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Dossier : IMM-1125-19

Référence : 2020 CF 112

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 23 janvier 2020

En présence de monsieur le juge Russell

ENTRE :

XIAONING ZANG

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  INTRODUCTION

[1]  La Cour est saisie d’une demande présentée au titre du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR], en vue d’obtenir le contrôle judiciaire d’une décision datée du 19 décembre 2018 [la décision] par laquelle un agent des visas [l’agent] a rejeté la demande de permis de travail de la demanderesse.

II.  CONTEXTE

[2]  La demanderesse est une citoyenne de la Chine. Elle réside actuellement dans la ville de Hong Kong, avec son mari et sa fille.

[3]  La demanderesse a demandé un permis de travail de deux ans afin de venir travailler au Canada comme dirigeante principale des finances [DPF] chez 2043167 Alberta Ltd. [l’entreprise], une entreprise de construction résidentielle en démarrage en Alberta dans laquelle la demanderesse a investi 600 000 $ et est actionnaire majoritaire. La demanderesse fait remarquer que son mari et sa fille l’accompagneront au Canada si elle obtient le permis de travail demandé. Son mari a également demandé un permis de travail ouvert à titre de personne à charge de la demanderesse. passible

[4]  Le 28 février 2018, l’entreprise a reçu les résultats d’une étude d’impact sur le marché du travail [l’EIMT] d’Emploi et Développement social Canada et de Service Canada, laquelle concluait que l’embauche d’un travailleur étranger au poste de DPF de l’entreprise aurait un « effet positif ou neutre sur le marché du travail canadien ». La demanderesse a donc été invitée à présenter sa demande de permis de travail à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada [IRCC]. Les exigences du poste énoncées dans l’EIMT comprenaient un baccalauréat, ainsi que des compétences orales et écrites en anglais, et le numéro de téléphone indiqué pour l’entreprise était le « 999-999-9999 », et une boîte postale était fournie pour l’adresse.

[5]  La demanderesse a présenté une première demande de permis de travail en mai 2018, qui a toutefois été rejetée le 3 août 2018. La demanderesse affirme que cette demande a été rejetée parce qu’elle n’a pas fourni [traduction« suffisamment d’éléments de preuve et de documents ». Par conséquent, elle a présenté une autre demande de permis de travail le 22 août 2018, laquelle fait l’objet de la présente demande de contrôle judiciaire.

[6]  Dans une lettre du président-directeur général de l’entreprise datée du 14 août 2018 que la demanderesse a déposée avec sa demande, son futur employeur a fourni la description du poste de DPF. Dans cette lettre, il est noté que l’entreprise a besoin d’un DPF qualifié pour superviser et aider à établir la stratégie financière de l’entreprise. Le titulaire du poste doit entre autres superviser toutes les opérations financières de l’entreprise, superviser les aspects financiers de plusieurs projets de construction, maintenir les permis du gouvernement, préparer des rapports pour le conseil d’administration et visiter les chantiers de construction pour produire des rapports d’étape sur chaque projet.

[7]  La demanderesse a présenté des éléments de preuve démontrant qu’elle détient un diplôme de l’École des agents de bord de la Civil Aviation University of China, ainsi qu’un certificat en administration du Programme de formation avancée de niveau supérieur de la Northeast Normal University. Elle a également présenté son curriculum vitae, qui indique qu’elle a travaillé comme adjointe du directeur général de Set Sheng International Trade Limited [Set Sheng] de 2006 à 2012, comme directrice adjointe de l’administration chez Set Sheng de 2012 à 2015, et comme directrice du marketing chez Sinolink Consultants Services Ltd [Sinolink] depuis 2015. En plus des expériences de travail énoncées dans son curriculum vitae, la demanderesse a fourni une lettre indiquant que Sinolink est un cabinet-conseil spécialisé dans les investissements à l’étranger, y compris les investissements immobiliers et commerciaux au Canada et aux États-Unis.

[8]  Pour démontrer ses compétences en anglais, la demanderesse a présenté des éléments de preuve confirmant qu’elle avait obtenu un certificat collégial de niveau 4 en anglais en janvier 2003, alors qu’elle étudiait à l’École des agents de bord de la Civil Aviation University of China.

III.  DÉCISION FAISANT L’OBJET DU CONTRÔLE

[9]  Le 19 décembre 2018, la demanderesse a reçu une lettre de l’agent indiquant que sa demande de permis de travail était rejetée. L’agent a indiqué que sa demande ne satisfaisait pas aux exigences de la LIPR ni à celles du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 [le Règlement]. Plus précisément, l’agent a conclu : (1) que la demanderesse n’avait pas démontré qu’elle satisfait de façon appropriée aux exigences de son futur poste; et (2) que l’objet de la visite de la demanderesse ne permettait pas de conclure de façon satisfaisante qu’elle quitterait le Canada à la fin de son séjour autorisé.

[10]  Les notes de l’agent précisent les motifs du rejet de la demande de permis de travail de la demanderesse.

[11]  Premièrement, l’agent a noté que la demanderesse avait étudié pour devenir agente de bord, qu’elle détenait un certificat d’études supérieures en administration, que sa principale expérience de travail était en soutien administratif, puis en marketing, et qu’elle n’avait pas d’expérience en construction résidentielle. En examinant cette preuve dans son ensemble, l’agent a conclu qu’elle ne démontrait pas que la demanderesse possède l’expérience et les études requises pour satisfaire aux exigences du poste offert.

