'ai conclu que chaque décision attaquée du registraire fait appel à la même norme de contrôle, j'estime que la façon la plus pratique de procéder est de traiter les questions dans l'ordre en fonction de chaque procédure.

Le motif d'opposition visé en a)i) dans les deux procédures

[35]            Comme on l'a exposé précédemment, ce motif d'opposition a été formulé de

manière identique dans les deux déclarations d'opposition. Le registraire a conclu, pour chaque affirmation que [TRADUCTION] « la marque de commerce alléguée n'est pas une marque de commerce » , qu'elle ne satisfaisait pas à l'alinéa 38(3)a) de la Loi.

[36]            L'article 38 de la Loi prévoit la procédure que doit suivre la partie qui fait

opposition à une demande d'enregistrement de marque de commerce et la procédure applicable au traitement de l'opposition. Le paragraphe (3) prévoit la teneur de la déclaration d'opposition et, comme on l'a déjà noté, l'alinéa a) prescrit que la déclaration d'opposition indique « les motifs de l'opposition, avec détails suffisants pour permettre au requérant d'y répondre » .


[37]            Novopharm a soutenu que son acte de procédure contenait des détails suffisants

du fait qu'Astra comprenait manifestement ce qui était en question. Novopharm a également affirmé que le registraire avait commis une erreur en fondant sa décision sur un point technique, à savoir qu'Astra n'avait pas soulevé la question de l'insuffisance de détails dans sa contre-déclaration.

[38]            S'agissant du premier argument de Novopharm, je ne suis pas persuadée, même

en supposant qu'Astra comprenait le fondement de l'affirmation que la marque de commerce alléguée n'était pas une marque de commerce, que la décision du registraire était déraisonnable. Sans égard aux échanges entre les parties, j'estime que le registraire ne peut commettre une erreur manifeste en exigeant le respect de la loi.

[39]            L'alinéa 38(3)a) de la Loi assure le respect du principe de base de l'équité visant à


ce que chaque partie soit informée de la nature de l'instance : Carling Breweries Ltd. c. Molson Companies Ltd. et al. (1984), 1 C.P.R. (3d) 191 (C.F.1re inst.). L'alinéa permet également au requérant de décider en toute connaissance de cause s'il abandonne sa demande et évite que de nouvelles questions ou positions interviennent dans un appel auprès de la Cour. La Cour a jugé dans le passé que l'appel est limité aux questions soulevées devant le registraire : McDonald's Corp. c. Coffee Hut Stores Ltd. (1994), 76 F.T.R. 281 (1re inst.) à la page 286; confirmé par (1996), 68 C.P.R. (3d) 168 (C.A.F.).

[40]            En ce qui a trait au deuxième point soutenu par Novopharm, soit qu'Astra n'a pas

soulevé la question dans sa contre-déclaration, j'accepte l'observation faite au nom d'Astra que le registraire disposait de la latitude raisonnable pour décider si la disposition de la loi avait été respectée.

[41]            J'estime que la conclusion du registraire selon laquelle les dispositions de l'alinéa

visé n'ont pas été respectées était raisonnable et n'était pas manifestement erronée. Elle a été posée en conformité avec la jurisprudence de la Cour :_ voir Benson & Hedges (Canada) Ltd. c. Imasco Ltd. (1976), 25 C.P.R. (2d) 269 (C.F.1re inst.) à la page 272.

Le motif d'opposition visé en a)ii) dans la procédure 918

[42]            Répondant au motif d'opposition de Novopharm fondé sur le fait que la demande


d'enregistrement ne comportait pas de dessin de la marque de commerce comme le prévoit l'alinéa 30h) de la Loi, le registraire a conclu que la demande contenait un dessin qui, accompagné d'une description écrite de la marque et des spécimens versés au dossier, décrivait adéquatement la marque. Bien qu'Astra ait soutenu que le registraire avait tranché la question sur la base de la suffisance des actes de procédure (comme il l'avait fait pour une question identique dans la procédure 917), je ne suis pas disposée à ne pas tenir compte des motifs que le registraire a expressément invoqués.

