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Date : 20060119

Dossier : T‑1029‑92

Référence : 2006 CF 51

Ottawa (Ontario), le 19 janvier 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BLAIS

 

ENTRE :

JOSEPHINE E. MARSHALL

 

demanderesse

 

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

L’ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

et LE SYNDICAT DES EMPLOYÉS DE LA FONCTION PUBLIQUE

 

défendeurs

 

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

 

 

[1]               Sa Majesté la Reine (la Couronne défenderesse) ainsi que l’Alliance de la fonction publique du Canada et le Syndicat des employés de la fonction publique (les syndicats défendeurs) ont déposé des requêtes interlocutoires pour obtenir un jugement sommaire rejetant l’action introduite par Josephine E. Marshall (la demanderesse).

 

LES FAITS

[2]               L’action qui est l’objet aujourd’hui des requêtes interlocutoires en jugement sommaire a été déposée le 6 mai 1992. La demanderesse a introduit l’action en tant que partie qui se représente elle‑même, à l’encontre des défendeurs, afin d’obtenir un jugement déclaratoire et des dommages‑intérêts pour diverses périodes au cours desquelles elle a travaillé dans la fonction publique du Canada entre 1972 et 1986.

 

[3]               La déclaration initiale n’a jamais été signifiée, et la demanderesse a par la suite signifié, le 6 mai 1993, une déclaration modifiée. Par ordonnance en date du 10 mai 1994, M. le juge Strayer a ordonné à la demanderesse de modifier sa déclaration, qui comptait 112 pages, pour la rendre plus concise. La demanderesse a finalement modifié sa déclaration trois ans plus tard, le 22 mai 1997.

 

[4]               M. le juge Blais a rendu une ordonnance exigeant notamment que les interrogatoires préalables soient achevés au plus tard le 31 mars 1999. Il a rendu une nouvelle ordonnance le 13 mai 1999 enjoignant à la demanderesse de déposer son affidavit de documents et de terminer les interrogatoires préalables d’ici le 30 juin 1999. Mme la protonotaire Aronovitch a été nommée protonotaire en charge de la gestion de l’instance, et un nouveau calendrier a été établi le 28 juin 1999.

 

[5]               Par requête en date du 8 novembre 1999, la demanderesse a sollicité la suspension de l’instance. Les défendeurs s’y sont opposés en raison de la lenteur excessive de la demanderesse. La requête a été rejetée par la protonotaire Aronovitch et un nouvel échéancier a été fixé. L’échéancier a par la suite été suspendu temporairement pour faciliter la médiation. La médiation a été infructueuse et un nouvel échéancier a été fixé. Il a été de nouveau modifié par ordonnance en date du 6 décembre 2000.

 

[6]               Le 3 novembre 2003, l’action était rejetée par ordonnance, pour défaut de poursuite. Toutefois, cette ordonnance a été annulée après réexamen. Un autre échéancier a été fixé le 22 mars 2005 par la protonotaire responsable de la gestion de l’instance. Cet échéancier, actuellement en vigueur, envisage le dépôt des requêtes en cause ici.

 

[7]               La déclaration de la demanderesse renferme des allégations qui se rapportent à son emploi au sein de la fonction publique fédérale et à la manière dont son emploi avait pris fin. Elle était, à toutes les époques pertinentes, membre des syndicats défendeurs. Au fil des ans, outre sa déclaration modifiée, la demanderesse a déposé au moins 34 griefs qui, pour l’essentiel, reflètent les allégations contenues dans sa déclaration modifiée.

 

[8]               La demanderesse demandait réparation pour des blessures subies au lieu de travail, pour un état de stress résultant de présumés mauvais traitements et pour des ennuis de santé, et cela par le biais de sa demande d’indemnisation déposée en vertu de la Loi sur l’indemnisation des agents de l’État. Au cours de cette procédure, on est arrivé à la conclusion que ses présumées blessures n’étaient imputables à aucun mauvais traitement de la part de collègues ou de superviseurs et, pour la plupart, étaient sans rapport avec son emploi ou son milieu de travail. Une indemnité a été versée à la demanderesse en vertu de ce régime législatif pour certaines choses qui avaient été jugées imputables à l’état physique de son lieu de travail. Les appels interjetés de ces décisions ont été rejetés, et d’autres appels interjetés à la Cour d’appel de la Nouvelle‑Écosse restent en suspens, à la demande de la demanderesse.

 

[9]               La demanderesse n’a pas encore procédé à un interrogatoire préalable. Il lui avait été ordonné en premier lieu de franchir cette étape au plus tard le 30 juin 1999.

