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Date : 20010126

Dossier : IMM-2113-99

OTTAWA (ONTARIO), le 26 janvier 2001

EN PRÉSENCE DE Mme le juge Dolores M. Hansen

ENTRE :        

                                                                     YI ZHOU

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

                                                              ORDONNANCE

VUla demande de contrôle judiciaire de la décision de l'agent des visas, en date du 19 mars 1999, qui rejetait la demande de résidence permanente au Canada de la demanderesse;

AYANT lu la documentation déposée et entendu les plaidoiries des parties;

ETpour les motifs d'ordonnance délivrés ce jour;

LA COUR ORDONNE QUE :


1)    La demande de contrôle judiciaire est accueillie et la décision du 19 mars 1999 est annulée, la question étant renvoyée pour nouvel examen par un agent des visas différent.

2)    Il n'y aura pas de question certifiée.

       Dolores M. Hansen         

J.C.F.C.                   

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.


                                                                                                                                                          

Date : 20010126

Dossier : IMM-2113-99

ENTRE :        

                                                                     YI ZHOU

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE HANSEN

[1]                 La présente demande, introduite en vertu de l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7 (la Loi), sollicite le contrôle judiciaire de la décision du 19 mars 1999 de l'agent des visas Warren K. Apesland, du consulat général du Canada à Los Angeles, qui rejetait la demande de résidence permanente au Canada présentée par la demanderesse.

Le contexte


[2]                 La demanderesse est une Chinoise qui réside aujourd'hui aux États-Unis. Elle a demandé le droit de résider en permanence au Canada dans la catégorie des immigrants indépendants. Elle désirait être évaluée sous la Classification nationale des professions, comme microbiologiste (CNP 2121.2), profession qui comprend celle d'histologiste.

[3]                 Selon la documentation présentée à l'appui de sa demande, elle est une histologiste qualifiée et d'expérience, ayant travaillé en recherche scientifique dans les domaines de l'histologie et de l'embryologie. Au moment de sa demande, elle occupait le poste non rémunéré de chargée de recherche à la division d'oncologie du centre des sciences de la santé de l'Université du Texas.

[4]                 Sa demande a été rejetée au motif qu'elle n'avait pas obtenu suffisamment de points pour se qualifier comme immigrante au Canada. Elle n'a reçu que 66 points sur les 70 requis.

[5]                 L'agent des visas lui a accordé deux points sur quinze pour la connaissance de l'anglais, ayant constaté qu'elle avait [traduction] « de la difficulté à lire et à écrire l'anglais » . Il lui a accordé quatre points sur dix pour la personnalité, [traduction] « parce que, selon moi, vous auriez de la difficulté à vous trouver un emploi dans votre discipline étant donné vos connaissances linguistiques limitées... » .


[6]                 Dans cette demande de contrôle judiciaire, la demanderesse soulève deux questions. La première question porte sur la valeur et l'équité de l'examen linguistique utilisé par l'agent des visas. La deuxième question vise à faire déterminer si l'agent des visas a commis une erreur de droit en « comptant deux fois » les faiblesses linguistiques de la demanderesse lorsqu'il a évalué sa personnalité.

[7]                 La demanderesse déclare que l'entrevue a eu lieu à travers une paroi de plastique transparent et que le micro, qui était le seul moyen de communication, était défectueux. Elle déclare qu'à cause de cette défectuosité, l'agent des visas a dû lui demander de répéter ce qu'elle disait. Elle déclare aussi qu'elle a dû demander à l'agent des visas des répéter ses questions. Bien que la demanderesse ait souscrit un affidavit à ce sujet, l'agent des visas a aussi souscrit un affidavit où il déclare ne pas se souvenir d'avoir eu des difficultés avec le micro, non plus que la demanderesse aurait fait mention de telles difficultés au cours de l'entrevue. Rien au dossier ne fait état d'une défectuosité du micro.

[8]                 Pour mesure la capacité de lecture en anglais de la demanderesse, l'agent des visas lui a demandé de lire à haute voix un passage du formulaire de visa. L'affidavit de l'agent des visas porte que [traduction] « ...la demanderesse prononçait mal certains mots, ne pouvait prononcer du tout certains autres mots, et j'ai constaté des problèmes d'articulation et de syntaxe... » . La demanderesse admet avoir eu de la difficulté à prononcer certains mots non familiers, mais elle a déclaré qu'elle comprenait ce qu'elle lisait. L'agent des visas ne parle pas du tout de la compréhension.


[9]                 Pour mesurer sa capacité d'écriture en anglais, l'agent des visas lui a dicté un court paragraphe à écrire. L'affidavit de l'agent des visas porte que [traduction] « ...en examinant le texte écrit par la demanderesse, j'ai constaté qu'il y avait plus de dix erreurs dans trois phrases. Il y avait des erreurs d'épellation, des erreurs de ponctuation, des mots qui manquaient et des mots incorrects... » (dossier du défendeur, page 2, paragraphe 7).

