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Date : 20200205


Dossier : IMM-826-19

Référence : 2020 CF 199

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 5 février 2020

En présence de monsieur le juge Russell

ENTRE :

TALIB SHEIKH

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  INTRODUCTION

[1]  La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire présentée par le demandeur au titre du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR], à l’encontre de la décision datée du 18 janvier 2019 [la décision], par laquelle un agent d’immigration [l’agent] a refusé de traiter la demande de parrainage présentée par le demandeur.

II.  CONTEXTE

[2]  Né le 17 février 1991, le demandeur est un citoyen du Pakistan. Il a obtenu le statut de résident permanent au Canada le 14 mai 2017.

[3]  En janvier 2018, le demandeur a déposé deux formulaires de déclaration d’intérêt [DI] indiquant son intérêt à présenter une demande de parrainage de ses parents. Il a lui-même déposé le premier formulaire, tandis que le deuxième a été déposé par son avocat. Le 28 mars 2018, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada [IRCC] a invité le demandeur à présenter une demande de parrainage de ses parents, fondée sur la DI no 90BC106-19, qui mentionnait que sa date de naissance était le 17 décembre 1991 (« 1991/12/17 »). Le 22 mai 2018, le demandeur a présenté une demande de parrainage de ses parents, laquelle indiquait que sa date de naissance était le 17 février 1991 (« 1991/02/17 »). Dans sa demande, le demandeur a inclus une copie de son passeport, de sa carte de résident permanent ainsi que de son certificat d’enregistrement familial émis par le gouvernement du Pakistan. Les trois documents indiquent que sa date de naissance est le 17 février 1991.

[4]  Le 6 septembre 2018, un agent a refusé de traiter la demande de parrainage présentée par le demandeur, car il a été découvert que le demandeur avait déposé plus d’une DI. Le demandeur a déposé une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire, alléguant que le dédoublement des DI découlait d’une erreur. À l’étape de l’autorisation, le défendeur a consenti à ce que ce refus soit annulé et à ce que la demande soit appréciée à nouveau.

[5]  Après la nouvelle appréciation, le traitement de la demande du demandeur a encore une fois été refusé le 18 janvier 2019.

III.  DÉCISION FAISANT L’OBJET DU PRÉSENT CONTRÔLE

[6]  Après la nouvelle appréciation, l’agent a refusé de traiter la demande de parrainage présentée par le demandeur, au motif que la date de naissance mentionnée dans la DI no 90BC106-19 différait de celle indiquée dans sa demande de parrainage. L’agent a fait remarquer que la DI mentionnait que sa date de naissance était le 17 décembre 1991 (« 1991/12/17 »), tandis que la demande de parrainage indiquait que sa date de naissance était le 17 février 1991 (« 1991/02/17 »).

[7]  Plus précisément, l’agent a fait remarquer que la demande de parrainage n’était pas conforme au 21e ensemble d’instructions, les Instructions ministérielles sur le traitement des demandes de visa de résident permanent faites par les parents ou grands-parents d’un répondant, au titre de la catégorie du regroupement familial, et sur le traitement des demandes de parrainage faites relativement à ces demandes (2017), Gazette du Canada, partie I, vol 151, no 1 [les IM21], qui ont été pris effet le 1er janvier 2017. L’agent a déclaré que les IM21 exigeaient qu’une demande de parrainage soit présentée par la même personne que celle invitée à le faire par IRCC et que, pour s’en assurer, la demande doit indiquer les mêmes renseignements que ceux fournis dans la DI, y compris la date de naissance du demandeur.

[8]  Par conséquent, compte tenu des dates de naissance contradictoires, l’agent a refusé de traiter la demande de parrainage présentée par le demandeur et l’a invité à présenter une nouvelle DI une fois le programme rouvert.

IV.  QUESTIONS EN LITIGE

[9]  Les questions soulevées dans le cadre de la présente demande sont les suivantes :

  1. Le refus de l’agent de traiter la demande de parrainage présentée par le demandeur constitue-t-il une décision susceptible de contrôle?
  2. L’agent a-t-il entravé l’exercice de son pouvoir discrétionnaire?

V.  NORME DE CONTRÔLE

[10]  La présente demande a été débattue avant que soient rendus les récents arrêts de la Cour suprême du Canada dans Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov], et Bell Canada c Canada (Procureur général), 2019 CSC 66. Notre Cour a pris l’affaire en délibéré. Les observations des parties sur la norme de contrôle étaient donc fondées sur le cadre d’analyse établi dans Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 [Dunsmuir]. Cependant, compte tenu des circonstances de l’espèce et des directives énoncées par la Cour suprême du Canada au paragraphe 144 de Vavilov, notre Cour a conclu qu’il était nécessaire de demander aux parties de présenter des observations supplémentaires sur la norme de contrôle. J’ai appliqué le cadre d’analyse établi dans Vavilov à mon examen de la demande, et ce cadre ne change ni la norme de contrôle applicable dans la présente affaire ni mes conclusions.

[11]  Aux paragraphes 23 à 32 de Vavilov, les juges majoritaires ont cherché à simplifier la façon dont un tribunal choisit la norme de contrôle applicable aux questions dont il est saisi. Ils ont renoncé à l’approche fondée sur le contexte et les catégories qui avait été adoptée dans Dunsmuir, en faveur de l’établissement d’une présomption selon laquelle la norme de la décision raisonnable s’applique. Cependant, les juges majoritaires ont souligné que cette présomption pouvait être réfutée, sur la base : (1) d’une intention claire du législateur de prescrire une autre norme de contrôle (Vavilov, aux para 33‑52); (2) de certains cas où la primauté du droit exige l’application de la norme de la décision correcte, par exemple à l’égard des questions constitutionnelles, des questions de droit générales d’importance capitale pour le système juridique dans son ensemble et des questions liées aux délimitations des compétences respectives d’organismes administratifs (Vavilov, aux para 53‑64).

[12]  Les parties ont d’abord soutenu que la norme de contrôle applicable en l’espèce était la décision raisonnable. Cependant, elles ont toutes deux soutenu que, quelle que soit la norme de contrôle appliquée par la Cour à l’examen de la question de savoir si un décideur a entravé l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, une conclusion positive constitue une erreur susceptible de contrôle exigeant l’annulation de la décision.

[13]  Le 16 janvier 2020, les parties ont été invitées à formuler des observations écrites sur la norme de contrôle applicable, à la lumière de l’arrêt Vavilov. Les deux parties ont continué d’affirmer que la norme de la décision raisonnable s’appliquait à la question de savoir si l’agent avait entravé l’exercice de son pouvoir discrétionnaire. Le demandeur continue d’affirmer que, quelle que soit la norme de contrôle appliquée par la Cour, une conclusion positive quant à cette question constitue une erreur susceptible de contrôle exigeant l’annulation de la décision.

[14]  Je conviens avec les deux parties que la norme de la décision raisonnable devrait être appliquée à l’examen par la Cour de la question de savoir si l’agent a entravé l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, étant donné que rien ne réfute la présomption selon laquelle la norme de la décision raisonnable s’applique en l’espèce.

[15]  Au paragraphe 108 de l’arrêt Vavilov, la Cour suprême du Canada a fait remarquer qu’un régime législatif « oriente [...] les approches acceptables en matière de prise de décisions : par exemple, lorsque le décideur dispose d’un vaste pouvoir discrétionnaire, il serait déraisonnable de sa part d’entraver un tel pouvoir discrétionnaire ». Cela est conforme à la jurisprudence antérieure à Vavilov, qui a établi que l’entrave à l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire constitue une erreur susceptible de contrôle justifiant l’annulation de la décision (Maple Lodge Farms c Gouvernement du Canada, [1982] 2 RCS 2 au para 6).

