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Date : 20200417


Dossiers : IMM‑1267‑20

IMM‑1696‑20

Référence : 2020 CF 527

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 17 avril 2020

En présence de monsieur le juge Annis

ENTRE :

MARK ANTHONY PLUMMER

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

défendeur

ET ENTRE :

XIAOQI YU

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

et

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET

DE LA PROTECTION CIVILE

 


ORDONNANCE ET MOTIFS

I.  Introduction

[1]  En raison de la suspension des vols dans la foulée de la crise de la COVID‑19, l’Agence des services frontaliers du Canada [l’ASFC] a annulé le renvoi prévu des personnes concernées dans les deux présentes affaires. Cette annulation a donné lieu à des avis opposés sur la question de savoir si la Cour devrait rejeter les requêtes en sursis à l’exécution du renvoi en raison de leur caractère théorique, comme le soutient le défendeur, ou tout simplement les ajourner en attendant que l’ASFC fixe les nouvelles dates de renvoi, comme le soutiennent les demandeurs.

[2]  Dans l’affaire IMM‑1267‑20, la requête présentée par M. Plummer vise l’obtention d’un sursis au renvoi pour permettre que soit mené à bien le contrôle judiciaire sous-jacent de la décision défavorable relative à l’examen des risques avant renvoi [la requête en sursis relative à l’ERAR]. Il convient aussi de signaler que M. Plummer a retiré sa demande et sa requête en sursis dans l’affaire IMM‑1884‑20. Celles-ci se rapportaient au contrôle judiciaire sous-jacent des décisions par lesquelles un agent d’exécution avait refusé une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire et une demande de report du renvoi.

[3]  M. Plummer soutient que la Cour devrait ajourner la requête en sursis relative à l’ERAR pour des motifs d’« économie des ressources judiciaires », c’est-à-dire pour éviter les dépens inutiles et les conséquences accessoires, comme celle de se voir empêcher à l’avenir de s’adresser à la Cour pour obtenir une réparation. Je ne pense pas que cette dernière question soit une issue probable qu’il convient d’examiner en l’espèce.

[4]  Dans l’affaire IMM‑1696‑20, la requête en sursis à l’exécution du renvoi présentée par M. Yu vise à permettre que soit mené à bien le contrôle judiciaire sous-jacent du rejet de sa demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire. Selon le demandeur, si une nouvelle date de renvoi était fixée à l’avenir, ce qui nécessiterait la présentation de nouveaux éléments de preuve qui pourraient se manifester dans l’intervalle à l’appui de son argument touchant le préjudice irréparable, il soumettrait à ce moment‑là un nouvel avis de requête accompagné de ces nouveaux éléments de preuve. Je présume que cela signifie que le demandeur abandonnerait le premier avis de requête, même si j’ajournais la requête.

[5]  De plus, les demandeurs dans les deux affaires s’appuient sur la décision Okojie c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 905 [Okojie]. Dans cette affaire, la Cour a conclu que le renvoi du demandeur fixé pour une date prochaine s’inscrivait dans « une même procédure » amorcée par la requête en sursis originale. Le renvoi du demandeur avait été reporté brièvement, en raison d’une maladie qui l’empêchait de prendre l’avion. Le défendeur soutient que les faits de l’affaire Okojie sont différents.

[6]  Le défendeur soutient également qu’un ajournement n’entraînerait aucune économie des ressources judiciaires, et ce, pour plusieurs raisons. Premièrement, les Règles des Cours fédérales ne permettent pas aux parties de mettre à jour leurs observations une fois que les dossiers de requête ont été signifiés et déposés, sauf si la Cour l’autorise.

[7]  Deuxièmement, de nombreux changements pourraient se produire d’ici la résolution de la crise de la COVID‑19, y compris les suivants : les demandes de contrôle judiciaire pourraient être tranchées sur le fond, la situation personnelle des demandeurs pourrait changer, une nouvelle décision faisant jurisprudence pourrait être rendue, une nouvelle instruction relative à la pratique ayant une incidence sur l’issue pourrait être adoptée, les politiques de l’ASFC pourraient être modifiées ou encore il pourrait y avoir une forte augmentation des requêtes en sursis ajournées ou reportées exigeant des ressources judiciaires additionnelles pour traiter les observations mises à jour et les arguments additionnels sur la question du caractère théorique. En fait, le défendeur soutient que la fragmentation du litige va à l’encontre de l’esprit des Règles et nuit à l’économie des ressources judiciaires.

