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Date : 19971215


Dossier : T-1814-96


AFFAIRE INTÉRESSANT une décision de la Commission des oppositions

des marques de commerce relativement à l'opposition de Coca-Cola Company,

faisant parfois affaires sous le nom et l'appellation de Coca-Cola Foods,

une division de The Coca-Cola Company, à la demande no 679,225 de

SUN-RYPE PRODUCTS LTD. relative à la marque de commerce

SUN-RYPE HI-5 et à son dessin

ENTRE :

     SUN-RYPE PRODUCTS LTD.,

     appelante,

     - et -


THE COCA-COLA COMPANY, faisant parfois affaires sous le nom

et l'appellation de Coca-Cola Foods,

une division de The Coca-Cola Company

     intimée.

     JUGEMENT

LE JUGE ROULEAU :

[1]      L'appel est accueilli. L'appelante a droit à ses dépens.

                             "P. Rouleau"
                                 JUGE

OTTAWA (Ontario)

le 15 décembre 1997

Traduction certifiée conforme             
                             Raymond Trempe, B.C.L.

Date : 19971215


Dossier : T-1814-96


AFFAIRE INTÉRESSANT une décision de la Commission des oppositions

des marques de commerce relativement à l'opposition de Coca-Cola Company,

faisant parfois affaires sous le nom et l'appellation de Coca-Cola Foods,

une division de The Coca-Cola Company, à la demande no 679,225 de

SUN-RYPE PRODUCTS LTD. relative à la marque de commerce

SUN-RYPE HI-5 et à son dessin

ENTRE :

     SUN-RYPE PRODUCTS LTD.,

     appelante,

     - et -


THE COCA-COLA COMPANY, faisant parfois affaires sous le nom

et l'appellation de Coca-Cola Foods,

une division de The Coca-Cola Company

     intimée.

     MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE ROULEAU :

[1]      Il s'agit d'un appel, interjeté sous le régime de l'article 56 de la Loi sur les marques de commerce, d'une décision du registraire des marques de commerce portant que la marque de l'appelante n'est pas enregistrable parce qu'elle crée de la confusion avec certaines marques de commerce déposées au nom de l'intimée.

[2]      Les faits sont simples. Le 4 avril 1991, l'appelante a déposé, sous le numéro 679,225, une demande d'enregistrement de la marque de commerce suivante pour emploi en liaison avec des jus de fruits, fondée sur un emploi projeté au Canada :

[3]      La demande a été publiée dans le Journal des marques de commerce de 1991. Le 18 mars 1992, l'intimée a déposé auprès du registraire des marques de commerce un avis d'opposition dans lequel elle s'opposait à la demande pour les trois motifs suivants :

     a)      la marque de commerce de l'appelante n'est pas enregistrable parce qu'elle crée de la confusion avec les marques de commerce déposées au nom de l'intimée qui suivent :
         FIVE ALIVE, enr. no 260,305;

         DELI-CINQ, enr. no 265,829

         FIVE ALIVE LIGHT et dessin, enr. no 358,627;

         DELI-CINQ LEGER et dessin, enr. no 358,272;

         FIVE ALIVE LIGHT, enr. no 385,814;

             

         DELI-CINQ LEGER, enr. no 385,815; et

         HI-C, enr. no UCA50875;

     b) l'appelante n'est pas la personne qui a droit à l'enregistrement de sa marque;         

     c) la marque de l'appelante n'est pas distinctive.

[4]      L'appelante a produit une contre-déclaration et les parties ont toutes deux produit des éléments de preuve. Le 6 juin 1996, David J. Martin, membre de la Commission des oppositions des marques de commerce, a, pour le compte du registraire des marques de commerce, rendu une décision rejetant la demande de l'appelante, notamment pour les motifs suivants :