[43]            En soutenant que le registraire avait commis une erreur, Novopharm a noté qu'il

incombait à Astra d'établir qu'elle se conformait à l'alinéa 30h) de la Loi, qui prévoit :


30.Quiconque sollicite l'enregistrement d'une marque de commerce produit au bureau du registraire une demande renfermant_:

[...]

(h);sauf si la demande ne vise que l'enregistrement d'un mot ou de mots non décrits en une forme spéciale, un dessin de la marque de commerce, ainsi que le nombre, qui peut être prescrit, de représentations exactes de cette marque;

30.An applicant for the registration of a trade-mark shall file with the Registrar an application containing

[...]

h);unless the application is for the registration only of a word or words not depicted in a special form, a drawing of the trade-mark and such number of accurate representations of the trade-mark as may be prescribed;


Novopharm s'est appuyée sur la conclusion du juge Evans dans l'arrêt Bayer, précité, qui déclare au paragraphe 50 :

[...] lorsque l'État octroie un monopole, les concurrents et le public en général ont le droit d'insister sur le respect rigoureux des termes de la législation qui autorise cet octroi. La préservation de l'exactitude du registre en tant que relevé public des marques de commerce comporte un intérêt public qui dépasse la question de savoir s'il existe un risque immédiat de confusion. Les droits que le titulaire d'une marque de commerce pourra faire exécuter dans le futur sont définis par les termes de la demande telle qu'elle est enregistrée, ce qui comprend le dessin, et les concurrents devraient pouvoir considérer que les termes de l'enregistrement sont définitifs quant aux droits que la Loi reconnaît au déposant.


[44]            Novopharm a soutenu que le registraire avait commis une erreur parce que les

lignes sur la demande d'enregistrement ne représentaient ni le rouge ni le brun, comme le prévoit l'article 28 du Règlement sur les marques de commerce; parce qu'il s'était appuyé sur les spécimens au dossier pour décider si les dessins étaient adéquats; parce que la description faisait référence à une marque pour une couleur et une forme particulière alors que la demande d'enregistrement indiquait que le comprimé dont le contour était en pointillé ne faisait pas partie intégrante de la marque. Novopharm a noté que la requérante a fait allusion à [TRADUCTION] « l'ensemble de la surface visible » , ce qui donnait à entendre que le comprimé devait être entièrement rouge-brun et dépourvu d'inscriptions.

[45]            L'argumentation de Novopharm ne m'a pas persuadée que la conclusion du

registraire doit être révisée.

[46]            La couleur faisant l'objet de la demande a été décrite par Astra dans sa demande


d'enregistrement comme [TRADUCTION] « rouge-brun » . Contrairement à l'affirmation de Novopharm que le dessin ne satisfaisait pas à l'article 28 du Règlement sur les marques de commerce, le tableau des couleurs du paragraphe 28(2) n'offre pas au requérant qui veut faire enregistrer une marque de commerce la possibilité d'indiquer spécifiquement la couleur [TRADUCTION] « rouge-brun » . Si Astra avait hachuré le diagramme soit avec des lignes verticales pour le rouge, soit avec des lignes obliques inclinées vers la droite pour le brun, le résultat aurait été incorrect et en contradiction avec la description verbale de la marque. Astra a plutôt appliqué une trame de points indéfinie et indiqué la couleur dans la description de la marque de commerce. Le registraire a jugé le procédé adéquat et je ne vois aucune erreur manifeste dans sa conclusion.

[47]            De la même façon, l'affirmation de la demanderesse que le dessin est inadéquat

parce que la description indique que la marque vise une couleur et une forme alors que la demande d'enregistrement précise que le comprimé illustré par un contour en pointillé ne fait pas partie intégrante de la marque de commerce, ne me persuade pas. Dans l'arrêt Bayer, précité, le juge Evans a rejeté l'argument, aux paragraphes 32 à 36, dans les termes suivants :

[32]      Novopharm soutient qu'il est possible d'interpréter la demande comme revendiquant la couleur rose antique en tant que marque de commerce parce que le dessin joint à la description porte la mention suivante [traduction] « le comprimé en pointillé ne fait pas partie de la marque de commerce » . Si tel est le cas, alors la demande est irrégulière puisqu'une couleur seule ne peut constituer une marque de commerce : voir l'arrêt Wampole & Co. Ltd. (Henry K.) c. Hervay Chemical Company of Canada Ltd., [1929] R.C.É. 78; confirmé par [1930] R.C.S. 336.