II.  Les requêtes en sursis à l’exécution du renvoi

[8]  Une ordonnance sursoyant à l’exécution d’un renvoi ne sera accordée que si le demandeur satisfait à chacun des trois volets du critère énoncé dans l’arrêt Toth c Canada (Minister of Employment and Immigration) (1988), 86 NR 302, 6 Imm LR (2d) 123 (CAF). Le demandeur doit démontrer que la demande sous-jacente soulève une question sérieuse, que l’expulsion entraînera un préjudice irréparable et que la prépondérance des inconvénients favorise le report de l’expulsion.

[9]  Normalement, l’octroi d’un report se limite aux situations d’urgence de courte durée. Un tribunal n’accordera un report à plus long terme que si la preuve démontre que le contrôle judiciaire sous-jacent doit être mené à bien. Ces situations se limitent à celles où l’expulsion exposerait le demandeur à un risque de mort, de sanctions excessives ou de traitement inhumain, ou aux situations où il existe des considérations spéciales, touchant principalement la sécurité personnelle du demandeur ou d’autres personnes concernées (Baron c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2009 CAF 81, au par. 51).

[10]  Pour démontrer l’existence d’une question sérieuse, il suffit normalement d’établir que la question n’est pas frivole ou vexatoire. Il s’agit d’une norme peu rigoureuse, moins exigeante que la probabilité ou la vraisemblance. Toutefois, en ce qui concerne la décision d’un agent d’exécution de refuser de reporter un renvoi, la norme est plus exigeante, et le demandeur doit présenter une bonne preuve, souvent appelée « preuve prima facie ». Autrement, l’octroi d’un sursis dans le cadre d’une demande interlocutoire aurait pour effet d’accorder le même redressement que celui sollicité dans la demande de contrôle judiciaire sous-jacente visant l’annulation de la décision par laquelle l’agent d’exécution a refusé de reporter l’expulsion du demandeur.

[11]  Quant au volet lié au préjudice irréparable, le demandeur doit démontrer qu’il existe « une preuve claire et convaincante » que le risque se réalisera probablement. Pour ce faire, le demandeur doit établir au moyen d’éléments de preuve détaillés et concrets qu’il subira probablement un préjudice réel, certain et inévitable – et non pas hypothétique et conjectural – qui ne pourra être redressé plus tard (Janssen Inc. c Abbvie Corporation, 2014 CAF 112, au par. 24; Gateway City Church c Canada (Revenu national), 2013 CAF 126, aux par. 14 à 16; Glooscap Heritage Society c Canada (Revenu national), 2012 CAF 255, aux par. 12 et 31).

[12]  Il s’agit d’un critère plus élevé que le critère qui s’applique habituellement pour établir l’existence d’une question sérieuse. Cela signifie que le fait d’établir qu’il existe une question sérieuse touchant le risque en démontrant simplement que la question n’est pas frivole ou vexatoire ne suffit peut-être pas pour prouver que le renvoi entraînera un préjudice irréparable, alors que ce sont souvent les mêmes éléments de preuve qui s’appliquent aux deux questions.

III.  Le caractère théorique

[13]  Les principes régissant l’analyse du caractère théorique sont exposés par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Borowski c Canada (Procureur général), [1989] 1 RCS 342, aux par. 31 et 34 à 36 [Borowski], comme suit :

[31] La première raison d’être de la politique ou de la pratique en question tient à ce que la capacité des tribunaux de trancher des litiges a sa source dans le système contradictoire. L’exigence du débat contradictoire est l’un des principes fondamentaux de notre système juridique et elle tend à garantir que les parties ayant un intérêt dans l’issue du litige en débattent complètement tous les aspects. Il semble que cette exigence puisse être remplie si, malgré la disparition du litige actuel, le débat contradictoire demeure. Par exemple, même si la partie qui a engagé des procédures en justice n’a plus d’intérêt direct dans l’issue, il peut subsister des conséquences accessoires à la solution du litige qui fournissent le contexte contradictoire nécessaire. […]

[34] La deuxième grande raison d’être de la doctrine du caractère théorique tient à l’économie des ressources judiciaires. […] La triste réalité est qu’il nous faut rationner et répartir entre les justiciables des ressources judiciaires limitées. Le fait que les litiges actifs qui reçoivent une autorisation de pourvoi en cette Cour représentent une faible proportion du nombre total des demandes présentées, témoigne de cette réalité. La saine économie des ressources judiciaires n’empêche pas l’utilisation de ces ressources, si limitées soient‑elles, à la solution d’un litige théorique, lorsque les circonstances particulières de l’affaire le justifient.