 

[10]           La demanderesse a déposé une action auparavant, numéro du greffe T‑1085‑85. Cette action faisait état, pour l’essentiel, des mêmes faits et sujets que l’action en cours. La demanderesse n’a pas donné suite à cette action et celle‑ci a été finalement, après examen de l’état de l’instance, rejetée 11 ans plus tard pour cause de retard, par ordonnance du juge en chef Jerome. La demande de réexamen a été rejetée le 13 avril 2000.

 

[11]           Dans le dossier A‑259‑00, la demanderesse a fait appel du rejet de son action T‑1085‑85. L’appel a été rejeté pour cause de retard, après plusieurs prorogations, par ordonnance de la Cour le 28 août 2003.

 

POINT LITIGIEUX

[12]           La Cour a‑t‑elle compétence pour juger cette affaire?

ANALYSE

 

[13]           La procédure des jugements sommaires a pour objet de permettre à la Cour de se libérer des cas qui ne justifient pas un procès parce qu’ils ne soulèvent aucune question véritable à trancher. Le point important est celui de savoir si le dossier est douteux au point qu’il ne mérite pas l’examen du juge des faits dans un procès futur. Chaque cas doit être évalué selon son propre contexte et, lorsque se posent de sérieuses questions de crédibilité, l’affaire doit alors déboucher sur un procès. Par ailleurs, les questions complexes de droit ou de fait ne devraient pas être tranchées par requête en jugement sommaire. (Granville Shipping Co. c. Pegasus Lines Ltd. S.A., [1996] 2 C.F. 853, au paragraphe 8)

 

[14]           La demanderesse réclame des dommages‑intérêts pour de présumés méfaits qu’elle dit avoir subis dans son milieu de travail lorsqu’elle était fonctionnaire fédérale. La Couronne défenderesse dit que sa déclaration modifiée concernant la présente action fait état de plaintes qui se rapportent aux conditions d’emploi, aux droits après licenciement, aux questions touchant le lieu de travail et/ou aux droits à certains avantages sociaux tels que la priorité administrative et la priorité statutaire prévues par la Loi sur l’emploi dans la fonction publique. La Couronne défenderesse est d’avis que la Cour suprême du Canada a confirmé, dans l’arrêt Vaughan c. Canada, [2005] A.C.S. no 12, que ce sont là des aspects qui sont tous assujettis à la procédure de règlement des griefs comme le prévoient la convention collective de la demanderesse et la procédure établie par la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la LRTFP).

 

[15]           Pour savoir si la Cour a ou non compétence dans la présente affaire, je dois décider si la procédure établie par le législateur dans la LRTFP pour le traitement des plaintes de la demanderesse commande la retenue judiciaire. Les dispositions applicables de la LRTFP sont les suivantes :

91(1)Sous réserve du paragraphe (2) et si aucun autre recours administratif de réparation ne lui est ouvert sous le régime d’une loi fédérale, le fonctionnaire a le droit de présenter un grief à tous les paliers de la procédure prévue à cette fin par la présente loi, lorsqu’il s’estime lésé :

 

91(1) Where any employee feels aggrieved

 

a) par l’interprétation ou l’application à son égard :

 

(a) by the interpretation or application, in respect of the employee, of

 

(i)soit d’une disposition législative, d’un règlement - administratif ou autre -, d’une instruction ou d’un autre acte pris par l’employeur concernant les conditions d’emploi,

 

(i) a provision of a statute, or of a regulation, by‑law, direction or other instrument made or issued by the employer, dealing with terms and conditions of employment, or

 

(ii) soit d’une disposition d’une convention collective ou d’une décision arbitrale;

 

(ii) a provision of a collective agreement or an arbitral award, or

 

b) par suite de tout fait autre que ceux mentionnés aux sous‑alinéas a)(i) ou (ii) et portant atteinte à ses conditions d’emploi.

 

(b) as a result of any occurrence or matter affecting the terms and conditions of employment of the employee, other than a provision described in subparagraph (a)(i) or (ii),in respect of which no administrative procedure for redress is provided in or under an Act of Parliament, the employee is entitled, subject to subsection (2), to present the grievance at each of the levels, up to and including the final level, in the grievance process provided for by this Act.

 

92(1)Après l’avoir porté jusqu’au dernier palier de la procédure applicable sans avoir obtenu satisfaction, un fonctionnaire peut renvoyer à l’arbitrage tout grief portant sur :

 

92(1) Where an employee has presented a grievance, up to and including the final level in the grievance process, with respect to

 

a) l’interprétation ou l’application, à son endroit, d’une disposition d’une convention collective ou d’une décision arbitrale;

 

(a) the interpretation or application in respect of the employee of a provision of a collective agreement or an arbitral award,

 

b) dans le cas d’un fonctionnaire d’un ministère ou secteur de l’administration publique fédérale spécifié à la partie I de l’annexe I ou désigné par décret pris au titre du paragraphe (4), soit une mesure disciplinaire entraînant la suspension ou une sanction pécuniaire, soit un licenciement ou une rétrogradation visé aux alinéas 11(2)f) ou g) de la Loi sur la gestion des finances publiques;

 

(b) in the case of an employee in a department or other portion of the public service of Canada specified in Part I of Schedule I or designated pursuant to subsection (4),

(i) disciplinary action resulting in suspension or a financial penalty,

or

 

(ii) termination of employment or demotion pursuant to paragraph 11(2)(f) or (g) of the Financial Administration Act, or

 

c) dans les autres cas, une mesure disciplinaire entraînant le licenciement, la suspension ou une sanction pécuniaire.

