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Date : 20200120


Dossier : T‑210‑12

Référence : 2020 CF 78

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 20 janvier 2020

En présence de madame la protonotaire Mandy Aylen

ENTRE :

JENNIFER MCCREA

représentante demanderesse

et

SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA

défenderesse

et

SARAH CORNIOLA

demanderesse

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  La demanderesse, Sarah Corniola, a déposé la présente demande de contrôle de la décision, en vertu de l’article 8 de l’entente de règlement conclue dans le cadre du présent recours collectif et approuvée par madame la juge Kane, dans son ordonnance et ses motifs datés du 29 janvier 2019. Mme Corniola sollicite le contrôle de la décision du 13 novembre 2019, par laquelle l’administrateur du recours collectif portant sur les prestations de maladie de l’assurance‑emploi a rejeté sa demande de prestations de maladie.

[2]  Pour les motifs exposés ci‑dessous, je conclus que Mme Corniola ne satisfait pas à la définition du groupe et que, par conséquent, la décision de l’administrateur est confirmée.

I.  Le contexte

[3]  Le contexte du recours collectif sous‑jacent est décrit en détail dans les décisions McCrea c Canada (Procureur général), 2013 CF 1278, [2013] ACF no 1444 [McCrea 2013], McCrea c Canada (Procureur général), 2015 CF 592, [2015] ACF no 1225 (QL) [McCrea 2015], ainsi que dans l’ordonnance et les motifs de madame la juge Kane datés du 29 janvier 2019.

[4]  En somme, il s’agit d’un recours collectif fondé sur une prétention formulée par la représentante demanderesse, à savoir que certaines personnes, dont elle‑même, tombées malades alors qu’elles touchaient des prestations parentales, se sont vu refuser illégalement des prestations de maladie sous le régime de la Loi sur l’assurance‑emploi. Le recours collectif a été autorisé, mais après modification de la description du groupe. La Cour a en effet refusé d’élargir cette description afin d’y inclure les personnes qui, au cours de la période en cause, ont « été informées de vive voix ou par écrit par les défendeurs, la Commission ou Ressources humaines et Développement des compétences Canada (RHDCC) qu’elles n’étaient pas admissibles à un congé de maladie, étant donné qu’elles étaient en congé parental ou qu’elles étaient autrement indisponibles au travail au moment où leur demande de congé de maladie aurait été présentée si, après avoir reçu cet avis et ces déclarations, elles ne s’étaient pas abstenues de présenter une telle demande ».

 

[5]  Pour les besoins de la présente demande, il est essentiel d’examiner certains détails de l’entente de règlement, de sa mise en œuvre et du processus relatif aux demandes de contrôle.

[6]  Le paragraphe 4.02 de l’entente de règlement définit le groupe ainsi :

Toutes les personnes qui, au cours de la période s’étendant du 3 mars 2002 au 23 mars 2013, inclusivement :

  • i) ont présenté une demande de prestation et reçu des prestations parentales au titre de la Loi sur l’assurance‑emploi ou des prestations équivalentes au titre de la Loi sur l’assurance parentale du Québec;

  • ii) sont tombées malades, ont été blessées ou mises en quarantaine alors qu’elles touchaient les prestations parentales en question;

  • iii) ont présenté une demande de prestation de maladie relativement à la maladie, à la blessure ou à la mise en quarantaine mentionnée au point ii) ci‑dessus;

  • iv) ont vu leur demande de conversion de prestations parentales en prestations de maladie refusée pour l’une ou l’autre des raisons suivantes :

a)  elles étaient autrement indisponibles au travail; ou

b)  elles n’avaient pas reçu au moins une semaine de prestations de maladie au cours de la période de prestations parentales.

[7]  Suivant le paragraphe 5.01 de l’entente de règlement, toute personne en mesure d’établir qu’elle répond à la définition du groupe et ayant touché moins de 15 semaines de prestations de maladie au cours de la période de prestations durant laquelle la demande originale de conversion en prestations de maladie a été présentée est admissible à un paiement individuel (au sens de l’entente de règlement).