[16]  Par conséquent, aucun degré de retenue ne permet de racheter une décision découlant de l’entrave à l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire. Comme le juge Stratas l’a déclaré dans Stemijon Investments Ltd c Canada (Procureur général), 2011 CAF 299 au para 24 : « Une décision qui découle d’un pouvoir discrétionnaire limité est être [sic] en soi déraisonnable. » Il suffit de déclarer que, quelle que soit la norme de contrôle appliquée à cette question, toute décision découlant d’une entrave à l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire devrait être annulée (Barco c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2018 CF 421 au para 20; Gordon c Canada (Procureur général), 2016 CF 643 au para 28).

[17]  Par souci de clarté, aucune norme de contrôle ne s’applique à la question de savoir si le refus de l’agent de traiter la demande de parrainage présentée par le demandeur constitue une décision susceptible de contrôle.

VI.  DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

[18]  Les dispositions suivantes de la LIPR sont applicables à la présente demande de contrôle judiciaire :

Sélection des résidents permanents

Selection of Permanent Residents

Regroupement familial

Family reunification

12 (1) La sélection des étrangers de la catégorie « regroupement familial » se fait en fonction de la relation qu’ils ont avec un citoyen canadien ou un résident permanent, à titre d’époux, de conjoint de fait, d’enfant ou de père ou mère ou à titre d’autre membre de la famille prévu par règlement.

12 (1) A foreign national may be selected as a member of the family class on the basis of their relationship as the spouse, common-law partner, child, parent or other prescribed family member of a Canadian citizen or permanent resident.

[...]

...

Parrainage de l’étranger

Sponsorship of foreign nationals

13 (1) Tout citoyen canadien, résident permanent ou groupe de citoyens canadiens ou de résidents permanents ou toute personne morale ou association de régime fédéral ou provincial – ou tout groupe de telles de ces personnes ou associations – peut, sous réserve des règlements, parrainer un étranger.

13 (1) A Canadian citizen or permanent resident, or a group of Canadian citizens or permanent residents, a corporation incorporated under a law of Canada or of a province or an unincorporated organization or association under federal or provincial law – or any combination of them – may sponsor a foreign national, subject to the regulations.

[...]

...

Instructions

Instructions of Minister

(4) L’agent est tenu de se conformer aux instructions du ministre sur la mise en œuvre des règlements visés à l’alinéa 14(2)e).

(4) An officer shall apply the regulations on sponsorship referred to in paragraph 14(2)(e) in accordance with any instructions that the Minister may make.

[...]

...

Instructions sur le traitement des demandes

Instructions on Processing Applications and Requests

Application

Application

87.3 (1) Le présent article s’applique aux demandes de visa et autres documents visés aux paragraphes 11(1) et (1.01) – sauf à celle faite par la personne visée au paragraphe 99(2) –, aux demandes de parrainage faites au titre du paragraphe 13(1), aux demandes de statut de résident permanent visées au paragraphe 21(1) ou de résident temporaire visées au paragraphe 22(1) faites par un étranger se trouvant au Canada, aux demandes de permis de travail ou d’études ainsi qu’aux demandes prévues au paragraphe 25(1) faites par un étranger se trouvant hors du Canada.

87.3 (1) This section applies to applications for visas or other documents made under subsections 11(1) and (1.01), other than those made by persons referred to in subsection 99(2), to sponsorship applications made under subsection 13(1), to applications for permanent resident status under subsection 21(1) or temporary resident status under subsection 22(1) made by foreign nationals in Canada, to applications for work or study permits and to requests under subsection 25(1) made by foreign nationals outside Canada.

Atteinte des objectifs d’immigration

Attainment of immigration goals

(2) Le traitement des demandes se fait de la manière qui, selon le ministre, est la plus susceptible d’aider l’atteinte des objectifs fixés pour l’immigration par le gouvernement fédéral.

(2) The processing of applications and requests is to be conducted in a manner that, in the opinion of the Minister, will best support the attainment of the immigration goals established by the Government of Canada.

Instructions

Instructions

(3) Pour l’application du paragraphe (2), le ministre peut donner des instructions sur le traitement des demandes, notamment des instructions :

(3) For the purposes of subsection (2), the Minister may give instructions with respect to the processing of applications and requests, including instructions

a) prévoyant les groupes de demandes à l’égard desquels s’appliquent les instructions;

(a) establishing categories of applications or requests to which the instructions apply;

a.1) prévoyant des conditions, notamment par groupe, à remplir en vue du traitement des demandes ou lors de celui-ci;

(a.1) establishing conditions, by category or otherwise, that must be met before or during the processing of an application or request;

b) prévoyant l’ordre de traitement des demandes, notamment par groupe;

(b) establishing an order, by category or otherwise, for the processing of applications or requests;

c) précisant le nombre de demandes à traiter par an, notamment par groupe;

(c) setting the number of applications or requests, by category or otherwise, to be processed in any year; and

d) régissant la disposition des demandes dont celles faites de nouveau.

(d) providing for the disposition of applications and requests, including those made subsequent to the first application or request.

Application

Application

(3.1) Les instructions peuvent, lorsqu’elles le prévoient, s’appliquer à l’égard des demandes pendantes faites avant la date où elles prennent effet.

(3.1) An instruction may, if it so provides, apply in respect of pending applications or requests that are made before the day on which the instruction takes effect.

Précision

Clarification

(3.2) Il est entendu que les instructions données en vertu de l’alinéa (3)c) peuvent préciser que le nombre de demandes à traiter par an, notamment par groupe, est de zéro.

(3.2) For greater certainty, an instruction given under paragraph (3)(c) may provide that the number of applications or requests, by category or otherwise, to be processed in any year be set at zero.

Respect des instructions

Compliance with instructions

(4) L’agent – ou la personne habilitée à exercer les pouvoirs du ministre prévus à l’article 25 – est tenu de se conformer aux instructions avant et pendant le traitement de la demande; s’il ne procède pas au traitement de la demande, il peut, conformément aux instructions du ministre, la retenir, la retourner ou en disposer.

(4) Officers and persons authorized to exercise the powers of the Minister under section 25 shall comply with any instructions before processing an application or request or when processing one. If an application or request is not processed, it may be retained, returned or otherwise disposed of in accordance with the instructions of the Minister.

Précision

Clarification

(5) Le fait de retenir ou de retourner une demande ou d’en disposer ne constitue pas un refus de délivrer les visa ou autres documents, d’octroyer le statut ou de lever tout ou partie des critères et obligations applicables.

(5) The fact that an application or request is retained, returned or otherwise disposed of does not constitute a decision not to issue the visa or other document, or grant the status or exemption, in relation to which the application or request is made.

Publication

Publication

(6) Les instructions sont publiées dans la Gazette du Canada.

(6) Instructions shall be published in the Canada Gazette.

Précision

Clarification

(7) Le présent article n’a pas pour effet de porter atteinte au pouvoir du ministre de déterminer de toute autre façon la manière la plus efficace d’assurer l’application de la loi.

(7) Nothing in this section in any way limits the power of the Minister to otherwise determine the most efficient manner in which to administer this Act.

