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Date : 20010412

Dossier : IMM-1711-01

Référence neutre : 2001 CFPI 325

ENTRE :

BALAZS MOLNAR

demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

                          MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE BLANCHARD

[1]                Le demandeur a déposé une requête pour sursis de la mesure de renvoi du Canada. Le renvoi du demandeur est prévu pour le 19 avril 2001. La demande d'autorisation et de contrôle judiciaire sous-jacente vise la décision défavorable relative à la catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada (DNRSRC) rendue le 28 février 2001 par B. Sachs-Syer, agent de révision des revendications refusées (ARRR). La mesure d'interdiction de séjour est entrée en vigueur le 27 mars 2000, et sa validité n'est pas en cause.


[2]                Le demandeur, un Tzigane, est un citoyen de la Hongrie qui est venu au Canada le 12 mars 1998, a quitté le pays par la suite et y est revenu le 16 mai 1998.

[3]                En 1997, lorsqu'il était en Hongrie, le demandeur a été attaqué et battu par un groupe de Skinheads. Il a été blessé et soupçonne les parents de son épouse d'avoir orchestré l'agression.

[4]                En mai 1998, le demandeur a fait une demande de statut de réfugié au Canada, laquelle a été refusée. Le demandeur n'a pas sollicité l'autorisation de contester la décision de la Section du statut de réfugié. Le demandeur a présenté une demande relative à la CDNRSRC et a été jugé ne pas faire partie de cette catégorie le 28 février 2001.

[5]                En décembre 1998, le demandeur a épousé Vivien Huszar, qui est citoyenne hongroise, mais qui n'est pas Tzigane. Le demandeur prétend que les parents de cette dernière ne voulaient pas de lui et qu'ils ont tout fait pour mettre fin à sa relation avec leur fille, allant même jusqu'à le menacer.

[6]                Le demandeur soutient qu'il a fait l'objet de discrimination et de préjugés en Hongrie en raison de son origine tzigane et que sa relation et son mariage avec Vivien Huszar a même mis sa sécurité personnelle en péril.


[7]                Le demandeur affirme craindre de subir les représailles des parents de son épouse, qui ne sont pas Tziganes, s'il est renvoyé en Hongrie.

[8]                L'ARRR a conclu qu'il n'y avait pas suffisamment d'éléments de preuve pour démontrer que les parents de l'épouse du demandeur étaient au courant de son mariage avec leur fille et qu'ils sauraient que le demandeur est de retour en Hongrie s'il décidait de résider loin de sa belle-famille. L'ARRR a également reconnu qu'il y avait de la discrimination contre les Tziganes en Hongrie, mais il a conclu qu'à la lumière de la situation du demandeur, il n'y avait pas suffisamment d'éléments de preuve convaincants pour démontrer que celui-ci ferait l'objet d'un risque objectivement identifiable, conformément au mandat relatif à la DNRSRC, de sorte qu'il devait être renvoyé en Hongrie.

[9]                Pour accorder le sursis des procédures, la Cour doit appliquer le même critère qu'en matière d'injonction interlocutoire[1]. Le critère exige que le demandeur démontre :

(1)        qu'il a soulevé une question sérieuse à trancher dans la demande de contrôle judiciaire sous-jacente;

(2)        qu'il subira un préjudice irréparable si aucune ordonnance n'est accordée;


(3)        qu'à la lumière de l'ensemble de la situation des deux parties, la prépondérance des inconvénients favorise l'octroi du sursis.

[10]            À l'audition de la demande de sursis de la mesure de renvoi, l'avocat du demandeur a prétendu que l'ARRR avait [traduction] « banalisé et occulté » la gravité des problèmes et des risques auxquels le demandeur ferait face s'il était renvoyé en Hongrie. En particulier, le demandeur affirme que la décision défavorable portant sur sa demande relative à la DNRSRC doit être annulée parce que l'évaluation des risques était viciée pour les raisons suivantes :

a)         L'ARRR n'était pas conscient de l'importance du fait que le demandeur s'est marié au Canada, loin de sa famille, plutôt qu'en Hongrie.

b)         L'ARRR n'a pas effectué une évaluation équitable et équilibrée de la demande relative à la CDNRSRC, le choix des documents mentionnés étant sélectif et partial et ne tenant pas compte d'autres éléments de preuve crédibles indiquant une situation très différente.


c)         La décision de l'ARRR était déséquilibrée par rapport à la décision de 46 pages de la Section du statut de réfugié qui a été rendue dans le dossier T-99-82565 par les membres Yasmeen Siddiqui et Berzoor Popatia.

d)         L'ARRR a faussé la véritable situation des Tziganes de Hongrie, de sorte qu'il n'a pas évalué correctement les risques auxquels le demandeur ferait face.

e)         À la lumière de la discrimination répandue que subissent les Tziganes en Hongrie, laquelle est établie par la preuve documentaire, l'ARRR aurait dû conclure que le demandeur risquait de subir un traitement inhumain en Hongrie.

f)          L'ARRR a été influencé indûment par la décision défavorable de la Section du statut de réfugié, de sorte qu'il a entravé son pouvoir discrétionnaire.