[12]  Deuxièmement, l’agent a fait remarquer qu’il ne semble pas raisonnable que l’entreprise, qui ne fait que démarrer, offre le poste de DPF assorti d’un salaire annuel de 120 993 $ à la demanderesse, qui n’a aucune expérience dans le marché canadien de la construction résidentielle. L’agent a également fait remarquer que ni le moment de l’établissement de l’entreprise ni dans quelle mesure la demanderesse a investi dans celle-ci n’étaient clairs. De plus, il n’y avait aucune trace de cette entreprise sur Internet; l’adresse postale est une boîte postale et le numéro de téléphone indiqué est « 999-999-9999 ».

[13]  Troisièmement, l’agent a conclu que la demanderesse n’avait pas démontré qu’elle possédait les compétences requises en anglais, conformément aux exigences du poste, telles qu’énoncées dans l’EIMT.

IV.  QUESTIONS EN LITIGE

[14]  Les questions soulevées en l’espèce sont les suivantes :

1.  La décision de l’agent a-t-elle violé le droit à l’équité procédurale de la demanderesse?

2.  L’agent a-t-il déraisonnablement omis d’évaluer des éléments de preuve importants qui étaient contraires à ses conclusions?

V.  NORME DE CONTRÔLE

[15]  La présente demande a été plaidée avant que soient rendues les récentes décisions de la Cour suprême du Canada dans Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov], et Bell Canada c Canada (Procureur général), 2019 CSC 66. Le jugement de la Cour a été mis en délibéré. Les observations des parties sur la norme de contrôle étaient donc fondées sur le cadre d’analyse établi dans l’arrêt Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 [Dunsmuir]. Toutefois, compte tenu des circonstances de l’espèce et des directives fournies par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Vavilov, au paragraphe 144, la Cour a conclu qu’il n’était pas nécessaire de demander aux parties de présenter des observations supplémentaires sur la norme de contrôle. J’ai appliqué le cadre d’analyse établi dans Vavilov à mon examen de la demande, et cela ne modifie pas les normes de contrôle applicables en l’espèce ni mes conclusions.

[16]  Dans l’arrêt Vavilov, aux paragraphes 23 à 32, les juges majoritaires ont cherché à simplifier la façon dont les tribunaux choisissent la norme de contrôle applicable aux questions qui leur sont soumises. Les juges majoritaires ont choisi de ne pas appliquer l’approche fondée sur le contexte et les catégories adoptée dans l’arrêt Dunsmuir en faveur de la présomption selon laquelle la norme de la décision raisonnable s’applique. Toutefois, les juges majoritaires ont souligné que cette présomption peut être réfutée (1) s’il existe une intention claire du législateur de prescrire une norme de contrôle différente (Vavilov, aux par. 33 à 52) et (2) dans les cas où la primauté du droit commande l’application de la norme de la décision correcte, par exemple à l’égard des questions constitutionnelles, des questions de droit générales d’une importance capitale pour le système juridique dans son ensemble et des questions liées aux délimitations des compétences respectives d’organismes administratifs (Vavilov, aux par. 53 à 64)

[17]  La demanderesse et le défendeur ont tous deux fait valoir que la norme de contrôle applicable à la question de l’équité procédurale était celle de la décision correcte, alors que la norme de contrôle applicable à l’évaluation, faite par l’agent, de la demande de permis de travail présentée par la demanderesse était celle de la décision raisonnable.

[18]  Certains tribunaux ont récemment conclu que la norme de contrôle applicable à une allégation de manquement à l’équité procédurale est celle de la « décision correcte » (Établissement de Mission c Khela, 2014 CSC 24, au paragraphe 79; Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, aux paragraphes 43, 59 et 61 [Khosa]). L’arrêt Vavilov de la Cour suprême du Canada ne traite pas de la norme de contrôle qui s’applique aux questions d’équité procédurale (Vavilov, au paragraphe 23). Cependant, une approche plus judicieuse sur le plan doctrinal veut qu’aucune norme de contrôle ne s’applique à la question de l’équité procédurale. Voici comment la Cour suprême du Canada s’est exprimée à ce sujet dans l’arrêt Moreau-Bérubé c Nouveau-Brunswick (Conseil de la magistrature), 2002 CSC 11, au paragraphe 74 :

[L’équité procédurale] n’exige pas qu’on détermine la norme de révision judiciaire applicable. Pour vérifier si un tribunal administratif a respecté l’équité procédurale ou l’obligation d’équité, il faut établir quelles sont les procédures et les garanties requises dans un cas particulier.

[19]  En ce qui a trait à la norme de contrôle qui s’applique à l’évaluation de la demande de permis de travail par l’agent en l’espèce, rien ne permet de réfuter la présomption selon laquelle la norme de la décision raisonnable est celle qui trouve application. L’application de la norme de la décision raisonnable à cette question est également conforme à la jurisprudence qui existait avant que la Cour suprême du Canada ne rende l’arrêt Vavilov. Voir Toor c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1143, au paragraphe 6; Baran c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 463, aux paragraphes 15 et 16; et Bui c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 440, aux paragraphes 22 et 23.