[19]  Les dispositions suivantes du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 [le Règlement], sont applicables à la présente demande de contrôle judiciaire :

Demandes

Applications

Forme et contenu de la demande

Form and content of application

10 (1) Sous réserve des alinéas 28b) à d) et 139(1)b), toute demande au titre du présent règlement :

10 (1) Subject to paragraphs 28(b) to (d) and 139(1)(b), an application under these Regulations shall

a) est faite par écrit sur le formulaire fourni, le cas échéant, par le ministère ou, dans le cas d’une demande de déclaration de dispense visée au paragraphe 42.1(1) de la Loi, par l’Agence des services frontaliers du Canada;

(a) be made in writing using the form, if any, provided by the Department or, in the case of an application for a declaration of relief under subsection 42.1(1) of the Act, by the Canada Border Services Agency;

b) est signée par le demandeur;

(b) be signed by the applicant;

c) comporte les renseignements et documents exigés par le présent règlement et est accompagnée des autres pièces justificatives exigées par la Loi;

(c) include all information and documents required by these Regulations, as well as any other evidence required by the Act;

d) est accompagnée d’un récépissé de paiement des droits applicables prévus par le présent règlement;

(d) be accompanied by evidence of payment of the applicable fee, if any, set out in these Regulations; and

e) dans le cas où le demandeur est accompagné d’un époux ou d’un conjoint de fait, indique celui d’entre eux qui agit à titre de demandeur principal et celui qui agit à titre d’époux ou de conjoint de fait accompagnant le demandeur principal.

(e) if there is an accompanying spouse or common-law partner, identify who is the principal applicant and who is the accompanying spouse or common-law partner.

Renseignements à fournir

Required information

(2) La demande comporte, sauf disposition contraire du présent règlement, les éléments suivants :

(2) The application shall, unless otherwise provided by these Regulations,

a) les nom, date de naissance, adresse, nationalité et statut d’immigration du demandeur et de chacun des membres de sa famille, que ceux-ci l’accompagnent ou non, ainsi que la mention du fait que le demandeur ou l’un ou l’autre des membres de sa famille est l’époux, le conjoint de fait ou le partenaire conjugal d’une autre personne;

(a) contain the name, birth date, address, nationality and immigration status of the applicant and of all family members of the applicant, whether accompanying or not, and a statement whether the applicant or any of the family members is the spouse, common-law partner or conjugal partner of another person;

[...]

...

d) une déclaration attestant que les renseignements fournis sont exacts et complets.

(d) include a declaration that the information provided is complete and accurate.

[...]

...

Demande de parrainage

Application – sponsorship

(4) La demande faite par l’étranger au titre de la catégorie du regroupement familial doit être accompagnée de la demande de parrainage visée à l’alinéa 130(1)c).

(4) An application made by a foreign national as a member of the family class must be accompanied by a sponsorship application referred to in paragraph 130(1)(c).

Demandes multiples

Multiple applications

(5) Le répondant qui a déposé une demande de parrainage à l’égard d’une personne ne peut déposer de nouvelle demande concernant celle-ci tant qu’il n’a pas été statué en dernier ressort sur la demande initiale.

(5) No sponsorship application may be filed by a sponsor in respect of a person if the sponsor has filed another sponsorship application in respect of that same person and a final decision has not been made in respect of that other application.

Demande de parrainage non valide

Invalid sponsorship application

(6) Pour l’application du paragraphe 63(1) de la Loi, la demande de parrainage qui n’est pas faite en conformité avec le paragraphe (1) est réputée non déposée.

(6) A sponsorship application that is not made in accordance with subsection (1) is considered not to be an application filed in the prescribed manner for the purposes of subsection 63(1) of the Act.

[...]

...

Renvoi de la demande

Return of application

12 Sous réserve de l’article 140.4, si les exigences prévues aux articles 10 et 11 ne sont pas remplies, la demande et tous les documents fournis à l’appui de celle-ci, sauf les renseignements visés aux sous-alinéas 12.3b)(i) et (ii), sont retournés au demandeur.

12 Subject to section 140.4, if the requirements of sections 10 and 11 are not met, the application and all documents submitted in support of it, except the information referred to in subparagraphs 12.3(b)(i) and (ii), shall be returned to the applicant.

[20]  Les dispositions suivantes des IM21 sont applicables à la présente demande de contrôle judiciaire :

Conditions – demandes de parrainage

Conditions – sponsorship applications

À l’égard d’une année, afin d’être traitée, toute demande de parrainage visée par les présentes instructions qui n’a pas été retournée en vertu de l’article 12 du Règlement parce qu’elle ne remplissait pas les exigences prévues aux articles 10 et 11 du Règlement par exemple parce qu’elle n’avait pas été faite sur tous les formulaires applicables fournis par le Ministère dans la trousse de demande publiée sur le site Web du Ministère ou parce qu’elle ne comportait pas tous les renseignements, documents et pièces justificatives visés à l’alinéa 10(1)c) du Règlement doit remplir les conditions suivantes :

With respect to a year, in order to be processed, any sponsorship application referred to in these Instructions that has not been returned under section 12 of the Regulations for not meeting the requirements of sections 10 and 11 of the Regulations for example by not using all the applicable forms provided by the Department in the application package published on the website of the Department or by not including all information, documents and evidence referred to in paragraph 10(1)(c) of the Regulations must meet the following conditions:

a) la demande de parrainage est faite par une personne qui, ayant indiqué durant la période durant laquelle elle pouvait le faire son intérêt à faire une demande de parrainage par les moyens mis à disposition par le Ministère à cette fin, a été invitée à faire sa demande après avoir été sélectionnée au hasard par le Ministère parmi les autres intéressés;

(a) the sponsorship application is made by a person who, having indicated during the period during which they could do so their interest in making a sponsorship application by means that have been made available by the Department for that purpose, has been invited to make the application after they were randomly selected by the Department among the other interested persons;

b) la demande de parrainage a été reçue par le Ministère dans les 90 jours suivant le jour où le Ministère lui a envoyé une invitation à faire une demande de parrainage;

(b) the sponsorship application has been received by the Department within the period of 90 days after the day on which the Department sent the sponsor an invitation to make a sponsorship application;

c) la demande de parrainage indique les mêmes renseignements, tels que le nom, la date de naissance, l’adresse et le pays de naissance, que ceux relatifs à la personne qui a été invitée à faire une telle demande;

(c) the sponsorship application indicates the same information, such as name, date of birth, address, country of birth, as that of the person who has been invited to make such an application; and

d) la demande de parrainage est accompagnée des documents exigés par la trousse de demande, avec ses modifications successives, publiée sur le site Web du Ministère.

(d) the sponsorship application is accompanied by the documents required by the application package published on the website of the Department, as amended from time to time.

[21]  La disposition suivante de l’instruction et ligne directrice opérationnelle intitulée « La catégorie du regroupement familial : Parents et grands-parents » [la ligne directrice] est applicable à la présente demande de contrôle judiciaire :

Validation des demandes de parrainage

Validating applications to sponsor

L’agent d’IRCC du RC compare les renseignements contenus dans la demande de parrainage à ceux qui se trouvent dans la liste de travail pour valider le nom, la date de naissance, l’adresse, le pays de naissance, les noms de la ou des personnes parrainées, et le numéro du document attestant du statut au Canada. Si les renseignements contenus dans la demande de parrainage ne correspondent pas à ceux qui se trouvent dans le formulaire « Intérêt pour le parrainage », la demande peut être rejetée. Si l’agent d’IRCC est convaincu de la concordance des renseignements qui figurent dans le formulaire « Intérêt pour le parrainage » et dans la demande de parrainage, il consigne la décision.

IRCC officers in the CN validate the name, date of birth, address, country of birth, names of sponsored person or people, and status-in-Canada document number by comparing the information in the sponsorship application to the information in the working list. If the information in the sponsorship application does not match what is on the interest to sponsor form, the application may be rejected. If the IRCC officer is satisfied the information on the interest to sponsor form and the sponsorship application match, the officer records the decision.

