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Date : 19980915


Dossier : T-1305-98

    

Entre :      TOMMY HILFIGER LICENSING INC. et
         TOMMY HILFIGER CANADA INC.,

     demanderesses,

et :          YM INC. (SALES),

     défenderesse.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE et ORDONNANCE

LE JUGE DENAULT


[1]      Il s'agit d'une requête présentée par les demanderesses en vue d'obtenir une ordonnance radiant les paragraphes 6(a), 6(b), 7, 8, 9 et 10 de la défense ou, subsidiairement, enjoignant à la partie adverse de donner des détails sur les faits substantiels qui étayent les allégations formulées dans ces paragraphes.


[2]      La Cour estime que, dans la présente affaire, il n'est pas justifié de radier ces paragraphes de la défense. Elle se demandera toutefois si les paragraphes en question consistent en de simples allégations dépourvues d'un fondement véritable suffisant et s'il est nécessaire de fournir des détails.


[3]      Dans le cadre d'une requête pour détails, il incombe à l'auteur de celle-ci " les demanderesses en l'occurrence " d'établir à la fois que les détails sont nécessaires pour sa plaidoirie et qu'il n'en a pas connaissance, à moins que les actes de procédure soient, à première vue, inadéquats ou contraires aux règles (Windsurfing International Inc. v. Novaction Sports Inc. (1988), 18 C.P.R. (3d) 230).


[4]      La Cour examinera ensemble les requêtes pour détails visant les paragraphes 6(a), 7 et 8 de la défense.


[5]      Dans les paragraphes 6(a) et 7, la défenderesse soutient que les marques de commerce des demanderesses sont dépourvues d'un caractère distinctif parce qu'elles sont couramment employées par des tiers ou que les termes utilisés consistent en des prénoms usuels. La défense énumère les noms de 29 marques de vêtements. À l'audience, l'avocat des demanderesses s'est vu remettre 23 photographies montrant les dessins énumérés au paragraphe 6(a). Par leur requête, les demanderesses souhaitent obtenir davantage de renseignements quant au lieu et au moment où ces dessins ou marques sont présumés avoir été employés, de même que le nom et le lieu d'affaires des propriétaires des marques énumérées.


[6]      À mon avis, les détails fournis par la défenderesse offrent suffisamment d'information aux demanderesses pour leur permettre de comprendre la thèse de la défenderesse et de répondre intelligemment à la défense de cette dernière. Les affaires Levi Strauss & Co. v. Woolworth Canada Inc. (1997), 72 C.P.R. (3d) 236, et Levi Strauss & Co. c. Roadrunner Apparel Inc., décision non publiée rendue par le juge Cullen le 6 mars 1997 et confirmée par la Cour d'appel (76 C.P.R. (3d) 129), sont deux espèces analogues à la présente instance. Dans au moins l'une d'elles, les mêmes cabinets d'avocats ont comparu pour les parties à l'instance, et des demandes de détails similaires y ont été présentées. Dans le cadre de ces affaires, la Cour a rejeté les demandes de détails en raison des allégations des défenderesses relatives à l'absence de caractère distinctif des marques et du consentement découlant de l'utilisation courante par des tiers1. La Cour a estimé que ces allégations étaient suffisamment détaillées pour permettre aux demanderesses d'y répondre intelligemment. En l'espèce, la défenderesse fait valoir qu'un dessin rectangulaire utilisé en combinaison avec les couleurs rouge, blanche et bleue, ou les présumées marques de commerce Tommy, ne sont pas distinctifs des vêtements des demanderesses, et, comme il a été mentionné plus haut, qu'elle a remis à l'avocat des demanderesses des photographies des marques de vêtements énumérées. Comme je suis convaincu que la défenderesse a fourni suffisamment de renseignements dans sa défense pour permettre aux demanderesses de saisir les arguments avancés contre elles, aucun détail additionnel n'est nécessaire.


[7]      Dans le paragraphe 8 de sa défense, la défenderesse affirme que les présumées marques de commerce des demanderesses ne sont pas distinctives parce que ces dernières ont consenti à l'emploi des marques de commerce mentionnées aux paragraphes 6(a) et 7 et toléré cet usage. Comme cette allégation est intimement liée aux paragraphes 6(a) et 7 qui offrent suffisamment d'information aux demanderesses pour qu'elles connaissent les moyens invoqués contre elles, il est inutile de fournir d'autres détails à cet égard.


[8]      Au paragraphe 6(b) de la défense, la défenderesse soutient que Tommy Hilfiger Licensing Inc. a omis d'exercer, sous le régime d'une licence, un contrôle direct ou indirect sur l'emploi des marques de commerce par Tommy Hilfiger Canada Inc. Personne n'est mieux placé que les demanderesses pour savoir ce qu'elles ont à prouver pour réfuter cette allégation de la défenderesse. Par conséquent, aucun détail supplémentaire n'est requis sur ce point.


[9]      Au paragraphe 9 de sa défense, la défenderesse nie que les demanderesses ont employé les marques de commerce enregistrées sous les numéros 432095 et 482283 à titre de marques de commerce depuis la présumée date du premier emploi. Elle invoque en outre, relativement à ces deux marques de commerce, que Tommy Hilfiger Licensing Inc., ou tout présumé prédecesseur, n'était pas l'entité ayant droit à l'enregistrement des présumées marques de commerce. Ici encore, personne n'est mieux placé que les demanderesses pour connaître la preuve qu'elles devront faire compte tenu des allégations précédemment formulées dans la défense.


[10]      Lors de l'audition de la requête, l'avocat des demanderesses n'a pas insisté pour connaître, relativement au paragraphe 10 de la défense, l'identité et l'établissement du fabricant et du fournisseur de la défenderesse; il n'est pas nécessaire de donner d'autres détails à cet égard.


[11]      Pour les motifs susmentionnés, j'arrive à la conclusion que les paragraphes 6(a), 6(b), 7, 8, 9 et 10 de la défense doivent demeurer inchangés et que la défenderesse n'a pas à fournir des détails additionnels en ce qui les concerne.


[12]      La requête est donc rejetée avec dépens.



     O R D O N N A N C E

     La présente requête est rejetée avec dépens.

                         PIERRE DENAULT

     Juge

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU GREFFE :              T-1305-98
INTITULÉ DE LA CAUSE :      TOMMY HILFIGER LICENSING INC. ET AL. c. YM INC. (SALES)
LIEU DE L'AUDIENCE :          OTTAWA (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE :          LE 10 SEPTEMBRE 1998

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE PRONONCÉS LE 15 SEPTEMBRE 1998 PAR LE JUGE DENAULT.

ONT COMPARU :

M. CHARLES E. BEALL                      POUR LES DEMANDERESSES
M. ELLIOTT SIMCOE                      POUR LA DÉFENDERESSE

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

GOWLING, STRATHY & HENDERSON              POUR LES DEMANDERESSES

OTTAWA (ONTARIO)

SMART & BIGGAR                      POUR LA DÉFENDERESSE

OTTAWA (ONTARIO)

__________________

     1      La preuve a convaincu la Cour du fait que les défenderesses avaient fourni un énoncé des faits étayant cette demande, de même que des photocopies de nombreux vêtements réels.

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