[20]  Lors de la révision d’une décision selon la norme de la décision raisonnable, la Cour doit se demander si la décision « possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité, et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle‑ci » (Vavilov, au paragraphe 99). La norme de la décision raisonnement est une norme de contrôle unique qui « qui s’adapte au contexte », lequel varie (Vavilov, au paragraphe 89, citant Khosa, au paragraphe 59). Ces contraintes d’ordre contextuel « cernent les limites et les contours de l’espace à l’intérieur duquel le décideur peut agir, ainsi que les types de solution qu’il peut retenir » (Vavilov, au paragraphe 90). Autrement dit, la Cour ne devrait intervenir que si elle est convaincue que la décision « souffre de lacunes graves à un point tel qu’on ne peut pas dire qu’elle satisfait aux exigences de justification, d’intelligibilité et de transparence » (Vavilov, au paragraphe 100). La Cour suprême du Canada a énuméré deux types de lacunes fondamentales qui rendent une décision déraisonnable : (1) un manque de logique interne dans le raisonnement du décideur; et (2) le caractère indéfendable d’une décision « compte tenu des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur la décision » (Vavilov, au paragraphe 101).

VI.  DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

[21]  Voici les dispositions de la LIPR applicables à la présente demande de contrôle judiciaire :

Visa et documents

Application before entering Canada

11 (1) L’étranger doit, préalablement à son entrée au Canada, demander à l’agent les visa et autres documents requis par règlement. L’agent peut les délivrer sur preuve, à la suite d’un contrôle, que l’étranger n’est pas interdit de territoire et se conforme à la présente loi.

11 (1) A foreign national must, before entering Canada, apply to an officer for a visa or for any other document required by the regulations. The visa or document may be issued if, following an examination, the officer is satisfied that the foreign national is not inadmissible and meets the requirements of this Act.

[…]

Obligation à l’entrée au Canada

Obligation on entry

20 (1) L’étranger non visé à l’article 19 qui cherche à entrer au Canada ou à y séjourner est tenu de prouver :

20 (1) Every foreign national, other than a foreign national referred to in section 19, who seeks to enter or remain in Canada must establish,

[…]

b) pour devenir un résident temporaire, qu’il détient les visas ou autres documents requis par règlement et aura quitté le Canada à la fin de la période de séjour autorisée.

(b) to become a temporary resident, that they hold the visa or other document required under the regulations and will leave Canada by the end of the period authorized for their stay.

[…]

Règlements

Regulations

32 Les règlements régissent l’application des articles 27 à 31, définissent, pour l’application de la présente loi, les termes qui y sont employés et portent notamment sur :

32 The regulations may provide for any matter relating to the application of sections 27 to 31, may define, for the purposes of this Act, the terms used in those sections, and may include provisions respecting

a) les catégories de résidents temporaires, notamment les étudiants et les travailleurs;

(a) classes of temporary residents, such as students and workers;

[…]

[22]  Voici les dispositions du Règlement qui sont applicables à la présente demande de contrôle judiciaire :

Permis de travail – demande préalable à l’entrée au Canada

Work permits

200 (1) Sous réserve des paragraphes (2) et (3), et de l’article 87.3 de la Loi dans le cas de l’étranger qui fait la demande préalablement à son entrée au Canada, l’agent délivre un permis de travail à l’étranger si, à l’issue d’un contrôle, les éléments ci-après sont établis :

200 (1) Subject to subsections (2) and (3) – and, in respect of a foreign national who makes an application for a work permit before entering Canada, subject to section 87.3 of the Act – an officer shall issue a work permit to a foreign national if, following an examination, it is established that

[…]

b) il quittera le Canada à la fin de la période de séjour qui lui est applicable au titre de la section 2 de la partie 9;

(b) the foreign national will leave Canada by the end of the period authorized for their stay under Division 2 of Part 9;

[…]

Exceptions

Exceptions

(3) Le permis de travail ne peut être délivré à l’étranger dans les cas suivants :

(3) An officer shall not issue a work permit to a foreign national if

a) l’agent a des motifs raisonnables de croire que l’étranger est incapable d’exercer l’emploi pour lequel le permis de travail est demandé;

(a) there are reasonable grounds to believe that the foreign national is unable to perform the work sought;

[…]

VII.  ARGUMENTS

A.  Demanderesse

[23]  La demanderesse soutient que l’agent : (1) a violé son droit à l’équité procédurale en tirant des conclusions quant à la crédibilité sans lui donner la possibilité de répondre; et (2) a commis une erreur en omettant déraisonnablement d’admettre des éléments de preuve importants concernant l’expérience de travail de la demanderesse, ses compétences en anglais et le soutien de son futur employeur. Pour ces motifs, la demanderesse allègue que la présente demande de contrôle judiciaire devrait être accueillie.

(1)  Équité procédurale

[24]  La demanderesse soutient que l’agent a violé son droit à l’équité procédurale en tirant des conclusions sur la crédibilité des éléments de preuve relatifs à ses compétences en anglais et à l’établissement de son employeur sans lui donner la possibilité de répondre à ces préoccupations. La demanderesse invoque les décisions rendues par la Cour dans les affaires Egheoma c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 1164, aux paragraphes 12 à 14, et Bajwa c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2017 CF 202, aux paragraphes 62 à 65.