Si l’agent est incapable de valider les renseignements contenus dans la demande de parrainage et qu’aucune lettre d’explication ni aucun document justificatif n’ont été transmis pour expliquer les divergences entre les renseignements figurant dans le formulaire « Intérêt pour le parrainage » et dans la demande, il ne peut pas accepter la demande aux fins de traitement et la retourne au répondant. L’agent doit consigner les motifs de la décision.

If the officer is unable to validate the information in the sponsorship application, and no letter of explanation or supporting documentation is included to explain discrepancies between the information on the interest to sponsor form and the information in the application, the officer cannot accept the application for processing and returns it to the sponsor. Officers should record the reason for the decision.

[22]  Les dispositions suivantes de la Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c F-7, sont applicables à la présente demande de contrôle judiciaire :

Demande de contrôle judiciaire

Application for judicial review

18.1 (1) Une demande de contrôle judiciaire peut être présentée par le procureur général du Canada ou par quiconque est directement touché par l’objet de la demande.

18.1 (1) An application for judicial review may be made by the Attorney General of Canada or by anyone directly affected by the matter in respect of which relief is sought.

Délai de présentation

Time limitation

(2) Les demandes de contrôle judiciaire sont à présenter dans les trente jours qui suivent la première communication, par l’office fédéral, de sa décision ou de son ordonnance au bureau du sous-procureur général du Canada ou à la partie concernée, ou dans le délai supplémentaire qu’un juge de la Cour fédérale peut, avant ou après l’expiration de ces trente jours, fixer ou accorder.

(2) An application for judicial review in respect of a decision or an order of a federal board, commission or other tribunal shall be made within 30 days after the time the decision or order was first communicated by the federal board, commission or other tribunal to the office of the Deputy Attorney General of Canada or to the party directly affected by it, or within any further time that a judge of the Federal Court may fix or allow before or after the end of those 30 days.

Pouvoirs de la Cour fédérale

Powers of Federal Court

(3) Sur présentation d’une demande de contrôle judiciaire, la Cour fédérale peut :

(3) On an application for judicial review, the Federal Court may

a) ordonner à l’office fédéral en cause d’accomplir tout acte qu’il a illégalement omis ou refusé d’accomplir ou dont il a retardé l’exécution de manière déraisonnable;

(a) order a federal board, commission or other tribunal to do any act or thing it has unlawfully failed or refused to do or has unreasonably delayed in doing; or

b) déclarer nul ou illégal, ou annuler, ou infirmer et renvoyer pour jugement conformément aux instructions qu’elle estime appropriées, ou prohiber ou encore restreindre toute décision, ordonnance, procédure ou tout autre acte de l’office fédéral.

(b) declare invalid or unlawful, or quash, set aside or set aside and refer back for determination in accordance with such directions as it considers to be appropriate, prohibit or restrain, a decision, order, act or proceeding of a federal board, commission or other tribunal.

VII.  ARGUMENTS

A.  Le demandeur

[23]  Le demandeur fait valoir que l’agent a entravé l’exercice de son pouvoir discrétionnaire en considérant les IM21 et la ligne directrice comme des règles obligatoires, ce qui n’a pas permis à l’agent d’exercer ce pouvoir pour trancher la question de savoir si la demande de parrainage présentée par le demandeur, dans son ensemble, confirmait suffisamment sa date de naissance et le fait qu’il était la même personne qui avait déposé la DI. Le demandeur affirme également que le refus de l’agent de traiter sa demande constitue une décision susceptible de contrôle et que le contrôle judiciaire en question porte sur la conclusion de non-conformité que l’agent aurait tirée à tort. Ainsi, le demandeur fait valoir que la présente demande de contrôle judiciaire devrait être accueillie, que la décision devrait être annulée et que sa demande devrait être renvoyée pour qu’un autre agent statue à nouveau sur celle-ci.

(1)  L’assujettissement au contrôle du refus de traiter la demande de parrainage

[24]  Le demandeur fait valoir que la décision de refuser de traiter sa demande de parrainage est susceptible de contrôle judiciaire, puisqu’il a satisfait à toutes les exigences prévues dans la LIPR, le Règlement, les IM21 et la ligne directrice en ce qui concerne le traitement des demandes de parrainage, à l’exception d’une erreur typographique d’un seul chiffre. Le demandeur affirme que le contrôle judiciaire en question porte sur la conclusion de non‑conformité que l’agent aurait tirée à tort et que la décision est donc susceptible de contrôle judiciaire. Le demandeur fait remarquer que, si on ne considère pas une telle décision comme susceptible de contrôle, les décideurs pourraient refuser de traiter les demandes pour des motifs spécieux sans être tenus responsables.

[25]  Le demandeur soutient également que la jurisprudence citée par le défendeur ne s’applique pas en l’espèce. En fait, le demandeur fait remarquer que Dhillon c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 391 [Dhillon], et Liang c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 758 [Liang], ne sont pas pertinents en l’espèce, puisqu’il conteste le fait même que sa demande a été jugée inadmissible au traitement. Dans Dhillon, les demandeurs n’avaient pas été invités à présenter une demande de parrainage, tandis que, dans Liang, la Cour a fait remarquer qu’une obligation de traitement n’existait qu’à l’égard des demandes jugées admissibles au traitement.

[26]  En outre, le demandeur affirme que la décision Filippiadis c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 685 [Filippiadis], peut aussi être distinguée, car, dans cette affaire, la Cour a conclu que le refus de traiter une demande « incomplète » ne constituait pas une décision susceptible de contrôle, puisque, dans cette affaire, le demandeur n’avait pas inclus le bon document d’identité. Le demandeur soutient que cela ne peut pas être comparé à la présente affaire, puisqu’il a déposé tous les documents nécessaires et fourni à l’agent tous les renseignements requis pour traiter sa demande.

(2)  L’entrave à l’exercice du pouvoir discrétionnaire

[27]  Le demandeur fait valoir que l’agent a entravé l’exercice de son pouvoir discrétionnaire en appliquant les IM21 et la ligne directrice comme des sources de droit juridiquement contraignantes, au lieu d’apprécier l’erreur typographique unique et évidente au regard de la preuve simple et claire dont il disposait.

[28]  Le demandeur fait d’abord remarquer qu’il semble que l’agent a fondé sa décision sur la ligne directrice, et non pas sur les IM21, puisque le libellé de la ligne directrice est inclus, bien que les IM21 soient citées. Quoi qu’il en soit, le demandeur soutient que ni la ligne directrice ni les IM21 ne fournissent un fondement juridique sur lequel s’appuyer pour rendre une décision. Le demandeur affirme qu’il est bien établi que les instructions ministérielles et les lignes directrices sont des outils utiles pour aider les décideurs à traiter les demandes plutôt que des sources de droit juridiquement contraignantes qui doivent être appliquées strictement dans toutes les affaires, sans égard aux circonstances.

[29]  En ce qui concerne le fondement juridique des lignes directrices, le demandeur cite l’arrêt de la Cour d’appel fédérale dans Kanthasamy c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CAF 113 aux para 51‑54, où il est expressément indiqué ce qui suit, au paragraphe 52 :

Le guide opérationnel constitue un ensemble de lignes directrices administratives, sans plus. De telles lignes directrices sont souhaitables lorsqu’on a affaire à une disposition comme celle qui nous occupe, puisqu’elles favorisent la cohérence du processus décisionnel (arrêt Hawthorne, précité; Eng c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 596). Le guide aide à faire la lumière sur le sens de l’expression « difficultés inhabituelles et injustifiées ou excessives ». La Cour fédérale confirme d’ailleurs régulièrement les décisions d’agents fondées sur l’examen attentif des facteurs mis en jeu par les faits portés à leur attention.

