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Date : 20200117

Dossier : IMM-2877-19

Référence : 2020 CF 60

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 17 janvier 2020

En présence de madame la juge Simpson

ENTRE :

BIBIANA PETER

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

(Prononcés oralement à l’audience à Toronto (Ontario), le 16 janvier 2020)

I.  PROCÉDURE

[1]  La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire de la décision, datée du 11 avril 2019, par laquelle un agent principal de l’immigration (l’agent) a rejeté la demande de visa de résidente permanente fondée sur des motifs d’ordre humanitaire ayant été déposée par la demanderesse (la décision). La présente demande a été présentée au titre du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR).

II.  Contexte

[2]  La demanderesse est une citoyenne de Sainte-Lucie âgée de 57 ans. Elle est célibataire et a de la famille à Sainte-Lucie : deux fils adultes et deux sœurs. Elle a un autre fils, qui est résident permanent canadien (le fils canadien) et qui vit ici avec son épouse et sa belle-fille.

[3]  La demanderesse est arrivée au Canada en 2004. Après l’expiration de son visa, elle a indûment prolongé son séjour autorisé, et elle vit ici sans statut depuis. Elle travaille comme personne soignante auprès de personnes âgées, comme elle le faisait auparavant à Sainte-Lucie. Toutefois, la demanderesse ne possède pas de permis de travail et n’a pas démontré qu’elle avait payé de l’impôt sur son revenu gagné au Canada.

[4]  Vers 2015, l’appelante a reçu un diagnostic de cancer du sein. Elle est actuellement en rémission, mais elle doit prendre du tamoxifène tous les jours. Elle doit également faire examiner sa vue tous les six mois, compte tenu des éventuels effets secondaires problématiques liés à la prise de ce médicament.

[5]  À l’heure actuelle, le fils canadien de la demanderesse et son épouse lui apportent un soutien financier et émotionnel. Ils l’assistent également pour ses rendez-vous chez le médecin.

[6]  Selon la demanderesse, si elle est renvoyée à Sainte-Lucie, elle fera face à des difficultés d’ordre financier et médical. Elle pense qu’elle sera incapable de trouver un emploi en raison de son âge et du fait qu’elle n’est pas scolarisée. Qui plus est, la demanderesse croit qu’elle ne pourra pas payer les soins médicaux dont elle a besoin. Elle ne prétend pas que ces soins ne sont pas accessibles; ce sont les coûts qui la préoccupent.

[7]  Les deux fils de la demanderesse à Sainte-Lucie ne sont pas en mesure d’aider à payer ses traitements médicaux. En revanche, le fils canadien de la demanderesse a exprimé sa volonté de subvenir aux besoins financiers de sa mère.

III.  LA DÉCISION

[8]  L’agent a conclu que l’établissement de la demanderesse au Canada n’était pas un facteur très favorable, étant donné que la demanderesse ne s’était pas conformée aux lois canadiennes sur l’immigration.

[9]  En ce qui concerne les soins médicaux, l’agent a constaté qu’il ne disposait d’aucun renseignement sur les coûts du tamoxifène et des examens de la vue, ni d’aucune preuve concernant l’incapacité de payer de la demanderesse. Ces éléments étaient importants, compte tenu de la volonté du fils canadien de fournir un soutien financier.

[10]  Dans sa conclusion, l’agent a indiqué ne pas avoir été convaincu par les arguments de la demanderesse. Il a estimé que ces arguments ne justifiaient pas une décision favorable.

IV.  LES QUESTIONS EN LITIGE

  1. La décision est-elle déraisonnable parce que l’agent a effectué une analyse axée sur les difficultés?

  2. La décision est-elle déraisonnable parce que l’agent a exigé de la demanderesse qu’elle établisse son incapacité de payer ses soins médicaux?

  3. La décision est-elle déraisonnable parce que l’agent a omis de tenir compte de l’établissement de la demanderesse?

V.  1re QUESTION : ANALYSE AXÉE SUR LES DIFFICULTÉS

[11]  À mon avis, il est inexact de dire que la décision était [traduction] « axée sur les difficultés ». La demanderesse est en bonne santé, bien qu’elle ait besoin de prendre du tamoxifène et de passer un examen de la vue deux fois par an. Elle a une carrière bien établie comme personne soignante auprès des personnes âgées; dispose de perspectives d’emploi à Sainte‑Lucie; a de la famille là-bas et peut compter sur le soutien financier de son fils canadien.

[12]  La question des difficultés a assurément été prise en considération, dans la mesure où la demanderesse éprouvait des préoccupations à l’idée de retourner à Sainte-Lucie, préoccupations qu’elle a présentées comme des difficultés. Il n’y avait rien de déraisonnable dans cette approche, qui s’insérait dans une analyse globale et exhaustive, laquelle supposait de tenir compte d’autres facteurs concernant la demanderesse, comme son fils canadien, ses amis et son église au Canada et son degré d’établissement. Les facteurs favorables n’ont pas été écartés en raison de son séjour indu au Canada. De fait, tous les facteurs ont été soupesés, et les défavorables l’ont finalement emporté sur les favorables.

VI.  2e QUESTION : LES QUESTIONS MÉDICALES

[13]  Dans son témoignage, la demanderesse s’est dite préoccupée par le fait qu’elle ignorait si elle aurait accès à des soins médicaux à Sainte-Lucie, compte tenu de leur coût et de sa prétendue incapacité de payer.

[14]  À mon avis, en l’absence de tout renseignement sur les coûts réels, et étant donné que son fils canadien a offert de l’aider, il était raisonnable de la part de l’agent de s’attendre à ce que la demanderesse justifie son allégation selon laquelle elle ne pourrait se permettre ces soins médicaux.

VII.  3e QUESTION : L’ÉTABLISSEMENT

[15]  Dans l’arrêt Legault c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CAF 125, la Cour d’appel fédérale a établi clairement qu’un agent peut considérer le temps passé au Canada sans autorisation comme un facteur défavorable au demandeur. En l’espèce, l’agent a déclaré que la demanderesse n’avait pas démontré l’existence d’un établissement [traduction] « solide » au Canada, en raison de son manquement aux lois canadiennes en matière d’immigration. À mon sens, l’agent a considéré l’établissement comme un facteur neutre, voire défavorable, ce qui était raisonnable.

VIII.  CONCLUSION

[16]  Pour tous ces motifs, la demande sera rejetée.

IX.  CERTIFICATION

[17]  Aucune question n’a été proposée aux fins de certification en vue d’un appel.


 

JUGEMENT dans le dossier IMM-2877-19

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

« Sandra J. Simpson »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 31e jour de janvier 2020.

Julie-Marie Bissonnette, traductrice agréée


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-2877-19

INTITULÉ :

BIBIANA PETER c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE l’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 16 JANVIER 2020

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE SIMPSON

DATE DES MOTIFS ET DU JUGEMENT :

LE 17 JANVIER 2020

COMPARUTIONS :

Dotun Davies

Pour la demanderesse

Laura Upans

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

TOPMARKÉ ATTORNEYS LLP

Avocats

Brampton (Ontario)

Pour la demanderesse

Procureur général du Canada

Pour le défendeur

 

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