[25]  Premièrement, la demanderesse soutient que le certificat d’études supérieures confirmant qu’elle a réussi l’examen collégial d’anglais de niveau 4 en janvier 2003 ainsi que le fait que son employeur était satisfait de ses compétences linguistiques étaient suffisant pour démontrer qu’elle satisfaisait aux exigences linguistiques énoncées dans l’EIMT. La demanderesse soutient que l’espèce est analogue à l’affaire Li c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 484, où la Cour a conclu que l’équité procédurale exigeait que l’agent donne au demandeur la possibilité de répondre aux préoccupations concernant ses compétences linguistiques en se fondant sur des dossiers scolaires vieux de 20 ans indiquant qu’il avait obtenu les notes de passage en anglais.

[26]  Deuxièmement, la demanderesse allègue que les notes de l’agent révèlent clairement qu’il avait des préoccupations quant à la crédibilité de l’employeur proposé par la demanderesse. La demanderesse fait remarquer que l’agent a non seulement conclu que l’entreprise était une entreprise en démarrage, mais il a aussi tiré une conclusion négative de son manque de présence en ligne, de son adresse postale et de son numéro de téléphone. Par conséquent, la demanderesse est d’avis que l’agent aurait dû lui donner la possibilité de répondre à ces préoccupations.

(2)  Évaluation de la preuve

[27]  La demanderesse soutient également que l’agent n’a pas admis des éléments de preuve importants et pertinents qui étaient contraires à ses conclusions en l’espèce. Elle affirme qu’il est bien établi en droit que les agents doivent examiner des éléments de preuve qui sont contraires à leur décision finale et expliquer pourquoi ils ont privilégié d’autres éléments de preuve. Voir Omijie c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 878, aux paragraphes 25 et 26. Plus précisément, la demanderesse soutient que l’agent a commis une erreur en écartant les éléments de preuve relatifs à ses fonctions de travail et à ses compétences en anglais et la lettre de l’employeur proposé par la demanderesse indiquant les conséquences qui découleraient d’un rejet de sa demande.

[28]  Premièrement, la demanderesse soutient que l’agent a indûment mis l’accent sur le titre de ses anciens postes plutôt que sur les éléments de preuve relatifs aux fonctions qu’elle accomplissait dans le cadre de ces postes. La demanderesse soutient que, ce faisant, l’agent a indûment mis l’accent sur son expérience en soutien administratif. Si l’agent avait tenu compte des fonctions qu’elle avait exercées, il aurait constaté que son expérience de travail correspondait clairement aux exigences énoncées dans l’EIMT et à la description de travail fournie par le futur employeur, qui comprend principalement des tâches de surveillance financière et d’administration, plutôt que de construction. Même si la demanderesse est d’avis que l’agent a indûment conclu qu’en l’espèce elle devait détenir une expérience en construction, elle fait toutefois remarquer que les éléments de preuve relatifs à ses fonctions de travail démontrent également qu’elle a acquis une expérience significative dans l’immobilier au Canada dans le cadre de son rôle actuel chez Sinolink.

[29]  De plus, la demanderesse déclare que l’agent a indûment mis l’accent sur ses études d’agente de bord, tout en ignorant complètement ses études en administration. La demanderesse soutient que, si l’agent avait bien évalué ses études, il aurait conclu qu’elle satisfaisait aux exigences du poste.

[30]  Deuxièmement, la demanderesse soutient que la conclusion de l’agent selon laquelle elle n’avait pas les compétences requises en anglais pour occuper le poste n’est pas fondée sur le dossier et est inintelligible, puisque l’agent a clairement ignoré les éléments de preuve démontrant qu’elle avait obtenu un certificat collégial de niveau 4 en anglais en janvier 2003.

[31]  Troisièmement, la demanderesse soutient que l’agent a omis de tenir compte de la lettre d’appui de son futur employeur qui détaille l’investissement de la demanderesse dans l’entreprise et les conséquences qui pourraient découler du rejet de sa demande. La demanderesse fait remarquer que l’agent a noté qu’il n’est pas clair dans quelle mesure la demanderesse a investi dans l’entreprise, alors que la lettre d’appui indique clairement que l’entreprise perdrait son investissement de 600 000 $, ce qui entraînerait la perte de sept emplois à temps plein dans une période de trois mois. L’agent a également omis de noter le numéro de téléphone déclaré par l’entreprise.

B.  Défendeur

[32]  Le défendeur soutient que : (1) l’agent n’a pas violé le droit de la demanderesse à l’équité procédurale, car il n’était pas tenu de lui offrir la possibilité de remédier à l’insuffisance des éléments de preuve présentés; et (2) l’agent a examiné l’ensemble de la preuve présentée et, par conséquent, il lui était loisible de conclure que la demanderesse n’avait pas démontré qu’elle satisfaisait aux exigences de la LIPR et du Règlement. Pour ces motifs, le défendeur allègue que la présente demande de contrôle judiciaire devrait être rejetée.

(1)  Équité procédurale

[33]  Le défendeur allègue que l’agent n’était pas tenu de porter ses doutes ou ses préoccupations à l’attention de la demanderesse, ou d’effectuer un suivi auprès de cette dernière, puisqu’il incombait à la demanderesse de fournir des éléments de preuve suffisants pour démontrer qu’elle satisfaisait aux exigences de la LIPR et du Règlement. En effet, le défendeur déclare que l’agent n’était pas tenu de fournir à la demanderesse un [traduction« résultat intermédiaire » à chaque étape de la procédure, ou d’informer la demanderesse des lacunes de sa preuve. Le défendeur invoque les décisions rendues par la Cour dans les affaires Roberts c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 518, au paragraphe 21, et Nehme c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 64, au paragraphe 18.