[35] L’économie des ressources judiciaires n’empêche pas non plus d’entendre des affaires devenues théoriques dans les cas où la décision de la cour aura des effets concrets sur les droits des parties même si elle ne résout pas le litige qui a donné naissance à l’action. […]

[36] De même, il peut être justifié de consacrer des ressources judiciaires à des causes théoriques qui sont de nature répétitive et de courte durée. Pour garantir que sera soumise aux tribunaux une question importante qui, prise isolément, pourrait échapper à l’examen judiciaire, on peut décider de ne pas appliquer strictement la doctrine du caractère théorique. […] Il est préférable d’attendre et de trancher la question dans un véritable contexte contradictoire, à moins qu’il ressorte des circonstances que le différend aura toujours disparu avant d’être résolu.

[Renvois omis.] [Non souligné dans l’original.]

IV.  Analyse

A.  La décision Okojie

[14]  Comme je l’ai déjà signalé, les deux demandeurs s’appuient sur la décision Okojie, rendue précédemment par la Cour, en particulier sur les paragraphes 2 et 6, qui sont rédigés comme suit :

[2] L’audition de la demande de sursis, d’abord déposée le 11 juillet 2003, concernant le départ du demandeur prévu à l’origine pour le 11 juin, avait été ajournée sine die ce même jour, apparemment après qu’il se fut révélé que le demandeur était incapable de se déplacer pour cause de maladie. Un second avis de renvoi a plus tard été donné pour le 7 juillet, et la demande de sursis a alors été déposée de nouveau sur avis sommaire et entendue le 3 juillet. Aux fins de la présente demande, la Cour considère les deux avis de renvoi comme formant une même procédure, ayant pour effet d’exprimer une seule décision ordonnant que des dispositions soient prises pour exécuter le renvoi du demandeur aussitôt que raisonnablement possible.

[…]

[6] […] On a soutenu au nom du défendeur que la demande originale sous-jacente d’autorisation et de contrôle judiciaire visant le refus prononcé le 9 juillet de reporter le renvoi était dénuée d’intérêt pratique au moment de l’audition de cette affaire, puisque la demande concernait la décision de ne pas exécuter le renvoi du demandeur le 11 juin. Cependant, comme je l’ai déjà dit, je considère que l’objet de la présente espèce est une seule et même procédure de renvoi; la question que soulève la demande sous‑jacente est celle de l’équité de cette procédure et, en particulier, le point de savoir s’il a été porté attention - et si oui dans quelle mesure - aux facteurs d’ordre humanitaire invoqués par l’avocat du demandeur au moment de la demande de report. À mon avis, ces considérations sont suffisamment sérieuses - car la responsabilité de l’agent de renvoi est ici mise en cause - pour que soit remplie la première condition du critère tripartite, à savoir l’existence d’une question sérieuse à trancher.

[Non souligné dans l’original.]

[15]  Je souscris à l’avis du défendeur selon lequel l’affaire Okojie se distingue des présentes affaires, mais pas seulement parce qu’elle a trait à une perturbation brève et temporaire. Tout d’abord, dans la décision Okojie, la question du caractère théorique a été soulevée à l’audience relative à requête en sursis, et non avant l’instruction de la requête, comme c’est le cas dans les présentes demandes d’ajournement. Fait important, la question déterminante se rapportait à l’équité (« la question que soulève la demande sous-jacente est celle de l’équité de cette procédure »).

[16]  De fait, la Cour a accueilli la requête en sursis à l’exécution du renvoi, ayant conclu que l’agent d’exécution n’avait pas apprécié correctement certains éléments de preuve importants qui pouvaient avoir une incidence sur l’issue. Quand une question liée au caractère théorique est soulevée en présence d’une conclusion de manquement à l’équité, on peut s’attendre à ce que la Cour trouve le moyen de rejeter l’argument concernant le caractère théorique, si un tel argument peut être avancé. Toutefois, le point à retenir est qu’aucune question concernant l’équité ou l’intérêt de la justice n’est soulevée en l’espèce pour permettre aux demandeurs de se fonder sur cette décision.

[17]  De plus, dans la décision Okojie, non seulement le report du renvoi n’était qu’une perturbation temporaire, mais il semble que le dossier soit demeuré inchangé depuis son dépôt. Il y aurait eu un grave gaspillage de ressources judiciaires si le demandeur avait été obligé de déposer une nouvelle demande et une nouvelle requête en sursis, dans lesquelles l’unique changement aurait été la date du renvoi. Les parties en l’espèce reconnaissent la possibilité qu’il soit nécessaire d’apporter des modifications aux dossiers de requête en raison des circonstances exceptionnelles liées à la pandémie de COVID‑19.

