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Date : 20040413

Dossier : T-1849-01

Référence : 2004 CF 551

ENTRE :

TED AIRD, VIVIEN AIRD, GLENN ALSIP, SHIRLEY ALSIP, SHIRLEY BEATTIE, AL BOSSERT, ROGER BOYCE, PAT BOYCE, JIM COLLINS, OLIVE COLLINS, REG COOPER, PAT COOPER, BILL DAVIES, JESSIE DAVIES, ED DAVIES, ELANIE DAVIES, TONY DAVIS, JACKIE DAVIS, WILLARD EDWARDS, ETHNA EDWARDS, PATRICIA ELLIOT, ARCHIBALD ELLIS, KURT FENGLER, ANNA FENGLER, LARRY FENGLER, RENATE FENGLER, TOM GLANCY, SHIRLEY GLANCY, JOE GRZYB, DORLES GRYZB, JOHN GUILIANA, BRITT GUILIANA, ED HOLMES, ETHEL HOLMES, HELEN HOLZWORTH, HERB HOLZWORTH, KATHY HRISHUK, MIKE HRISHUK, PETER JOHNER, HELEN JOHNER, ERNIE KAHLER, HILDA KAHLER, RON BACON, exécuteur testamentaire de JOSEPH KOVACS, GERRY McCARTHY, MARILYN McCARTHY, RON McCOMB, ROSE McCOMB, PETR MEISTER, INGRID MEISTER, WAYNE MITCHEL, TRUDIE MITCHEL, DIANE MOORE, JOHN MOORE, JOHN MORSE, CATHERINE MORSE, ROY NEFF, DAISY NEFF, JOAN OLLIFFE, JOHN OSTENDORF, NELLIE OSTENDORF, NORMAN PARKER, ROXIE PARKER, KEN PATTERSON, JEFFREY PUNSHON, DOREEN PUNSHON, ELAINE EBY, DOROTHY REID, ED ROGOZINSKY, DELORES ROGOZINSKY, DEREK ROLPH, BETTE ROLPH, DAVID SCHELLENBERG, JOHN SNYDERS, JANNIE SNYDERS, RUDY SNYDERS, JOHN SONNEVELDT, WILLIE SONNEVELDT, TOM SPANN, IRMA SPANN, HARLYN SPROULE, FAYE SPROULE, HENRY STRYD, ADRIANA STRYD, STAN TURNER, HAL WESTON, DOLORES WESTON, DON WHITTAKER, MARYANN WHITTAKER, CATHERINE KNUDSEN, HOWARD KNUDSEN, MARGARET MAKI, LEO MAKI, LORENZ LOHNINGER, HANNELORE LOHNINGER, MARGARET TIBBEN, RALPH CHURCHILL, SANDRA CHURCHILL, JANET REED, CHRIS SEABROOK, MARGARET SEABROOK, FRED HOWSE, PHYLLIS HOWSE, MACE HARRISON, IRENE HARRISON, BUD THOMPSON, MARJORIE THOMPSON, JOHANNA AUBERTIN, GORDON SIDDONS, ROSEMARY SIDDONS, RUSS GRILLS, DIANE GRILLS, BILL MILLER, GERRY MILLER, DEBORAH INNES, ARLESS MISFELDT, JANET MISFELDT, STANLEY BAXTER et GRACE BALES

                                                                                                                                        demandeurs


                                                                             et

                        COUNTRY PARK VILLAGE PROPERTY (MAINLAND) LTD.

                                                                                                                                      défenderesse

                                                       MOTIFS DU JUGEMENT

LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

[1]                Plus de la moitié des résidents du Country Park Village sont mécontents. Il s'agit des demandeurs ici en cause; à diverses dates, entre l'année 1994 et l'an 2000, ils ont conclu des sous-baux ou des cessions de sous-baux avec la défenderesse, Country Park Village Properties (Mainland) Ltd. (CPV). Dans la présente action, CPV est représentée par son dirigeant et administrateur, M. Norman William Eden. Le litige a pris naissance lorsque M. Eden a avisé les sous-locataires d'une augmentation de loyer qui devait prendre effet le 1er mars 2000. La controverse qui en a résulté a donné lieu à des examens, des enquêtes, des actions, des réactions et des accusations qui ont abouti à une situation dans laquelle les parties se considéraient mutuellement avec méfiance et dédain. Il en était ainsi au moment de faire instruire l'affaire. Les seuls points sur lesquels les parties s'entendaient étaient les questions qui les opposaient.

CONTEXTE


[2]                Country Park Village (Country Park) est un parc résidentiel composé de maisons modulaires ou préfabriquées ou d'habitations de type classique (bâties sur place) situé au 45918, chemin Knight, au sud de la route transcanadienne et à l'est du chemin Vedder, dans le secteur Sardis, à Chilliwack (Colombie-Britannique), dans une région connue sous le nom de la vallée du Fraser. Ce parc résidentiel est situé sur des terres qui font partie de la réserve indienne Skowkale et dont Robert Sepass, membre de la bande Skowkale, a la possession légale (en vertu d'un certificat de possession délivré conformément à l'article 20 de la Loi sur les Indiens, L.R.C. 1985, ch. I-5). Monsieur Sepass a présenté une demande auprès du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien (le ministre) aux fins de la location des terres. Le ministre a donné son consentement et, conformément au paragraphe 58(3) de la Loi sur les Indiens, un bail commercial conclu entre Sa Majesté la Reine du chef du Canada, représentée par le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, et Knight Road Developments, a été signé le 5 février 1992 et inscrit dans le registre des terres indiennes le 12 février 1992, sous le numéro 137805. La durée du bail est de 44 ans et le document comporte environ 55 pages. Le paragraphe 13.1 traite de l'utilisation des terres; il stipule ce qui suit :

[TRADUCTION] Le locataire n'utilisera pas les lieux ou ne permettra pas que les lieux soient utilisés à des fins autres que la construction, l'exploitation et le maintien d'un ensemble résidentiel composé entièrement de maisons unifamiliales préfabriquées ainsi qu'aux fins accessoires habituellement associées à pareil ensemble. Toutes les améliorations nécessairement requises auxdites fins sont dans les présentes appelées les « améliorations permises » . Quatre-vingt-seize maisons préfabriquées au plus peuvent être installées sur les terres.


[3]                Une entente modificatrice en date du 15 octobre 1992 prévoyait, entre autres choses, une utilisation plus étendue aux fins de l'ajout d'un centre de loisir et d'une aire d'entreposage pour les véhicules de plaisance. Le bail a été cédé à CPV par Knight Road Estates Ltd. le 29 octobre 1992; il a été inscrit dans le registre des terres indiennes le 5 mars 1993, sous le numéro 211988. Entre le mois d'avril 1993 et le mois de mai 2001, des modifications additionnelles ont été effectuées; elles prévoyaient, entre autres choses, une augmentation du nombre permis d'habitations, une prorogation du bail (depuis la date d'expiration, le 29 février 2036, jusqu'au 28 février 2041) et l'ajout d'habitations du type duplex. Toutes les modifications ont été inscrites dans le registre des terres indiennes.

[4]                Le siège social de CPV, une société constituée en 1992 sous le régime des lois de la Colombie-Britannique, est situé à Victoria. CPV exploitait un certain nombre de parcs de maisons modulaires « Country Park » sur l'île de Vancouver et voulait prendre de l'expansion. La cession du bail susmentionné constitue le résultat (ou l'un des résultats) de ses efforts d'expansion. Au moment où CPV a acquis le bail, il n'y avait, à l'endroit en question, qu'un champ, sans infrastructure. CPV était promoteur du Chilliwack Country Park et elle s'occupait également des travaux de construction. Une fois terminé l'aménagement du parc, il y avait 120 habitations (dont certaines étaient des duplex), un centre de loisir et une aire d'entreposage pour les véhicules de plaisance.


[5]                Le bail principal stipulait que le loyer annuel que CPV devait payer était de 19 200 $ pour la première année (allant du 1er mars 1992 au 28 février 1993), de 37 920 $ pour la deuxième année et de 66 000 $ pour les troisième et quatrième années. Le bail prévoyait par la suite une révision du loyer aux quatre ans, la date de révision étant le 1er mars. Il existe une autre disposition, prévoyant le paiement d'un montant représentant 25 p. 100 du revenu de location brut. En 1996, CPV a payé 66 000 $; en 1997, elle a payé 69 000 $; en 1998 et en 1999, elle a payé 84 500 $. En ce qui concerne la période de quatre ans qui a commencé le 1er mars 2000, le ministre a décidé (après que Travaux publics Canada eut procédé à une évaluation) de fixer à 102 000 $ le loyer annuel afférent au bail principal. CPV s'est opposée au loyer proposé et a convenu (après avoir obtenu le consentement de l'occupant, M. Sepass), de payer un loyer annuel de 84 500 $ pour les années 2000 et 2001 et de 97 241 $ pour les années 2002 et 2003.

[6]                La mise en valeur a été réalisée par phases. Étant donné que Country Park était situé sur des terres de réserve, CPV a signé, le 24 août 1993, une entente de viabilisation du lotissement avec le district de Chilliwack aux fins de l'installation de services d'aqueduc et d'égout. Les premières habitations étaient prêtes à être occupées au début de l'année 1994. Les acquéreurs ont conclu avec CPV un contrat d'achat, de vente et de location ainsi qu'un sous-bail. CPV a toujours utilisé le même sous-bail (les modifications étaient mineures et ne tiraient pas à conséquence), de sorte que tous les demandeurs ont conclu le « même » sous-bail. CPV a initialement utilisé un contrat type d'achat, de vente et de location. Lorsque les courtiers en immeubles ont commencé à vendre les maisons, au moins quatre formulaires différents de contrats d'achat et de vente ont été utilisés, selon le courtier en cause.

[7]                Le sous-bail conclu entre CPV et les résidents de Country Park, et en particulier l'article 2 du document, stipule que les sous-locataires paient un loyer. L'article 2 sera examiné d'une façon plus détaillée ci-dessous dans ces motifs. Pour l'instant, il suffit de dire que le juste loyer économique (que les sous-locataires devaient verser à CPV) devait également être révisé aux quatre ans à compter du 1er mars 1996.


[8]                Les demandeurs ont conclu leurs contrats de sous-location avec CPV à divers moments entre le 30 avril 1994 et le 1er octobre 1999. Certains demandeurs ont acquis leur intérêt directement de CPV, alors que d'autres l'ont acquis par voie de cession d'autres sous-locataires avec le consentement de CPV. Jusqu'en 1997, les sous-locataires versaient à CPV un montant fixe au titre du loyer de base, plus un supplément de loyer. Ce supplément constituait la part que le sous-locataire devait payer pour les coûts réels, y compris des frais de gestion de 20 p. 100 versés à CPV. Après 1997, CPV a exigé, pour le loyer, un montant global appelé « loyer brut » . Les demandeurs qui ont acquis leurs intérêts directement de CPV après le mois de mars 1997 n'ont jamais payé de loyer créant une distinction entre le loyer de base et le supplément de loyer.

[9]                Jusqu'au 1er mars 2000, CPV exigeait les montants suivants comme loyer mensuel :

1994-1995                185,00 $ (loyer de base) + 78,00 $ (supplément de loyer)

1995-1996                187,96 $ (loyer de base) + 78,00 $ (supplément de loyer)

1996-1997                206,76 $ (loyer de base) + 78,00 $ (supplément de loyer)

1997-1998                287,61 $ (loyer brut)

1998-1999                287,61 $ (loyer brut pour les habitations unifamiliales)

150,00 $ (loyer brut pour les duplex)

1999-2000                287,61 $ (loyer brut pour les habitations unifamiliales)

150,00 $ (loyer brut pour les duplex)


Par une lettre en date du 1er février 2000, CPV a informé les sous-locataires que le nouveau loyer pour la période de quatre ans commençant le 1er mars 2000 serait de 400 $ par mois pour les habitations unifamiliales et de 300 $ par mois pour les duplex. À la date de cette révision, il restait 41 ans avant l'expiration du bail. Les demandeurs se sont opposés au montant.

[10]            À la suite de l'augmentation effectuée le 1er mars, les demandeurs ont tenté de régler le différend par voie de médiation, en s'adressant au Residential Tenancy Office, en procédant à l'arbitrage et en faisant appel à la Cour suprême de la Colombie-Britannique. Or, aucun de ces organismes n'avait la compétence voulue. L'action devant la présente cour a été intentée le 16 octobre 2001, conformément au paragraphe 17(3) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7, dans sa forme modifiée. Une réparation interlocutoire a été obtenue le 4 décembre 2001 (laquelle a en partie été modifiée par une ordonnance en date du 13 juin 2002) autorisant les demandeurs à payer le loyer qu'ils versaient avant le 1er mars 2000, en attendant l'audition de la présente affaire.

[11]            L'aire d'entreposage pour les véhicules de plaisance, au Country Park, couvre une surface qui correspond à quatre lots ordinaires. CPV a dès le départ permis aux sous-locataires d'entreposer leurs véhicules de plaisance gratuitement, à condition qu'il y ait suffisamment de place. Or, il semble qu'il y ait toujours eu suffisamment de place. Toutefois, à la suite de l'ordonnance susmentionnée du 4 décembre 2001, les sous-locataires qui sont les demandeurs dans la présente action ont été avisés que, dorénavant, ils devraient payer un montant annuel de 450 $ pour entreposer leur véhicule de plaisance parce qu'ils [TRADUCTION] « ne payaient pas le juste loyer économique fixé le 1er mars 2000 [...] » .


POINTS LITIGIEUX

[12]            Les questions à trancher sont ci-après énoncées :

a)          Quel est le juste loyer économique approprié pour la période de quatre ans commençant le 1er mars 2000?

b)          CPV est-elle tenue de rendre compte du supplément de loyer exigé?

c)          CPV est-elle tenue de fournir sans frais une aire d'entreposage pour les véhicules de plaisance et, dans l'affirmative, à qui?

QUESTIONS PRÉLIMINAIRES

[13]            Au début de l'instruction, les avocats ont fait savoir que les demandeurs Nell Doornbosch, Bernie Morris, Pat Radbourne, Lynne Reynan et Alan McLean ne poursuivaient pas l'action qu'ils avaient intentée. La demanderesse Sophie Honch s'était antérieurement désistée de son action. Par conséquent, sur consentement de la défenderesse, il a été ordonné que les noms des demandeurs qui s'étaient désistés de leur action soient radiés de l'intitulé.

LA PREUVE


[14]            Je ne me propose pas d'examiner toute la preuve. Les demandeurs ont cité trente-quatre témoins. Parmi ces témoins, vingt-sept étaient des demandeurs, l'un était le conjoint d'un demandeur, deux étaient des agents du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, deux étaient des agents immobiliers et l'un, M. Danny Ronald Grant, a présenté une opinion d'expert au sujet de la question du juste loyer économique. De plus, six demandeurs qui ne pouvaient pas comparaître pour cause d'invalidité ont présenté, sur consentement de la défenderesse, une preuve par affidavit. La défenderesse a cité quatre témoins : M. Eden; Avis Houlden, agent immobilier; M. Howard Kevin Mark Langdon, C.A., comptable de CPV; et M. Brian Edward McConnell, qui a témoigné à titre d'expert au sujet de la question du juste loyer économique. Je ferai référence à la preuve pertinente qui a été soumise par les divers témoins en analysant chacune des questions en litige.


