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Date : 19990729


Dossier : IMM-570-99



ENTRE :

     MOHAMMED REZA MALEKI,



     demandeur,

     et



     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     défendeur.



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

     (prononcés à l'audience à Toronto (Ontario), le

jeudi 29 juillet 1999)


LE JUGE LINDEN :


[1]      Le demandeur, qui avait vu sa revendication de statut de réfugié refusée, mais qui n'avait pas encore été expulsé, a demandé à être admis dans la catégorie des immigrants visés par une mesure de renvoi à exécution différée (programme DROC). C'est la décision prise suite à cette demande qui est soumise au contrôle judiciaire en l'instance. Suite à une rencontre avec des représentants du ministère de la Citoyenneté, le demandeur a reçu une lettre rejetant sa demande de statut en vertu du programme DROC. Cette lettre, qui fait l'objet de la présente demande, est rédigée comme suit dans la partie qui est pertinente en l'instance :

         [traduction]

         En 1990, vous avez été trouvé coupable d'être entré illégalement en Grèce et condamné à 14 mois d'emprisonnement. Cette infraction, si elle avait été commise au Canada, est une infraction prévue à l'article 94 de la Loi sur l'immigration, qui est une loi fédérale. En conséquence, vous faites partie d'une catégorie non admissible au Canada en vertu de l'alinéa 19(2)a.1) de la Loi sur l'immigration et votre demande de résidence permanente est rejetée.1


[2]      Il y a deux dispositions législatives qui sont pertinentes en l'instance. L'alinéa 19(2)(a.1) de la Loi sur l'immigration2 (la Loi) est rédigé comme suit :

Appartiennent à une catégorie non admissible les immigrants et, sous réserve du paragraphe (3), les visiteurs qui : [...]
a.1) sont des personnes dont il y a des motifs raisonnables de croire qu'elles ont, à l'étranger
     (i) soit été déclarées coupables d'une infraction qui, si elle était commise au Canada, constituerait une infraction qui pourrait être punissable, aux termes d'une loi fédérale, par mise en accusation, d'un emprisonnement maximal de moins de dix ans, sauf si elles peuvent justifier auprès du ministre de leur réadaptation et du fait qu'au moins cinq ans se sont écoulés depuis l'expiration de toute peine leur ayant été infligée pour l'infraction,
     (ii) soit commis un fait " acte ou omission " qui constitue une infraction dans le pays où il a été commis et qui, s'il était commis au Canada, constituerait une infraction qui pourrait être punissable, aux termes d'une loi fédérale, par mise en accusation, d'un emprisonnement maximal de moins de dix ans, sauf si elles peuvent justifier auprès du ministre de leur réadaptation et du fait qu'au moins cinq ans se sont écoulés depuis la commission du fait ...

Le paragraphe 94(1) de la Loi est rédigé comme suit :

94. (1) Commet une infraction quiconque :
a) pénètre au Canada sans passer par un point d'entrée et sans se présenter à un agent d'immigration pour l'interrogatoire visé au paragraphe 12(1);
b) entre au Canada ou y demeure soit sur la foi d'un passeport, visa " ou autre document relatif à son admission " faux ou obtenu irrégulièrement, soit par des moyens frauduleux ou irréguliers ou encore par suite d'une fausse indication sur un fait important [...]

[3]      Bien que l'alinéa 19(2)a.1) n'exige pas qu'on fasse la preuve d'une équivalence parfaite, les éléments constitutifs de l'infraction commise à l'étranger doivent pour l'essentiel être similaires à ceux de l'infraction existant au Canada3. L'article 94 fait de l'entrée illégale au Canada une infraction, mais il y a beaucoup d'incertitude quant à savoir si une telle infraction existe en Grèce et si le demandeur a été déclaré coupable de cette infraction. Divers documents déposés en cette cour font état d'une infraction consistant à " entrer en Grèce illégalement ". Toutefois, la documentation disponible visant les diverses infractions grecques que le demandeur a fournies à la Couronne, que l'on considérait justifier de l'existence de cette infraction, n'est pas convaincante. Le décideur et la Cour n'ont pas obtenu un texte ou une description valable d'une loi qui serait censée être l'équivalent de l'article 94.

[4]      Au vu de la preuve, le décideur n'avait pas, a mon avis, des motifs raisonnables de conclure à une équivalence entre les infractions canadiennes et grecques, car on ne connaissait pas suffisamment les éléments constitutifs essentiels de l'infraction grecque. On ne peut déduire qu'il y a équivalence entre les infractions prévues dans notre Loi sur l'immigration et une prétendue infraction commise à l'étranger dont les éléments constitutifs essentiels sont inconnus4.

[5]      En l'instance, je n'ai pas l'intention de discuter des questions de procédure complexes qui permettraient de déterminer qui a le fardeau de soulever la question de la réadaptation et comment on doit le traiter. Toutefois, étant donné le contexte historique de cette affaire, j'encourage le Ministère à indiquer au demandeur que c'est lui qui doit prendre toutes les mesures qu'il estime nécessaire, y compris la présentation de toute preuve qu'il estime nécessaire, au cas où il voudrait soulever cette question.

[6]      En conséquence, la demande est accueillie. La question est renvoyée pour nouvel examen. Cet examen doit s'appuyer sur une preuve plus complète et mieux analysée, et faire l'objet de motifs plus sérieux.

                                 A.M. Linden

     JUGE


TORONTO (ONTARIO)

Le 29 juillet 1999



Traduction certifiée conforme


Bernard Olivier


     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     Noms des avocats inscrits au dossier

No DU GREFFE :                      IMM-570-99
INTITULÉ DE LA CAUSE :              MOHAMMED REZA MALEKI
                             et
                             LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                            

DATE DE L'AUDIENCE :              LE JEUDI 29 JUILLET 1999
LIEU DE L'AUDIENCE :                  TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE M. LE JUGE LINDEN

EN DATE DU :                      JEUDI 29 JUILLET 1999

ONT COMPARU :                      M. Douglas Lehrer

                                 pour le demandeur

                             M me Geraldine MacDonald

                                 pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :          VanderVennen Lehrer

                             Barristers & Solicitors

                             45, rue St. Nicholas

                             Toronto (Ontario)

                             M4Y 1W6

                                 pour le demandeur

                              Morris Rosenberg

                             Sous-procureur général du Canada

                                 pour le défendeur

                             COUR FÉDÉRALE DU CANADA


                                 Date : 19990729

                        

         Dossier : IMM-570-99


                             Entre :


                                       MOHAMMED REZA MALEKI,

     demandeur,

                             et



                             LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

                        

     défendeur.




                    

                            

        

                                                                                 MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                            

__________________

1      Dossier du demandeur, p. 15.

2      L.R.C. (1985), ch. I-2, telle que modifiée.

3      Li c. Canada [1997] 1 C.F. 235 (C.F.A.), aux par. 17 à 19.

4      Le fait de déduire l'existence des éléments constitutifs essentiels d'une infraction commise à l'étranger est contraire à la jurisprudence en Cour d'appel : voir Li , précité. À ce sujet, voir aussi Brannson c. Canada [1981] 2 C.F. 141 (C.A.), aux pp. 152 et 153; Anderson c. Canada [1981] 2 C.F. 30 (C.A.); Hill c. Canada (1987), 73 N.R. 315 (C.A.F.), à la p. 320; Steward c. Canada [1988] 3 C.F. 487 (C.A.).

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