[33]      J'estime que cette prétention est dépourvue de bien-fondé. Les mots tirés de la description contenue dans la demande visent à préciser que la marque revendiquée n'est pas le comprimé lui-même, mais seulement la couleur telle qu'elle est appliquée aux surfaces externes de celui-ci comme le montre le spécimen déposé auprès du Bureau des marques de commerce.

[34]      Il ressort d'une autre affaire qui ressemble à la présente, l'affaire Novopharm Ltd. c. Astra Aktiebolag, [1997] T.M.O.B. n º 303 (QL), que les mots [au paragraphe 1] [traduction] « le comprimé en pointillé ne fait pas partie de la marque de commerce » sont inclus, à la demande du Bureau, pour la fin expliquée précédemment. J'estime que ces mots parviennent effectivement à établir la distinction voulue entre le produit lui-même et ses propriétés physiques de forme et de couleur extérieure.

[35]      Quoi qu'il en soit, si j'avais eu le moindre doute sur cette question, j'aurais accordé beaucoup de poids à l'opinion du registraire étant donné qu'il s'agit d'une question de pratique et de procédure suivie par le Bureau relativement aux demandes de marque de commerce.


[36]      J'estime donc que le registraire n'a pas commis d'erreur en concluant que la marque de commerce visée par la demande ne se limitait pas à la couleur, mais s'entendait de la couleur rose antique appliquée à l'ensemble de l'extérieur des comprimés que représente le spécimen.

[48]            À mon avis, les mots contestés en appel par Novopharm sont susceptibles de faire

la distinction voulue entre le comprimé lui-même et ses propriétés matérielles de forme et de couleur extérieure. S'agissant des inscriptions sur le comprimé, je considère qu'il est de pratique courante au Canada que tous les médicaments pharmaceutiques comportent des inscriptions à usage d'identification. Cela n'a pas constitué un empêchement à l'enregistrement d'une marque de commerce dans l'arrêt Novopharm Ltd. c. Bayer, précité.

[49]            Considérant que la description verbale et les dessins n'étaient ni insuffisants ni

imprécis, je conclus que le registraire n'a pas commis d'erreur en se référant aux spécimens.

Le motif d'opposition visé en a)iii) dans la procédure 917

[50]            Le registraire a conclu que l'opposition de Novopharm au dessin allait à


l'encontre de l'alinéa 38(3)a) de la Loi, et dans l'hypothèse où cette conclusion serait erronée, il a ensuite examiné le bien-fondé de l'opposition. Tout en reconnaissant un peu anormal pour le registraire de trancher la question par une considération technique dans la présente procédure alors qu'il ne l'avait pas fait dans la procédure 918, j'estime que la conclusion du registraire, à savoir que l'opposition n'était rien de plus qu'une simple affirmation et qu'elle ne répondait pas aux dispositions prévues à l'alinéa 38(3)a) de la Loi, n'était pas manifestement erronée.

[51]            En outre, je suis persuadée que la conclusion subsidiaire du registraire sur ce

motif d'opposition n'était pas non plus manifestement erronée.

[52]            La différence importante du dessin visé dans la présente procédure vient du fait

que le tableau des couleurs du paragraphe 28(2) du Règlement sur les marques de commerce contient une représentation visuelle de la couleur rose. Dans la présente procédure, la description verbale du comprimé indiquait le rose et dans le dessin, le rose était représenté par une trame à points dense. Or le tableau des couleurs du paragraphe 28(2) prévoit un hachuré à traits verticaux comme indication du rouge ou du rose, et non une trame à points.

[53]            Le registraire s'est fondé sur la description verbale claire du [TRADUCTION]

« rose » et sur le fait que le paragraphe 28(2) du Règlement sur les marques de commerce prévoit l'usage du tableau des couleurs si la description « n'est pas claire » pour conclure que le dessin satisfaisait aux exigences de la Loi. Comme je l'ai noté, je suis persuadée que la conclusion du registraire n'était pas manifestement erronée.