[15]            Dans l'ensemble, la preuve documentaire laissait à désirer. Le bail principal ainsi que les sous-baux de 1994, de 1997 et de 1998, représentatifs des sous-baux signés par les divers demandeurs, ont été produits. Aucun sous-bail n'a été produit à l'égard d'un duplex. Les autres documents étaient incomplets ou n'étaient de toute évidence pas disponibles. Certains demandeurs avaient leurs contrats d'achat, de vente et de location, alors que d'autres ne les avaient pas. La plupart ont finalement pu fournir des copies de leurs états de rajustements. Dans un cas, il y avait des divergences entre les états de rajustements du vendeur et ceux de l'acquéreur. La défenderesse s'est fortement appuyée sur une deuxième communication modifiée, en date du 11 octobre 1995, mais elle n'a pas produit les communications antérieures. La pièce 5 du document qui a été produit se rapportait aux prévisions budgétaires pour les années 1993-1994 plutôt que pour les années 1995-1996. La pièce J-2 contenait 130 documents, en trois volumes, sans aucun ordre particulier. Les pièces accompagnant des documents particuliers se trouvaient dans des volumes différents, sans aucune raison apparente. On a fourni peu de renseignements au sujet de la mesure dans laquelle les parties se fondaient sur les divers documents. Les pièces versées sous la cote J-2 contenaient des documents dont il n'avait jamais été expressément fait mention pendant les témoignages.

[16]            Je ferai ici des remarques au sujet de certaines parties de la preuve de plusieurs demandeurs, selon laquelle ils n'avaient pas examiné les dispositions du sous-bail et ils n'avaient pas vu le bail principal. Dans la mesure où cette preuve contredit les dispositions précises du sous-bail signé par les divers demandeurs, je ne lui ai accordé aucun poids. Je me reporterai ici en particulier aux articles 15.09, 15.010, 15.011 et 16.01, qui stipulent ce qui suit :

[TRADUCTION]

15.09        Le sous-locataire reconnaît avoir lu et compris le bail principal.

15.010     Malgré les dispositions des présentes, le présent sous-bail est expressément assujetti au bail principal et au droit de Sa Majesté en vertu de ce bail et prendra fin à l'expiration du bail principal.

15.011      Le sous-locataire s'engage à observer les dispositions, engagements, conditions, réserves et clauses du bail principal et à être lié par ceux-ci. En cas de conflit entre les dispositions de bail principal et celles du présent sous-bail, les dispositions du bail principal s'appliqueront.

16.01        Conformément aux dispositions de l'alinéa 8.01f) du bail principal, le présent sous-bail doit être inscrit dans le registre des terres indiennes aux conditions ci-après énoncées : [...]


[17]            De même, je n'ai accordé aucun poids à la preuve donnant à entendre que les demandeurs qui s'étaient présentés au cabinet d'avocats recommandé par la défenderesse ont obtenu de mauvais conseils juridiques. Je retiens le témoignage de M. Eden lorsqu'il déclare s'être renseigné auprès d'agents immobiliers locaux pour obtenir le nom d'avocats qui s'y connaissaient en matière de baux principaux et de sous-baux concernant les terres des Premières nations. Je retiens également le témoignage de ce témoin, lorsqu'il déclare que même s'il avait recommandé aux demandeurs de retenir les services d'un cabinet d'avocats particulier, ceux-ci n'étaient pas tenus de suivre ses conseils. De fait, certains demandeurs se sont adressés à d'autres cabinets. CPV était représentée par son propre avocat. Pour les besoins de l'instance, je suppose que chacun des demandeurs a obtenu un avis juridique indépendant. Si ce n'est pas le cas, il ne convient pas ici de se prononcer sur ce point.

LE SOUS-BAIL

[18]            Comme il en a déjà fait mention, tous les sous-locataires ont signé le même sous-bail. J'ai décidé de me fonder sur le sous-bail de 1998 qui a été produit en preuve, et ce, simplement parce qu'il a été signé à une date qui se rapprochait davantage de la date de révision du 1er mars 2000 que les documents de 1994 et de 1997. Une analyse des questions en litige exige nécessairement l'examen des dispositions pertinentes du sous-bail. Les articles 2 et 3 ont une importance particulière et sont donc reproduits en entier :

[TRADUCTION] ARTICLE 2. LOCATION

2.01          Au cours de la durée du sous-bail, le sous-locataire versera au sous-locateur, en argent canadien, sans aucune compensation ou déduction, le loyer de base suivant :

a)      Pour la période commençant à la date de commencement et prenant fin le 29 février 1996 (la première période de location), le loyer de base sera composé de l'ensemble des montants déterminés ci-dessous conformément aux sous-alinéas (i) et (ii) :

i.       un loyer de 2 220 $, en versements mensuels égaux de 185 $ payables d'avance le premier jour de chaque mois à compter du 1er août 1994 jusqu'au 1er février 1996 inclus; et


ii.      le produit du loyer annuel fixé pour l'année de location précédente, multiplié le cas échéant par l'augmentation annuelle moyenne, exprimée en pourcentage, de l'indice des prix à la consommation qui s'est produite au cours de l'année civile précédente, calculée de la façon énoncée au sous-alinéa 2.1d) (l'augmentation annuelle d'IVC). L'augmentation annuelle d'IVC s'appliquera à compter du 1er mars 1995;

b)      Pour la période commençant le 1er mars 1996 et prenant fin le 27 février 2041, le loyer sera payable d'avance le premier jour de chaque mois, et pour chaque année de location, entre le 1er mars 1996 et le 27 février 2041, ce loyer sera composé de l'ensemble des montants déterminés ci-dessous conformément aux sous-alinéas (i) et (ii) :

i.       le juste loyer économique déterminé par le sous-locateur pour chacune des onze (11) périodes de location de quatre (4) ans, à compter du 1er mars 1996 jusqu'au 27 février 2041 (les périodes de quatre ans); et

ii.      l'augmentation annuelle d'IVC.

c)      « Juste loyer économique » s'entend, pour une période particulière de quatre ans, du montant du loyer annuel auquel un locateur sérieux informé louerait les lieux loués sur le marché ouvert libre à un locataire sérieux informé, sans se limiter à les comparer aux autres terres de réserve disponibles aux fins de la location au début de chaque période de quatre ans, à supposer qu'à ce moment-là :

i.       les lieux loués appartiennent à un locateur en pleine propriété et ne soient pas grevés de charges;

ii.      les lieux loués comprennent les améliorations qui y ont été apportées avant le début du présent sous-bail, mais ne comprennent pas les améliorations qui y sont subséquemment apportées;

iii.     les lieux loués soient loués aux fins permises par le présent sous-bail; et

iv.     le locateur et le locataire n'aient entre eux aucun lien de dépendance.

d)      La modification annuelle moyenne, exprimée en pourcentage, de l'indice des prix à la consommation pour l'année civile précédente est calculée comme suit à l'aide de l'indice annuel moyen des prix à la consommation :

(Indice de la période courante - Indice de la période antérieure)

(Indice de la période antérieure) x 100

Exemple :

Pour l'année de location qui commence le 1er octobre 1994, l'augmentation, exprimée en pourcentage, le cas échéant, de l'indice des prix à la consommation pour l'année civile précédente sera calculée comme suit :


(moyenne annuelle                    )

(numéro de l'indice des            )

(prix à la consommation           )

(pour l'année civile prenant      )

(fin le 31 décembre 1993           )

(moyenne annuelle                  )

(numéro de l'indice des prix    )

(à la consommation pour        )

(l'année civile prenant fin       )

(le 31 décembre 1992) x 100

(       indice annuel moyen des prix à la consommation       )

(     pour l'année civile prenant fin le 31 décembre 1992    )

e)      « Indice annuel moyen des prix à la consommation » s'entend de la composante « logement » de l'indice annuel moyen des prix à la consommation pour Victoria (Colombie-Britannique), lequel est publié chaque année dans le numéro du mois de décembre du catalogue 62-001 de Statistique Canada. Si Statistique Canada modifie l'année de base (maintenant décembre 1984 = 100) de l'indice des prix à la consommation pendant la durée du présent sous-bail, dix calculs subséquents effectués conformément à l'article 2.01 du présent sous-bail seront effectués à l'aide de l'indice annuel moyen des prix à la consommation qui est fondé sur la nouvelle année de base; TOUTEFOIS, dans l'éventualité où Statistique Canada cesserait de publier pareil indice pour Victoria, l'indice comparable pour Vancouver y sera substitué.

f)      Le sous-locateur tentera de déterminer le juste loyer économique et d'en aviser le sous-locataire au moins 60 jours avant le début de l'année de location pertinente, mais il pourra procéder à cette détermination et en aviser le sous-locataire dans les 60 jours qui suivront le début de l'année de location pertinente; TOUTEFOIS, en l'absence de détermination et d'avis ou en attendant la détermination et l'avis, le sous-locataire continuera à payer un loyer annuel au même montant et selon les mêmes modalités que pour l'année de location antérieure.

g)      Si l'avis du juste loyer économique est donné après le début de l'année de location pertinente, et si le juste loyer économique est supérieur au loyer annuel de l'année de location antérieure, le sous-locataire paiera la différence dans les 30 jours qui suivent la date à laquelle l'avis est donné.

h)      « Loyer » s'entend du loyer de base et du supplément de loyer payable en vertu des présentes.

i)       « Année de location » s'entend de chaque période successive de douze mois au cours de la durée du sous-bail à compter du 1er mars.

2.02          Lieu du paiement - Le loyer sera versé au sous-locateur au 3471, rue Short, Victoria (Colombie-Britannique), V8X 2V6, ou à tout autre endroit désigné par écrit par le sous-locateur.


2.03          Le sous-locataire peut contester la cotisation - Le sous-locataire peut contester, au moyen des procédures judiciaires appropriées, le montant et la validité des impôts ou autres cotisations exigés par une autorité compétente qu'il doit en partie payer directement ou indirectement en vertu du présent sous-bail, y compris les impôts payables à l'égard des lieux loués, en remettant au sous-locateur la garantie qui convient à celui-ci pour la partie des impôts qu'il doit directement ou indirectement payer. À la demande du sous-locataire, le sous-locateur se joindra au besoin à pareilles procédures et les appuiera, mais il ne paiera aucuns frais et il ne sera assujetti à aucune obligation à l'égard de ces procédures, et le sous-locataire indemnisera le sous-locateur des obligations et frais résultant de pareilles procédures; toutefois, le sous-locateur ne sera pas tenu de se joindre aux procédures tant que le sous-locataire ne lui aura pas fourni la garantie qui lui convient pour les obligations et frais anticipés.

2.04          Sous-bail à loyer net - Le sous-locataire reconnaît et convient que le présent sous-bail est destiné à être un sous-bail à loyer net, tel qu'il s'applique aux lieux loués, et que le sous-locateur ne sera pas responsable, pendant la durée du sous-bail, des frais, charges, dépenses et débours de quelque nature que ce soit, associés aux lieux loués, à l'exception des obligations qui lui incombent en vertu de l'article 9 de la présente entente.

ARTICLE 3. SERVICES PUBLICS ET AUTRES CHARGES

3.01          Le sous-locataire paie les frais des services publics - Le sous-locataire paiera les frais de chauffage, d'électricité, de téléphone ainsi que les impôts, droits de licences, montants et autres frais exigés à l'égard des lieux loués ou à l'égard des accessoires fixes, machines, matériels ou appareils qu'il aura installés dans les lieux loués, et ce, qu'ils soient exigés du sous-locateur ou du sous-locataire.

3.02          Impôts fonciers et autres frais - Le sous-locataire paiera à l'échéance, à titre de supplément de loyer, sur avis du sous-locateur :


i.       si les lieux loués sont évalués séparément pour les impôts fonciers ou d'autres cotisations ou frais, les impôts, cotisations ou autres frais se rapportant aux lieux loués ou impayés à l'égard des lieux loués et sa part au pro rata des impôts, y compris les frais liés aux améliorations locales, aux services d'aqueduc et d'égout, aux cotisations et autres frais, à la protection contre les incendies, aux droits de licences et autres droits ou prélèvements, de quelque nature que ce soit, applicables aux terres autres que les lieux loués et à toute partie louée à un autre sous-locataire, ou aux bâtiments, améliorations, structures, accessoires fixes, machines et matériels (les améliorations effectuées par le propriétaire) se trouvant le cas échéant sur les terres, ou applicables au sous-locateur ou au sous-locataire à ce titre pendant la durée du bail. Si les lieux loués ne sont pas évalués séparément pour les impôts fonciers ou d'autres cotisations ou frais, le sous-locataire paiera à titre de supplément de loyer, lorsqu'elle sera exigible, sa part au pro rata des impôts, y compris les frais liés aux améliorations locales, aux services d'aqueduc et d'égout, aux cotisations et autres frais, à la protection contre les incendies, aux droits de licences et autres droits ou prélèvements, de quelque nature que ce soit, applicables aux terres ou aux bâtiments, améliorations, structures, accessoires fixes, machines et matériels se trouvant le cas échéant sur les terres, ou applicables au sous-locateur ou au sous-locataire à ce titre pendant la durée du sous-bail (ci-après les « cotisations foncières » ). Le sous-locataire paiera également, à titre de supplément de loyer, lorsqu'elle sera exigible, sa part au pro rata des frais d'exploitation engagés par le sous-locateur à l'égard des terres et des améliorations effectuées par le propriétaire dans les lieux loués, et malgré les dispositions ci-dessus énoncées, ces montants comprendront les primes d'assurance, les frais de gestion, les frais d'entretien général et de réparation, de cueillette des ordures, de déneigement, d'électricité, d'aqueduc et d'égout. Le sous-locataire paiera également, lorsqu'elle sera exigible, sa part au pro rata des frais d'entretien et de réparation ainsi que les primes d'assurance et frais d'exploitation du centre de loisir situé sur les terres (ci-après le « centre de loisir » ). Malgré les dispositions ci-dessus énoncées, le 1er janvier de chaque année pendant la durée du sous-bail, le sous-locataire paiera au sous-locateur sa part au pro rata des cotisations annuelles relatives aux services d'aqueduc et d'égout que le sous-locateur doit payer au district de Chilliwack conformément aux dispositions de l'entente de viabilisation du lotissement conclue le 24 août 1993;


ii.      le sous-locateur estimera la part au pro rata payable par le sous-locataire avant le commencement du sous-bail pour la période allant de la date de commencement du sous-bail au 31 décembre suivant la date de commencement et par la suite pour chaque année civile suivante au cours de la durée du sous-bail avant le 30 novembre de l'année en question, et le sous-locataire versera au sous-locateur sa part au pro rata du montant ainsi estimé en versements mensuels égaux payables d'avance le 1er jour de chaque mois au cours de chaque année de location. Dans les 60 jours qui suivront le 1er janvier, le sous-locateur procédera à une détermination finale de la part au pro rata payable par le sous-locataire pour l'année civile précédente ou pour une partie de l'année civile précédente le cas échéant, et remettra un état de compte au sous-locataire. Si la part au pro rata payable par le sous-locataire excède le total des versements que celui-ci a effectués au cours de l'année civile précédente, ou d'une partie de l'année civile précédente le cas échéant, le sous-locataire versera l'excédent au sous-locateur dans les trente (30) jours suivant la date de la signification de l'état. Si la somme des versements mensuels effectués par le sous-locataire au cours de l'année civile précédente, ou d'une partie de l'année civile précédente le cas échéant, excède la part au pro rata payable par le sous-locataire, le sous-locateur remettra l'excédent au sous-locataire dans les trente (30) jours suivant la date de la signification de l'état. La « part au pro rata du sous-locataire » s'entend d'une fraction, dont le numérateur est 1 et le dénominateur est le nombre de lots dont les terres sont composées en vue de la sous-location par le sous-locateur;

iii.     le sous-locateur peut, sur avis écrit remis au sous-locataire, répartir le supplément de loyer entre les frais d'exploitation et les autres cotisations et peut demander au sous-locataire de payer en tout ou en partie le supplément de loyer à la société de gestion dont le sous-locateur aura retenu les services;

iv.     en outre, le sous-locataire versera au sous-locateur, sur avis du sous-locateur, des frais d'administration et frais comptables correspondant à vingt pour cent (20 %) des montants exigibles conformément aux dispositions des sous-alinéas 3.1(i) et (ii).

