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Date : 20200220


Dossier : IMM‑4553‑19

Référence : 2020 CF 282

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Vancouver (Colombie‑Britannique), le 20 février 2020

En présence de madame la juge Roussel

ENTRE :

PRINCE NIMELY

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Contexte

[1]  Le demandeur, Prince Nimely, sollicite le contrôle judiciaire d’une décision rendue le 8 juillet 2019, par laquelle un agent des visas [l’agent] du haut‑commissariat du Canada à Accra, au Ghana, a refusé sa demande de permis d’études présentée à l’extérieur du Canada.

[2]  Le demandeur est citoyen du Libéria. En 2019, le demandeur a présenté une demande de permis d’études en vertu du paragraphe 216(1) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227, après avoir été admis à un programme de certificat d’études bibliques d’un an au Christian College et à la School of Graduate Theological Studies [le Collège] du Canada, situé à Whitby, en Ontario, débutant en septembre 2019 et se terminant en avril 2020.

[3]  Après avoir examiné la demande, l’agent n’était pas convaincu que le demandeur quitterait le Canada à la fin de son séjour, pour trois (3) motifs : (1) le plan d’études du demandeur semblait vague et mal documenté; (2) les incitations du demandeur à rester au Canada pourraient l’emporter sur les liens qu’il a avec son pays d’origine, étant donné des liens familiaux ou des raisons économiques de rester au Canada; (3) le demandeur ne semblait pas suffisamment bien établi pour que les études proposées constituent une dépense raisonnable.

[4]  Le demandeur soutient que la décision de l’agent est déraisonnable et non étayée par les éléments de preuve.

II.  Analyse

[5]  Dans l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov], la Cour suprême du Canada a conclu que le caractère raisonnable d’une décision est la norme de contrôle présumée qui s’applique à l’égard des décisions prises par les décideurs administratifs (Vavilov, aux paragraphes 10, 16 et 17). Aucune des exceptions décrites dans Vavilov ne s’applique ici.

[6]  En donnant des orientations sur ce qui constitue une décision raisonnable, la Cour suprême du Canada a expliqué qu’« [i]l incombe à la partie qui conteste la décision d’en démontrer le caractère déraisonnable » (Vavilov, au paragraphe 100). La cour de révision doit porter son attention à « la décision effectivement rendue par le décideur, notamment au raisonnement suivi et au résultat de la décision » (Vavilov, au paragraphe 83) pour déterminer si la décision est « fondée sur une analyse intrinsèque cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti » (Vavilov, au paragraphe 85). Il faut accorder une attention particulière aux motifs écrits du décideur et les interpréter de façon globale et contextuelle (Vavilov, au paragraphe 97). Il ne s’agit pas d’une « chasse au trésor, phrase par phrase, à la recherche d’une erreur » (Vavilov, au paragraphe 102). Si « la décision possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité, et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle‑ci » il n’appartient pas à la cour de révision de substituer le résultat qu’elle préférerait (Vavilov, au paragraphe 99).

[7]  Dans le contexte des décisions rendues par les agents des visas, il n’est pas nécessaire d’avoir des motifs exhaustifs pour que la décision soit raisonnable étant donné les pressions énormes qu’ils subissent pour produire un grand volume de décisions chaque jour. (Vavilov, aux paragraphes 91 et 128; et Hajiyeva c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 71, au paragraphe 6 [Hajiyeva]). De plus, il est bien établi qu’ils bénéficient d’une retenue considérable compte tenu du niveau d’expertise qu’ils apportent à ces questions (Vavilov, au paragraphe 93; Hajiyeva, au paragraphe 4; Solopov  c Canada (Citoyenneté et Immigration)), 2016 CF 690, au paragraphe 12; Akomolafe c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 472, au paragraphe 22).