[30]  Le demandeur affirme également que cela s’applique également aux instructions ministérielles, et il se fonde sur la décision de la Cour dans Lorenzo c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 37 au para 25, où il a été souligné ce qui suit :

Interpréter les instructions ministérielles comme juridiquement contraignantes et conférant à l’agent d’immigration des pouvoirs que la LIPR ne prévoit pas, comme le demandeur voudrait y amener la Cour, entrerait en contradiction flagrante avec le principe constant selon lequel les instructions de cette nature n’ont pas force de loi (Agraira c Canada (Sécurité publique et Protection civile), [2013] 2 RCS 559, 2013 CSC 36, au paragraphe 85; Kanthasamy c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CSC 61 (Kanthasamy), au paragraphe 32). Les instructions ministérielles « peuvent servir à déterminer ce qui constitue une interprétation raisonnable d’une disposition donnée de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (Agraira, par. 85) » (Kanthasamy, précité, au paragraphe 32).

[31]  Par conséquent, le demandeur affirme que l’agent a commis une erreur en fondant son refus sur un fondement juridique inapproprié et qu’il a donc entravé l’exercice de son pouvoir discrétionnaire en refusant de traiter sa demande pour ce qui était manifestement une erreur typographique. Le demandeur fait valoir que, si l’agent avait exercé son pouvoir discrétionnaire et examiné la totalité de la preuve présentée, il aurait clairement été en mesure de déterminer que ceux qui avaient déposé la DI ainsi que la demande de parrainage étaient une seule et même personne, et que l’écart résultait d’une seule erreur typographique.

[32]  Le demandeur fait remarquer que l’objet général des IM21 est d’assurer l’uniformité des renseignements personnels afin de valider que la personne qui a déposé la DI est la même personne qui présente la demande de parrainage. Le demandeur affirme qu’il n’était pas au courant de l’erreur avant d’en avoir été avisé par l’agent et qu’il n’a donc pas été en mesure de fournir une lettre d’explication pour les incohérences, mais l’agent n’aurait eu aucune difficulté à valider les renseignements contenus dans la demande de parrainage après avoir examiné tous les éléments de preuve qu’il avait en main.

[33]  Le demandeur soutient également que la ligne directrice, sur laquelle l’agent semble avoir fondé sa décision, était permissive, car elle prévoit que, si « les renseignements contenus dans la demande de parrainage ne correspondent pas à ceux qui se trouvent dans le formulaire “Intérêt pour le parrainage”, la demande peut être rejetée ». Par conséquent, l’agent n’est pas automatiquement tenu de rejeter une demande de traitement simplement en raison d’une erreur typographique, puisque la ligne directrice autorise l’agent à exercer son pouvoir discrétionnaire.

[34]  Le demandeur conclut que l’agent a entravé l’exercice de son pouvoir discrétionnaire en considérant les IM21 et la ligne directrice comme des règles obligatoires, ce qui n’a pas permis l’exercice du pouvoir discrétionnaire. Le demandeur fait remarquer qu’en fait, cela remplace le pouvoir juridique appropriée conféré aux agents par la LIPR et son règlement, puisque le demandeur a satisfait à toutes les exigences pour le traitement prévues à l’art. 10 du Règlement.

[35]  Enfin, le demandeur affirme que la décision ne respecte pas le principe de minimis non curat lex énoncé par la Cour suprême du Canada dans Canadian Foundation for Children, Youth and the Law c Canada (Procureur général), 2004 CSC 4 au para 202 :

Le concept de common law de minimis non curat lex a été formulé de la manière suivante dans la décision anglaise The « Reward » (1818), 2 Dods. 265, 165 E.R. 1482, p. 1484 :

[traduction] La cour n’est pas tenue à une sévérité à la fois dure et pédantesque dans l’application des lois. La loi permet la qualification qui était implicite dans l’ancien adage De minimis non curat lex. – En présence d’irrégularités entraînant de très légères conséquences, elle ne vise pas à infliger des peines inéluctablement sévères. Si l’écart est une vétille qui, advenant qu’elle se poursuive, n’aurait que peu ou pas d’incidence sur l’intérêt public, on pourrait légitimement l’ignorer.

[36]  Étant donné que l’erreur typographique en l’espèce était minime et insignifiante, et que les intérêts en jeu sont importants, le demandeur soutient que l’agent a interprété la ligne directrice d’une façon [traduction] « dure » et [traduction] « pédantesque », ce qui a mené à un résultat [traduction] « exagérément punitif » qui enfreint le principe de minimis non curat lex.

B.  Le défendeur

[37]  Le défendeur soutient que la décision de renvoyer la demande de parrainage présentée par le demandeur pour non-conformité n’est pas une décision susceptible de contrôle judiciaire devant la Cour. Cependant, le défendeur fait remarquer que, de toute façon, l’agent n’a pas entravé l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, car le demandeur n’a pas fourni des renseignements complets et exacts pour démontrer qu’il satisfaisait aux exigences prévues par les IM21. Ainsi, le défendeur fait valoir que la présente demande de contrôle judiciaire devrait être rejetée.

(1)  L’assujettissement au contrôle du refus de traiter la demande de parrainage

[38]  Le défendeur fait valoir que le renvoi de la demande de parrainage présentée par le demandeur pour non-conformité n’est pas une décision susceptible de contrôle devant la Cour, puisqu’il ne constitue pas un rejet de la demande. Le défendeur invoque le paragraphe 87.3(5) de la LIPR, qui prévoit que le refus de traiter une demande ne constitue pas un refus de délivrer un visa. Le défendeur cite Dhillon, aux paragraphes 24 à 34, et Liang, au paragraphe 43, à l’appui.

[39]  Le défendeur fait remarquer que, tout comme dans Filippiadis, le non-respect superficiel des instructions ministérielles peut entraîner une conclusion de non-acceptation, même si les renseignements pertinents auraient pu être déduits d’autres éléments des documents d’un demandeur.

(2)  L’entrave à l’exercice du pouvoir discrétionnaire

[40]  Le défendeur soutient que les agents sont tenus de s’assurer que les demandes de parrainage sont conformes aux IM21. Le pouvoir discrétionnaire d’un agent d’accepter une demande de parrainage est limité par le paragraphe 13(4) de la LIPR, qui exige qu’une demande soit examinée « conform[ément] aux instructions du ministre ».

[41]  Le défendeur fait remarquer que les IM21 exigent qu’un demandeur fournisse les mêmes renseignements personnels dans sa demande de parrainage que ceux qu’il a fournis dans sa DI. Le défendeur affirme également que la ligne directrice appuie cette affirmation et que, même si elle n’est pas juridiquement contraignante, elle constitue un outil précieux pour apprécier les fonctions d’un agent. Le défendeur explique que cette exigence stricte existe, parce qu’une invitation à présenter une demande de parrainage n’est pas transférable.

[42]  En l’espèce, le défendeur soutient qu’il incombe toujours au demandeur de fournir des renseignements complets et exacts. Bien que le défendeur admette que la date de naissance du demandeur est indiquée sur certains de ses documents à l’appui, ces documents n’expliquent pas, dans le cadre de la ligne directrice, l’incohérence et ne confirment pas que le demandeur était la même personne que celle qui a déposé la DI. Étant donné que la demande de parrainage ne satisfaisait pas aux exigences prévues dans les IM21, l’agent n’avait d’autre choix que de refuser de la traiter. Le défendeur affirme que l’agent n’était pas tenu de présumer qu’il y avait une erreur typographique en l’espèce. Ainsi, il n’y a pas eu entrave à l’exercice du pouvoir discrétionnaire.