DÉTERMINATION DU JUSTE LOYER ÉCONOMIQUE

[19]            La détermination du juste loyer économique approprié pour la période de quatre ans commençant le 1er mars 2000 comporte la détermination de questions accessoires, dont la première est de savoir si le « juste loyer économique » s'entend du loyer « de base » ou du loyer « brut » .

Loyer de base ou loyer brut

[20]            Lorsque les premiers demandeurs ont occupé les lots, au Country Park, on exigeait le paiement d'un loyer de base et d'un supplément de loyer. Ce supplément représentait, en termes simples, la part que le sous-locataire devait payer pour les zones communes ainsi que les frais d'entretien et les frais de gestion. Les impôts fonciers sur le lot loué étaient payés d'une façon indépendante et les frais individuels des services d'aqueduc et d'égout étaient payés au district de Chilliwack par l'entremise de CPV.


[21]            Monsieur Eden a qualifié de loyer « brut » le loyer de base et le supplément de loyer combinés. Il a témoigné qu'en 1997, les administrateurs de CPV avaient décidé que le loyer ne serait plus divisé en composantes. CPV exigerait plutôt un loyer brut mensuel. La décision était fondée sur les motifs suivants : le loyer de base et le supplément de loyer ensemble constituent un loyer brut; les concurrents sur les marchés de Victoria et de Vancouver exigeaient des loyers bruts dans les parcs de maisons mobiles et de maisons modulaires; le « loyer » prévu par le sous-bail était défini comme étant composé du loyer de base et d'un supplément de loyer. Monsieur Eden a décrit la chose comme suit : [TRADUCTION] « À compter de l'année 1997, [...] nous avons décidé de notre propre chef de lire et de définir le sous-bail et le bail principal comme un bail à loyer brut, et c'est ainsi que nous l'avons traité. »


[22]            CPV maintient que les divergences relevées dans la documentation (les sous-baux postérieurs à l'année 1996 prévoient un loyer mensuel de 187,60 $, alors que les baux se rapportant aux demi-lots stipulaient un montant brut de 150 $ et que les baux se rapportant aux lots ordinaires stipulaient un montant plus élevé que le montant 187,60 $) montrent que personne n'insistait pour que l'on observe strictement les dispositions des sous-baux. Elle maintient également que l'établissement d'un loyer brut (après 1997) était fondé sur la pratique de l'industrie et sur son interprétation du sous-bail et que cela n'allait pas à l'encontre des dispositions du sous-bail. La défenderesse souligne que la majorité des demandeurs ont acheté des maisons au Country Park après qu'elle eut adopté le modèle du loyer brut. Selon l'argument que CPV a avancé, la chose permet d'inférer qu'à ce moment-là, l'établissement de loyers bruts convenait aux demandeurs. Je note qu'à part cette déclaration générale non spécifique, aucune preuve et aucun argument n'ont été avancés au sujet des notions d'acquiescence, de renonciation ou de fin de non-recevoir.

[23]            CPV fournit une liste de vingt-trois demandeurs; elle affirme que les états de rajustements de ces demandeurs révèlent que le loyer est défini comme étant un loyer brut. À mon avis, la liste de la défenderesse n'est pas utile. Neuf des opérations se rapportent à des demi-lots pour lesquels le loyer stipulé dans les contrats d'achat, de vente et de location (lorsqu'il est de fait stipulé) et dans les états de rajustements est un montant brut. On ne donne pas à entendre que les sous-baux contiennent des mentions similaires et je ne puis tirer cette conclusion parce qu'aucun sous-bail se rapportant aux demi-lots n'a été produit en preuve. Quant aux quatorze autres opérations, trois des états seulement prévoient un montant brut (Bales, Boyd, Churchill). Dans le cas de M. Bossert, le loyer mentionné dans l'état de rajustements de l'acquéreur est divisé en composantes, alors que l'état du vendeur prévoit un montant brut. Les états de rajustements qui s'appliquent aux autres opérations figurant sur la liste de la défenderesse ne font pas mention d'un loyer brut. En outre, il y a vingt-neuf autres états de rajustements (P-20) dans lesquels le loyer est divisé en composantes et, sur ces vingt-neuf documents, dix-sept portent une date postérieure au mois de mars 1997. CPV s'appuie également fortement sur la définition figurant à l'alinéa 2.02h) :

[TRADUCTION] « Loyer » s'entend du loyer de base et du supplément de loyer payable en vertu des présentes.


[24]            Je ne souscris pas à la position prise par CPV. Selon la pratique existant dans l'industrie, on exige peut-être des loyers bruts dans les parcs de maisons modulaires, mais la relation entre les parties est régie par les dispositions du sous-bail dans la mesure où ces dispositions ne sont pas incompatibles avec le bail principal. La Cour suprême du Canada a dit à maintes reprises que les questions d'interprétation doivent être abordées eu égard au contexte. Par conséquent, en interprétant l'alinéa 2h) et l'expression « juste loyer économique » , il faut tenir compte du sous-bail dans son ensemble et en particulier des articles 2 et 3 ci-dessus reproduits.

[25]            À mon avis, le mot « loyer » tel qu'il est employé aux alinéas 2.01a) et b), et l'expression « juste loyer économique » , telle qu'elle est employée à l'alinéa 2.01b), s'entendent du loyer de base. La clause introductive de l'article 2.01 énonce les paramètres applicables aux alinéas a) et b) et prévoit le paiement par le sous-locataire du [TRADUCTION] « loyer de base suivant [...] » . L'alinéa 2.01a) donne des précisions au sujet des paiements jusqu'au 29 février 1996 inclus et prévoit une augmentation annuelle d'IVC. Les mots « loyer de base » et « loyer » sont utilisés d'une façon interchangeable à l'alinéa a). L'alinéa 2.01b) donne des précisions au sujet du « loyer » payable pour chacune des périodes de location de quatre ans et prévoit une augmentation annuelle d'IVC. À l'alinéa b), les mots « loyer » et « juste loyer économique » sont employés d'une façon interchangeable. Toutefois, les alinéas a) et b) sont visés par la disposition introductive, qui précise [TRADUCTION] « le loyer de base suivant [...] » .


[26]            L'article 3.02 indique les frais payables par le sous-locataire au titre du « supplément de loyer » . Le sous-alinéa 3.02(i) renforce et clarifie l'article 2.04 en ce qui concerne le [TRADUCTION] « sous-bail à loyer net » . Si l'interprétation préconisée par CPV était adoptée, le sous-alinéa 3.02(i) n'aurait aucune fin utile. Les sous-alinéas 3.02(ii), (iii) et (iv) renforcent encore plus cette position. Il est vrai que CPV peut détailler ses coûts réels à la fin de chaque année si le loyer applicable au lot est un loyer brut, mais on laisse les sous-locataires dans l'ignorance au sujet du supplément de loyer qu'ils ont payé et le sous-alinéa 3.02(ii) n'aurait alors aucun sens.

[27]            L'interprétation préconisée par la défenderesse suscite d'autres problèmes. Premièrement, je ne puis rien constater qui permette d'appliquer l'augmentation d'IVC aux coûts réels s'il est tenu compte de la définition figurant à l'alinéa 2.02e), qui traite uniquement de la composante « logement » de l'indice annuel moyen des prix à la consommation. Deuxièmement, le sous-locataire est tenu, en vertu du sous-alinéa 3.02(iv), de payer des frais d'administration et des frais comptables s'élevant à 20 p. 100. Les frais correspondent à 20 p. 100 des montants énoncés aux sous-alinéas 3.02(i) et (ii), c'est-à-dire les dépenses additionnelles. Troisièmement, l'article 12.01 stipule que les sous-locataires après terme, à l'expiration du sous-bail, devront payer un loyer mensuel correspondant à 120 p. 100 du loyer de base mensuel. Quatrièmement, entre le moment où Country Park a ouvert ses portes en 1994 et le mois de mars 1997, CPV a exigé un loyer de base et un supplément de loyer plutôt qu'un loyer brut. Il semble anormal d'avoir deux méthodes tout à fait différentes découlant du même document.


[28]            La seule interprétation raisonnable de la définition du mot « loyer » figurant à l'alinéa 2.02h), si cette définition est considérée selon le contexte, est que ce mot peut se rapporter soit au loyer de base soit au supplément de loyer. Bref, le mot « loyer » peut être, et est, utilisé d'une façon interchangeable avec les mots loyer « de base » et « supplément » de loyer figurant dans le sous-bail. Une interprétation conjonctive par laquelle le « loyer » doit inclure le loyer « de base » plus le « supplément » de loyer (s'il est tenu compte des dispositions connexes) donne lieu à une absurdité. Il n'est pas contesté que les mots « loyer » et « juste loyer économique » sont employés d'une façon interchangeable. Par conséquent, lorsqu'elle fixe le « juste loyer économique » , CPV fixe ou détermine le loyer « de base » . Cela n'est pas incompatible avec les dispositions du bail principal. Ce résultat ne correspond peut-être pas à la pratique de l'industrie, et il n'est peut-être pas commode, mais le sous-bail et les dispositions qu'il renferme régissent les relations entre les parties.

[29]            Il s'agit en deuxième lieu de savoir si le loyer établi par CPV en 1996 était un juste loyer économique. La détermination de cette question influera sur la preuve relative à l'évaluation. Toutefois, pour plus de clarté et de cohérence, je crois qu'il est préférable d'examiner la question dès maintenant.

Le loyer applicable à l'année 1996 était-il le juste loyer économique?


[30]            Monsieur Eden a témoigné qu'en 1995 ou en 1996, il avait communiqué avec la maison Burgess, Austin et associés et avait demandé que l'on procède à un sondage des loyers applicables aux emplacements de maisons modulaires dans les parcs de banlieue. Il a reçu une télécopie (pièce P-7, figurant également sous la cote J-2, onglet 124) dans laquelle les renseignements ci-dessous mentionnés étaient donnés. Une note manuscrite, [TRADUCTION] « Au mois de février 1995 » , figure près du titre [TRADUCTION] « Loyers mensuels courants applicables aux emplacements » .

[TRADUCTION] Sondage relatif aux loyers applicables aux emplacements de maisons modulaires dans les parcs de banlieue

Parc

Loyers mensuels courants applicables aux emplacements

Commodités communes

PROPRIÉTÉ

rue Laity/route Lougheed

Maple Ridge

255 à 270 $

Aucune installation

Parc de maisons mobiles Garibaldi

12892, 232e avenue

Maple Ridge

305 $

Installations minimales

9132, 120e rue

Surrey

305 $

Aucune installation

Parc de maisons mobiles Plaza

8266, route King George

Surrey

320 $

Aucune installation

Crestway Bay

Surrey

488 à 510 $

Ensemble récréatif avec sauna, bain tourbillon, club-house

Crispen Bays

7790, route King George

Surrey

350 à 498 $

Piscine extérieure

Westvilla Estates

8560, 156e rue

Surrey

385 à 491 $

Sauna, club-house, salle de jeu


[31]            Après avoir examiné les renseignements et avoir noté que plus on se rapproche de Vancouver, plus les loyers sont élevés, M. Eden a rencontré les autres membres du conseil d'administration de CPV. Monsieur Eden a décrit comme suit le résultat de la rencontre :

[TRADUCTION] À un moment donné, nous avons songé à fixer les loyers, dans le parc, à un montant plus élevé, de 370 à 380 $, pour l'année 1996, mais nous avons pris une décision sur le plan de la commercialisation, soit de laisser les loyers tels quels et d'effectuer une augmentation modeste de 10 p. 100. Comme nous l'avons fait dans nos autres parcs, nous avons décidé d'attribuer aux loyers applicables aux emplacements une valeur inférieure à celle du marché [...] pour cette période particulière, étant donné que nous savons que nous pouvons augmenter les loyers tous les quatre ans en vertu du bail principal. Par conséquent, nous avons décidé, sur le plan commercial, que même si nous nous rendions compte que les loyers étaient inférieurs à ceux du marché, nous avions intérêt à commercialiser le parc à ces prix pour encourager les ventes et louer tout le parc et bénéficier du revenu tiré des lots. Il s'agissait d'une décision commerciale.

[32]            CPV se reporte à l'alinéa 2.01f) du sous-bail et note que si le sous-locateur ne fait rien à la date de la révision, le loyer ne change pas. CPV affirme que cela ne veut pas nécessairement dire que le loyer est le juste loyer économique. Elle soutient que [TRADUCTION] « [c]ela veut dire que le propriétaire a tout simplement fixé le montant du loyer, et a décidé sur le plan commercial de ne pas l'augmenter » . La défenderesse maintient que la preuve présentée par M. Eden n'a pas été contredite et que [TRADUCTION] « les demandeurs n'ont soumis aucune preuve donnant à entendre que les loyers de 1996 n'avaient pas été fixés à un montant inférieur à celui du marché » . Je ne suis pas d'accord.


[33]            Le raisonnement de la défenderesse pose un problème en ce qui concerne l'alinéa 2.01f). La preuve indique qu'en 1995-1996, le loyer de base était de 187,96 $ et que le supplément de loyer était de 78 $, soit un montant mensuel total de 265,96 $. En 1996-1997, le loyer de base était de 206,76 $ et le supplément de loyer était de 78 $, soit un montant total de 284,76 $. L'alinéa 2.01f) est ainsi libellé :

[TRADUCTION] Le sous-locateur tentera de déterminer le juste loyer économique et d'en aviser le sous-locataire au moins 60 jours avant le début de l'année de location pertinente, mais il pourra procéder à cette détermination et en aviser le sous-locataire dans les 60 jours qui suivront le début de l'année de location pertinente; TOUTEFOIS, en l'absence de détermination et d'avis ou en attendant la détermination et l'avis, le sous-locataire continuera à payer un loyer annuel au même montant et selon les mêmes modalités que pour l'année de location antérieure.