[8]  Le demandeur soutient qu’il était déraisonnable que l’agent conclue que son plan d’études semblait vague et mal documenté. Sa demande de permis d’études indique qu’il est pasteur de l’église de sa congrégation depuis 2008 et qu’il a suivi des études bibliques en 2016 au WEPA College of Theology and Mission au Libéria. Selon le demandeur, l’agent aurait dû prendre en considération que ce cours d’un an au Canada n’était qu’une progression naturelle dans sa vie biblique, éducative et professionnelle.

[9]  Même si l’agent avait pu examiner le plan d’études du demandeur de la manière dont le demandeur laisse entendre, il lui était tout à fait loisible de conclure que le plan était effectivement vague et mal documenté. Il n’y avait pas de plan d’études décrivant les objectifs à long terme du demandeur. Le demandeur n’a pas expliqué en quoi ces études lui seraient profitables. Rien n’indiquait en quoi ces études étaient différentes de celles qu’il avait suivies en 2016. Outre les déclarations du demandeur dans son formulaire de demande et la lettre d’acceptation du Collège, il n’y avait tout simplement pas d’autres renseignements que l’agent puisse évaluer.

[10]  Le demandeur a également fait valoir qu’il était déraisonnable que l’agent croie que ses motivations à rester au Canada pourraient l’emporter sur ses liens avec son pays d’origine, étant donné que son épouse, ses quatre (4) enfants mineurs et sa congrégation se trouvent au Libéria.

[11]  L’argument du demandeur doit être rejeté. Tout d’abord, l’agent n’avait pas l’avantage de savoir que le demandeur avait des enfants. Rien dans le dossier ne permet de soutenir ces allégations. De plus, même si l’agent aurait pu conclure que le lien qu’il avait avec son épouse et sa congrégation l’incitait fortement à retourner dans son pays, il n’était pas déraisonnable que l’agent conclue le contraire compte tenu du dossier dont il disposait.

[12]  Enfin, le demandeur soutient que l’agent s’est trompé sur la question de la capacité qu’il avait de subvenir à ses besoins pendant qu’il se trouvait au Canada. La lettre d’acceptation du Collège indiquait que ses frais de scolarité étaient payés au complet, et sa demande de permis d’études indiquait que ses autres frais seraient payés par son église. Toutefois, le demandeur concède qu’il n’a fourni aucun document financier de l’église ou autre preuve de fonds indiquant la façon dont il pourrait subvenir à ses besoins au Canada et à ceux de sa famille au Libéria, tout en poursuivant ses études au Canada. En l’absence de tels documents, il n’était pas déraisonnable que l’agent ait des préoccupations concernant le caractère raisonnable des dépenses pour venir étudier au Canada.

[13]  Je reconnais qu’un agent des visas doit examiner l’ensemble de la situation du demandeur, mais il incombait au demandeur d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il quitterait le Canada à la fin du séjour autorisé. Sa demande manque de renseignements et de détails. De plus, le demandeur n’a produit aucun autre élément de preuve supplémentaire à l’appui de sa demande, à part la lettre d’acceptation du Collège et les accusés de réception relatifs au paiement de ses frais de scolarité. Dans ce contexte, je suis convaincue que les motifs de l’agent répondaient aux renseignements et aux éléments de preuve fournis par le demandeur.

[14]  Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[15]  Aucune question d’importance générale n’a été proposée aux fins de certification, et je conviens que l’affaire n’en soulève aucune.


JUGEMENT dans le dossier IMM‑4553‑19

LA COUR STATUE que :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Aucune question de portée générale n’est certifiée.

« Sylvie E. Roussel »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 2e jour de mars 2020

Caroline Tardif, traductrice


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑4553‑19

INTITULÉ :

PRINCE NIMELY c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE l’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (Colombie‑Britannique)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 19 FÉVRIER 2020

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE ROUSSEL

DATE DES MOTIFS :

LE 20 FÉVRIER 2020

COMPARUTIONS :

Me Malvin J. Harding

POUR LE DEMANDEUR

Me Charlotte Chan

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Malvin J. Harding

Avocat

Surrey (Colombie‑Britannique)

POUR LE DEMANDEUR

Procureur général du Canada

Vancouver (Colombie‑Britannique)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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