VIII.  ANALYSE

A.  La décision

[43]  Nonobstant les observations écrites du demandeur (voir le paragraphe 39 du mémoire du demandeur ainsi que les paragraphes 2 et 6 de son mémoire en réplique), dans lesquelles le demandeur demande à la Cour [traduction] « [d’]annuler la décision par laquelle l’agent a refusé de traiter la demande de parrainage présentée par le demandeur et [d’]ordonner qu’un autre agent rende une nouvelle décision », il a précisé lors de l’audience qu’il demandait le contrôle judiciaire du refus de traiter sa demande de parrainage, refus qui se trouve dans la lettre de l’agent datée du 18 janvier 2019.

B.  Les questions en litige

[44]  La présente demande soulève deux questions principales :

  • a) La décision de l’agent de refuser de traiter la demande de parrainage présentée par le demandeur est-elle susceptible de contrôle devant la Cour?

  • b) En refusant de traiter la demande de parrainage, l’agent a-t-il omis d’exercer un pouvoir discrétionnaire en vertu des lois, des règlements et des instructions ministérielles applicables?

[45]  En plus des questions à examiner, le demandeur sollicite les dépens et a soulevé une question aux fins de certification.

C.  L’assujettissement au contrôle judiciaire

(1)  La nature de la décision

[46]  Le défendeur affirme que le refus de traiter la demande n’est pas susceptible de contrôle au titre du paragraphe 87.3(5) de la LIPR et de la jurisprudence de la Cour. Le défendeur s’appuie principalement sur la décision de la Cour dans Filippiadis.

[47]  Le refus en l’espèce se lit ainsi :

[traduction]

Par conséquent, votre demande de parrainage, ou toute demande de résidence permanente connexe, ne sera pas traitée ou placée dans la file d’attente aux fins de traitement dans le cadre du plafond du PGP pour 2018. Vous ne recevrez pas d’autre invitation à présenter une demande et vous devrez présenter un nouveau formulaire Intérêt pour le parrainage lors de la réouverture du programme des PGP en 2019.

[En caractères gras, italiques et soulignés dans l’original.]

[48]  Comme l’indique clairement la lettre de refus, la demande même de parrainage n’a pas été rejetée; la lettre soulignait simplement qu’elle ne serait pas traitée dans le cadre du plafond du Programme des parents et des grands-parents [PGP] pour 2018, et que le demandeur devrait donc déposer un nouveau formulaire de DI à une date ultérieure.

[49]  Les répercussions de ce refus sur le demandeur pourraient être graves. Il a eu la chance d’avoir été choisi par tirage au titre du programme de 2018 pour présenter une demande de parrainage de ses parents. Il a perdu la chance de le faire pour 2018 en raison de ce refus et pourrait ne pas avoir autant de chance au titre du processus d’admission, quelle que soit sa forme, à l’avenir.

[50]  Cela ne signifie pas pour autant que sa demande de parrainage a été rejetée. Le paragraphe 87.3(5) de la LIPR le prévoit clairement.

[51]  En réalité, le demandeur participait au programme sous le régime administratif en vigueur en 2018 (sélection par tirage) pour le traitement du grand nombre de demandes de parrainage. Il devra maintenant se conformer à tout nouveau régime de sélection en vigueur lorsqu’il présentera sa nouvelle demande de parrainage.

[52]  Il n’est pas contesté, en l’espèce, ou dans la jurisprudence, que le ministre peut établir des instructions lui permettant de retourner certaines demandes sans toutes les traiter. Voir, par exemple, Liang, au paragraphe 43. En l’espèce, le litige porte sur la question de savoir si le refus de l’agent d’autoriser le traitement à un moment donné, aux termes du régime en vigueur en 2018, devrait être susceptible de contrôle devant la Cour.

[53]  Je ne vois rien à l’article 87.3 de la LIPR qui répond à cette question. Le paragraphe 87.3(5) indique simplement que le fait de retenir, de retourner une demande de parrainage ou d’en disposer « ne constitue pas un refus de délivrer les visa ou autres documents, d’octroyer le statut ou de lever tout ou partie des critères et obligations applicables ».

[54]  En d’autres termes, l’art. 87.3 prévoit que le refus de traiter la demande de parrainage en l’espèce ne constituait pas un rejet de la demande du demandeur en vue de parrainer ses parents.

[55]  Cependant, à mon avis, il s’agissait d’une décision portant le non-traitement de la demande de parrainage aux termes du régime administratif en vigueur en 2018, de sorte que le demandeur devrait présenter une nouvelle demande conformément au régime en vigueur à l’avenir, quel qu’il soit.

[56]  En l’espèce, le refus de traiter la demande ne découle pas du fait que la demande de parrainage n’était pas conforme. Cela découle plutôt du fait que, aux termes du régime de sélection et d’appréciation des demandes aux fins de traitement en vigueur en 2018, il y avait une incohérence entre la date de naissance du demandeur qui était indiquée dans la DI sélectionnée par tirage par IRCC et celle qui était indiquée dans sa demande de parrainage. Si les dates de naissance avaient été compatibles (un chiffre différait), la demande de parrainage aurait vraisemblablement été traitée. Cependant, nous ne savons pas si elle aurait été accueillie ou rejetée.

(2)  La compétence de la Cour fédérale en matière de contrôle judiciaire

[57]  La compétence de la Cour en matière de contrôle judiciaire est établie à l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales. Notamment, les paragraphe 18.1(1) et (2) prévoient ce qui suit :

18.1 (1) Une demande de contrôle judiciaire peut être présentée par le procureur général du Canada ou par quiconque est directement touché par l’objet de la demande.

18.1 (1) An application for judicial review may be made by the Attorney General of Canada or by anyone directly affected by the matter in respect of which relief is sought.

(2) Les demandes de contrôle judiciaire sont à présenter dans les trente jours qui suivent la première communication, par l’office fédéral, de sa décision ou de son ordonnance au bureau du sous-procureur général du Canada ou à la partie concernée, ou dans le délai supplémentaire qu’un juge de la Cour fédérale peut, avant ou après l’expiration de ces trente jours, fixer ou accorder.

(2) An application for judicial review in respect of a decision or an order of a federal board, commission or other tribunal shall be made within 30 days after the time the decision or order was first communicated by the federal board, commission or other tribunal to the office of the Deputy Attorney General of Canada or to the party directly affected by it, or within any further time that a judge of the Federal Court may fix or allow before or after the end of those 30 days.

[58]  Dans le contexte d’un contrôle judiciaire au titre de la LIPR, la Cour d’appel fédérale a récemment déclaré que l’article 72 de la LIPR ne créait pas, en soi, « un droit au contrôle judiciaire d’une mesure prise dans le cadre de la [LIPR] », mais que ce droit découlait plutôt des articles 18 et 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales. En fait, l’article 72 de la LIPR « prévoit simplement des exigences procédurales additionnelles, dans le contexte de l’immigration, pour l’exercice du droit de demander un contrôle judiciaire » et « ne précise pas dans quelles circonstances le contrôle judiciaire est possible » (Zaghbib c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2016 CAF 182 aux para 29‑31 [Zaghbib]).

[59]  De même, à mon avis, on ne peut pas dire que l’article 87.3 de la LIPR précise dans quelles circonstances, dans le contexte de l’immigration, un demandeur dispose du contrôle judiciaire. Plutôt, il informe simplement la Cour de la nature juridique et des répercussions d’un refus de traiter une demande de parrainage sous le régime administratif en vigueur à l’époque.