Dans une lettre en date du 29 avril 1996 adressée aux propriétaires de Country Park, M. Eden a informé les sous-locataires que leur loyer serait rajusté et que CPV les informerait du nouveau montant. Dans une lettre en date du 17 juin 1996, M. Eden a avisé les sous-locataires que le loyer de base était augmenté de 10 p. 100. Il [TRADUCTION] « a renoncé aux arriérés pour l'augmentation relative aux mois de mars, d'avril, de mai et de juin 1996 » et il a demandé le paiement du montant plus élevé à compter du 1er juillet 1996, et ce, jusqu'au 1er février 1997. CPV n'a pas observé le délai prévu à l'alinéa 2.01f), mais elle s'est conformée à la réserve. Je ne puis voir comment cet aspect de l'argument de la défenderesse aide à déterminer si le loyer établi en 1996 était un juste loyer économique.


[34]            Il est certain que M. Eden a témoigné que les administrateurs de CPV avaient décidé, sur le plan commercial, de fixer le loyer de 1996 à un montant inférieur à la valeur marchande. Toutefois, la preuve qu'il a présentée au sujet du moment où CPV a commencé à fixer le loyer selon le marché était contradictoire et prêtait à confusion. À l'instruction, il a corrigé certaines des réponses qu'il avait données aux questions qui lui avaient été posées lors de l'interrogatoire préalable. L'une de ces corrections se rapportait à la question 467. À l'interrogatoire préalable, la question suivante lui avait été posée : [TRADUCTION] « Quand avez-vous commencé à fixer le loyer au juste loyer économique? » À l'interrogatoire préalable, la réponse suivante a été donnée : [TRADUCTION] « En l'an 2000, et selon nous, il s'agit d'un loyer brut. » À l'instruction, M. Eden a déclaré qu'il aurait dû répondre qu'il s'agissait de l'année 1997. De même, lorsqu'il a donné des explications au sujet du document intitulé [TRADUCTION] « Illustration relative à l'investissement de Country Park Village Properties (Mainland) Ltd. » (pièce J-2, onglet 72), M. Eden a dit ce qui suit : [TRADUCTION] « [N]ous avons commencé à fixer le loyer au juste loyer économique en 1997 seulement » .

[35]            Il m'est fort difficile de concilier la preuve. Le sous-bail prévoit la révision des loyers tous les quatre ans à compter du 1er mars 1996. En 1996, le loyer de base était de 206,76 $ et le supplément de loyer était de 78 $, soit un montant de 284,76 $ en tout. En 1997, CPV est passée au loyer brut et a exigé un montant de 287,61 $. Cela représente une augmentation mensuelle de 2,85 $ sur le total payé en 1996. Si le loyer de 1997 était le juste loyer économique plus l'augmentation d'IVC, comment se fait-il que le loyer de 1996 n'était pas le juste loyer économique?


[36]            Monsieur Christopher Seabrook, un demandeur, a témoigné qu'avant d'acheter sa propriété, il avait discuté de la question du loyer avec M. Eden. Il a déclaré avoir questionné M. Eden au sujet du niveau auquel le loyer était fixé et de la révision prospective. Monsieur Seabrook a témoigné que M. Eden lui avait assuré que le niveau du loyer était exact lors de la dernière révision et qu'au mois de mars 2000, s'il y avait une augmentation, [TRADUCTION] « elle serait fort minime et que l'on ne la remarquerait même pas » . Lorsqu'il a été interrogé à ce sujet, M. Eden ne se rappelait pas avoir fait ces déclarations.

[37]            L'expert des demandeurs, M. Grant, a témoigné que, si les rajustements appropriés tirés des données contenues dans le rapport McConnell étaient appliqués, le loyer de 1996 n'était pas disproportionné avec le juste loyer économique, compte tenu du sondage auquel la maison Burgess Austin avait procédé.

[38]            La défenderesse ne donne pas à entendre que les demandeurs ont été informés que le loyer de 1996 était fixé à un montant inférieur au juste loyer économique. Je suis portée à souscrire à l'avis des demandeurs, à savoir que de tels renseignements sont d'un genre qu'un propriétaire ou vendeur responsable aurait communiqué. Les demandeurs maintiennent également que Country Park n'avait pas vendu toutes les propriétés entre les années 1996 et 2000 même si toutes les propriétés situées sur des lotissements similaires l'avaient été au cours de la même période. Il semble être inféré que si le loyer était de fait inférieur au juste loyer économique, le taux d'occupation l'aurait montré. Je comprends la position des demandeurs, mais étant donné qu'elle se rapproche davantage d'une conjecture que d'une inférence, je ne suis pas portée à lui accorder beaucoup de poids.

[39]            Toutefois, j'accorde énormément de poids aux lettres de M. Eden en date du 29 avril et du 17 juin 1996. La lettre du 29 avril se lit comme suit :


[TRADUCTION] Conformément à l'alinéa 2.01b) du sous-bail que nous avons conclu avec vous, nous tenons à vous aviser que nous rajusterons votre loyer pour qu'il corresponde au juste loyer économique courant ou que nous le rajusterons en fonction du coût de la vie.

Des pourparlers sont en cours avec le ministère des Affaires indiennes au sujet de l'augmentation qui devrait être apportée au juste loyer économique applicable au bail principal pour les quatre années à venir. Une fois que la chose aura été établie, nous vous informerons du nouveau montant.

Nous regrettons de ne pas avoir pu vous faire part plus tôt du nouveau montant. Nous communiquerons bientôt avec vous, à la suite d'autres pourparlers avec le ministère.

[40]            La lettre du 17 juin est ainsi libellée :

[TRADUCTION] À la suite de la lettre que nous vous avons envoyée le 29 avril 1996 au sujet du rajustement de votre loyer au Country Park Village, nous avons fait examiner les montants des loyers applicables à des emplacements comparables par une société de Vancouver. Nous augmenterons votre loyer de 10 p. 100 conformément à l'alinéa 2.01b) de votre sous-bail. [Non souligné dans l'original.]

L'alinéa 2.01b) est la disposition du sous-bail dans laquelle est fixé le juste loyer économique, des augmentations étant prévues à compter du mois de mars 1996. On n'a pas donné à entendre que l'augmentation d'IVC serait de 10 p. 100 ou pourrait être de 10 p. 100.


[41]            À mon avis, compte tenu de la preuve, il est raisonnable de conclure qu'en 1996, CPV a fixé le loyer au juste loyer économique et je rejette la preuve contraire soumise par M. Eden. Les demandeurs qui s'étaient installés au Country Park avant 1996 pouvaient à bon droit croire que le juste loyer économique serait exigé à compter du mois de mars 1996. Les sous-baux indiquaient que ce serait le cas et les lettres de M. Eden l'indiquent. Rien ne permettait aux demandeurs qui s'étaient installés après le mois de mars 1996 de remettre en question les dispositions de leurs sous-baux qui prévoyaient qu'un juste loyer économique serait exigé à compter du mois de mars 1996. CPV n'a jamais affirmé autre chose tant que le différend relatif au loyer de l'an 2000 n'a pas pris naissance.

[42]            La troisième question subsidiaire se rapporte à la façon dont CPV a abordé la question de la facturation des frais des services d'aqueduc et d'égout. Le règlement de cette question sera utile lorsque je procéderai à l'analyse de la preuve relative à l'évaluation et à la détermination du juste loyer économique en résultant.

Frais liés aux services d'aqueduc et d'égout

[43]            Les demandeurs soutiennent que les calculs que CPV a effectués pour les services d'aqueduc et d'égout n'étaient pas appropriés. Ils affirment qu'il faut tenir compte de l'article 3.02 du sous-bail pour déterminer comment ces frais devraient être facturés. Or, le sous-alinéa 3.02(i) prévoit que, si les lieux loués ne sont pas évalués séparément, le sous-locataire doit payer, à titre de supplément de loyer, sa part au pro rata des frais des services d'aqueduc et d'égout. S'il est en outre tenu compte du libellé de la fin de ce sous-alinéa, qui exige que le sous-locataire verse au sous-locateur sa part du pro rata des cotisations annuelles (du sous-locateur au district de Chilliwack) conformément aux conditions de l'entente de viabilisation, cela veut dire, selon les demandeurs, qu'ils doivent payer leur part au pro rata au sens qui est attribué à ces termes dans le sous-bail. Il est soutenu que CPV devrait donc répartir ses coûts réels entre 115 lots pour l'année 1995 et entre 120 lots à compter de l'année 1998.


[44]            Les demandeurs maintiennent que CPV a simplement divisé les dépenses annuelles estimatives par le nombre de lots occupés plutôt que par le nombre total de lots. La position prise par la défenderesse, à savoir qu'elle devrait facturer les demandeurs en fonction de la consommation conformément à l'entente de viabilisation est, de l'avis des demandeurs, une interprétation incroyablement excessive du libellé du sous-bail. Ils affirment que l'entente de viabilisation a été conclue entre CPV et le district de Chilliwack et n'a rien à voir avec eux. En outre, cette entente n'exige de toute façon pas le recours à une méthode de facturation individuelle. Les demandeurs affirment que, si la clause est ambiguë, elle devrait être interprétée en leur faveur.

[45]            CPV maintient que M. Eden et M. Langdon ont tous deux confirmé que le montant exigé des sous-locataires pour les services d'aqueduc et d'égout était basé sur la consommation sur les lots aménagés. CPV recouvrait simplement les montants exigibles et les remettait directement au district de Chilliwack. À la fin et au début de chaque année civile, les estimations de coûts des services d'aqueduc et d'égout étaient rajustées et les sous-locataires recevaient des remboursements, ou des factures si les coûts étaient plus élevés que ceux qui étaient prévus, en fonction du montant réel facturé par le district. La défenderesse maintient que ses opérations, à cet égard, étaient entièrement correctes, en particulier s'il est tenu compte de l'article 2.04 (prévoyant un sous-bail à loyer net) et de l'article 3.01 (prévoyant que le sous-locataire devait payer les frais de chauffage, d'électricité, de téléphone ainsi que les impôts, droits de licences, montants et autres frais exigés à l'égard des lieux loués).


[46]            La défenderesse se reporte à l'entente de viabilisation et affirme que cette entente exige que les frais soient basés sur l'utilisation. Il s'ensuit donc, logiquement et légalement, que seuls les lots du Country Park sur lesquels des habitations avaient été bâties devraient à juste titre se voir imposer une part au pro rata des frais des services d'aqueduc et d'égout. CPV soutient que si l'interprétation préconisée par les demandeurs était retenue, elle supporterait, tant que le parc n'était pas complètement occupé, une part disproportionnée et inéquitable des frais des services d'aqueduc et d'égout. Il est affirmé que cette interprétation contredirait clairement les dispositions de l'article 2.04 et l'intention exprimée dans le document, à savoir que le sous-bail est un sous-bail à loyer net.

[47]            Il est clair que le district de Chilliwack estime annuellement les frais des services d'aqueduc et d'égout pour l'année à venir en se fondant sur les montants facturés l'année précédente et qu'il facture le sous-locateur. À la fin de l'année civile, le district procède à un rajustement, de façon à tenir compte du montant réel qui doit être payé. L'alinéa 6.02b) de l'entente de viabilisation montre que tant les coûts estimatifs que les coûts réels sont basés sur la consommation. Il est également clair, eu égard à la preuve, que CPV considérait le recouvrement et la remise des sommes dues au titre des services d'aqueduc et d'égout comme un arrangement donnant lieu à un transfert des paiements.

[48]            Le litige découle du libellé du sous-alinéa 3.02(ii) du sous-bail, qui prévoit ce qui suit :

[TRADUCTION] [...] La « part au pro rata du sous-locataire » s'entend d'une fraction, dont le numérateur est 1 et le dénominateur est le nombre de lots dont les terres sont composées en vue de la sous-location par le sous-locateur [...]


[49]            Les demandeurs se reportent au bail principal, tel qu'il a été modifié, et au plan d'arpentage à l'appui de l'argument selon lequel la part au pro rata devrait être de 1/115 pour l'année 1995 et de 1/120 pour les années subséquentes.

[50]            À mon avis, la position des demandeurs n'est pas défendable. L'entente de viabilisation a été conclue avant que les sous-locataires eussent signé les contrats d'achat, de vente et de location et avant que les demandeurs se soient installés au Country Park. Le sous-bail fait expressément mention de l'entente de viabilisation et stipule que les frais des services d'aqueduc et d'égout doivent être payés conformément aux dispositions de cette entente. Interpréter les mots [TRADUCTION] « part au pro rata » de la façon préconisée par les demandeurs exige que l'on y incorpore les mots [TRADUCTION] « approuvés aux fins de la division » plutôt que les mots [TRADUCTION] « dont les terres sont composées en vue de la sous-location » .

[51]            Le bail principal et le plan d'arpentage prévoient 120 lots. Ni l'un ni l'autre n'exige que les 120 lots soient mis en valeur dès le départ. Le bail principal stipule plutôt expressément (article 23) que l'aménagement sera réalisé par étapes conformément au plan de lotissement. Dans ce cas-ci, l'aménagement devait être réalisé par phases. En outre, le bail principal a été modifié à deux reprises afin d'augmenter le nombre de lots à mettre en valeur.


[52]            Si l'interprétation avancée par les demandeurs était adoptée, une partie importante de l'utilisation par les sous-locataires des services d'aqueduc et d'égout serait financée par la défenderesse. Les demandeurs cherchent essentiellement à obtenir une aide financière grâce au paiement d'une partie importante des frais liés à l'utilisation des services d'aqueduc et d'égout. Or, un tel avantage ne saurait être retiré des dispositions du sous-bail dont il a été fait mention ou des dispositions du sous-bail dans son ensemble.

[53]            Il peut exister une distinction théorique entre les lots viabilisés et les lots occupés, mais en réalité un lot viabilisé dont les services sont en attente n'entraînera pas d'utilisation. Une habitation inoccupée n'entraînera pas non plus d'utilisation (sauf peut-être dans une mesure minime). Pour établir une distinction sur cette base, il faut procéder à une enquête détaillée qui n'est pas justifiée. Quant à la maison-témoin, la défenderesse doit supporter les frais des services d'aqueduc et d'égout; si je comprends bien la preuve, CPV reconnaît que tel est le cas.

[54]            Je conclus donc que la méthode par laquelle la défenderesse recouvrait les frais des services d'aqueduc et d'égout et remettait les sommes reçues au district de Chilliwack n'était pas inappropriée, contrairement aux allégations des demandeurs. J'examinerai maintenant les évaluations et la question de la détermination du juste loyer économique.

