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Date : 20020830

Dossier : IMM-3202-02

Référence neutre : 2002 CFPI 923

ENTRE :

                                                           KAMALJIT KAUR SIDHU

                                                                                                                                              demanderesse

                                                                                   et

                                               LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                           ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                      défendeur

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE DAWSON

[1]                 Les motifs de la décision par laquelle j'ai rejeté à l'audience, vers 18 h le 27 août 2002, la requête de Mme Sidhu visant à obtenir un sursis à son renvoi du Canada prévu pour le 28 août 2002, à 1 h, à destination de l'Inde, sont exposés ci-dessous.

[2]                 L'affidavit d'un agent d'exécution, déposé à l'appui de l'opposition à la requête visant l'obtention du sursis, relate les faits relatifs au statut d'immigrante de Mme Sidhu. L'agent a déclaré sous serment ce qui suit :

[TRADUCTION]


2.             La demanderesse a obtenu le droit d'établissement au Canada le 1er avril 1996 en tant qu'épouse d'Ajitpal Singh Gill. Elle a divorcé d'avec celui-ci en janvier 1997, puis s'est mariée, en Inde, avec Lakhvir Singh Sidhu, le 20 avril 1997.

3.             La demanderesse a fait une demande de parrainage de son nouvel époux, mais l'agent des visas a rejeté sa demande sur le fondement que M. Sidhu s'était avant tout marié dans le but d'obtenir l'admission au Canada à titre de parent. La demanderesse a interjeté appel du refus auprès de la Section d'appel de l'immigration (la SAI). Après audience, cette dernière a, le 4 mars 1999, rejeté l'appel.

4.             À l'audience devant la SAI, la demanderesse a, par l'entremise de son avocat, mentionné qu'elle s'était mariée la première fois dans le but de pouvoir immigrer au Canada. Après cette audience, Citoyenneté et Immigration a déposé un rapport suivant lequel la demanderesse était une personne visée à l'alinéa 27(1)e) de la Loi sur l'immigration. Une enquête a alors été tenue devant un arbitre, à qui la demanderesse a expliqué avoir, en fait, donné de faux renseignements à l'audience devant la SAI au sujet de son parrainage de M. Sidhu, mais avoir affirmé sous serment que son premier mariage avait été arrangé en raison de contraintes culturelles. L'arbitre a conclu qu'elle n'avait pas fait de fausses déclarations. M'est présentée et est identifiée comme étant la pièce « A » du présent affidavit, une copie certifiée des motifs et de l'ordonnance de la Section d'appel de l'immigration en date du 20 septembre 2000.

5.             Citoyenneté et Immigration Canada a alors interjeté appel devant la SAI de la décision de l'arbitre, lequel appel a été accueilli. Dans ses motifs datés du 20 septembre 2000, la SAI a conclu que la demanderesse avait fait de fausses déclarations. Une mesure d'expulsion a par conséquent été prise contre elle ce jour-là. M'est présentée et est identifiée comme étant la pièce « B » du présent affidavit, une copie certifiée des motifs et de l'ordonnance de la Section d'appel de l'immigration en date du 20 septembre 2000. La demanderesse a alors porté en appel la décision de la SAI devant la SAI et son appel a été rejeté sur le fondement que la demanderesse n'était ni digne de confiance ni crédible. On me montre actuellement une copie certifiée de la décision de la SAI datée de février 2000, qui constitue la pièce « B » du présent affidavit.

6.             La demanderesse a alors présenté, le 13 juillet 2001, une demande fondée sur des raisons d'ordre humanitaire conformément au paragraphe 114(2) de la Loi sur l'immigration. La demande RH a par la suite été rejetée, en mai 2002.

7.             Le 13 juin 2002, on a envoyé une lettre à la dernière adresse connue de la demanderesse dans laquelle on lui demandait de se présenter le 18 juin 2002 à une entrevue en vue de son renvoi. Le 18 juin 2002, la demanderesse ne s'est pas présentée à son rendez-vous. On a fixé une nouvelle entrevue pour le 19 juin 2002, à laquelle la demanderesse s'est présentée accompagnée d'une personne amie. On a enjoint à la demanderesse d'acheter son billet d'avion à destination de l'Inde et de se présenter à une autre entrevue le 26 juin 2002 pour prouver qu'elle avait acheté son billet d'avion. Le 26 juin 2002, la demanderesse ne s'est pas, comme ordonné, présentée à l'entrevue et a déménagé sans donner à CIC sa nouvelle adresse.


8.             Le 26 juin 2002, CIC a reçu du représentant de la demanderesse une télécopie informant le ministère que Mme Sidhu avait, comme demandé, acheté un billet d'avion, mais qu'elle s'était séparée de son mari, M. Sidhu, et qu'elle vivait maintenant en union libre avec un certain M. Mund. La demanderesse a maintenant présenté une deuxième demande RH; son conjoint de fait actuel doit la parrainer.

9.             Un mandat d'arrestation a été lancé à l'endroit de la demanderesse, car celle-ci omettait continuellement de se présenter aux entrevues en vue de son renvoi et n'avait pas donné à Citoyenneté et de Immigration sa nouvelle adresse. La demanderesse a ensuite été libérée à certaines conditions, dont celle de verser un cautionnement en espèces de 3000 $.

10.           Le 28 juin 2002, la demanderesse a déposé une demande d'autorisation et de contrôle judiciaire de la mesure de renvoi. Le 2 juillet 2002, elle a déposé une requête visant à obtenir le sursis de son renvoi, mais n'y a plus fait suite à partir du moment où l'avocat du ministère de la Justice l'a informée qu'en vertu de la nouvelle Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, elle ne pouvait pas être expulsée tant que son examen des risques avant renvoi (l'ERAR) ne serait pas terminé.