                 [TRADUCTION] En appliquant le critère de la confusion, j'ai tenu compte du fait qu'il s'agit d'une question de première impression et de souvenirs imparfaits. Au vu de mes conclusions qui précèdent et en particulier de la ressemblance entre les marchandises et les commerces des parties, de la réputation liée aux marques HI-C et FIVE ALIVE de l'opposante et du degré de ressemblance entre la marque de l'auteur de la demande et les marques de l'opposante (en particulier HI-C), je conclus que l'auteur de la demande ne s'est pas acquitté de la charge qui lui incombait de prouver que sa marque projetée ne crée pas de confusion avec les marques de commerce HI-C et FIVE ALIVE de l'opposante. L'auteur de la demande ne s'est donc pas acquitté du fardeau qui lui incombait d'établir que sa marque distingue ou permet de distinguer ses marchandises de celles de l'opposante à l'échelle du Canada. Le troisième motif est donc retenu.                 
                 En ce qui a trait au premier motif d'opposition, la période pertinente pour l'examen des circonstances entourant la question de la confusion avec une marque de commerce déposée débute à la date de ma décision. En ce qui a trait au deuxième motif, la période pertinente pour l'examen des circonstances visées débute à la date de production de la demande par l'auteur. Les deux motifs portent sur la question de la confusion et, au vu de mes conclusions quant au troisième motif d'opposition, je conclus que ces premier et deuxième motifs méritent tous deux d'être retenus.                 

[5]      Les tribunaux accordent généralement beaucoup de poids à toute décision du registraire des marques de commerce sur l'opportunité d'accorder ou de refuser l'enregistrement d'une marque puisqu'il s'agit d'un domaine dans lequel il doit être présumé avoir une expertise confirmée. Toutefois, lorsque la décision du registraire est portée en appel, pour résoudre la question de savoir si une marque de commerce crée de la confusion, il faut procéder à l'examen judiciaire d'une question de fait pratique et la Cour a toute latitude pour trancher en se fondant sur les faits établis devant elle. Dans la présente espèce, après avoir examiné la décision attaquée et pris en considération les observations écrites et orales des parties, je suis convaincu qu'il y a lieu d'accueillir l'appel pour les motifs suivants.

[6]      En premier lieu, les marques de l'intimée ne sont pas distinctives au point de pouvoir être qualifiées de marques fortes. Au contraire, elles sont des marques à faible caractère distinctif inhérent qui ne méritent qu'un degré limité de protection. Par exemple, l'élément descriptif HI dans la marque HI-C de l'intimée, ou l'équivalent phonétique HIGH ou HY, fait partie de neuf autres marques figurant au registre des marques de commerce qui appartiennent à des tiers et qui sont employées en liaison avec des jus et des boissons, à savoir :

         1. HIGH COUNTRY;                 
         2. HIGH PARK;                 
         3. HY & ZELS'S;                 
         4. HI-SPOT;                 
         5. HI-SPOT et dessin;                 
         6. HI-TWIST;                 
         7. HIGH-N-DRY;                 
         8. HY-5 (en instance);                 

         9. HIGH VALLEY (en instance).

[7]      De même, le mot FIVE dans la marque FIVE ALIVE de l'intimée est un élément de quinze autres marques figurant au registre en liaison avec des jus et des boissons :

         1. TAKE FIVE;

         2. PRENDS 5;

         3. CITRUS FIVE et dessin;

         4. CITRUS 5;

         5. TAKE 5;

         6. TROPIC 5;

         7. 5 ALARM GINGER BEER;

         8. Dessin 5

         9. Dessin 5 de LABATT;

         10. Dessin de 5 H & H;

         11. TROPICAL 5;

         12. LIFESAVERS FIVE FLAVOR et dessin;

         13. 5 Q;

         14. FIVE ROSES;

         15. HY-5.

[8]      En deuxième lieu, lorsqu'il s'agit d'examiner si une marque de commerce crée de la confusion avec une autre, il faut poser la question de savoir si l'emploi de la marque projetée est susceptible de porter à inférer que les marchandises qui lui sont liées et celles qui sont liées à la marque de commerce déposée sont produits ou commercialisés par la même entreprise.

[9]      Dans la présente espèce, l'intimée prétend que l'emploi des éléments HI et 5 dans la marque de commerce de l'appelante crée de la confusion avec ses propres marques de commerce déposées. Toutefois, le fait que les deux marques comportent ces éléments particuliers ne suffit pas, en soi, à emporter la conclusion que les marques créent de la confusion. Les critères qu'il faut appliquer sont ceux de la présentation, du son et des idées que suggèrent les marques. Dans l'application de ces critères, le premier principe à respecter est celui selon lequel les marques doivent être examinées dans leur ensemble et non comme des éléments disséqués. C'est l'idée évoquée par chaque marque, c'est-à-dire l'impression nette laissée à l'esprit par la marque dans son ensemble, qui doit être examinée. Par conséquent, les marques ne devraient pas faire l'objet d'une analyse approfondie et détaillée, mais plutôt être examinées du point de vue de la personne qui, n'ayant qu'un souvenir imparfait d'une marque, voit ou entend par la suite la marque concurrente par elle-même.