Les évaluations

Les demandeurs


[55]            Monsieur Danny R. Grant, P. Ag., a été reconnu à titre d'expert lorsqu'il s'est agi de présenter une preuve d'opinion au sujet de l'évaluation des biens immobiliers. Il est agronome et a une longue expérience en matière d'évaluation, tant pour ce qui est de l'emplacement de la propriété ici en cause qu'en ce qui concerne les questions d'évaluation qui se posent dans des circonstances similaires. Son rapport d'évaluation comprend des photographies; des données sur la région et le voisinage, y compris des diagrammes, des graphiques et des plans; une description détaillée de la propriété, y compris la mention du sous-bail, du bail principal et une liste des baux et des conditions matérielles influant sur la valeur; les évaluations; et un résumé accompagné de conclusions. Ses estimations du juste loyer économique se rapportent au loyer de base.


[56]            Monsieur Grant était d'avis qu'un certain nombre d'obstacles empêchaient l'obtention du loyer le plus élevé auquel on pouvait s'attendre par suite de la location en pleine propriété à long terme de chacun des lots dont est composé Country Park. Parmi les obstacles mentionnés, il y avait le fait que les sous-locataires n'exerçaient aucun contrôle sur le bail principal; le fait que les sous-locataires n'étaient pas protégés contre l'inobservation du bail principal par le locateur principal; le fait qu'il y avait à la fois des habitations unifamiliales et des duplex; les restrictions auxquelles était assujetti le sous-bail; le fait que l'exploitant n'avait pas retenu les services d'un agent immobilier sur une base continue; les modalités d'imposition du loyer; le fait que la direction ne faisait pas rapport annuellement au sujet des dépenses réelles; le montant associé aux frais de gestion; le fait qu'aucune distinction n'était établie entre les duplex et les habitations unifamiliales quant aux frais liés aux zones communes et aux frais d'entretien; l'absence de dispositions en cas de contestation découlant de la révision des loyers, sauf par l'entremise de la Cour fédérale; les actes de la direction, et notamment le fait que la direction menaçait d'engager des poursuites et proférait d'autres menaces du même genre; la position que la direction avait prise au sujet de l'enlèvement des maisons; le fait que les terres étaient en la possession d'un occupant dans une réserve des Premières nations; le fait que les sous-locataires avaient payé d'avance les améliorations; le recours, à Victoria, à une augmentation d'IVC ne comportant pas les composantes de l'IPC relatives au logement qui s'appliquaient à Chilliwack; l'absence de protection législative provinciale régissant les locations; le fait que les sous-locataires n'étaient pas au courant du bail principal et de ses modifications et qu'ils n'avaient pas obtenu de conseils à ce sujet; et l'obligation pour les sous-locataires de signer des baux stipulant des loyers inexacts. Selon M. Grant, compte tenu de pareilles incertitudes, il serait difficile de trouver un acquéreur qui conclurait un achat à des conditions reflétant la définition de la valeur du loyer économique.

[57]            Selon M. Grant, l'utilisation optimale de la propriété consistait à la diviser en lots résidentiels. Monsieur Grant a conclu que le sous-bail de Country Park était unique en son genre et qu'il présentait des difficultés. Étant donné qu'il croyait qu'il n'y avait pas beaucoup de comparables fiables, M. Grant a employé un certain nombre de méthodes différentes pour évaluer le juste loyer économique.


[58]            Premièrement, M. Grant a eu recours à l'indexation et a employé deux méthodes. Le loyer de base tiré de l'application de la composante du logement de l'IPC applicable à Victoria pour la période disponible se rapprochant le plus de la date de révision indiquait une baisse de 2,7 p. 100 depuis 1996. En se fondant sur cet indice, M. Grant obtenait un loyer de 209,61 $, moins 2,7 p. 100, soit 203,95 $. Monsieur Grant a ensuite tenu compte des conditions locales en appliquant le prix unitaire moyen des loyers déterminés par le Chilliwack Real Estate Board au cours des quatre années qui avaient précédé la date de révision et il a conclu que le loyer de base se situait entre 195,77 et 207,72 $, soit environ 200 $ par mois.

[59]            La deuxième méthode employée consistait à comparer directement le lotissement à des lotissements similaires. Monsieur Grant a examiné dix-neuf comparables. Aucun n'était identique. Certains parcs étaient composés de maisons modulaires ou d'habitations de type classique, mais la plupart étaient principalement composés de maisons mobiles. Dans certains cas, des paiements étaient effectués d'avance; dans d'autres cas, les améliorations foncières étaient payées d'avance et dans d'autres cas, des loyers étaient versés. Monsieur Grant s'est fondé sur l'hypothèse selon laquelle les sous-locataires, au Country Park, avaient payé d'avance toutes les améliorations apportées à leurs lots; il a conclu que la seule véritable comparaison possible se rapportait à la location d'un lot nu non amélioré. Il a ensuite procédé à des rajustements à l'égard de la région, des frais d'exploitation et du stationnement pour les véhicules de plaisance. Ayant constaté que les loyers s'échelonnaient de 180 $ à près de 250 $ par mois et n'ayant trouvé aucun comparable privilégié, et compte tenu de la possibilité d'un éventail compétitif négociable, il a conclu que le loyer de base approprié se situait au milieu de l'éventail, c'est-à-dire qu'il était d'environ 215 $ par mois.


[60]            Monsieur Grant a ensuite employé la méthode de la parité en comparant le parc à un indice, tâche qu'il a trouvée difficile. Ce processus comportait une analyse des prix unitaires moyens d'habitations publiés par le Chilliwack Real Estate Board par rapport à la composante du logement de l'IPC pour Victoria, par rapport aux ventes et reventes d'habitations identiques et d'habitations similaires dans le parc. Il a conclu que le marché avait accusé une baisse générale de 5,3 p. 100 et qu'à Country Park, la perte précise était de 21,3 p. 100 plus élevée que sur le marché et il a conclu qu'aucun locataire informé ne paierait pour des améliorations et ne louerait un lot aux conditions fixées au Country Park, compte tenu des pertes de valeur qui avaient été accusées par le passé. Country Park avait un rendement beaucoup moins élevé que celui du marché immobilier en général. Country Park avait perdu jusqu'à 42 p. 100 de sa valeur à la fin des années 1990, alors que sur le marché résidentiel en général, la perte était de 5 p. 100. Country Park n'avait pas réagi au cours de la phase de recouvrement, lorsque le marché résidentiel en général avait connu une hausse de plus de 12 p. 100. Monsieur Grant a conclu que, sur la base de la comparaison dans le parc, aucun loyer ne pouvait être exigé afin de maintenir les valeurs payées, compte tenu de la baisse du marché.

[61]            La dernière méthode qui a été employée a été désignée sous le nom de méthode du loyer économique. Dans le cas d'un lot à louer, il s'agirait du montant nécessaire pour attirer les facteurs de production, y compris les frais fonciers et les frais de viabilisation et une marge de profit, afin de créer des lots. Monsieur Grant considérait qu'il s'agit d'une méthode utile lorsque la preuve de la valeur locative selon le marché n'est pas abondante. En se fondant sur l'hypothèse selon laquelle le loyer applicable au lot est estimé comme si le lot était détenu en pleine propriété, loué dans un parc de maisons préfabriquées et assujetti aux conditions du sous-bail, M. Grant a analysé le rendement du terrain. En combinant le rendement du terrain et le rendement de toutes les améliorations, il a conclu que le loyer mensuel pour des lots ordinaires se situait entre 135 et 150 $.


La défenderesse

[62]            Monsieur Brian E. McConnell, AACI, P.App., a été reconnu à titre d'expert aux fins de la présentation d'une preuve d'opinion concernant l'établissement des loyers pour les intérêts locatifs. Monsieur McConnell est agréé par l'Institut canadien des évaluateurs; il a une expérience directe considérable dans ce domaine. Son rapport initial, en date du 4 juillet 2001, a été modifié le 19 février 2002 de façon à tenir compte, entre autres choses, du fait que les impôts fonciers levés sur les lots individuels au Country Park étaient payés par les sous-locataires, soit un facteur dont il n'avait pas tenu compte dans son rapport initial. Le rapport de M. McConnell est intitulé [TRADUCTION] « Sommaire modifié du rapport d'évaluation du loyer économique applicable aux loyers prévus par les sous-baux pour la location d'emplacements dans le parc de maisons modulaires Country Park Village » . Le rapport de M. McConnell n'est pas aussi détaillé et complet que celui de M. Grant, mais il contenait une description du site; des photographies; des renseignements généraux; un exposé de l'objet du rapport et de l'étendue de l'enquête; des données additionnelles; et ses estimations du loyer économique.


[63]            Monsieur McConnell s'est fondé sur le fait que les montants mensuels cotés sur le marché pour la location d'emplacements de maisons modulaires ou de maisons mobiles sont habituellement des montants bruts. Ses estimations de la juste valeur marchande des lots ordinaires et des demi-lots sont fondées sur les loyers mensuels bruts rajustés à la baisse à l'égard de deux facteurs propres au lotissement, à savoir le paiement des impôts fonciers et des frais des services d'aqueduc et d'égout par les sous-locataires. Monsieur McConnell a conclu que l'utilisation optimale de la propriété consistait à y installer des maisons modulaires, des maisons mobiles, des habitations de type classique ou des duplex.

[64]            Monsieur McConnell a adopté la technique de la parité. Il a utilisé comme comparables deux unités, à Country Park, ainsi que cinq parcs, à Chilliwack et à Langley. Un comparable (Forest Green, à Langley) était un ensemble mixte de maisons modulaires et de maisons mobiles bâties sur un site détenu en pleine propriété. Un autre était un ensemble mixte de maisons mobiles et de maisons en rangée, à Chilliwack. Les trois autres comparables étaient des parcs de maisons mobiles, à Chilliwack.

[65]            Dans son rapport, M. McConnell considérait qu'à l'exception des deux unités situées au Country Park, les montants exigés dans les autres parcs s'appliquaient à des ensembles inférieurs à celui de Country Park. Il a conclu que le loyer mensuel brut pour une unité complète, à part les frais des services d'aqueduc et d'égout, était de 405 $. En rajustant ce total à la baisse pour tenir compte des impôts fonciers, de 13,24 $ par mois, il a conclu que le loyer économique brut mensuel rajusté pour un lot ordinaire était de 391,76 $.


[66]            Monsieur McConnell a noté que, par le passé, les loyers pour les duplex étaient inférieurs, dans une proportion de 47,9 p. 100, aux taux applicables aux lots ordinaires. Il a en outre noté que les montants exigés par le passé avaient été fixés par CPV afin d'attirer une demande pour des maisons modulaires du type duplex. De l'avis de M. McConnell, les duplex situés côte-à-côte se louaient habituellement à un montant qui était de 20 à 30 p. 100 inférieur aux montants exigés pour des habitations unifamiliales d'une superficie équivalente situées dans des emplacements équivalents. En utilisant un taux de 75 p. 100 rajusté pour les frais des services d'aqueduc et d'égout, le loyer économique brut des demi-lots était de 303,75 $ par mois, chiffre qui a été arrondi à 305 $. En rajustant ce total à la baisse afin de tenir compte des impôts fonciers, de 7,32 $ par mois, M. McConnell a conclu que le loyer économique brut mensuel rajusté pour un demi-lot était de 297,68 $.

[67]            Monsieur McConnell a donc conclu que le juste loyer économique brut pour un lot ordinaire, au Country Park, était de 391,76 $ et que, pour un demi-lot, le loyer était de 297,68 $. Ces loyers comprenaient les coûts liés aux zones communes que CPV avait signalés à M. McConnell, soit 35,38 $ pour l'année 1999, 43,94 $ pour l'an 2000 et 50,68 $ pour l'année 2001.

[68]            Madame Avis Houlden est membre du Real Estate Institute de la Colombie-Britannique; elle travaille pour Fortin Appraisals Ltd., à Chilliwack. Le 24 janvier 2000, à la demande de M. Eden, elle a inspecté le Country Park et a entrepris un bref sondage des loyers exigés pour les emplacements dans les parcs de maisons mobiles, à Chilliwack. Elle voulait obtenir une estimation du loyer économique [d'un lot] pour la période de location de quatre ans à venir, au Country Park. Madame Houlden n'a pas été reconnue à titre d'expert et il ne sera donc pas fait mention de l'opinion qu'elle a exprimée au sujet du juste loyer économique. Toutefois, les observations qu'elle a faites au sujet du Country Park et les résultats du sondage qu'elle a effectué dans les parcs de maisons mobiles, à Chilliwack, sont admissibles.


[69]            Madame Houlden considérait que le Country Park était un parc de bonne qualité, composé de 120 emplacements pour les maisons modulaires. Elle a décrit le parc comme suit :

[TRADUCTION] Le parc comporte des routes à revêtement noir avec des trottoirs en béton et des réverbères ornementaux; il est entouré d'une clôture en bois ou en bois et en briques avec des barrières à accès contrôlé. Tous les services sont installés sous terre. L'aménagement comporte de vastes « espaces verts » , avec de nombreux arbres et buissons ainsi qu'un système d'arrosage souterrain.

Il y a un club-house d'un étage à charpente en bois au centre du parc; il comporte une salle de réunion ou salle de jeu avec un foyer, une cuisine complète, deux salles de bains comportant trois accessoires et deux chambres à coucher pour les invités. La cour qui entoure le club-house est aménagée d'une façon élaborée et comprend un petit étang avec un pont pour piétons et une fontaine, un kiosque, un stationnement pour les visiteurs, des allées piétonnières et un putting green.

Dans le coin sud-est du parc, il y a un lot revêtu de gravier pour l'entreposage des véhicules de plaisance.

La superficie des emplacements individuels est supérieure à la moyenne, et chaque emplacement comporte une voie d'accès pavée de briques avec une bordure de béton ainsi qu'une cour engazonnée dans laquelle des buissons et des arbres ont été plantés.

Le parc est composé de maisons modulaires de conception contemporaine plutôt que de maisons mobiles; ces maisons sont habituellement bien tenues.

[70]            Les données relatives à la location, dans les parcs de maisons mobiles, qui ont été obtenues par suite du sondage auquel Mme Houlden a procédé sont énoncées ci-dessous.