[54]            Il faut remarquer que la trame à points dense utilisée dans le dessin ne figure pas

dans le tableau des couleurs. La situation diffère de celle que devait trancher le juge Evans dans l'arrêt Bayer,précité, où le comprimé était décrit comme rose, mais dessiné comme bleu, selon le hachuré horizontal du tableau des couleurs du paragraphe 28(2) qui représente le bleu.

Le motif d'opposition visé en c) dans les deux procédures

[55]            Dans les deux procédures, Novopharm a fondé son opposition sur le fait que la

marque de commerce n'était pas descriptive parce que les comprimés de couleur étaient courants dans le secteur pharmaceutique et ne pouvaient être distingués des marchandises « d'autres personnes, notamment des comprimés » de certaines sociétés pharmaceutiques mentionnées sur une liste.

[56]            Le registraire a conclu que cette allégation ne fournissait pas de détails suffisants

et qu'il n'incombait pas à la requérante de s'enquérir des produits qui sont vendus par des tiers pour savoir à quels comprimés de couleur l'opposante faisait allusion.

[57]            Dans sa contre-déclaration, Astra avait clairement déploré de ne pas être en

mesure de répondre à ce motif d'opposition faute de détails sur la forme et la nature spécifique des médicaments auxquels il était fait allusion.


[58]            Je ne puis conclure que le registraire a commis une erreur manifeste en rejetant ce

motif d'opposition pour cette raison. La liste des sociétés pharmaceutiques fournie par Novopharm n'était pas exhaustive, comme le montre la présence du terme [TRADUCTION] « notamment » . De plus, faute d'indications sur les produits spécifiques auxquels on fait allusion ou sur les circonstances pertinentes par rapport à l'endroit, au moment ou aux quantités dans lesquels ces comprimés ont été utilisés, je ne vois pas comment Astra pouvait être en mesure de savoir de quoi il s'agissait et de répondre à l'opposition. Par conséquent, j'estime que la conclusion du registraire ne peut être qualifiée de manifestement erronée.

[59]            Cette conclusion, selon moi, tranche l'appel de Novopharm pour ce motif. Bien

que Novopharm ait produit en appel une preuve supplémentaire importante au sujet de la conclusion subsidiaire du registraire que l'opposante n'avait pas étayé les allégations de sa déclaration d'opposition, je suis d'avis que je n'aurais la faculté de prendre cette preuve en considération que si j'étais persuadée que le registraire avait commis une erreur quand il a conclu initialement au caractère insuffisant de la déclaration d'opposition de Novopharm. Je n'en suis pas persuadée.

[60]            Par conséquent, pour les motifs qui viennent d'être exposés, je conclus que les

appels doivent être rejetés.


[61]            Si les parties n'arrivent pas à s'entendre sur les dépens, elles seront ultérieurement

invitées à présenter des observations à ce sujet.

ORDONNANCE

[62]            LA COUR ORDONNE :

1.          Les appels sont rejetés.

2.          Si les parties n'arrivent pas à une entente sur les dépens, elles devront ultérieurement présenter des observations à ce sujet.

Eleanor R. Dawson

                                                                                                                                                    Juge                        

Traduction certifiée conforme

______________________

Richard Jacques, LL. L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Nos DU GREFFE :                               T-1470-99 et T-1471-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :             Novopharm Limited

c. AstraZeneca AB

et le registraire des marques de commerce

LIEU DE L'AUDIENCE :                   Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                 9 mai 2001

________________________________________________________________________

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

DE MADAME LE JUGE DAWSON

EN DATE DU 12 JUIN 2001

________________________________________________________________________

ONT COMPARU :

Carol Hitchman et Paula Bremner                       pour la demanderesse

Gunars A. Gaikis et Nancy P. Pei                       pour la défenderesse (AstraZeneca AB)

Aucune comparution                                             pour le défendeur (le registraire des marques de commerce)

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Hitchman & Sprigings

Toronto (Ontario)                                                 pour la demanderesse

Smart & Biggar

Toronto (Ontario)                                                 pour la défenderesse (AstraZeneca AB)

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada                     pour le défendeur (le registraire des marques de commerce)

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