[8]  L’entente de règlement prévoit que les personnes qui ont été identifiées à l’issue du projet d’examen des dossiers sont réputées être des membres admissibles du groupe. Pour ce qui est des personnes n’ayant pas été identifiées à l’issue de ce projet, il est nécessaire d’établir qu’elles satisfont à la définition du groupe. Le paragraphe 5.03 de l’entente de règlement est ainsi libellé :

Le cas échéant, les demandeurs qui n’ont pas été identifiés comme membres du groupe à l’issue du projet d’examen des dossiers seront admissibles s’il est établit [sic] qu’ils satisfont à la définition de groupe sur la base de preuve d’une demande de conversion en prestations de maladie dans le dossier de EDSC dans : a) les renseignements supplémentaires concernant la demande de prestations; b) la liste de vérification des demandes de conversion utilisée pendant la période visée par le recours collectif; ou c) un autre dossier tenu par EDSC. Subsidiairement, EDSC prendra en compte un élément de preuve documentaire fournie [sic] par un demandeur qui atteste la présentation d’une demande de conversion.

[9]  L’article 7 de l’entente de règlement expose le processus d’administration des demandes à l’intention des personnes souhaitant présenter une demande de prestations au titre de l’entente de règlement. L’administrateur est chargé du traitement de toutes les demandes et il remet ses décisions aux demandeurs par écrit.

[10]  Suivant l’article 8 de l’entente de règlement, un demandeur peut demander à la Cour fédérale le contrôle de la décision de l’administrateur, si celui‑ci détermine que la demande n’est pas fondée et refuse au demandeur un paiement individuel.

[11]  Le paragraphe 8.05 de l’entente de règlement prévoit que le protonotaire de la Cour fédérale qui a été désigné détermine si le demandeur est ou non un membre admissible du groupe (au sens de l’entente de règlement), à la suite de quoi soit il maintient la décision de l’administrateur, soit il infirme cette décision et renvoie la demande à l’administrateur afin que celui‑ci procède au calcul et au traitement du paiement individuel auquel le demandeur a droit.

II.  La décision de l’administrateur

[12]  Le 4 septembre 2019, la demanderesse a présenté à l’administrateur une demande de prestations de maladie pour une période de cinq semaines, soit du 7 décembre 2011 au 9 janvier 2012.

[13]  Dans une lettre datée du 13 novembre 2019, l’administrateur a informé la demanderesse qu’il rejetait sa demande. Il a déclaré ce qui suit :

[traduction]

Au terme d’un examen minutieux de votre dossier, nous avons déterminé que vous n’êtes pas admissible à un paiement individuel, conformément à l’entente de règlement approuvée, relativement à la demande de prestations d’assurance‑emploi commençant le 2 octobre 2011, au motif que vous ne satisfaites pas à la définition du groupe, car vous n’avez pas présenté de demande de prestations de maladie pendant que vous touchiez des prestations parentales de l’assurance‑emploi ou des prestations équivalentes au titre de la Loi sur l’assurance parentale (RQAP) du Québec.

III.  Analyse

[14]  Dans le formulaire de demande de contrôle de la décision qu’elle a rempli, la demanderesse sollicite le contrôle de la décision de l’administrateur pour les motifs suivants :

[traduction]

J’ai joint une copie de la décision rendue par Service Canada le 27 mars 2012 de ne pas me verser de prestations de maladie de l’assurance‑emploi pendant mon congé de maternité et mon congé parental, comme la lettre en question le précise. Cela prouve que votre décision du 13 novembre 2019 n’est pas valide.

[15]  La lettre du 27 mars 2012 de RHDCC prévoit notamment ce qui suit :

[TRADUCTION]

Nous vous écrivons pour vous informer que nous ne pouvons pas vous verser de prestations de maladie de l’assurance‑emploi pour la période du 7 décembre 2011 au 9 janvier 2012.

C’est parce que vous n’avez pas prouvé que, si vous n’aviez pas été malade, vous auriez été disponible pour travailler. Dans votre cas, vous étiez en congé de maternité et congé parental prévus.