DONNÉES RELATIVES À LA LOCATION

(Loyers applicables aux emplacements dans les parcs de maisons mobiles)

EMPLACEMENT

ÉVENTAIL DES LOYERS MENSUELS POUR EMPLACEMENTS

                  COMMENTAIRES

1

Parc de maisons mobiles Maple Meadows

6338, chemin Vedder, Sardis

250 à 275 $

- Parc de bonne qualité sur des terres de réserve

- Loyers comprenant les frais des services d'aqueduc, d'égout et de cueillette des ordures

2

Westwood Estates

45640, chemin Watson, Sardis

362 à 390 $

- Parc de bonne réputation, de qualité moyenne

- Loyers comprenant les frais des services d'égout, d'aqueduc et de cueillette des ordures

3

Parc de maisons mobiles Cedar Grove

5742, chemin Unsworth, Sardis

340 à 355 $

- Parc de qualité moyenne situé à l'ouest de Vedder Crossing

- Loyers comprenant les frais des services d'aqueduc, d'égout et de cueillette des ordures

4

Village-retraite Cottonwood

7610, chemin Evans, Sardis

Environ 400 $

- Parc de bonne qualité situé tous près des centres commerciaux de Sardis

- Ruisseau traversant le parc; immeuble de commodités inclus

- Stationnement pour véhicules de plaisance disponible moyennant le paiement de frais additionnels

- Loyers comprenant les frais des services d'aqueduc et d'égout, mais ne comprenant pas la cueillette des ordures

5

Parc de maisons mobiles Fraser Village

45111, chemin Wolfe, Chilliwack

350 à plus de 400 $ (loyer déclaré)

- Parc de bonne qualité situé près du centre de la ville de Chilliwack

- Loyers comprenant les services d'aqueduc, d'égout et de cueillette des ordures

Analyse du juste loyer économique

[71]            Il existe des arrêts portant sur la location des terres des Premières nations. À ma connaissance, aucun arrêt ne porte sur les terres de réserve qui sont en la possession d'un occupant qui a signé un bail principal et l'a subséquemment cédé à une personne qui signe ensuite des sous-baux avec un certain nombre de sous-locataires. Même s'il y en avait, ces arrêts ne seraient probablement pas utiles parce que les dispositions des baux sont dans chaque cas différentes et que chaque cas dépend en fin de compte de l'interprétation du bail particulier qui lui est applicable.

[72]            Pour mémoire et pour plus de commodité, la définition du juste loyer économique figurant à l'alinéa 2.01c) du sous-bail est ici reprise :


[TRADUCTION]

c)      « Juste loyer économique » s'entend, pour une période particulière de quatre ans, du montant du loyer annuel auquel un locateur sérieux informé louerait les lieux loués sur le marché ouvert libre à un locataire sérieux informé, sans se limiter à les comparer aux autres terres de réserve disponibles aux fins de la location au début de chaque période de quatre ans, à supposer qu'à ce moment-là :

i.       les lieux loués appartiennent à un locateur en pleine propriété et ne soient pas grevés de charges;

ii.      les lieux loués comprennent les améliorations qui y ont été apportées avant le début du présent sous-bail, mais ne comprennent pas les améliorations qui y sont subséquemment apportées;

iii.     les lieux loués soient loués aux fins permises par le présent sous-bail; et

iv.     le locateur et le locataire n'aient entre eux aucun lien de dépendance.

[73]            Les parties ont consacré énormément de temps et d'énergie à critiquer les méthodes adoptées par leurs évaluateurs respectifs. Pour des raisons qui deviendront bientôt évidentes, je n'ai pas l'intention d'examiner en détail tous ces arguments.


[74]            J'ai différé deux décisions portant sur l'admissibilité de certains éléments de preuve. La première se rapporte à l'objection de la défenderesse en ce qui concerne des paragraphes précis du rapport d'évaluation de M. Grant; en effet, la défenderesse affirme qu'ils renferment des conclusions factuelles qu'il incombe à la Cour de trancher. J'ai conclu que les paragraphes contestés sont admissibles. La preuve d'expert portant sur des questions de fait ne devrait pas être exclue simplement parce qu'elle propose des réponses à des questions qui sont au coeur du litige dont la cour est saisie : R. c. Burns, [1994] 1 R.C.S. 656. Les paragraphes en question exposent des faits sur lesquels M. Grant a fondé ses conclusions et sont admissibles à cette fin. Il ne s'ensuit pas que ces faits seront compatibles avec les faits constatés par la Cour.

[75]            La deuxième décision qui a été différée se rapportait aux objections soulevées par les deux avocats au sujet de certaines questions posées à M. Grant en contre-preuve. Les objections que la défenderesse a formulées à l'égard des questions que l'avocat des demandeurs avait posées à M. Grant au sujet des pièces D33 et D34, et plus précisément au sujet de la clause 11.2, sont fondées. Monsieur Grant avait été interrogé à ce sujet pendant le contre-interrogatoire qui avait eu lieu plus tôt à l'instruction et il était loisible à l'avocat d'examiner ces points dans le cadre du réinterrogatoire. Par conséquent, il ne s'agit pas d'une contre-preuve appropriée. L'objection de la défenderesse en ce qui concerne la question que l'avocat a posée à M. Grant au sujet des effets négatifs de l'affaire Musqueam est également fondée. Cette question a été examinée à fond dans le rapport de M. Grant et lors de l'interrogatoire principal et elle ne constitue donc pas une contre-preuve appropriée. L'objection des demandeurs en ce qui concerne les questions de la défenderesse se rapportant à la clause 11.2 est également fondée. Étant donné que j'ai conclu que les questions des demandeurs à cet égard n'étaient pas appropriées, il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de procéder à un contre-interrogatoire.


[76]            Les demandeurs s'opposent en dernier lieu à la mention par la défenderesse, dans ses conclusions finales, de trois cas dans lesquels M. Grant avait fourni une preuve d'évaluation au sujet de laquelle le décideur avait fait des remarques. Sur les trois décisions, la défenderesse n'en a mentionné qu'une seule lorsqu'elle a interrogé M. Grant. La présentation de ces décisions par la défenderesse donne implicitement à entendre que la preuve soumise par M. Grant devrait être considérée avec un certain scepticisme. À mon avis, il ne convenait pas pour la défenderesse de mentionner, dans ses conclusions finales, des décisions qui pourraient tendre à attaquer les compétences ou la crédibilité de M. Grant. Les décisions qui donnent à entendre, comme l'a dit la défenderesse, que [TRADUCTION] « le recours par M. Grant à des hypothèses non pertinentes ou non justifiées a fait l'objet de critiques de la part d'autres tribunaux judiciaires par le passé » ne devraient pas être prises en considération puisqu'elles n'ont pas été signalées à celui-ci à l'instruction. Je n'en ai donc pas tenu compte.

[77]            Comme il en a déjà été fait mention, M. Grant a utilisé quatre méthodes pour déterminer le juste loyer économique. Il l'a fait parce que, à son avis, la propriété ici en cause était unique en son genre et qu'il n'y avait pas beaucoup de comparables fiables. Contrairement aux affirmations de la défenderesse, M. Grant n'a pas rejeté la technique de la parité. D'autre part, M. McConnell a maintenu que la technique de la parité était celle qu'il convenait d'employer et que c'était la meilleure technique parce qu'il existait sur le marché de nombreux éléments de preuve concernant des propriétés situées près de la propriété ici en cause.


[78]            Je conclus que la technique de la parité est celle qu'il faut utiliser, eu égard aux circonstances, pour établir le juste loyer économique. Aux fins de l'évaluation, la technique de la parité est la technique qu'il faut retenir : Bande indienne de Musqueam c. Glass (1997), 137 F.T.R. 1 (1re inst.), infirmé [1999] 2 C.F. 138, confirmé par [2000] 2 R.C.S. 633. Dans la décision Musqueam, la cour a eu recours à la technique résiduelle parce que les valeurs en pleine propriété ne pouvaient pas être utilisées et qu'il n'existait aucune terre comparable. Or, tel n'est pas ici le cas. Le juste loyer économique défini à l'alinéa 2.01c) est basé sur l'hypothèse énoncée au sous-alinéa 2.01c)(i), à savoir que les terres sont détenues en pleine propriété et ne sont pas grevées. Monsieur McConnell a exprimé l'avis selon lequel la technique de la parité était la seule technique qu'il convenait d'employer eu égard aux circonstances. Monsieur Grant convenait que la technique de la parité était appropriée, à condition que les rajustements nécessaires soient effectués afin de tenir compte des différences entre les comparables utilisés. Monsieur Grant a soumis une estimation du juste loyer économique basée sur la technique de la parité.

[79]            Malheureusement, cette conclusion ne permet pas de trouver une solution immédiate à la question parce que les experts, au moyen des techniques respectives de parité qu'ils ont employées, ont exprimé des opinions divergentes au sujet du montant du juste loyer économique. Toutefois, ces divergences ne sont pas aussi sérieuses qu'elles pourraient de prime abord sembler l'être. Ni l'une ni l'autre évaluation n'est tout à fait satisfaisante.

[80]            Monsieur McConnell s'est fondé sur deux hypothèses fautives. La première était que le juste loyer économique est le loyer brut. Or, pour les raisons dont il a ci-dessus été fait mention, j'ai conclu que le juste loyer économique s'entend du loyer de base. La défenderesse a fait remarquer que dans l'éventualité où je tirerais pareille conclusion, il serait néanmoins possible de déterminer le loyer de base à l'aide du rapport de M. McConnell en se reportant aux dépenses liées aux zones communes mentionnées à la page 16 du rapport modifié.


[81]            La deuxième hypothèse était que le loyer de 1996 était inférieur au loyer économique. Ici encore, pour les raisons dont il a ci-dessus était fait mention, j'ai conclu que ce n'est pas le cas. Sur ce point, M. McConnell se fondait sur les déclarations que M. Eden lui avait faites. J'ai conclu que la position de M. Eden à ce sujet doit être rejetée. Pendant le contre-interrogatoire, M. McConnell a reconnu que si les loyers de 1996 étaient les justes loyers économiques, cela influerait sur son estimation, sans toutefois préciser dans quelle mesure.

[82]            Monsieur Grant s'est appuyé sur le fait que le juste loyer économique est le loyer de base; sur ce point, on ne saurait considérer qu'il s'est trompé. Les rajustements que M. Grant a effectués se rapportaient à l'emplacement, aux frais d'exploitation, au rendement des améliorations foncières et au stationnement pour les véhicules de plaisance. Ces rajustements, ou certains de ces rajustements, étaient liés aux dix-huit obstacles empêchant d'arriver au [TRADUCTION] « loyer le plus élevé sur le site en cause » que j'ai ci-dessus résumés dans ces motifs lorsque j'ai analysé le rapport de M. Grant. La plupart de ces obstacles, sinon tous, se rapportent aux dispositions et conditions du sous-bail.


[83]            La définition figurant à l'alinéa 2.01c) dicte les paramètres applicables à la détermination du juste loyer économique. Elle ne fait pas mention des dispositions et conditions du sous-bail. Je considère qu'il est établi en droit qu'en l'absence de termes contraires, il ne faut pas tenir compte des conditions d'un bail en déterminant la juste valeur marchande ou le juste loyer économique : Musqueam, précité; St-Martin c. Canada (Ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien) (2001), 273 N.R. 134 (C.A.F.). Les arguments des demandeurs ne me convainquent pas qu'implicitement, la définition figurant à l'alinéa 2.01c) englobe une considération des dispositions du sous-bail. Les rajustements à la baisse effectués par M. Grant à cet égard n'étaient donc pas appropriés. Pour les raisons qui seront examinées ci-dessous dans ces motifs sous le titre « Entreposage des véhicules de plaisance » , je conclus également que M. Grant a d'une façon inappropriée effectué un rajustement à la baisse à l'égard du stationnement pour les véhicules de plaisance.

[84]            La question qui a été le plus vivement contestée était celle que M. Grant a désignée comme se rapportant aux [TRADUCTION] « améliorations payées d'avance » . Sans entrer inutilement dans les détails, si je comprends bien, M. Grant a pris la position selon laquelle les sous-locataires, en achetant leurs maisons, avaient payé d'avance les améliorations apportées aux lots, plus précisément le coût de la fondation, de la voie d'accès, des tuyaux de drainage, de l'aménagement paysager ainsi que les frais additionnels. En estimant le juste loyer économique, M. Grant a supposé que la défenderesse avait fourni l'infrastructure avec services jusqu'au trottoir. Dans la mesure où les améliorations effectuées par le sous-locataire n'étaient pas exclues de la détermination du juste loyer économique, il a déclaré que ces améliorations auraient dû être exclues.


[85]            Avec égards, je crois que les avocats se sont inutilement arrêtés à l'emploi des mots [TRADUCTION] « améliorations payées d'avance » . Monsieur McConnell avait de la difficulté à ne pas distinguer les voies d'accès en béton dans les propriétés comparables et les voies en pavés autobloquants, au Country Park, mais il a clairement témoigné avoir exclu la maison en estimant le juste loyer économique. Dans la notion de [TRADUCTION] « maison » , il incluait des éléments payés par les sous-locataires - la fondation, la voie d'accès, les tuyaux de drainage, l'aménagement paysager et les frais additionnels. En fin de compte, il s'agit d'une question de description ou de sémantique. Selon moi, les deux évaluateurs ont exclu les améliorations effectuées par les sous-locataires en estimant le juste loyer économique.

[86]            La seule véritable question à débattre est de savoir si les services fournis par CPV allaient jusqu'au trottoir ou jusqu'au centre du lot. Il régnait une certaine confusion sur ce point et les documents n'étayent pas la preuve soumise par M. Eden à ce sujet. Toutefois, aucun des deux experts n'a soutenu que ce facteur était important au point d'influer sur la détermination du loyer.


[87]            Compte tenu des documents, je ne retiens pas la prétention de M. Grant selon laquelle les sous-locataires ont payé d'avance une partie des frais liés au bail. Je retiens la preuve de M. Eden et de M. Langdon, selon laquelle le fait que le [TRADUCTION] « bail à long terme » était mis à part et qu'une valeur était attribuée à ce bail dans les premiers contrats d'achat, de vente et de location permettait de réduire les frais de TPS pour les acheteurs. La défenderesse n'en retirait aucun avantage et elle a finalement mis fin à cette pratique parce que les problèmes administratifs l'emportaient sur les avantages obtenus sur le plan des ventes. De même, les documents produits sous la cote J-2, onglet 25 (se trouvant également en partie sous la cote J-2, onglet 64) n'étayent pas l'allégation selon laquelle les sous-locataires ont payé d'avance une partie des frais liés aux sous-baux. La lettre d'envoi peut avoir donné l'impression que le lot loué se rapportait à un achat, mais la feuille d'estimation de coûts qui était jointe indiquait que le montant de 25 000 $ comprenait deux éléments - les améliorations apportées au lot double (aménagement paysager, raccordements, voie d'accès et ainsi de suite), d'environ 16 305 $, et le prix de déplacement d'une maison modulaire double, d'un montant approximatif de 8 900 $.

[88]            Quant à la question des comparables, M. Grant a pris la position selon laquelle les parcs de maisons mobiles à l'égard desquels aucun rajustement important n'avait été effectué n'étaient pas des comparables appropriés au Country Park, et ce, pour diverses raisons. En résumé, il s'agissait des raisons suivantes : les sous-locataires, au Country Park, avaient l'avantage d'un bail à long terme et avaient payé d'avance les améliorations apportées à leur emplacement (ou à leur lot). Plus précisément, M. Grant a déclaré que, dans le parc de maisons mobiles, le propriétaire du parc paie d'avance ces améliorations et rentre ensuite dans ses frais en exigeant un loyer mensuel du locataire de la maison mobile. Les loyers devraient donc être plus élevés dans le parc de maisons mobiles parce que le propriétaire doit recouvrer le coût des améliorations au moyen du loyer, alors qu'au Country Park, le loyer devrait être moins élevé parce que les sous-locataires ont payé les améliorations et louent un lot nu.


