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Date : 20011017

Dossier : IMM-448-01

Référence neutre : 2001 CFPI 1118

ENTRE :

                                                             GURDIAL SINGH KANG

                                                                                                                                               Demandeur

                                                                              - et -

                              LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                   Défendeur

                                     MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE BLAIS

[1]                 Il s'agit d'une demande en vertu de l'article 82.1 de la Loi sur l'immigration (la "Loi") pour le contrôle judiciaire en vertu de l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale dans le but d'obtenir une ordonnance de mandamus à l'encontre du Ministre et de ses officiers désignés pour le défaut d'avoir donné suite à la demande de résidence permanente à l'intérieur d'un délai raisonnable.

[2]                 En date du 3 octobre 2001, le défendeur a déposé une demande d'autorisation pour déposer un affidavit supplémentaire.

[3]                 En début d'audience, le demandeur a informé la Cour qu'il ne s'opposait pas

au dépôt de cet affidavit supplémentaire. La Cour conclut donc sur ce point particulier que la requête du défendeur est accueillie sans frais.

FAITS PERTINENTS

[4]                 Gurdial Singh Kang est un citoyen de l'Inde. Il est venu au Canada en juillet 1995 et a revendiqué le statut de réfugié le 5 juillet 1995. Par décision datée du 24 avril 1996, la Commission a déterminé que le demandeur était un réfugié au sens de la Convention.

[5]                 Le demandeur a ensuite fait application pour obtenir la résidence permanente le 25 juillet 1996, pour lui-même, sa femme et ses deux enfants qui étaient toujours à l'extérieur du pays.

[6]                 Le 9 juin 1997, une lettre fut envoyée au demandeur pour obtenir un échantillon de ses empreintes digitales, lesquelles furent reçues le 9 septembre 1997.


[7]                 Le 23 octobre 1997, le bureau du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, à Montréal, a examiné la possibilité de faire une demande afin que le demandeur puisse perdre le statut de réfugié en vertu des dispositions de l'article 69.2(1) de la Loi.

[8]                 Le 25 mars 1998, un agent du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration Canada, à Montréal, a déterminé, qu'à ce moment là, il n'y avait pas de preuve suffisante pour déposer une pareille application.

[9]                 Le 23 décembre 1998, une copie originale de la demande de résidence permanente fut envoyée au demandeur afin de mettre son dossier à date afin d'obtenir l'aval du Service canadien de renseignements et de sécurité (le "SCRS").

[10]            Le 6 août 1999, le SCRS invitait le demandeur à se présenter pour une interview, laquelle fut tenue à Montréal le 9 septembre 1999.

[11]            Le 10 avril 2000, l'épouse du demandeur fut interviewée par les autorités de l'immigration canadienne en Inde.

[12]            Le 23 octobre 2000, le SCRS transmettait son rapport aux autorités canadiennes de l'immigration.

[13]            Le 1er février 2001, le demandeur déposait une demande de contrôle judiciaire requérant une ordonnance de mandamus pour forcer le défendeur à fournir une réponse à la demande de résidence permanente considérant le délai déraisonnable depuis le dépôt de ladite demande.

[14]            Le 6 mars 2001, Madame Joanne Gorda expédiait un courrier électronique à M. Robert Gervais demandant s'il y avait une quelconque objection à finaliser le dossier du demandeur.

[15]            Le 11 mai 2001, Madame Sylvie Pelletier répondait à Madame Joanne Gorda:

De ne pas accorder le droit d'établissement au demandeur car il y a possibilité de la présentation d'une demande d'annulation du statut de réfugié du demandeur.


[16]            Finalement, nous référant à l'affidavit de Madame Sandra Guilmette daté du 31 août 2001, il existait une possibilité qu'une demande soit déposée auprès du Président de la Commission du statut de réfugié (la "Commission") dans les semaines à venir, le tout en vertu des dispositions de l'article 69.2(3) de la Loi, laquelle demande viserait à obtenir le renversement de la décision quant au statut de réfugié du demandeur sur la base qu'il existait une preuve, laquelle si elle avait été connue par la Commission, la décision rendue aurait pu être différente.

DISPOSITIONS LÉGALES PERTINENTES

[17]            Les articles 46.04(1) et 46.04(6) de la Loi se lisent comme suit:


46.04 (1) La personne à qui le statut de réfugié au sens de la Convention est reconnu par la section du statut peut, dans le délai réglementaire, demander le droit d'établissement à un agent d'immigration pour elle-même et les personnes à sa charge, sauf si elle se trouve dans l'une des situations suivantes_:

a) elle est un résident permanent;

b) un autre pays lui a reconnu le statut de réfugié au sens de la Convention et elle serait, en cas de renvoi du Canada, autorisée à retourner dans ce pays;

c) elle a la nationalité ou la citoyenneté d'un autre pays que celui qu'elle a quitté ou hors duquel elle est demeurée de crainte d'être persécutée;

d) elle a résidé en permanence dans un autre pays que celui qu'elle a quitté ou hors duquel elle est demeurée de crainte d'être persécutée et elle serait, en cas de renvoi du Canada, autorisée à retourner dans ce pays.