[11]            Après avoir entendu la plaidoirie des parties et après avoir lu et examiné attentivement l'ensemble de la preuve, je ne suis pas convaincu que le demandeur a satisfait au premier des trois volets du critère. Je ne suis pas convaincu qu'il a prouvé qu'il existait une question sérieuse à trancher relativement à la décision de l'ARRR.


[12]            Bien que le seuil d'établissement d'une « question sérieuse » ne soit pas élevé en matière de demande de sursis, le demandeur a le fardeau minimal de démontrer qu'il y a au moins une cause défendable découlant des questions soulevées dans la demande de contrôle judiciaire sous-jacente.

[13]            Je suis convaincu qu'en rendant sa décision, l'ARRR a tenu compte des observations du demandeur relativement à la DNRSRC, de la preuve documentaire jointe sur la situation du pays, des Formulaires de renseignements personnels du demandeur ainsi que de la décision et des motifs de la SSR. L'ARRR a conclu que l'affirmation du demandeur, selon laquelle il subira les risques visés par le règlement, n'était pas appuyée par des faits tangibles.

[14]            Suivant mon examen de la présente affaire, j'ai donc conclu que le demandeur n'avait pas soulevé une question sérieuse à trancher dans la demande de contrôle judiciaire sous-jacente.


[15]            Même si je donnais au demandeur le bénéfice du doute et que je concluais qu'il avait soulevé une question sérieuse à trancher, le demandeur n'a pas démontré qu'il subirait un préjudice irréparable s'il était renvoyé en Hongrie. Une conclusion de préjudice irréparable exige la production d'éléments de preuve non hypothétiques relatifs au préjudice irréparable[2]. Pour établir le préjudice irréparable, le demandeur invoque la preuve documentaire relative à la situation des Tziganes en Hongrie ainsi que les menaces antérieures proférées contre lui par les parents de son épouse. J'estime que cela ne suffit pas. La Section du statut de réfugié a conclu que le demandeur n'était pas un réfugié au sens de la Convention, et le demandeur a fait l'objet d'une évaluation défavorable relativement à la CDNRSRC. Le demandeur n'a pas établi le préjudice irréparable.

[16]            Étant donné que j'ai conclu que le demandeur n'avait pas satisfait aux première et deuxième exigences du critère établi dans Toth, il n'y a pas lieu que je me prononce sur la question de la prépondérance des probabilités.

[17]            Pour les motifs qui précèdent, la requête pour sursis de la mesure de renvoi est rejetée.

                                                                                                         « Edmond P. Blanchard »      

                                                                                                                                   J.C.F.C.                      

Toronto (Ontario)

Le 12 avril 2001

Traduction certifiée conforme

Pierre St-Laurent, LL.M.


                                           COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                                  Avocats inscrits au dossier

NO DU GREFFE :                                 IMM-1711-01

INTITULÉ DE LA CAUSE :    BALAZS MOLNAR   

demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION      

défendeur

DATE DE L'AUDIENCE :                   LE LUNDI 9 AVRIL 2001

LIEU DE L'AUDIENCE :                     TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE PAR :                 LE JUGE BLANCHARD

EN DATE DU :                                     JEUDI 12 AVRIL 2001

ONT COMPARU :                             M. Mark Rosenblatt

Pour le demandeur

Mme Mielka Visnic

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :       Rosenblatt Associates

Barristers & Solicitors   

1000-335, rue Bay, 10e étage

Toronto (Ontario)

M5H 2R3

Pour le demandeur

                                  Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Pour le défendeur


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

            Date : 20010412

                          Dossier : IMM-1711-01

ENTRE :

BALAZS MOLNAR

demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

                                                           

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE

                                                           



[1]            Toth c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1988), 6 Imm.L.R. (2d) 123.

[2]            Atakora c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1993), 68 F.T.R. 122.

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