[34]  De plus, le défendeur soutient que l’agent n’était pas tenu d’informer la demanderesse de l’insuffisance de ses éléments de preuve concernant ses compétences en anglais. Le défendeur déclare que l’EIMT indiquait clairement que des compétences en anglais étaient requises et qu’il était donc raisonnable de s’attendre à ce que d’autres éléments de preuve soient nécessaires pour démontrer les compétences linguistiques requises pour effectuer le travail d’un haut dirigeant. Malgré cela, le défendeur fait remarquer que la demanderesse n’a fourni aucun élément de preuve sur ses compétences en anglais, sauf un certificat délivré il y a environ 15 ans.

[35]  Le défendeur allègue également que l’agent n’était pas tenu d’informer la demanderesse des lacunes de la preuve concernant l’établissement de l’entreprise et sa capacité à rémunérer un DPF inexpérimenté 120 993 $ par année, car peu d’éléments de preuve objectifs indiquaient que le futur employeur était plus qu’une simple entreprise sur papier.

(2)  Évaluation de la preuve

[36]  Le défendeur soutient que l’agent a examiné l’ensemble des éléments de preuve sur les études et l’expérience de la demanderesse, ainsi que les éléments de preuve présentés au sujet de ses aptitudes linguistiques. Il fait remarquer qu’il est bien établi en droit qu’un décideur est présumé avoir tenu compte de tous les éléments de preuve. Toutefois, compte tenu des lacunes de la preuve présentée en l’espèce, le défendeur fait remarquer qu’il était raisonnable pour l’agent de conclure que la demanderesse n’avait pas démontré qu’elle satisfaisait aux exigences de la LIPR ou du Règlement.

[37]  Le défendeur soutient qu’il était raisonnable pour l’agent de conclure que la demanderesse n’avait pas établi qu’elle pouvait satisfaire adéquatement aux exigences professionnelles pour son futur emploi. L’agent a examiné l’ensemble des études postsecondaires de la demanderesse et a noté à juste titre que la majorité de son expérience de travail était en administration. Après avoir évalué l’ensemble de la preuve, il était loisible à l’agent de conclure que les études et l’expérience de travail de la demanderesse n’indiquaient pas qu’elle avait les compétences nécessaires pour travailler comme DPF dans le marché canadien de la construction résidentielle, une industrie dans laquelle elle a peu d’expérience. Le défendeur fait également remarquer qu’il était approprié pour l’agent d’accorder peu de poids aux éléments de preuve de la demanderesse concernant ses compétences et ses fonctions de travail, car il ne s’agissait que d’une simple auto-évaluation.

[38]  Le défendeur allègue également qu’il était raisonnable pour l’agent de conclure que la demanderesse n’avait pas démontré qu’elle possédait les compétences requises en anglais pour satisfaire aux exigences du poste. La demanderesse n’a fourni aucun élément de preuve attestant sa note d’examen en anglais ni aucun élément de preuve sur de récentes études en anglais. Bien que le défendeur admette que la demanderesse a fourni la preuve qu’elle avait réussi l’examen collégial d’anglais de niveau 4, il fait remarquer que ces résultats datent d’il y a environ 15 ans et que la demanderesse n’a fourni aucun élément de preuve sur ce que signifie avec des compétences linguistiques de niveau 4. Compte tenu de l’absence d’éléments de preuve établissant des compétences suffisantes en anglais, le défendeur affirme que l’agent n’avait pas d’autre choix que de rejeter la demande de permis de travail de la demanderesse en vertu de l’alinéa 200(3)a) du Règlement.

VIII.  ANALYSE

[39]  La demanderesse affirme que l’agent exprime et invoque des préoccupations quant à sa crédibilité qui n’ont jamais été portées à son attention. Plus particulièrement, elle affirme que l’agent a contesté l’existence même de l’entreprise (le futur employeur de la demanderesse), et elle souligne les erreurs de l’agent concernant le numéro de téléphone de l’entreprise et les renseignements sur l’investissement qu’elle y a fait.

[40]  Il s’agit d’erreurs de fait évidentes. Un numéro de téléphone réel a été fourni pour l’entreprise et la lettre datée du 21 août 2018 et rédigée par M. Vadnais indique clairement que la demanderesse a investi 600 000 $ dans l’entreprise. Nonobstant ces erreurs, le fondement de la décision est que l’agent n’était pas convaincu que [traduction« la [demanderesse principale] possède les connaissances et l’éducation requises pour occuper le poste qui lui a été offert au Canada ». En outre, les motifs indiquent clairement que l’agent n’était pas convaincu, d’après les renseignements fournis avec la demande, que la demanderesse possède les connaissances et l’expérience requises pour occuper le poste de DPF offert par l’entreprise ou les compétences linguistiques nécessaires pour satisfaire aux exigences du poste offert.

[41]  En ce qui concerne ces deux préoccupations fondamentales, il ne me semble pas que la crédibilité soit mise en doute. L’élément essentiel de la décision est l’évaluation par l’agent des éléments de preuve de la demanderesse sur les connaissances, l’expérience et les aptitudes linguistiques par rapport aux exigences de la description du poste.