[60]  Les cours ont maintes fois statué que le contrôle judiciaire au titre de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales devait être « interprété de façon englobante et libérale, donc qu’une grande gamme de procédures administratives feront partie du mandat de contrôle judiciaire de la Cour » (Larny Holdings Ltd c Canada (Ministre de la Santé) (1re inst), [2003] 1 CF 541, à la p 543 [Larny Holdings Ltd]). Cela a été confirmé dans plusieurs décisions subséquentes. Voir, par exemple, Prudential Steel Ltd c Bell Supply Company, 2015 CF 1243 au para 32, ainsi que Mikail c Canada (Procureur général), 2011 CF 674 au para 52, où il est souligné ce qui suit :

[...] Comme l’a souligné l’avocat du CSARS, l’arrêt Gestion Complexe Cousineau (1989) Inc. c. Canada (Ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux), [1995] 2 C.F. 694, cité dans la décision Larny Holdings Ltd. c. Canada (Ministre de la Santé), 2002 CFPI 750, permet d’affirmer ce qui suit :

[...] Entre une interprétation qui favorise l’accès au contrôle judiciaire et assoit la compétence de la Cour sur une base ferme et uniforme, et une interprétation qui restreint l’accès au contrôle judiciaire, segmente la compétence de la Cour en fonction de critères incertains et impraticables et amène inéluctablement une avalanche de débats liminaires, le choix s’impose de lui-même. [...]

[61]  Ainsi, la jurisprudence a adopté une approche générale pour préciser ce que constitue un « objet [d’une] demande » susceptible de contrôle judiciaire au titre de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales. En effet, c’est ce que la Cour d’appel fédérale a clairement exprimé dans Air Canada c Toronto Port Authority et al, 2011 CAF 347 aux para 24‑25 [Air Canada] (ce qui a plus tard été confirmé par cette même cour dans Zaghbib, au paragraphe 30), où le juge Stratas fait remarquer que « [l]a question qui peut faire l’objet d’une demande de contrôle judiciaire ne comprend pas seulement une “décision ou ordonnance”, mais tout objet susceptible de donner droit à une réparation aux termes de l’article 18 de la Loi sur les Cours fédérales ». C’est le cas même si la décision n’est pas la décision définitive, dans la mesure où une réparation peut être obtenue au titre de l’article 18 ou du paragraphe 18.1(3) de la Loi sur les Cours fédérales.

[62]  Cependant, les cours ont néanmoins restreint cette interprétation libérale de l’expression « objet de la demande », aux termes de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, aux questions qui touchaient les droits d’une partie, qui imposaient des obligations juridiques à une partie ou qui portaient directement préjudice à une partie. Voir Mfudi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1319 au para 7 [Mfudi]; Air Canada, au para 29.

[63]  Par le passé, les cours ont conclu que les actes purement administratifs n’avaient aucune incidence sur les droits d’une partie, n’imposaient aucune obligation juridique à une partie ou ne portaient pas directement préjudice à une partie. Par exemple, dans 1099065 Ontario Inc (Outer Space Sports) c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2008 CAF 47, la Cour d’appel fédérale a conclu, au paragraphe 9, qu’une « simple lettre proposant des dates pour une réunion n’est ni une “décision”, ni une “ordonnance”, ni une “procédure” susceptible de faire l’objet d’un contrôle judiciaire ». De même, dans Jarada c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2006 CF 14, notre Cour a conclu qu’une lettre fixant la date du renvoi du demandeur n’était elle-même pas susceptible de contrôle judiciaire, puisque le demandeur n’avait pas contesté la mesure de renvoi sous-jacente ou demandé le report de son renvoi. Dans ce contexte, la Cour a observé ce qui suit, aux paragraphes 14 et 15 :

Bien que les pouvoirs de la Cour fédérale soient étendus en matière de contrôle judiciaire, il faut aussi réaliser que les décisions doivent se prendre dans un contexte pratique.

Si à chaque fois qu’un agent d’un ministère, que ce soit de la Citoyenneté et de l’Immigration ou encore de quelque organisme gouvernemental que ce soit, émette une directive d’un caractère purement administratif et que chacune de ces directives administratives deviennent l’objet d’un recours en contrôle judiciaire, c’est l’administration entière des entités fédérales qui pourrait être compromise rendant son efficacité tout à fait nulle.

(3)  L’assujettissement au contrôle de la décision

[64]  En termes simples, la Cour doit déterminer si la décision de ne pas autoriser le traitement de la demande de parrainage sous le régime administratif en vigueur en 2018 porte atteinte aux droits du demandeur, si elle lui impose des obligations juridiques ou si elle lui porte directement préjudice (Mfudi, au para 7; Air Canada, au para 29).

[65]  Dans Filippiadis – une décision rendue dans une affaire similaire et sur laquelle se fonde principalement le défendeur –, la juge Gagné (tel était alors son titre) a déclaré ce qui suit aux paragraphes 2 et 3 :

[2]  La question est donc de savoir si le renvoi de la demande du demandeur avant qu’elle ne soit traitée peut bel et bien être considéré comme une décision sujette au pouvoir de contrôle judiciaire de la Cour prévu par le paragraphe 18.1(1) de la Loi sur les Cours Fédérales, LRC 1985, ch F-7.

[3]  Pour les raisons énoncées ci-dessous, je suis d’avis que la demande devrait être rejetée puisque la lettre du 3 juillet 2013 reçue par le demandeur ne contient pas une décision susceptible d’être contrôlée par cette Cour.

[66]  Dans cette affaire, la juge Gagné semble avoir conclu que la demande même n’était pas conforme. Aucune conclusion similaire n’a été tirée en l’espèce. D’autre part, la juge Gagné a déclaré que « la lettre du 3 juillet 2013 reçue par le demandeur ne cont[enait] pas une décision susceptible d’être contrôlée par cette Cour ». La juge Gagné ne précise pas quels sont les critères à appliquer pour trancher la question de savoir si une décision est « susceptible d’être contrôlée par la Cour ».

[67]  À mon avis, le demandeur n’a été privé d’aucun droit en l’espèce. Son droit de présenter une demande de parrainage conformément au régime en vigueur demeure intact. Le demandeur a tout simplement perdu la possibilité de faire traiter sa demande de parrainage sous le régime de 2018. Cela peut être ou non un inconvénient grave, selon ce qui se passera lorsque le demandeur présentera une nouvelle demande. De plus, aucune obligation juridique n’a été imposée au demandeur, et il n’a pas établi qu’il subirait un préjudice direct.

[68]  Le ministre a le droit et l’obligation de traiter le grand nombre de demandes de parrainage présentées au Canada, selon ce que le ministre juge approprié. Le ministre n’est pas responsable de ce grand nombre de demandes, et il a besoin d’une certaine souplesse dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire pour trouver des moyens de le faire. Le régime de 2018 était une tentative pour résoudre ce problème, mais il y en aura sans aucun doute d’autres. À mon avis, un régime qui peut causer des inconvénients et de la frustration à quelqu’un comme le demandeur, mais qui ne le prive pas du droit de parrainer ses parents, conformément à tout régime en vigueur à un moment donné, n’est pas susceptible de contrôle par la Cour.