[89]            Monsieur McConnell n'était pas d'accord avec M. Grant; il croyait que les parcs de maisons mobiles étaient des comparables appropriés. Je note que le rapport Ogden du mois de juin, préparé pour le ministère des Travaux publics, dont il a été fait mention dans le rapport de M. Grant et pendant le contre-interrogatoire de M. Grant, utilisait des parcs de maisons mobiles comme comparables. De même, sur le plan immobilier, Mme Houlden considérait les deux types de parcs comme similaires. À supposer que M. Grant ait raison et qu'un rajustement soit nécessaire, je conclus que son omission d'effectuer un rajustement positif pour les commodités au Country Park, dont Mme Houlden a donné une description juste dans son sondage, compense les rajustements négatifs effectués pour ce facteur.

[90]            En ce qui concerne l'utilisation par M. McConnell de comparables à l'intérieur du parc, je considère comme sensée la position de M. Grant selon laquelle les sous-locataires, qui déboursent beaucoup moins d'argent pour l'achat de la maison (à cause de la baisse des prix) seraient prêts à dépenser un montant plus élevé pour le loyer. Toutefois, je n'ai pas à me prononcer sur ce point. Il y a cinq comparables communs aux deux rapports. À mon avis, le parc Forest Green est le meilleur. Les deux évaluateurs ont utilisé ce parc comme comparable; ils l'avaient visité et, à l'instruction, ils ont fait de longs commentaires à son sujet. Il s'agit d'un parc composé de maisons mobiles et de maisons modulaires, situé à Langley. On y installe des maisons modulaires au fur et à mesure que des sites pour maisons mobiles deviennent vacants. Monsieur McConnell estimait qu'il s'agissait d'un comparable fort pertinent; je suis d'accord.


[91]            Toutefois, ici encore, la preuve est plutôt contradictoire. Monsieur McConnell a signalé des loyers mensuels de 440 à 500 $ pour les emplacements ou les lots, alors que M. Grant a déclaré qu'ils se situaient entre 445 et 485 $. Le témoignage oral de M. Grant était plus précis que celui de M. McConnell; M. Grant a affirmé avec vigueur que, selon le barème de location de l'an 2000, l'éventail des loyers pour les lots modulaires était de 475 à 485 $ pour un lot d'une très grande superficie. Le seul autre élément de preuve se trouvait dans la documentation produite par l'entremise de M. McConnell, que celui-ci avait directement obtenue de la direction de Forest Green juste avant l'instruction. Selon cette documentation, le loyer pour une maison modulaire était de 482 $ à la fin du mois de février 2000. J'estime que ce montant est conforme à la preuve soumise par M. Grant et je retiens le montant de 482 $ comme loyer brut applicable à un lot pour maison modulaire à Forest Green.

[92]            Après avoir effectué un rajustement compte tenu du fait que les sous-locataires payaient les frais de services d'aqueduc et d'égout, M. McConnell a conclu que le juste loyer économique pour un lot, au Country Park, était de 405 $ par mois. Il considérait ce montant comme légèrement inférieur à celui de Forest Green. Dans sa preuve orale, M. McConnell n'a pas contesté qu'il convenait d'effectuer un rajustement à l'égard de l'emplacement, mais il n 'a pas fourni de rajustement précis.


[93]            Quant aux frais des services d'aqueduc et d'égout, le rapport de M. McConnell faisait mention de frais mensuels de 23,89 $. On ne sait pas trop d'où provenait ce montant et il n'a pas été question de sa source lors de la présentation de la preuve orale. Avec égards, cette question, qui semble peu importante, montre que la preuve n'est pas satisfaisante. La méthode de facturation de la défenderesse, pour les services d'aqueduc et d'égout, était appropriée, mais je suis complètement dans l'ignorance pour ce qui est du montant mensuel réel (et exact) à cet égard. Dans la preuve soumise par M. Langdon, et plus précisément les pièces D23 et D24, les montants trimestriels étaient calculés et le total obtenu était d'environ 22,80 $ par mois. Le rapport Fortin faisait mention d'un montant mensuel de 29,41 $. Monsieur Grant a utilisé un montant mensuel de 25 $ dans ses calculs, et les totaux obtenus par M. Seabrook, pièce J2 onglet 80, sont de 24,87 $ par mois. Selon les états de rajustements de 1999 (la date de révision était le 1er mars 2000), les frais mensuels des services d'aqueduc et d'égout étaient de 32,16 $. Au mieux, je dispose d'un éventail dans lequel se situent les frais de services d'aqueduc et d'égout.


[94]            Après avoir calculé un montant mensuel de 405 $, M. McConnell a encore une fois procédé à un rajustement à la baisse en vue de tenir compte de l'obligation qui incombait aux sous-locataires de payer (indépendamment) les impôts fonciers levés sur leurs lots. À cet égard, M. McConnell a avec raison tenu compte des impôts applicables au lot, à l'exclusion de ceux qui se rapportaient à la maison. Toutefois, ce faisant, il a utilisé les impôts nets, déduction faite de l'aide financière accordée au propriétaire. L'explication qu'il a donnée à ce sujet ne me satisfait pas. Monsieur McConnell convenait que, dans le parc Forest Green, les impôts bruts se rapportant au terrain étaient inclus dans les dépenses payées par les locataires. Les efforts qu'il a faits pour rationaliser la méthode des impôts nets qu'il avait employée, en disant qu'un loyer brut était en cause, n'étaient pas convaincants et laissaient à désirer. L'aide financière accordée au propriétaire s'applique à la résidence plutôt qu'au terrain, et je ne puis voir aucune justification permettant de traiter les sous-locataires, au Country Park, d'une façon différente de ceux de Forest Green, étant donné en particulier que M. McConnell a affirmé avec insistance que les parcs étaient fort similaires. Les états de rajustements de 1999 indiquaient un montant de 25,57 $ pour les lots ordinaires et pour les demi-lots. La question de savoir si ce montant est exact pour les impôts fonciers applicables au lot à la date de révision demeure à mes yeux un mystère.

[95]            Monsieur McConnell a bien fait mention des dépenses liées aux zones communes, qu'il a présentées dans son rapport telles qu'elles lui avaient été présentées. J'aurai d'autres remarques à faire au sujet des coûts liés aux zones communes lorsque j'examinerai la question des dépenses additionnelles. Pour les besoins de mon analyse, il n'est pas nécessaire de déterminer précisément le montant. Les parties ont indiqué qu'elles ne s'attendent pas à ce que j'effectue les calculs, à condition que je détermine ce sur quoi elles peuvent se fonder pour procéder aux calculs nécessaires. Étant donné les divergences et les incertitudes qui ont été relevées dans la preuve, il est difficile d'arriver à une détermination précise. J'ai donc énoncé, comme on me l'a demandé, les conclusions factuelles permettant d'effectuer les calculs précis.


[96]            Comme il en a déjà été fait mention, M. McConnell n'a pas effectué de rajustement à l'égard d'un emplacement précis (pour tenir compte de la différence existant entre Chilliwack et Langley, qui est à proximité de Vancouver), mais il n'a pas contesté qu'il était possible de procéder à un tel rajustement. Sur ce point, je retiens la preuve de M. Grant selon laquelle, logiquement et selon les statistiques indiscutables qui s'appliquent sur une longue période, les prix montent en fonction des déplacements vers une grosse région métropolitaine. Selon la preuve portée à ma connaissance, le rajustement à effectuer à l'égard de l'emplacement devrait être de 38 p. 100, soit le chiffre utilisé par M. Grant, compte tenu des données relatives aux ventes de résidences unifamiliales et des données relatives à la location de la SCHL qui ont été jointes au rapport de M. McConnell, indiquant un rajustement de 25 p. 100. En l'absence d'une meilleure preuve, je choisis le point qui se situe à mi-chemin entre les deux comme rajustement applicable aux emplacements et je conclus que le rajustement devrait être de 31,5 p. 100.

[97]            Le loyer de 482 $, à Forest Green, constitue le point de départ, un rajustement à la baisse de 31,5 p. 100 devant être effectué pour l'emplacement. Il faut procéder à d'autres rajustements à la baisse pour les impôts fonciers, les services d'aqueduc et d'égout et les coûts liés aux zones communes (conformément aux conclusions que j'ai tirées sur ces points). Le loyer de base mensuel devrait être de 230 à 240 $, compte tenu des coûts réels associés aux zones communes. Ce résultat est obtenu à l'aide de l'estimation figurant dans le rapport de M. McConnell, une fois effectués les rajustements nécessaires selon mes conclusions.

[98]            Je note que l'on arrive à un résultat remarquablement similaire lorsqu'il est tenu compte de la pièce D33, dans laquelle le loyer, à Forest Green, est composé d'un loyer de base mensuel de 360 $ et de frais mensuels d'entretien de 122 $. Si l'on rajuste le loyer de base, à Forest Green, pour tenir compte de l'emplacement, on obtient un loyer de base mensuel de 236,69 $ au Country Park. En se reportant à l'estimation du juste loyer économique que M. Grant a effectuée au moyen de la technique de la parité, on obtient un juste loyer économique (de base) de 215 $. Toutefois, si la déduction relative au stationnement destiné aux véhicules de plaisance de 25 $ (question sur laquelle je reviendrai ci-dessous dans ces motifs) est rajoutée, ce juste loyer économique est de 240 $.


[99]            Comme il en a ci-dessus été fait mention, les divergences entre les évaluations ne sont pas aussi sérieuses qu'elles semblent l'être à première vue. Je conclus donc que le juste loyer économique, c'est-à-dire le loyer de base, se situe entre 230 et 240 $ par mois pour un lot ordinaire, selon les calculs effectués aux fins des rajustements à la baisse (compte tenu des montants exacts établis conformément aux conclusions tirées dans ces motifs) et des montants réels liés aux coûts additionnels ou aux coûts associés aux zones communes. Je retiens la preuve soumise par M. McConnell, à savoir que les loyers applicables aux demi-lots correspondraient à 75 p. 100 de ceux des lots ordinaires. Le juste loyer économique mensuel pour un demi-lot se situera donc probablement entre 172,50 $ et 180 $ compte tenu, encore une fois, des coûts additionnels réels ou des coûts réels associés aux zones communes.

LE SUPPLÉMENT DE LOYER

[100]        La conclusion selon laquelle le juste loyer économique est le loyer de base exige que l'on détermine le supplément de loyer ou (lorsque les impôts fonciers et les frais des services d'aqueduc et d'égout sont exclus), les dépenses liées aux zones communes et à l'entretien. Au début de l'instruction, les parties ont soumis leurs comptes rendus comptables respectifs au sujet de ces coûts. La divergence entre les calculs alors soumis peut avec justesse être qualifiée d'astronomique.


[101]        À l'instruction, au fur et à mesure que la preuve a été soumise, il est devenu évident à mes yeux que les divergences étaient en bonne partie attribuables à un malentendu et à une mauvaise communication. Par conséquent, lorsque les avocats ont traité de la question du supplément de loyer dans leurs conclusions orales finales, je leur ai proposé d'entamer d'autres discussions et de tenter de s'entendre et de remédier aux mauvaises communications. Je les ai également informés que, tant que les motifs de jugement et le jugement n'étaient pas prononcés, il n'était pas trop tard pour résoudre les questions qui se posaient encore. Le supplément de loyer (comportant un compte rendu comptable de base pour les dépenses désignées sur un certain nombre d'années) constituait, à mon avis, un exemple d'un différend qui se prêtait davantage à un règlement à l'amiable qu'à une décision judiciaire. Les avocats ont convenu d'entamer d'autres discussions comme je leur avais proposé de le faire.

[102]        Lorsque les conclusions écrites finales ont été reçues, l'avocat des demandeurs a fait savoir que les parties avaient réduit les montants contestés à 20 000 $ et qu'il était peut-être possible de s'entendre sur un autre chiffre. Le 2 avril 2004, les avocats des parties, dans des lettres distinctes, ont informé la Cour qu'ils étaient arrivés à une entente sur les questions comptables relatives aux coûts communs pour les années 1995 à 2002. La seule question qu'il restait à régler pour qu'ils puissent arriver à un règlement final de l'affaire se rapportait à la détermination du nombre approprié de sites pour les années en question.

[103]        Je tiens à louer les avocats pour leur persistance et les tentatives qu'ils ont faites et je les remercie de m'avoir promptement informée du résultat de leurs efforts.


[104]        Quant à la question qu'il reste à régler - le nombre total de sites - les demandeurs soumettent leurs prétentions au sujet du sens à attribuer aux mots [TRADUCTION] « part au pro rata du sous-locataire » figurant au sous-alinéa 3.02(ii) du sous-bail. Cette argumentation a déjà été résumée sous le titre « Frais liés aux services d'aqueduc et d'égout » et n'a pas à être ici reprise.

[105]        Le raisonnement que j'ai fait au sujet de la question des services d'aqueduc et d'égout s'applique également aux dépenses liées aux zones communes, à une exception près. À cause de l'entente de viabilisation, j'ai conclu que les frais des services d'aqueduc et d'égout étaient basés sur l'utilisation. Il n'en va pas de même pour les dépenses liées aux zones communes. La différence, en ce qui concerne les dépenses liées aux zones communes, est que l'occupation des lots viabilisés n'est pas pertinente. Bref, la part au pro rata des dépenses liées aux zones communes ne se rapporte pas aux lots occupés, mais elle se rapporte plutôt aux lots viabilisés. Toutefois, cela n'a aucun rapport avec le nombre total de lots dont la mise en valeur a été autorisée.

[106]        Un exemple hypothétique illustre la façon dont la part au pro rata, pour les dépenses liées aux zones communes, est déterminée. S'il y a 48 lots viabilisés et si 30 lots sont occupés, la part au pro rata des dépenses communes correspond à 1/48. La défenderesse CPV doit prendre en charge les dépenses liées aux zones communes pour les 18 lots qui sont mis en valeur, mais qui ne sont pas encore occupés. C'est le risque que les promoteurs doivent courir lorsque leurs lotissements sont prêts à être occupés, mais qu'ils ne le sont pas encore. Ce risque ne peut pas retomber sur les épaules des sous-locataires du Country Park qui se sont déjà installés sur les lieux.


[107]        D'un autre côté, ces mêmes sous-locataires ne peuvent bénéficier d'un avantage injuste en invoquant le nombre autorisé de lots et en affirmant que leur part des dépenses liées aux zones communes devrait être de 1/110 ou 1/120 parce que, en fin de compte, c'est ce nombre de lots qui existera. Le promoteur supporterait alors un fardeau disproportionné.

[108]        Les dépenses liées aux zones communes sont engagées à l'égard des zones qui sont mises en valeur ou viabilisées. Elles ne sont pas engagées pour des zones qui ne sont pas encore mises en valeur. Par conséquent, la part au pro rata des dépenses liées aux zones communes est le numérateur 1 sur [TRADUCTION] « le dénominateur, [représentant] le nombre de lots dont les terres sont composées en vue de la sous-location » (non souligné dans l'original), c'est-à-dire le nombre de lots viabilisés (non autorisés).