 

(c) in the case of an employee not described in paragraph (b), disciplinary action resulting in termination of employment, suspension or a financial penalty,

 

and the grievance has not been dealt with to the satisfaction of the employee, the employee may, subject to subsection (2), refer the grievance to adjudication.

 

 

[16]           La LRTFP prévoit la possibilité de déposer un grief dans un grand nombre de différends surgissant dans le milieu de travail, mais les griefs qui peuvent être soumis à un arbitrage indépendant sont strictement limités. Dans la décision Canada (Procureur général) c. Assh, [2005] A.C.F. no 923, le juge Strayer s’exprime ainsi, au paragraphe 11, sur cette situation particulière :

[...] en vertu de l’article 91, l’employé peut présenter un grief portant sur diverses questions ayant trait à l’application, à son endroit, de lois, de règlements ou d’autres actes tels que le Code. Il y a toute une série de plaintes de ce genre que l’employé s’estimant lésé au travail peut déposer. De nombreuses règles peuvent, lorsqu’elles ne sont pas respectées, entraîner des mesures disciplinaires. Il est toutefois clair, suivant l’article 92, que la possibilité d’avoir recours à l’arbitrage relativement à l’interprétation et à l’application de tels actes se limite à quelques types particuliers de griefs, savoir ceux qui se rapportent à une mesure disciplinaire entraînant la suspension ou une sanction pécuniaire ou au licenciement ou à la rétrogradation.

 

[17]           Dans l’arrêt Vaughan, la Cour suprême du Canada a souligné que les tribunaux doivent faire preuve de retenue envers les décisions d’arbitres indépendants se rapportant aux relations de travail. Tel serait le cas pour les décisions rendues par des arbitres dans des dossiers se rapportant à l’article 92 de la LRTFP. Toutefois, la question véritable posée dans l’arrêt Vaughan était celle de savoir si les décisions qui ne peuvent pas être renvoyées à l’arbitrage commandent ou non la retenue judiciaire. Plus précisément, les cours de justice doivent‑elles faire montre de retenue envers les décisions internes qui concernent des griefs relevant de l’article 91 de la LRTFP, mais non susceptibles d’arbitrage selon l’article 92.

 

[18]           Le juge Binnie, s’exprimant pour les juges majoritaires dans l’arrêt Vaughan, est d’avis que « les termes de la LRTFP ne sont pas suffisamment catégoriques pour écarter la compétence des tribunaux ordinaires en ce qui concerne les questions pouvant faire l’objet d’un grief mais non d’un arbitrage ». Cependant, il est également d’avis que, dans les affaires courantes relevant de l’article 91 de la LRTFP, mais ne pouvant pas faire l’objet d’un arbitrage selon l’article 92, « les tribunaux devraient généralement exercer leur pouvoir discrétionnaire pour refuser d’intervenir, sauf dans le cadre limité du contrôle judiciaire ».

 

[19]           Le cas des dénonciateurs est l’exemple donné dans l’arrêt Vaughan comme affaire qui n’est pas une « affaire courante ». Un tel exemple serait une exception à la règle de la retenue judiciaire et justifierait par conséquent l’intervention de la Cour. Sur ce point, le juge Binnie écrit ce qui suit, au paragraphe 39 :

Même si l’absence d’un arbitre indépendant peut, dans certaines circonstances, se répercuter sur l’exercice du pouvoir discrétionnaire résiduel du tribunal (comme dans le cas de dénonciateurs), la règle générale de la retenue dans les instances découlant des relations de travail devrait prévaloir.

 

[20]           Dans la présente affaire, la demanderesse reconnaît qu’elle a introduit son action à la suite d’un grief de nature courante qui concerne la cessation de son emploi et qui, en définitive, entrerait dans les limites naturelles d’un grief au sens de l’article 91. Cependant, elle dit que la cessation de son emploi n’était que le point culminant de tous les actes préjudiciables dirigés contre elle. Elle dit que, en définitive, son grief à l’encontre de la cessation de son emploi est fondé sur ce qu’elle considère comme des inconduites commises pas des collègues fonctionnaires au lieu de travail durant son emploi. Elle dit que l’inconduite suivante dont elle a été la victime dépassait le champ des questions relevant généralement du régime de la LRTFP :

[traduction] [...] collusion, complot en vue de causer un préjudice, une perte et un dommage; faute consistant à l’exposer d’une manière répétée à des toxines environnementales; conduite délibérée et malicieuse destinée à discréditer la demanderesse; infliction délibérée de dommages moraux; agression sexuelle et harcèlement, viol, coups et blessures, excès de pouvoir et exercice fautif du pouvoir.