[16]  Avant de rendre ma décision, j’ai pris connaissance des documents et du formulaire de la demanderesse, de la documentation produite par EDSC conformément au paragraphe 8.04 de l’entente de règlement, ainsi que des observations écrites déposées par EDSC. La demanderesse n’a pas présenté d’observations écrites supplémentaires, même si la possibilité de la faire lui a été accordée. Par conséquent, les seules observations de la demanderesse dont je dispose sont celles énoncées au paragraphe 14 ci‑dessus en ce qui concerne les raisons pour lesquelles elle avait déposé une demande de contrôle.

[17]  Selon la preuve dont je dispose, la demanderesse a présenté une demande de prestations de maternité de l’assurance‑emploi le 28 septembre 2011. Après le délai de carence de deux semaines, la demanderesse a reçu 15 semaines de prestations de maternité (de la semaine du 16 octobre 2011 à la semaine du 22 janvier 2012), suivies de 35 semaines de prestations parentales (de la semaine du 29 janvier 2012 à la semaine du 23 septembre 2012).

[18]  Pour satisfaire à la définition du groupe, la demanderesse doit avoir présenté une demande de prestation de maladie relativement à une maladie, à une blessure ou à une mise en quarantaine subie au cours de la période durant laquelle elle recevait des prestations parentales. Cependant, dans le cadre de la présente demande, la demanderesse cherche à obtenir des prestations de maladie pour la période de cinq semaines commençant le 7 décembre 2011, période durant laquelle elle recevait des prestations de maternité, et non des prestations parentales. Par conséquent, sa demande ne respecte pas les paramètres de l’entente de règlement.

[19]  Je souligne qu’il est malheureux que RHDCC ait mentionné le congé parental de la demanderesse dans sa lettre de refus du 27 mars 2012, plutôt que de simplement rejeter la demande de prestations de maladie en raison du congé de maternité. Cependant, le choix de libellé de RHDCC dans sa lettre du 27 mars 2012 ne change pas le fait que la demanderesse n’a pas reçu de prestations parentales pendant la période visée par la présente demande (du 7 décembre 2011 au 9 janvier 2012).

[20]  De plus, aucun des documents dont la Cour dispose, que ce soit ceux contenus dans le dossier d’EDSC ou ceux soumis par la demanderesse, ne prouve que la demanderesse avait présenté une demande de prestations de maladie ou une demande de conversion, alors qu’elle recevait des prestations parentales (c.‑à‑d. de la semaine du 29 janvier 2012 à la semaine du 23 septembre 2012).

[21]  Dans les circonstances, je conclus que la demanderesse ne satisfait pas à la définition du groupe.

[22]  Ayant déterminé que la demanderesse n’est pas visée par la définition du groupe, je conclus qu’elle n’est pas une membre admissible du groupe (au sens de l’entente de règlement). L’administrateur a correctement appliqué les paragraphes 4.02 et 5.03 de l’entente de règlement, et, par conséquent, sa décision est confirmée.

[23]  Aucuns dépens ne seront adjugés dans le cadre de la présente demande.


JUGEMENT dans le dossier T‑210‑12

  1. La décision de l’administrateur datée du 13 novembre 2019 concernant la demande de Sarah Corniola est confirmée.

« Mandy Aylen »

Protonotaire

Traduction certifiée conforme

Ce 29e jour de janvier 2020

Christian Laroche, LL.B., juriste-traducteur


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

DOSSIER :

T21012

 

INTITULÉ :

JENNIFER MCCREA C SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA et SARAH CORNIOLA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

OTTAWA (ONTARIO)

JUGEMENT ET MOTIFS :

MADAME LA PROTONOTAIRE MANDY AYLEN

 

DATE DU JUGEMENT

ET DES MOTIFS :

LE 20 JANVIER 2020

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Steven J Moreau

Cavalluzzo LLP

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LA REPRÉSENTANTE

DEMANDERESSE

 

Christine Mohr

Ayesha Laldin

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LA DÉFENDERESSE

 

Sarah Corniola

Pour son propre compte

POUR LA DEMANDERESSE

 

 

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