[109]        Il faut s'arrêter à une autre question dont il n'a pas été fait mention dans la lettre du 2 avril 2004, et ce, au cas où l'omission de le faire susciterait de la confusion ou de l'incertitude. Il s'agit de l'interprétation à donner au sous-alinéa 3.02(ii) du sous-bail, dont la partie pertinente est ici reproduite pour mémoire :


[TRADUCTION] Dans les 60 jours qui suivront le 1er janvier, le sous-locateur procédera à une détermination finale de la part au pro rata payable par le sous-locataire pour l'année civile précédente ou pour une partie de l'année civile précédente le cas échéant, et remettra un état de compte au sous-locataire. Si la part au pro rata payable par le sous-locataire excède le total des versements que celui-ci a effectués au cours de l'année civile précédente, ou d'une partie de l'année civile précédente le cas échéant, le sous-locataire versera l'excédent au sous-locateur dans les trente (30) jours suivant la date de la signification de l'état. Si la somme des versements mensuels effectués par le sous-locataire au cours de l'année civile précédente, ou d'une partie de l'année civile précédente le cas échéant, excède la part au pro rata payable par le sous-locataire, le sous-locateur remettra l'excédent au sous-locataire dans les trente (30) jours suivant la date de la signification de l'état. [...]

[110]        Je note les prétentions de la défenderesse selon lesquelles il existe une distinction entre l'obligation pour CPV de rendre compte et l'obligation des sous-locataires de payer. Je me rends également compte que le résultat sera peut-être finalement le même, et ce, que les demandeurs paient un loyer brut ou un loyer de base plus un supplément de loyer.

[111]        Toutefois, comme il en a déjà été fait mention, la relation entre les demandeurs et la défenderesse est régie par le sous-bail et par les dispositions qui y figurent. Or, le sous-bail a été préparé à la demande de la défenderesse. J'ai conclu que le juste loyer économique est le loyer de base et je l'ai fait en me fondant sur une analyse contextuelle. Ceci dit, il incombe à la défenderesse de rendre compte chaque année, comme l'exige le sous-alinéa 3.02(ii) du sous-bail, des frais énumérés au sous-alinéa 3.02(i).

ENTREPOSAGE DES VÉHICULES DE PLAISANCE

[112]        À l'instruction, on a consacré énormément de temps à cette question. J'ai l'intention de la régler d'une façon plus sommaire. En résumé, divers demandeurs ont témoigné que M. Eden leur avait dit ou que les annonces qui avaient paru dans les journaux ou les brochures de promotion disaient que Country Park offrait gratuitement un stationnement pour les véhicules de plaisance. Deux demandeurs ont conclu des contrats prévoyant expressément l'entreposage des véhicules de plaisance.


[113]        Les demandeurs ne possédaient pas tous des véhicules de plaisance et certains demandeurs avaient vendu leur véhicule de plaisance avant que le litige les opposant à la défenderesse pour ce qui est de la location eût pris naissance. Les demandeurs qui possédaient des véhicules de plaisance les ont garés dans l'aire d'entreposage affectée à cette fin au Country Park, sans frais, jusqu'au mois d'avril 2002. Le 29 avril 2002, M. Eden a écrit à ces demandeurs pour les informer de ce qui suit :

[TRADUCTION] Comme vous le savez, l'entreposage des véhicules de plaisance a jusqu'à maintenant été gratuit. Puisque vous ne payez pas le juste loyer économique fixé le 1er mars 2000 et que le supplément de loyer est impayé, nous devons cesser de vous offrir ce service.

Nous ne sommes plus prêts à prendre à notre charge les frais d'entreposage des véhicules de plaisance. À compter du 1er mai 2002, des frais annuels de 450 $ seront exigés pour l'entreposage des véhicules de plaisance.

Veuillez payer au complet le montant de 450 $ au plus tard le 15 mai 2002. Si vous décidez de ne pas entreposer votre véhicule de plaisance, veuillez l'enlever des lieux au plus tard le 31 mai 2002. Si aucun paiement n'est effectué à cette date, nous prendrons des dispositions pour faire enlever le véhicule à vos frais.

[114]        Il était fait mention du [TRADUCTION] « supplément de loyer impayé » parce que les demandeurs avaient obtenu une réparation interlocutoire de la Cour. Seuls les demandeurs dans la présente action ont reçu l'avis susmentionné. D'autres sous-locataires (qui ne sont pas demandeurs) ont continué à garer sans frais leurs véhicules de plaisance dans l'aire d'entreposage pour les véhicules de plaisance, au Country Park. Je considère la mesure prise par M. Eden à cet égard comme une tentative visant à contourner l'ordonnance rendue par la Cour; j'estime que l'attitude de M. Eden est déplorable.


[115]        À l'instruction, M. Eden a admis, apparemment pour la première fois, qu'il avait promis de fournir aux sous-locataires, au Country Park, un stationnement pour les véhicules de plaisance, et ce, sans frais, à condition qu'il y ait de la place. Or, aucun élément de preuve ne donne à entendre que le nombre de places ait posé ou posera un problème.

[116]        À part les personnes dont les contrats prévoient un stationnement pour les véhicules de plaisance, la position des demandeurs est que chacun d'eux a droit à une place dans l'aire d'entreposage pour les véhicules de plaisance, et ce, peu importe à qui appartient le véhicule. À l'appui de leur position, ils affirment qu'il existe un contrat accessoire qui est valide et obligatoire. Ils se fondent en outre sur la pratique passée.


[117]        La défenderesse maintient que toute disposition relative à l'entreposage gratuit des véhicules de plaisance offert aux demandeurs constitue un contrat accessoire non exécutoire. En se fondant sur les contrats d'achat, de vente et de location, CPV affirme que chacun renferme une clause [TRADUCTION] « exhaustive » qui prévoit [TRADUCTION] qu' « aucune déclaration, garantie, promesse ou entente n'existe à part celles qui sont ci-dessus prévues » . Les ententes types applicables dans l'industrie sont rédigées en des termes similaires. Ces ententes ne contiennent aucune disposition relative au stationnement des véhicules de plaisance. Étant donné que tous les demandeurs sauf deux ont signé des ententes contenant pareille disposition, la défenderesse a le droit de s'appuyer sur ces ententes parce que le libellé de la clause en question est clair et non ambigu. Selon la position prise par CPV, [TRADUCTION] « si la Cour conclut que le juste loyer économique au 1er mars 2000 fixé par Country Park Village était approprié et si tous les arriérés sont payés, chaque locataire qui a payé des frais d'entreposage pour un véhicule de plaisance se verra accorder un crédit à ce montant à valoir sur ses arriérés individuels » .

[118]        Je suis portée à croire que c'est la notion de contrat unilatéral qui s'applique à la situation qui nous occupe plutôt que celle de contrat accessoire. Toutefois, selon moi, il n'est pas nécessaire de se reporter à l'une ou l'autre de ces notions. Je me fonderai plutôt sur les dispositions du bail principal et du sous-bail pour régler la question.

[119]        En vertu de l'article 23.6 du bail principal, le locataire exécute uniquement les travaux qui sont prévus dans le plan de lotissement et que le ministre a autorisés. L'article 13 du bail principal, intitulé [TRADUCTION] « Utilisation des lieux » , définit les fins auxquelles les terres peuvent être utilisées. Or, les terres doivent principalement être utilisées aux fins de la construction, de l'exploitation et du maintien d'un ensemble résidentiel composé entièrement de maisons préfabriquées. Les fins accessoires habituellement associées à pareil ensemble sont également permises.


[120]        La première entente modificatrice, enregistrée le 5 mars 1993, laquelle avait pris effet le 15 octobre 1992, englobait dans les [TRADUCTION] « fins accessoires » un centre de loisir et une zone d'entreposage pour les véhicules de plaisance. Or, ces ajouts ne font pas partie d'une propriété qui est composée [TRADUCTION] « entièrement de maisons préfabriquées » . Ils font partie de la propriété aménagée à des fins accessoires, comme c'est également le cas pour l'étang, le pont pour piétons et la fontaine, le kiosque, le stationnement pour les visiteurs, l'allée piétonnière et le putting green dont Mme Houlden a fait mention. Le centre de loisir et l'aire d'entreposage pour les véhicules de plaisance font partie des zones communes.

[121]        L'article 5.01 du sous-bail exige que le sous-locataire utilise ou occupe tout ou partie des lieux loués uniquement à des fins résidentielles et uniquement conformément aux règles et règlements joints à l'annexe C. Or, l'alinéa 1m) de l'annexe C interdit le stationnement des véhicules de plaisance sauf à l'endroit désigné à cette fin par le locateur. Selon l'article 15.07, les obligations du sous-locateur ou du sous-locataire qui sont stipulées dans le sous-bail sont considérées comme des engagements, et ce, même si elles ne sont pas libellées sous forme d'engagement.

[122]        Les engagements pris par le sous-locateur sont définis à l'article 9 du sous-bail. L'article 9.01 est ainsi libellé :

[TRADUCTION] Le sous-locataire qui paie le loyer prévu dans les présentes et respecte les engagements stipulés dans les présentes aura la possession et la jouissance paisibles des lieux loués et aura le droit avec les autres sous-locataires et les invités du sous-locateur d'utiliser les zones communes pour la durée du présent sous-bail sans interruption et sans trouble de jouissance de la part du sous-locateur ou de ses ayants droit, sauf aux conditions prévues dans les présentes. (Non souligné dans l'original)

[123]        À mon avis, l'article 9.01 est déterminant. CPV doit assurer à ses sous-locataires l'accès à l'aire d'entreposage pour les véhicules de plaisance et elle doit le faire sans exiger de frais additionnels. Toutefois, cela ne veut pas pour autant dire qu'il y a suffisamment de places pour tous les sous-locataires, sans restriction aucune. Il est raisonnable de supposer, en se fondant sur le contrat, que pour obtenir une place, le sous-locataire doit posséder un véhicule de plaisance.


[124]        Quant aux demandeurs qui ont censément vendu leurs véhicules de plaisance ou qui les ont garés ailleurs parce que M. Eden exigeait des frais de stationnement, la preuve soumise n'est pas suffisante pour établir ces allégations. Des affirmations générales à l'emporte-pièce telles que [TRADUCTION] « je l'ai vendu parce que je n'avais pas les moyens de le conserver » ou [TRADUCTION] « je n'avais pas les moyens de le garer là » , sans plus, ne suffisent pas. Il faut un certain degré de précision. Une demanderesse a témoigné qu'elle payait plus ailleurs pour garer son véhicule de plaisance qu'elle n'aurait payé pour le garer au Country Park. Cette demanderesse a fait un choix qu'il lui appartenait de faire et elle doit subir les conséquences qui en résultent.

[125]        Je ne suis pas prête à élargir la portée de ma conclusion au-delà de ce que j'ai déjà dit. CPV est obligée de fournir aux sous-locataires qui possèdent des véhicules de plaisance et qui n'ont pas omis de payer leur loyer un stationnement dans l'aire d'entreposage pour les véhicules de plaisance, et ce, sans frais additionnels. Je m'empresse d'ajouter que, conformément à une ordonnance de la Cour et en attendant l'issue de litige, les sous-locataires qui paient moins que ce que M. Eden considère comme le juste loyer économique ne sont pas en défaut.

CONCLUSION

[126]        Cela règle les questions en litige. En résumé, mes conclusions sont ci-après énoncées :

1.          L'expression « juste loyer économique » figurant dans le sous-bail conclu entre les parties s'entend du loyer de base.


2.          Le loyer fixé par la défenderesse en 1996 était le juste loyer économique.

3.          La méthode que la défenderesse a employée pour recouvrer les frais des services d'aqueduc et d'égout n'est pas inappropriée.

4.          Au 1er mars 2000, le juste loyer économique, pour un lot ordinaire, se situait entre 230 et 240 $ par mois, selon les calculs effectués aux fins des rajustements à la baisse, compte tenu des montants exacts établis conformément aux conclusions tirées dans ces motifs et des montants réels liés aux coûts additionnels ou aux coûts associés aux zones communes.

5.          Au 1er mars 2000, le juste loyer économique pour un demi-lot se situait entre 172,50 $ et 180 $ par mois, compte tenu des coûts additionnels réels ou des coûts réels associés aux zones communes.

6.          Conformément au sous-alinéa 3.02(ii) du sous-bail, la défenderesse est tenue de rendre compte chaque année des frais énumérés au sous-alinéa 3.02(i).

7.          La défenderesse est tenue de fournir sans frais supplémentaires aux sous-locataires qui possèdent un véhicule de plaisance et qui n'ont pas omis de payer leur loyer un stationnement dans l'aire d'entreposage pour les véhicules de plaisance.

[127]        Pour en revenir aux plaidoiries, les demandeurs obtiendront, en vertu d'une ordonnance distincte, une déclaration faisant état des conclusions mentionnées ci-dessus aux numéros 1, 4, 5, 6 et 7.


[128]        Le succès est partagé, mais les demandeurs ont eu gain de cause sur presque tous les points. La Cour encourage les avocats à tâcher de régler à l'amiable la question des dépens. En l'absence de règlement, les avocats devront signifier et déposer des observations écrites dans les 60 jours qui suivront la date du jugement. Les réponses devront être signifiées et déposées dans les 10 jours de la signification des premières observations, ou dans les 70 jours qui suivront la date du jugement, au gré des avocats. Je demeure saisie de l'affaire pour ce qui est de la détermination de la question des dépens.

« Carolyn A. Layden-Stevenson »

Juge

Ottawa (Ontario)

le 13 avril 2004

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                                                             COUR FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                     T-1849-01

INTITULÉ :                                                    Ted Aird et al.

c.

Country Park Village Properties (Mainland) Ltd.

LIEU DE L'AUDIENCE :                              Vancouver (Colombie-Britannique)

DATE DE L'AUDIENCE :                            du 27 janvier au 12 février 2004

OBSERVATIONS ÉCRITES

FINALES :                                                      le 19 février 2004

OBSERVATIONS PRÉSENTÉES

PAR LES DEMANDEURS

EN RÉPONSE :                                              le 24 février 2004

OBSERVATIONS ÉCRITES

ADDITIONNELLES :                                   le 2 avril 2004

MOTIFS DU JUGEMENT :                         la juge Layden-Stevenson

DATE DES MOTIFS :                                  le 13 avril 2004

COMPARUTIONS :

Ian D. MacKinnon                                             POUR LES DEMANDEURS

Bianca Scheirer

George E.H. Cadman, c.r.                                 POUR LA DÉFENDERESSE

John Mostowich

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Robertson, Downe et Mullally                            POUR LES DEMANDEURS

Abbotsford (Colombie-Britannique)

Boughton, Peterson, Yang, Anderson                 POUR LA DÉFENDERESSE

Vancouver (Colombie-Britannique)

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