[42]  La décision de l’agent de rejeter la demande de permis de travail de la demanderesse est fondée sur deux motifs principaux :

[43]  Il s’agit de motifs indépendants. Aucun ne suffit à justifier le refus d’un permis de travail.

[44]  Dans l’affidavit qu’elle a déposé dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire, la demanderesse explique à la Cour pourquoi elle a été embauchée comme DPF par l’entreprise :

[traduction

Depuis avril 2015, je travaille pour Sinolink Consultants Services Limited (« Sinolink ») au poste de directrice du marketing. Sinolink est un cabinet-conseil de type « boutique » enregistré dans la région administrative spéciale de Hong et est spécialisé dans les investissements à l’étranger (y compris les investissements immobiliers et commerciaux aux États-Unis et au Canada). Je travaille en étroite collaboration avec des banques privées de renom à l’échelle régionale à Hong Kong pour me concentrer sur les clients de valeur nette élevée à très élevée dans la région de la Chine élargie. Dans le cadre de mes services professionnels, je dois passer la plupart de mon temps à Pékin et à Shenzhen pour offrir un soutien aux agents de service, ainsi que pour présenter des techniques de vente à mes propres futurs clients, que j’ai connus personnellement dans le cadre de mes anciennes activités dans la haute société. La rémunération que j’ai reçue était sous forme de commission.

Je connais bien les investissements à l’étranger et je suis convaincue que je peux créer une entreprise prospère au Canada. Je suis convaincue qu’en investissant dans l’entreprise 2043167 Alberta Limited, à titre d’actionnaire majoritaire, je pourrai lancer et gérer une entreprise prospère au Canada. Cette occasion me permettra d’investir dans le secteur de la construction résidentielle, une industrie qui, à mon avis, est en plein essor et la plus sûre en termes de risque commercial. Une fois autorisée à travailler au Canada, j’ai l’intention d’assumer le rôle de dirigeante principale des finances (DPF) chez 2043167 Alberta Limited et de superviser l’ensemble des aspects financiers de cette entreprise. En même temps, je dois renégocier mes conditions d’emploi avec Sinolink, ce qui, je l’espère, me permettra de retourner travailler auprès de l’entreprise lorsque je me serai acquittée de mon rôle au Canada. En me fondant sur mes réussites professionnelles antérieures dans le domaine des opérations commerciales en Chine, je suis convaincue que je peux maîtriser ce rôle de DPF grâce à l’aide de professionnels locaux, tels que des comptables, des avocats et des ingénieurs. Après tout, il s’agit d’une partie de mon investissement majeur et je dois le protéger correctement et faire tout ce que je peux pour le faire fructifier.

[45]  En d’autres termes, la demanderesse elle-même affirme qu’elle a été embauchée en raison de son investissement important dans l’entreprise et parce qu’elle peut aider l’entreprise à organiser ses rapports financiers avec les banques.

[46]  Le fait que la demanderesse ait personnellement investi dans l’entreprise ne signifie pas qu’elle est en soi qualifiée pour agir comme DPF, et le fait qu’elle sait comment traiter avec les banques ne signifie pas qu’elle satisfait aux exigences ou aux autres responsabilités énoncées dans la description de travail.

[47]  En ce qui concerne les qualifications de la demanderesse pour le poste de DPF, l’agent énumère précisément les exigences énoncées, puis renvoie aux études et aux antécédents de la demanderesse :

[traduction

La [demanderesse principale] a suivi une formation d’agente de bord et possède un certificat d’études supérieures en gestion administrative. L’expérience de travail de la [demanderesse principale] est principalement liée au soutien administratif, puis au marketing; il ne me semble pas que la [demanderesse principale] possède les connaissances et les études requises pour occuper le poste qui lui a été offert au Canada. De plus, la [demanderesse principale] ne semble avoir aucune expérience en construction résidentielle.

[48]  La demanderesse affirme que [traduction« l’agent a tiré des conclusions sur son aptitude à occuper le poste qui allaient à l’encontre de la preuve au dossier, dans une telle mesure que cela met en doute l’attention que l’agent a portée à l’ensemble de la demande ».

[49]  En ce qui concerne les éléments de preuve de la demanderesse sur ses qualifications et son expérience, elle se plaint que l’agent n’en mentionne pas les détails dans la décision. Toutefois, l’agent mentionne spécifiquement la description de travail, les études de la demanderesse, son certificat d’études supérieures en gestion administrative ainsi que son expérience de travail en soutien administratif, puis en marketing, de sorte que je pense que la demanderesse et la Cour peuvent raisonnablement présumer que l’agent mentionne les éléments de preuve qu’elle a présentés sur ces questions.

[50]  Le principal élément de preuve présenté à l’agent sur cette question est la lettre de la demanderesse, datée du 18 août 2018, son curriculum vitae et la lettre de l’entreprise, datée du 14 août 2018.

[51]  Dans sa lettre, la demanderesse affirme ce qui suit :

[52]  Le curriculum vitae de la demanderesse fait état de son expérience en marketing, en administration et en tant qu’adjointe du directeur général de Set Sheng, mais fournit encore moins de détails que sa lettre personnelle concernant ce que la demanderesse a réellement fait pour se qualifier pour le rôle de DPF de cette entreprise particulière du secteur de la construction.