(6) L'agent d'immigration rend sa décision le plus tôt possible et en avise par écrit l'intéressé.

46.04 (1) Any person who is determined by the Refugee Division to be a Convention refugee may, within the prescribed period, apply to an immigration officer for landing of that person and any dependant of that person, unless the Convention refugee is

(a) a permanent resident;

(b) a person who has been recognized by any country, other than Canada, as a Convention refugee and who, if removed from Canada, would be allowed to return to that country;

(c) a national or citizen of a country, other than the country that the person left, or outside of which the person remains, by reason of fear of persecution; or

(d) a person who has permanently resided in a country, other than the country that the person left, or outside of which the person remains, by reason of fear of persecution, and who, if removed from Canada, would be allowed to return to that country.

(6) An immigration officer to whom an application is made under subsection (1) shall render the decision on the application as soon as possible and shall send a written notice of the decision to the applicant.



[18]            Il apparaît clair que la preuve recueillie de l'épouse du demandeur en Inde, laquelle semble contredire des éléments importants de la déclaration du demandeur devant la Commission est un véritable pavé dans la mare quant au dossier du demandeur.

[19]            Je n'ai aucune hésitation à reconnaître que le défendeur était en droit de s'interroger quant au droit pour le demandeur d'obtenir le statut de résident permanent si son statut de réfugié avait été obtenu d'une façon illégale.

[20]            Cependant, les critères établis par l'article 46.04 ne permettent pas au défendeur de réévaluer le bien-fondé du statut de réfugié qui a été obtenu par le demandeur devant une autre instance.

[21]            Il était tout à fait légitime que le défendeur procède à d'autres vérifications quant au dossier du demandeur notamment auprès du SCRS, ce qui justifie amplement une partie du délai encouru.

[22]            Cependant, le défendeur aurait pu procéder à la demande de révision du dossier de statut de réfugié auprès de la Commission, beaucoup plus tôt qu'il ne l'a fait.

[23]            Par ailleurs, la Cour a été informée que la demande de révision de la décision de la Commission, bien que tardive, a été présentée en septembre 2001.


[24]            La Cour est en droit de se demander si les intérêts de la justice seraient bien servis par l'émission d'une ordonnance de mandamus pour forcer le défendeur à prendre une décision quant à la demande de résidence permanente, alors que le pilier central sur lequel est basé cette demande, soit le statut de réfugié du demandeur, est présentement l'objet d'une contestation judiciaire.

[25]            La Cour doit considérer également que si elle donnait raison au demandeur et qu'elle émettait une ordonnance de mandamus forçant le défendeur à prendre une décision sur le statut de résidence permanente, le défendeur n'est nullement obligé de répondre favorablement à cette demande, alors que le statut de réfugié du demandeur est contesté devant la Commission.

[26]            Le procureur du défendeur a prétendu avec raison que l'émission d'un mandamus constitue un recours discrétionnaire alors même que toutes les conditions pour l'obtenir puissent exister.


[27]            J'en arrive donc à la conclusion que même si, à première vue, les conditions préalables pour qu'une décision favorable puisse être rendue par le défendeur quant à la demande de résidence permanente sont présentes, émettre une ordonnance de mandamus pour forcer le défendeur à rendre une pareille décision ne servirait pas les intérêts de la justice à ce stade-ci.

[28]            Je dois mentionner que je n'ai pas de félicitations à transmettre au défendeur pour avoir tenu le demandeur dans l'ignorance quant aux véritables raisons qui l'empêchaient de rendre une décision quant à la demande de résidence permanente puisque ces dernières n'auraient été connues que lors du dépôt de la réponse du défendeur à la demande de contrôle judiciaire en mandamus.

[29]            De l'aveu même du procureur du demandeur, il est possible que le demandeur ait tout simplement attendu le résultat de la demande de reconsidération devant la Commission avant de déposer une demande en mandamus devant la Cour fédérale.

[30]            Je n'ai nulle hésitation à considérer que la lenteur avec laquelle le dossier a été traité par le défendeur est en bonne partie responsable de ce recours qui apparaît maintenant prématuré dans les circonstances.

[31]            J'en arrive donc à la conclusion que cette requête en mandamus doit être rejetée, puisque prématurée.

[32]            Les procureurs n'ont soumis aucune question pour certification.


[33]            Considérant les circonstances particulières de ce dossier et considérant la règle 22 des Règles en matière d'immigration (1993), les parties sont invitées à me soumettre des soumissions écrites concernant la possibilité d'accorder des frais dans ce dossier. Le demandeur devra déposer et signifier ses soumissions écrites au plus tard le 29 octobre 2001 et la défenderesse devra déposer et signifier les siennes au plus tard le 12 novembre 2001.

Pierre Blais                                          

Juge

OTTAWA, ONTARIO

Le 17 octobre 2001

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