V.  L’économie des ressources judiciaires

[18]  Dans l’arrêt Borowski, la Cour suprême du Canada a signalé que le caractère théorique ne fait pas obstacle à la poursuite de l’affaire si le litige actuel ne disparaît pas et que le débat contradictoire demeure. Ce principe s’appliquerait dans les présentes affaires.

[19]  Toutefois, la question primordiale, dans l’optique de l’économie des ressources judiciaires, consiste à déterminer la procédure la plus appropriée pour les requêtes en sursis annulées compte tenu de la probabilité que de nouvelles mesures de renvoi soient prises après le retour à un semblant de normalité au Canada et dans les pays de renvoi. Sur cette question, étant donné que le litige actuel n’est pas disparu et que le débat contradictoire demeure, je conclus que les requêtes devraient être ajournées, au lieu d’être rejetées, pour divers motifs.

[20]  Tout d’abord, la Cour fait déjà l’objet d’une ordonnance de suspension ayant pour effet d’ajourner les présentes affaires sine die en raison de la pandémie de COVID‑19. L’ordonnance de suspension ne signifie pas qu’il faille rejeter un argument valide sur la question du caractère théorique qui entraînerait le rejet des requêtes. Toutefois, je ne pense pas que ce soit le cas en l’espèce.

[21]  D’une part, je suis tenté tout simplement d’ajourner les requêtes sine die conformément à l’ordonnance de suspension de la Cour, sans imposer de conditions, puisqu’il est difficile de savoir quelles conditions s’appliqueront lorsque la suspension sera enfin levée. Toutefois, je souscris à l’avis du défendeur selon lequel, à la suite de cette levée, il pourrait y avoir une reprise accélérée où la Cour se verra pressée de démêler quelles affaires devraient aller de l’avant et suivant quels critères. Toute décision prise maintenant à l’égard de ces questions, en fixant les conditions de l’ajournement, devrait contribuer à éviter qu’il soit nécessaire de s’adresser plus tard à la Cour pour obtenir des instructions.

[22]  D’autre part, en ce qui concerne les arguments du défendeur, je conclus qu’il ne s’agit pas d’arguments de fond au sens d’arguments ayant une incidence sur l’issue, par opposition aux arguments ayant une incidence sur la procédure. Par exemple, mon ordonnance tiendra compte de l’argument selon lequel les Règles des Cours fédérales ne permettent pas aux parties de mettre à jour leurs observations une fois que les dossiers de requête ont été signifiés et déposés à moins d’obtenir l’autorisation de la Cour.

[23]  De même, j’estime hypothétique et peu important l’argument selon lequel de nombreux changements pourraient se produire en attendant la résolution de la crise de la COVID‑19, par exemple, les demandes de contrôle judiciaire pourraient être tranchées sur le fond, la situation personnelle des demandeurs pourrait changer, une nouvelle décision faisant jurisprudence pourrait être rendue, une nouvelle instruction relative à la pratique ayant une incidence sur l’issue pourrait être adoptée ou les politiques de l’ASFC pourraient être modifiées. À mon avis, il n’y a pas en l’espèce de fragmentation du litige. Il s’agit plutôt de déterminer le moyen optimal d’aller de l’avant avec de nouvelles dates de renvoi en espérant subir un minimum de perturbation sur le plan procédural dans le futur.

[24]  Deux scénarios semblent probables. Dans le premier scénario, après la pandémie de COVID‑19, aucun changement aux dossiers ne s’avérera nécessaire. Cela suppose que le risque d’infection diminuera considérablement au Canada et dans les pays de renvoi en question, et que les conséquences de la pandémie n’entraîneront pas de nouvelles conditions pouvant entraîner un préjudice irréparable à la suite du renvoi. Dans l’autre scénario, la situation ne s’améliorera pas pour une période assez longue ou la situation empirera dans les pays de renvoi.

[25]  Dans le premier cas, qui s’appliquerait peut-être à M. Yu à son retour en Chine, il se pourrait qu’il y ait très peu de changements, sinon aucun, aux éléments de preuve et aux observations. Par contre, dans le cas de M. Plummer, les avantages d’un ajournement sont peut-être moins clairs, d’autant plus qu’il est prévu qu’une nouvelle demande de report sera probablement déposée, accompagnée d’une nouvelle demande de contrôle judiciaire et d’une requête en sursis qui répétera les observations antérieures concernant le rejet de la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire présentée par le demandeur.