[53]  La lettre de l’entreprise, datée du 14 août 2018, fournit des détails sur la description du poste et l’évaluation des qualifications de la demanderesse :

[traduction

Description du poste

À l’heure actuelle, 2043167 Alberta Ltd. a besoin d’un dirigeant principal des finances qualifié pour superviser et aider à établir des stratégies financières au sein de notre organisation. Dans le cadre de ce rôle, Mme Zang supervisera toutes les opérations financières de l’entreprise, y compris les comptes débiteurs, les comptes créditeurs, les rapports de fin de mois, les conciliations bancaires, la production des déclarations de taxe sur les produits et services et la paye. Elle mettra à profit son expertise financière pour effectuer la surveillance de plusieurs projets en construction simultanés, et elle sera tenue de conserver et de documenter les permis du gouvernement, les dépenses, les impôts payables, les rapports de la [Workers’ Compensation Board (WBC)] et les revenus. Elle devra également préparer des rapports mensuels pour le conseil d’administration de la coentreprise. Dans le cadre de ce rôle, Mme Zang devra visiter les chantiers de construction pour élaborer des rapports d’étape sur chaque projet situé dans diverses villes du sud de l’Alberta.

2043167 Alberta Ltd. est une entreprise en démarrage qui gagne du terrain sur le marché canadien. L’entreprise a l’intention d’accroître la stabilité de l’industrie de la construction dans le sud de l’Alberta, car les études de marché indiquent que les petites collectivités ont de la difficulté à maintenir leur population, en partie en raison de l’incapacité de trouver un emploi stable. Ce projet créera des emplois pour les professionnels qualifiés de l’industrie de la construction pour les années à venir. En tant que première employée au Canada, la fonction initiale de Mme Zang sera de créer et de mettre en œuvre une stratégie financière solide pour l’avenir de l’entreprise. Elle sera responsable de la gestion de multiples projets de construction, y compris des permis du gouvernement, des dépenses, des impôts, des rapports de la WCB et des revenus. Sa participation quotidienne au succès de l’entreprise est essentielle. Les prévisions actuelles pour la construction d’environ 4 maisons par année se traduiraient par plus de 13 emplois dans le sud de l’Alberta et par un revenu d’environ 70 000 $ par année par employé.

La construction de maisons dans les petits centres contribuera à l’emploi, car l’entreprise de construction devra embaucher des personnes pour aider à la construction. Chaque maison fournit l’équivalent d’environ 3 années-personnes. Étant donné qu’il est prévu de construire 4 maisons par an. Cela équivaut à 12 années‑personnes. Ce projet créerait également un emploi à temps plein pour l’investisseur et au moins deux employés de soutien à temps plein, ce qui représenterait l5 années-personnes par année. De plus, environ 2,5 années-personnes supplémentaires seraient nécessaires en sous-traitance pour construire ces maisons, ce qui représente un total de 17,5 années-personnes. Du point de vue du gouvernement, cela équivaut à environ (l7,5 x 60 000) = 1 005 000 $ en revenus générés par année, ce qui représenterait des recettes gouvernementales d’environ 250 000 $.

Ce projet offre de bons emplois, fournit des logements abordables aux personnes à faible revenu, renforce les petites collectivités et aidera à fournir des logements dans celles-ci, ce qui encouragera les grandes entreprises à y déménager. L’investissement de Mme Zang a déjà permis de commencer la construction de deux maisons dans la région de Raymond. La première maison a été achevée et est vendue, et la deuxième a été achevée et sera mise sur le marché au cours du mois. Nous sommes actuellement en négociation avec la ville de Raymond pour former une coentreprise grâce à laquelle nous construirons des résidences pour personnes âgées (12 à 14 unités de 1 000 pieds carrés).

Si M. Zang n’avait pas investi et ne dirigeait pas toutes les opérations financières, 2043167 Alberta Ltd. s’effondrerait et tous les projets de construction en cours et prévus au Canada prendraient immédiatement fin. Cela entraînerait ensuite une perte importante de revenus et d’emplois pour l’entreprise et l’industrie de la construction dans le sud de l’Alberta.

Mme Xiaoning Zang

Mme Zang est parfaitement qualifiée pour remplir le mandat de dirigeante principale des finances chez 2043167 Alberta Ltd., en Alberta. Elle a obtenu une maîtrise en administration publique de la Northeast Normal University en Chine en 2014. Mme Zang est une professionnelle spécialisée en gestion possédant une vaste expérience en finances et en administration, et elle travaille pour Sinolink Consultants Services Ltd., en Chine, depuis 2015.