[10]      C'est cette démarche qui a été suivie par la Cour dans l'affaire Sealy Sleep Products Ltd. v. Simpson's-Sears Ltd (1960), 20 Fox Pat. C. 76, (C. Éch.), où le président Thorson a fait le commentaire suivant, aux pp. 81 et 82 :

     [TRADUCTION] Lorsqu'il s'agit de déterminer si une marque de commerce crée de la confusion avec une autre, il n'est pas approprié de les décomposer en leurs éléments constitutifs, de faire porter l'attention sur les éléments qui sont semblables et de conclure qu'en raison de l'existence de ressemblances dans les marques de commerce, les marques de commerce dans leur ensemble créent de la confusion entre elles. Les marques de commerces peuvent être différentes les unes des autres et donc ne pas créer de confusion entre elles lorsqu'on les examine dans leur ensemble, même si certains éléments examinés séparément contiennent des ressemblances. C'est la combinaison des éléments qui constitue la marque de commerce, et c'est l'effet de l'ensemble de la marque de commerce, et non l'effet d'une partie particulière de celle-ci, qu'il faut considérer.         

[11]      Je suis convaincu que, en ce qui a trait à la première impression, les marques de commerce en cause sont dissemblables pour l'essentiel. La marque de l'appelante comprend le dessin distinctif SUN-RYPE "en forme de soleil rayonnant" qui figure bien en vue au haut de la marque; l'élément HI-5 est un dessin distinctif étroitement lié au dessin SUN-RYPE "en forme de soleil rayonnant" ; s'y ajoutent des illustrations de divers fruits, ainsi que les mots [TRADUCTION] "Un mélange tropical de jus d'ananas, de fruit de la passion, de goyave, de tangerine et d'orange" qui ont fait l'objet d'un désistement.

[12]      À mon avis, le registraire a donné trop d'importance à l'élément HI-5 de la marque de l'appelante et pas assez de poids à l'ensemble de la marque de l'appelante, en particulier à l'élément SUN-RYPE.

[13]      Enfin, le registraire a conclu que la marque de l'appelante n'avait pas du tout été révélée pendant la période pertinente. La preuve par affidavit démontre toutefois que la marque SUN-RYPE est employée et annoncée en liaison avec des jus de fruits et des produits connexes depuis 1959 et que le volume annuel des ventes de produits portant le nom commercial SUN RYPE et l'une ou plusieurs des marques de commerce de la famille SUN RYPE dépasse les 71 millions d'unités depuis 1990. La preuve montre aussi que plus de cent millions d'unités ont été vendues en 1995. De plus, contrairement aux conclusions de la Commission, il y a eu d'importantes ventes des produits Sun-Rype à l'est du Manitoba de 1993 à 1996.

[14]      Je suis convaincu par conséquent que l'appelante a prouvé que sa marque de commerce n'est pas susceptible de créer de la confusion avec les marques de commerce déposées de l'intimée. En conséquence, l'appel est accueilli et la décision du registraire des marques de commerce est annulée. L'appelante a droit à ses dépens.

                             "P. Rouleau" JUGE

OTTAWA (Ontario)

le 15 décembre 1997

Traduction certifiée conforme             
                             Raymond Trempe, B.C.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

    

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :              T-1814-96
INTITULÉ DE LA CAUSE :      SUN-RYPE PRODUCTS LTD., - ET -
                     THE COCA-COLA COMPANY ET AL.
LIEU DE L'AUDIENCE :          Vancouver (Colombie-Britannique)
DATE DE L'AUDIENCE :      Le 2 octobre 1997

MOTIFS DU JUGEMENT PRONONCÉS PAR LE JUGE ROULEAU

EN DATE DU              15 décembre 1997

ONT COMPARU :

Me David J. McGruder      pour la demanderesse
Me Rose-Marie Perry, c.r.      pour la défenderesse

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Oyen, Wiggs, Green & Mutala      pour la demanderesse

Vancouver (Colombie-Britannique)

Gowling, Strathy & Henderson      pour la défenderesse
Ottawa (Ontario)         
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