11.           La demande d'ERAR de la demanderesse a été rejetée le 14 août 2002. Le 21 août 2002, un mandat d'arrestation a été lancé à l'endroit de la demanderesse, qui a été arrêtée le 26 août 2002. Lors de son arrestation, on a mentionné à la demanderesse qu'elle avait droit à un avocat et qu'elle était arrêtée pour être renvoyée. J'ai été avisé par l'agent qui a procédé à l'arrestation et je crois sincèrement que la demanderesse avait contacté son avocat Naren Nagin peu après son arrestation.

[3]                 Mme Sidhu a cherché à obtenir un sursis pendant le traitement de sa demande fondée sur des raisons humanitaires (RH) déposée le 26 juin 2002. Elle dit qu'elle subirait un préjudice irréparable si elle retournait en Inde parce qu'elle n'a là personne chez qui habiter et qu'il [TRADUCTION] « est impossible dans la culture indienne pour une femme de vivre seule » et qu'elle est maintenant émotionnellement dépendante de son nouveau conjoint de fait. Elle a ajouté : [TRADUCTION] « nous sommes tous deux dans un état émotionnel très fragile et je crains sincèrement que, si je devais retourner vivre dans de très mauvaises conditions en Inde, je finirais par me suicider » .


[4]         La requête a été rejetée sur le fondement que Mme Sidhu n'a pas démontré l'existence de préjudice irréparable.

[5]         La simple détresse inhérente à un renvoi ne suffit pas pour démontrer l'existence d'un préjudice irréparable. De ce fait et compte tenu de la nature récente de sa relation amoureuse, je ne suis pas convaincue que Mme Sidhu subirait un préjudice irréparable du fait de sa séparation de son nouveau conjoint si on l'obligeait à quitter le Canada pendant que sa demande RH est traitée.

[6]         Le 27 juin 2002, Mme Sidhu a souscrit l'affidavit à l'appui de la présente requête. Elle n'a mentionné nulle part qu'elle recevait un traitement médical contre la dépression ou toute autre maladie, bien qu'elle ait eu amplement de temps pour le faire. Compte tenu de cela et du fait qu'elle avait déjà fabriqué de toutes pièces un témoignage dans le but d'obtenir le statut d'immigrante, son témoignage selon lequel elle craint de finir par se suicider n'est pas convaincant.

[7]         De même, aucun élément de preuve objectif n'a été fourni pour appuyer la prétention de Mme Sidhu suivant laquelle il est impossible dans la culture indienne pour une femme de vivre seule. De plus, Mme Sidhu n'a pas mentionné ces craintes dans la demande RH qu'elle a signée le 26 juin 2002. On peut, selon moi, raisonnablement inférer qu'elle aurait mentionné dans cette demande toute crainte véritable et profonde.


[8]         Mme Sidhu n'a pas présenté de revendication du statut de réfugié au sens de la Convention. Le 19 février 2001, la Section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a examiné la question des conséquences pour Mme Sidhu de son renvoi en Inde et a conclu que celle-ci ne subirait pas de préjudice indu. En mai de la présente année, une demande RH de Mme Sidhu a été rejetée et toute allégation concernant l'existence d'un risque aurait été examinée. Le résultat de l'ERAR de Mme Sidhu a été défavorable.

[9]         Pour ces motifs, je conclus que la demanderesse n'a pas démontré l'existence d'un préjudice irréparable.

[10]       La seule incertitude soulevée dans la présente demande a trait à ce que Mme Sidhu n'a pas reçu les motifs de son ERAR défavorable. On lui a simplement remis une lettre dans laquelle on a coché la case où il était indiqué : [TRADUCTION] « Il a été décidé que votre renvoi vers votre pays de nationalité ou le pays où vous aviez votre résidence habituelle ne vous exposerait pas au risque de persécution ou de torture, à un danger de mort ou à un risque de traitements ou de peines cruels et inusités. »

[11]       L'avocate du ministre a fait valoir qu'elle avait compris que les motifs étaient fournis sur demande sous la forme des notes de service ou notes déjà fournies sur demande au sujet des décisions rendues par un agent de révision des revendications refusées.


[12]       Étant donné que j'ai conclu que la demanderesse n'a pas démontré qu'elle subirait un préjudice irréparable, je n'ai pas besoin d'examiner la question de savoir si l'absence de motifs soulevait une question grave. Dans une autre affaire dans laquelle il y aurait des éléments de preuve convaincants quant à l'existence d'un risque, l'absence de ces motifs pourrait bien justifier un ajournement de la requête visant l'obtention d'un sursis sous certaines conditions afin que les motifs puissent être fournis ou, peut-être, une conclusion selon laquelle une question grave a été soulevée en raison de l'absence de motifs.

« Eleanor R. Dawson »

Juge

     

Traduction certifiée conforme

Sandra Douyon-de Azevedo, LL.B.


                          COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

   

DOSSIER :                              IMM-3202-02

INTITULÉ :                           Kamaljit Kaur Sidhu c. MCI

LIEU DE L'AUDIENCE :                 Vancouver (C.-B.)

DATE DE L'AUDIENCE :              Le 27 août 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :             LE JUGE DAWSON

DATE DES MOTIFS :                      Le 30 août 2002

   

COMPARUTIONS :

M. Mir Huculak                       POUR LA DEMANDERESSE

Mme Brenda Carbonell                          POUR LE DÉFENDEUR

   

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

M. Mir Huculak                        POUR LA DEMANDERESSE

Vancouver

M. Morris Rosenberg              POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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