Plus récemment, Mme Zang a été directrice du marketing chez Sinolink Consultants Services Ltd. en Chine. Dans le cadre de ce rôle, elle était responsable de la gestion de l’élaboration et de la mise en œuvre de la division des projets d’investissement, et elle était responsable de la surveillance de tous les aspects financiers des grands projets dans le cadre de son emploi. Elle était chargée d’établir et d’entretenir de solides relations d’affaires avec les clients afin de réussir à stimuler le développement de l’entreprise. Mme Zang a joué un rôle essentiel dans de nombreuses opérations financières et a joué un rôle essentiel dans l’avancement du succès de l’entreprise. Avant ce rôle, elle a occupé le poste de directrice adjointe de l’administration chez Set Sheng International Trade (Shanghai) Limited de 2012 à 2015, où elle était responsable de la gestion des coûts opérationnels liés au contrôle des stocks, de l’établissement du salaire visé et de la direction des initiatives de recrutement, de formation et de perfectionnement du personnel afin d’optimiser le potentiel de productivité et de revenus grâce à la création d’une équipe de vente solide. Auparavant, Mme Zang a également occupé un poste d’adjointe du directeur général de Set Sheng International Trade (Shanghai) Limited de 2006 à 2012, où elle gérait les processus financiers, y compris les comptes créditeurs et les comptes débiteurs. Elle était également responsable de la simplification des services de bureau directs, y compris des finances, des dossiers et de la préparation du budget du département.

En occupant les postes susmentionnés, Mme Zang a acquis les compétences et l’expérience nécessaires pour occuper le poste de dirigeante principale des finances chez 2043167 Alberta Ltd. Elle a fait preuve d’un bon rendement dans l’élaboration et la mise en œuvre de stratégies financières.

[Caractères gras et erreurs dans l’original.]

[54]  Si l’on compare les responsabilités professionnelles aux qualifications et à l’expérience passées de la demanderesse, la raison pour laquelle elle est [traduction« parfaitement qualifiée » pour ce poste dans cette industrie particulière n’est pas évidente. L’entreprise semble satisfaite de la confiance qu’a la demanderesse en elle-même, mais bien que la demanderesse ait manifestement une expérience en finances, l’agent était préoccupé par son manque d’expérience dans le [traduction« marché canadien de la construction résidentielle ».

[55]  Dans l’ensemble, lorsqu’on examine les éléments de preuve sur l’expérience passée de la demanderesse qui ont été présentés à l’agent, il n’est pas difficile de comprendre pourquoi, malgré la confiance en soi et le succès de la demanderesse dans d’autres entreprises, l’agent n’était pas convaincu qu’elle possède l’expérience requise pour ce poste dans cette industrie particulière. J’aurais pu en arriver à une conclusion différente, mais il s’agit d’une question d’appréciation et je ne crois pas que le dossier soit suffisant pour que je puisse affirmer que l’agent a été déraisonnablement négligent dans son évaluation de la preuve.

[56]  Lors de son évaluation des éléments de preuve concernant les aptitudes linguistiques de la demanderesse, l’agent a mentionné que celle-ci :

[traduction

[...] n’a fourni que peu d’éléments de preuve sur ses compétences linguistiques et ne semble pas avoir suivi la formation linguistique nécessaire. La [demanderesse principale] n’a pas démontré qu’elle possédait les compétences linguistiques requises pour occuper le poste qui lui a été offert au Canada.

[57]  Encore une fois, cela me semble être une question de suffisance de la preuve, et non pas une question de crédibilité.

[58]  Les seuls éléments de preuve que la demanderesse a fournis pour attester de sa compétence linguistique étaient sa lettre personnelle et le certificat d’un examen collégial d’anglais, qui indiquaient qu’elle avait participé [traduction« à l’examen collégial national d’anglais de niveau 4 » et qu’elle l’avait réussi.

[59]  La lettre personnelle montre une bonne capacité à communiquer par écrit en anglais, mais on ne peut être sûr que c’est bien la demanderesse qui l’a rédigée et qu’il s’agit bien de son niveau normal de compétence en rédaction. En ce qui concerne la maîtrise de l’anglais à l’oral, le certificat d’examen collégial en anglais n’aide pas l’agent à déterminer le niveau qu’elle a atteint et si cela satisfait aux exigences du poste qui, comme l’entreprise l’a souligné, exigera notamment que la demanderesse [traduction« visit[e] les chantiers de construction pour élaborer des rapports d’étape sur chaque projet situé dans diverses villes du sud de l’Alberta ». Le certificat indique également que la demanderesse a étudié l’anglais il y a environ 15 ans, mais il n’y a aucun élément de preuve établissant ses compétences linguistiques actuelles.

[60]  Dans l’affaire Kaur c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 782, le juge Manson a conclu que « l’agent des visas a manifestement soulevé des préoccupations concernant la crédibilité au sujet du certificat IELTS d’aptitudes linguistiques en anglais de la demanderesse [...], mais ne lui a effectivement pas laissé la possibilité de répondre au moins à ses préoccupations concernant la crédibilité au sujet de ses compétences linguistiques en anglais » (au paragraphe 21).

[61]  En l’espèce, je ne vois aucune préoccupation quant à la crédibilité en ce qui concerne les compétences linguistiques de la demanderesse, vu les exigences de ce poste particulier. Il s’agit d’une question de suffisance de la preuve et je ne peux pas affirmer que, compte tenu de la preuve dont l’agent était saisi, ses conclusions étaient déraisonnables.

[62]  Je conclus que la décision porte essentiellement sur l’insuffisance de la preuve démontrant que la demanderesse pourrait satisfaire aux exigences d’un poste de DPF dans une entreprise albertaine de construction dans des petites villes. Compte tenu de la preuve, je ne peux pas affirmer que les conclusions de l’agent sont déraisonnables, et pour cette raison, je dois rejeter la demande.

[63]  Les avocats des parties sont d’avis qu’il n’y a aucune question à certifier en l’espèce et j’en conviens.




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