[10]            La demanderesse soutient que l'agent des visas ne lui a pas donné l'occasion de démontrer sa vraie connaissance de l'anglais, qui doit être évaluée selon le Guide d'évaluation linguistique de Citoyenneté et Immigration Canada. La demanderesse avait déclaré dans sa demande qu'elle parlait, lisait et écrivait l'anglais avec facilité.

[11]            Le Guide d'évaluation linguistique définit comme suit ce qui constitue parler, lire et écrire « avec facilité » (dossier de demande, affidavit d'Echo Hu, pièce B, onglet 4) :

Aptitude/

niveau

Parler

Lire

Écrire

Avec facilité :

Le demandeur peut comprendre et communiquer effectivement sur des sujets généraux variés.

Le demandeur peut comprendre presque tous les documents d'une nature générale et non abstraite.

Le demandeur peut écrire un compte rendu ou un exposé sommaire portant sur ses études, son travail ou ses antécédents sociaux.


[12]            La demanderesse soutient que le test d'écriture administré par l'agent des visas ne mesure pas la [traduction] « capacité à communiquer par écrit dans un contexte social, d'étude ou de travail » comme le prévoit le Guide, mais uniquement la capacité de transcrire un texte dicté. Comme tel, il ne pouvait évaluer correctement et équitablement sa capacité d'écrire l'anglais comme le prévoit le Guide d'évaluation linguistique. Bien que ce Guide ne lie pas les agents des visas, il doit avoir pour objectif de les aider à évaluer les demandeurs de façon conséquente. De la même façon, le test de lecture n'a pas mesuré sa compréhension.

[13]            Dans Shan Wang c. Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration [2000], J.C.F. no 1554, dossier no IMM-2904-99, où l'on a plaidé dans un contexte semblable que la méthode employée par l'agente des visas pour mesurer la capacité de la demanderesse à lire et à écrire l'anglais n'était pas raisonnable, le juge Sharlow déclare ceci (au paragraphe 12) :

L'agente des visas a mesuré semble-t-il la capacité de lecture de la demanderesse en lui faisant lire à haute voix la déclaration solennelle apparaissant sur le formulaire de demande. Il semble que la demanderesse n'a pas été priée de dire si elle comprenait les mots qu'elle devait lire. L'agente des visas a mesuré la capacité d'écriture de la demanderesse en lui demandant d'écrire quelque chose dicté par elle. La demanderesse n'a pas été priée d'écrire des phrases qui auraient permis à l'agente des visas de dire si elle était en mesure de communiquer par écrit en anglais. Eu égard aux pièces versées dans le dossier, il m'est impossible d'affirmer que la manière dont l'agente des visas a évalué la connaissance qu'avait la demanderesse de la langue anglaise était raisonnable.

[14]            Je ne suis pas convaincue que les tests qui ont été utilisés permettent de constater réellement quelle est la capacité de la demanderesse à « ...écrire un compte rendu ou un exposé sommaire portant sur ses études, son travail ou ses antécédents sociaux » . Je note aussi que les erreurs dans la transcription faite par la demanderesse pourraient aussi correspondre au fait qu'elle n'entendait pas bien.


[15]            Même si la Cour était persuadée que l'approche utilisée par l'agent des visas pour évaluer la capacité de lire l'anglais et d'écrire en anglais de la demanderesse était efficace, elle ne peut examiner l'aspect raisonnable de son évaluation étant donné que les textes originaux que la demanderesse devait lire ou transcrire n'ont pas été versés au dossier.

[16]            En l'absence du document que l'agent des visas a dicté, il est impossible de savoir si l'original ne comportait pas des erreurs, et encore moins d'évaluer l'aspect raisonnable de sa conclusion quant à l'importance des divergences entre la transcription de la demanderesse et l'original.

[17]            Par conséquent, je ne suis pas convaincue que l'agent des visas a correctement ou équitablement évalué la capacité de la demanderesse en langue anglaise, même sans aborder la question de savoir si oui ou non le micro était défectueux et constituait un obstacle à une communication efficace.

[18]            Étant donné cette conclusion, il n'est pas nécessaire que je me penche sur le deuxième motif invoqué par la demanderesse dans le cadre du présent contrôle judiciaire.


[19]            En conséquence, la demande de contrôle judiciaire est accueillie et la décision datée du 19 mars 1999 est annulée, la question étant renvoyée pour nouvel examen par un agent des visas différents.

                                                                                   Dolores M. Hansen            

                                                                                                      J.C.F.C.                      

OTTAWA, ONTARIO

Le 26 janvier 2001

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :                                IMM-2113-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :             Yi Zhou c. Le ministre de la

Citoyenneté et de l'Immigration

LIEU DE L'AUDIENCE :                   Vancouver (C.-B.)

DATE DE L'AUDIENCE :                 le 4 juillet 2000

MOTIFS DE JUGEMENT DE Mme LE JUGE HANSEN

EN DATE DU :                                     26 janvier 2001

ONT COMPARU

M. Rudolf Kischer                                                             POUR LA DEMANDERESSE

Mme Helen Park                                                                 POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

M. Rudolf Kischer                                                             POUR LA DEMANDERESSE

Vancouver (C.-B.)

M. Morris Rosenberg                                        POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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