Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

                                                                                                                                 Date : 19981008

                                                                                                                      Dossier : IMM-164-98

ENTRE :

                                                     FINBAR KEVIN CHARLES,

                                                                                                                                         demandeur,

                                                                          - et -

                    LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

                                                                                                                                          défendeur.

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                                                   (Rendus à l'audience à Winnipeg

                                                     (Manitoba) le 7 octobre 1998.)

LE JUGE HUGESSEN

[1]         Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire de la décision d'une agente d'immigration qui a refusé de recommander que le ministre exerce le pouvoir attribué par le paragraphe 114(2) de la Loi sur l'immigration d'accorder au requérant un redressement pour des raisons d'ordre humanitaire.

[2]         Les entrevues tenues aux fins de déterminer s'il y a lieu de recommander qu'on accorde un redressement pour des raisons d'ordre humanitaire sont assujetties à des exigences minimales d'équité procédurale, puisque le demandeur n'a droit à aucune forme particulière de redressement et que, en fait, il cherche à obtenir une exception à l'application de la loi normalement applicable à tous.

[3]         La principale question dont était saisie l'agente au moment de l'entrevue était de savoir si le mariage du demandeur avec Carol Desjarlais était un véritable mariage ou s'il s'agissait d'un mariage de convenance. Le demandeur et Madame Desjarlais étaient tous deux présents à l'entrevue et ils ont été interviewés séparément. L'agente avait également en main une déclaration écrite d'une certaine Christine Fontaine qui indiquait que le demandeur lui avait aussi proposé le mariage et qu'elle était effectivement enceinte de lui. L'agente a conclu, suivant la prépondérance des probabilités, qu'il s'agissait d'un mariage de convenance et elle a donc refusé de recommander qu'on accorde au demandeur un redressement pour des raisons d'ordre humanitaire. Il s'agit sans le moindre doute d'une décision qu'elle était fondée à rendre, vu les éléments dont elle disposait.

[4]         La seule question qui m'a fait hésiter dans cette demande de contrôle judiciaire provient du paragraphe suivant de l'affidavit de l'agente :

[Traduction] Le demandeur et Madame Desjarlais étaient accompagnés par David Davis ("M. Davis"), l'avocat du demandeur. J'ai avisé le demandeur, Madame Desjarlais et M. Davis que la politique du CIC consistait à permettre, par courtoisie, à l'avocat d'assister aux entrevues, mais qu'il ne pourrait aider le demandeur ou Madame Desjarlais dans leurs réponses. J'ai toujours mené mes entrevues de cette façon. La raison bien simple en est qu'ainsi je peux entendre l'histoire et la version des événements du demandeur, et non celles de son avocat.

[5]         Le demandeur allègue qu'on lui a nié le droit à l'assistance d'un avocat et cite à l'appui de cette allégation la décision de la Cour Qi, (1995), 32 Imm.L.R., (2nd), page 57, dans laquelle le juge Reed a conclu que la négation du droit à l'assistance d'un avocat au cours d'une audience devant un arbitre relativement à un rapport en vertu de l'article 27 constituait une violation des principes de justice naturelle. Elle s'est fondée en partie sur le fait que, dans cette affaire, les personnes concernées avaient reçu une lettre dans laquelle on leur avait dit qu'elles avaient le droit d'être accompagnées d'un avocat; elle a estimé que, dès lors qu'elles avaient été invitées à se faire accompagner d'un avocat, celui devait être autorisé à participer à l'entrevue et que ne pas lui permettre de le faire, c'était frustrer les attentes légitimes qu'avait suscitées chez elle la propre lettre du ministère.

[6]         À mon avis, la décision Qi ne présente pas une grande utilité ici. Elle porte, à mon avis, sur une situation qui peut être nettement distinguée de celle en l'espèce : il n'y a ici aucune preuve d'une lettre envoyée aux demandeurs, les invitant à se faire accompagner d'un avocat. Ce qui est encore plus important, dans l'affaire Qi, il s'agissait d'une audience à laquelle, je crois que nous en conviendrons tous, un avocat avait le droit d'être présent, tandis qu'ici il s'agit d'une audience dont la nature, je l'ai déjà dit, fait intervenir des exigences minimales d'équité et dans laquelle les demandeurs n'ont droit à aucun dénouement particulier.

[7]         Ceci dit, cependant, je crois important de souligner que le seul élément de preuve dont je dispose relativement à la négation du droit à l'assistance d'un avocat est celui qui se trouve dans l'affidavit de l'agente d'immigration dans le paragraphe que je viens de lire. Je note que ce paragraphe ne dit pas qu'on a nié à l'avocat le droit de présenter des observations orales ou écrites relativement à l'affaire de son client. Je pense que je pourrais adopter une opinion différente de l'affaire si cela s'était produit. L'agente d'immigration dit, et c'est ce qui s'est produit je présume, qu'elle a dit à l'avocat qu'il ne pourrait pas intervenir ou assister son client dans ses réponses aux questions. Cette restriction imposée à l'avocat est tout à fait légitime et, dans ces circonstances, je ne suis pas disposé à conclure qu'il y a eu déni de justice naturelle.

ƒ8         Je ne tranche pas la question de savoir ce qui se serait produit si on avait nié à l'avocat le droit de présenter des observations. Dans la présente affaire en particulier, on a donné à entendre que des observations auraient pu être présentées relativement à l'importance à accorder à la déclaration écrite de Madame Fontaine. Rien n'indique que cela n'aurait pu être fait ou que ce droit a été nié, et, par conséquent, je vais rejeter la demande de contrôle judiciaire. Avant de signer l'ordonnance, j'invite les avocats à présenter des arguments, s'ils en ont, relativement à la certification d'une question.

ƒ9         ƒPlus tard                     Ayant entendu les avocats, j'ai accepté de certifier la question suivante :

Dans le contexte d'un redressement pour raisons d'ordre humanitaire, est-ce une négation de l'obligation d'équité de la part de l'agent, que de nier à un avocat le droit d'assister le demandeur dans ses réponses?

                                                                                                                           "James K. Hugessen"                 

                                                                                                                                                   Judge                         

WINNIPEG (MANITOBA)

le 8 octobre 1998        

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL.L.


                                                 COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                            SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :                               IMM-164-98

INTITULÉ :                                        Finbar Kevin Charles c. Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration

LIEU DE L'AUDIENCE :                              Winnipeg (Manitoba)

DATE DE L'AUDIENCE :                le 7 octobre 1998

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

DE LA COUR PRONONCÉS PAR             MONSIEUR LE JUGE HUGESSEN

                                                                       

                                                                       

EN DATE DU :                                               8 octobre 1998

COMPARUTIONS :

M. David Davis                                                                                                         pour le demandeur

Mme Cynthia Myslicki                                                                                                  pour le défendeur

Ministère de la Justice

310 - 301 Broadway

Winnipeg (Manitoba)

R3C 0S6

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

David H. Davis Law Office

800 - 31 Broadway

Winnipeg (Manitoba)

R3C 0S6

                                                                                                                                pour le demandeur

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada                                                                              pour le défendeur


                   COUR FÉDÉRALE DU CANADA

              SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

Date : 19981008

Dossier : IMM-164-98

ENTRE :

FINBAR KEVIN CHARLES

                                                                              demandeur

                                            - et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                               défendeur

                                                                                                                      

                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                                                                                                                      

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.