[69]  Je dis cela, parce que le demandeur ne possédait aucun droit de faire traiter sa demande de parrainage sous le régime de 2018. Il tente d’établir l’existence d’un droit de faire traiter sa demande à un moment donné et d’une façon particulière. À mon avis, il ne peut pas exister un tel droit, et le ministre doit être libre de traiter les demandes d’une façon qui est dictée, en grande partie, par le grand nombre de demandes qu’il reçoit. Cela serait différent si le demandeur avait, à la suite de la décision de l’agent, perdu le droit de parrainer ses parents. Cependant, cela n’était pas le cas en l’espèce. Si le demandeur croit que le ministre ne traite pas sa demande de parrainage de façon raisonnablement expéditive et en conformité avec ses droits, le recours de mandamus est alors possible. Voir, par exemple, Liang, aux paragraphes 40 à 43.

[70]  Dans ses observations écrites, au paragraphe 15 de sa réplique, le demandeur affirme que [traduction] « la décision de rejeter la demande de parrainage présentée par le demandeur est justiciable ». Cependant, la demande de parrainage n’a pas été rejetée. Le paragraphe 87.3(5) de la LIPR précise les conséquences juridiques de la décision visée en l’espèce, et précise donc qu’une demande retournée ne constitue pas un rejet de la demande. Le demandeur tente de confondre le refus de traiter une demande à un moment donné et un rejet de cette demande. La loi indique clairement que ce n’est pas le cas.

[71]  Par conséquent, je crois que la décision de l’agent de ne pas autoriser le traitement de la demande de parrainage présentée par le demandeur conformément au régime de 2018 n’est pas une question susceptible de contrôle judiciaire aux termes de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales.

[72]  De toute évidence, le demandeur se sent lésé et est déçu par la conséquence de son erreur, qu’il a qualifiée de problème typographique mineur. Il semble tenir le ministre entièrement responsable de ce qui s’est passé, et il affirme qu’il n’a pas eu la possibilité de corriger son erreur. Ce n’est pas le cas.

[73]  Les instructions fournies aux demandeurs au sujet du formulaire en ligne Intérêt pour le parrainage sont très claires. Tous les demandeurs doivent suivre les instructions suivantes :

[traduction]

Assurez-vous que ces renseignements sont exacts. Ils doivent être les mêmes que ceux que vous inscrirez dans votre demande si vous êtes invité à le faire. Vérifiez tous les champs avant de soumettre le formulaire.

Inscrivez le nom et la date de naissance tels qu’ils apparaissent sur votre passeport, votre document voyage ou votre document d’identité.

[Non souligné dans l’original.]

[74]  Aucune raison n’a été fournie pour expliquer pourquoi le demandeur n’avait pas suivi ces instructions claires. Il est clairement à l’origine du problème, car il n’a pas vérifié la date de naissance qu’il avait inscrite. S’il avait suivi ces instructions simples, il n’aurait pas été nécessaire de présenter la présente demande de contrôle judiciaire. La position du demandeur semble être que, s’il ne suit pas les instructions claires relatives à la vérification des renseignements qu’il soumet, le ministre est tenu d’examiner la raison de toute incohérence et de l’aider à faire avancer sa demande de parrainage. Compte tenu du nombre de demandeurs, cela pourrait ne pas être possible. De plus, c’est la deuxième fois que le demandeur n’a pas suivi les instructions. Les instructions précisaient clairement qu’il était responsable de l’exactitude des renseignements qu’il fournit et que des incohérences peuvent avoir des conséquences défavorables. Le demandeur tente de se soustraire à cette responsabilité en l’espèce.

[75]  Comme il a été statué que cette question n’était pas susceptible de contrôle judiciaire, il n’est pas nécessaire d’examiner les autres questions soulevées.

D.  Les dépens

[76]  Le demandeur a demandé les dépens en l’espèce, au motif que le défendeur a refusé de traiter sa demande sans motif valable. Même si j’avais statué que la présente affaire était susceptible de contrôle judiciaire et que j’avais approfondi mon examen de la question soulevée quant à l’entrave à l’exercice du pouvoir discrétionnaire, aucun motif spécial justifiant l’adjudication de dépens et compatible avec l’article 22 des Règles des cours fédérales en matière de citoyenneté, d’immigration et de protection des réfugiés, DORS/93-22, ou la jurisprudence, n’a été invoqué. Voir Balepo c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 1104 au para 40. Dans ce contexte, la question de l’entrave à l’exercice du pouvoir discrétionnaire est complexe, et il n’y a pas de réponse claire. Le ministre avait des motifs raisonnables pour s’opposer à la demande de contrôle judiciaire.

E.  La certification

[77]  Le demandeur a présenté la question suivante aux fins de certification :

[traduction]

Est-ce qu’une décision de ne pas traiter une demande au titre d’instructions administratives peut être tranchée par la Cour?

[78]  Dans Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Liyanagamage, [1994] ACF no 1637 (CA), la Cour d’appel fédérale a déclaré et confirmé à maintes reprises qu’un juge doit certifier les questions graves de portée générale. En d’autres termes, la question doit être une question qui est déterminante quant à l’issue de l’appel et transcende les intérêts des parties au litige en raison de leur portée générale. Elle doit se prêter à une approche générique et être susceptible d’apporter une réponse d’application générale. Voir Canada (Citoyenneté et Immigration) c Nilam, 2017 CAF 44 au para 2.

[79]  À mon avis, cette question ne se prête pas à une approche générale.

[80]  Tout d’abord, un refus ou un défaut de traiter une demande peut être examiné par voie de mandamus, ce que le demandeur n’a pas sollicité dans le cadre de la présente demande.

[81]  En ce qui concerne le type de demande de contrôle judiciaire présentée en l’espèce, la question ne se prête pas à une approche générique, parce que, dans chaque cas, la réponse dépendra du contexte particulier, y compris la nature et l’incidence des instructions ministérielles, des règlements et des dispositions législatives applicables, ainsi que des conséquences d’un tel refus. En l’espèce, le refus n’empêche pas le demandeur de poursuivre ses plans de parrainage. Je vois que, dans certaines situations, un refus de traiter pourrait, dans les faits, entraîner la perte d’un droit reconnu ou placer un demandeur dans une position où il ne serait pas en mesure de continuer une demande. Des questions pratiques pourraient également entrer en jeu. En l’espèce, le pur volume des demandes de parrainage que le ministre doit traiter a donné lieu à des approches administratives différentes au fil des années, et il est probable qu’il entraînera d’autres ajustements et changements à l’avenir.

[82]  Les conséquences de l’autorisation d’un contrôle judiciaire de ce qui est un acte purement administratif, où aucun droit n’est compromis, pourraient avoir des conséquences extrêmement difficiles pour le défendeur. Cela pourrait ne pas être le cas dans d’autres contextes.

[83]  Je ne pense pas qu’il serait possible d’ajuster la question pour qu’elle s’applique aux instructions en l’espèce, comme l’a initialement proposé le demandeur. Ces instructions particulières pourraient bien ne pas s’appliquer à l’avenir, de sorte qu’une réponse ne se prêterait pas à une application générale.

[84]  Pour ces motifs, il n’y a aucune question à certifier.


JUGEMENT dans le dossier IMM-826-19

LA COUR ORDONNE :

  1. La demande est rejetée.

  2. Aucuns dépens ne sont adjugés.

  3. Il n’y a aucune question à certifier.

« James Russell »

Juge

Traduction certifiée conforme

C. Laroche, traducteur


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-826-19

 

INTITULÉ :

TALIB SHEIKH c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

calgary (alberta)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 20 novembre 2019

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

Le juge Russell

 

DATE DES MOTIFS :

le 5 février 2020

 

COMPARUTIONS :

Michael A.E. Greene

 

POUR LE DEMANDEUR

 

David Shiroky

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Michael A.E. Greene, c.r.

Avocat

Calgary (Alberta)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Procureur général du Canada

Calgary (Alberta)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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