[26]  Néanmoins, je garde à l’esprit la question soulevée par les demandeurs qui souhaitent éviter les dépens inutiles, qui devrait s’appliquer aussi au défendeur. Pour ce qui est du facteur de la question sérieuse, il est peu probable que les demandeurs présentent de nouveaux éléments de preuve ou modifient leurs observations, étant donné que les dossiers dont disposaient l’agent d’ERAR et l’agent chargé de la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire ne changeront pas. Toutefois, je souscris à l’avis des avocats du défendeur et de M. Yu selon lequel les facteurs liés au préjudice irréparable pourraient changer, ce qui pourrait nécessiter la présentation d’éléments de preuve et d’observations additionnels.

[27]  Cependant, les mémoires révisés en vue de l’audience, modifiés par rapport aux mémoires présentés dans le cadre des demandes d’autorisation, n’ont rien de nouveau pour la Cour. La présentation d’éléments de preuve additionnels ne devrait pas entraîner de complications excessives. Il semble y avoir deux problèmes rattachés aux dossiers révisés, qui pourraient exiger l’imposition de conditions dans le cadre de l’ajournement.

[28]  Premièrement, il faudrait exiger que les nouveaux mémoires remplacent les mémoires initiaux, de façon à s’assurer que les parties et la Cour se reportent à un seul et même document. Il pourrait y avoir des exceptions si les changements sont relativement minimes.

[29]  Deuxièmement, la partie qui modifie son dossier de quelque manière que ce soit devrait décrire les changements de manière à faciliter la réponse de la partie adverse. Malheureusement, les avocats ne respectent pas toujours ces règles, ce qui oblige la Cour à demander à ses adjoints judiciaires de passer en revue les deux versions du document pour s’assurer qu’il n’y a pas de confusion à l’audience quant aux prétentions des parties.

[30]  Enfin, tout document qui est invoqué dans les mémoires ou qui sera porté à l’attention de la Cour à l’audience, y compris les extraits de transcriptions, doit comporter un renvoi à la page et au paragraphe.

[31]  À la lumière des remarques exposées ci‑dessus, la Cour ordonne que les requêtes en sursis soient ajournées sine die.


ORDONNANCE DANS LES DOSSIERS IMM‑1267‑20 et IMM‑1696‑20

LA COUR ORDONNE :

  1. Les requêtes urgentes en vue d’obtenir un sursis dans les affaires IMM‑1267‑20 et IMM‑6096‑20 sont ajournées sine die, sans frais.

  2. Si de nouvelles dates sont fixées pour l’expulsion des demandeurs, ceux-ci sont autorisés à déposer un nouveau dossier de requête ou un dossier de requête révisé ou additionnel; autrement, les requêtes en sursis iront de l’avant comme si elles avaient été suspendues, exception faite de la substitution des dates de renvoi.

  3. En cas de nouveau dépôt à la Cour, les demandeurs sont tenus de remplacer leurs mémoires précédents par de nouveaux mémoires, sauf si les changements apportés ne sont pas significatifs. Les demandeurs doivent signaler tous les changements et ajouts importants à leurs dossiers.

  4. À l’audience, les parties ne pourront invoquer les documents qui ne comportent pas, dans leur mémoire, un renvoi à la page (et préférablement au paragraphe), sauf si la Cour l’autorise; une telle autorisation sera normalement conditionnelle à ce que la partie signale le document au plus tard la veille de l’audience.

[32]  Le demandeur dans l’affaire IMM‑1884‑20 est autorisé à retirer sa demande et sa requête en sursis à l’exécution du renvoi découlant du rejet de sa demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire et de sa demande de report de renvoi, sans préjudice du droit de déposer une autre requête si une nouvelle date de renvoi est fixée.

 

« Peter B. Annis »

 

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 11e jour de mai 2020.

Julie Blain McIntosh, LL.B., trad. a.

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

DoSSIER :

IMM‑1267‑20

 

INTITULÉ :

MARK ANTHONY PLUMMER c LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

ET DOSSIER :

IMM‑1696‑20

INTITULÉ :

XIAOQI YU c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION et LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

OTTAWA (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 14 AVRIL 2020

 

ordonnance et MOTIFS :

LE JUGE ANNIS

 

DATE DES MOTIFS :

LE 17 AVRIL 2020

 

COMPARUTIONS :

Tiffani A. Frederick

pour le demandeur dans le dossier IMM-1267-20

Richard Wazana

pour le demandeur dans le dossier IMM-1696-20

Chris Araujo

pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Tiffani A. Frederick

Frederick Law Company

pour le demandeur dans le dossier IMM-1267-20

Richard Wazana

Wazana Law

pour le demandeur dans le dossier IMM-1696-20

Chris Araujo

Procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR

 

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