 

[21]           La demanderesse dit que la présumée inconduite susmentionnée n’est pas le type courant d’inconduite qui relèverait d’un grief selon l’article 91, et qu’elle n’est pas non plus une inconduite pouvant être l’objet d’un arbitrage selon l’article 92 de la LRTFP. En conséquence, d’après la demanderesse, la Cour devrait exercer sa compétence résiduelle comme elle l’a fait auparavant dans des cas mettant en cause des dénonciateurs. La demanderesse est d’avis que, sans cette intervention de la Cour, ses griefs ne seront jamais valablement étudiés.

 

[22]           Je ne souscris pas à l’argument de la demanderesse pour diverses raisons. Elle dit que la procédure indiquée à l’article 91 ne devrait pas être employée parce que ses allégations ne concernent pas les questions courantes habituellement soumises à ce mécanisme particulier de règlement des griefs. Cet argument n’est pas fondé, d’autant plus que nombre des actes répréhensibles qu’elle allègue remontent à près de 30 ans et que, à maintes reprises, elle a recouru à la procédure de règlement des griefs pour obtenir réparation. Elle n’a pas obtenu de cette procédure le résultat qu’elle souhaitait, mais cela ne veut pas dire que le mécanisme des griefs prévu par l’article 91 est inadéquat.

 

[23]           Pour éluder la règle générale de la retenue judiciaire applicable aux affaires intéressant les relations de travail, la demanderesse dit que la Cour devrait exercer son pouvoir discrétionnaire résiduel dans la présente affaire en raison d’une présumée ressemblance entre son cas et l’exception mentionnée dans l’arrêt Vaughan à propos des dénonciateurs. Sur ce point, je souscris au raisonnement de la Couronne défenderesse. Plus exactement, la déclaration de la demanderesse n’indique nulle part qu’elle a tenté d’attirer l’attention sur « un gaspillage ou un abus de pouvoir », selon les mots employés dans l’arrêt Vaughan, au sein de l’un des ministères où elle a travaillé. Sa demande porte uniquement sur l’allégation selon laquelle c’est elle‑même qui a été victime de mauvais traitements.

 

[24]           Le cas particulier de la décision Pleau c. Canada (Procureur général), [1999] N.S.J. no 448, mentionnée par la demanderesse, doit être distingué de la présente affaire parce que la procédure de règlement du grief avait été menée à terme, à la satisfaction du demandeur. Néanmoins, l’action avait pu suivre son cours parce qu’il ne s’agissait pas d’un cas où le différend entre les parties pouvait être renvoyé à l’arbitrage en vertu de la Loi ou en vertu de la convention collective. Dans l’arrêt Vaughan, le juge Binnie, s’exprimant pour les juges majoritaires, a écrit, aux paragraphes 19 et 20 :

Dans Pleau (Litigation Guardian of) c. Canada (Attorney General) (1999), 182 D.L.R. (4th) 373 (C.A.N.‑É.), le demandeur prétendait être victime de harcèlement parce qu’il avait dénoncé [traduction] « ce qu’il avait cru être une preuve de mauvaise conduite dans l’exploitation d’une installation du gouvernement » (p. 380). Dans Guenette c. Canada (Attorney General) (2002), 60 O.R. (3d) 601 (C.A.), deux employés du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international se plaignaient des [traduction] « mesures punitives » prises par leurs supérieurs parce qu’ils avaient signalé [traduction] « la mauvaise gestion et le gaspillage des fonds publics » (par. 1) relativement à des biens situés à l’étranger. Dans les deux cas, les actions ont pu suivre leur cours.

On comprend la réticence des tribunaux à conclure que dans ces cas, le seul recours des employés était de présenter un grief dans une procédure interne au ministère même qu’ils avaient dénoncé, là où la décision finale appartenait à la personne qui, en dernier lieu, était responsable du fonctionnement du ministère critiqué, soit le sous‑ministre (ou la personne qu’il désigne). Les juges ont conclu que, à un moment donné, la décision relative à leurs plaintes devrait être prise par un décideur indépendant du ministère, mais la LRTFP ne prévoyait pas cette possibilité. Dans les deux cas, la cour a fait remarquer que les dispositions des art. 91 à 96 attributives d’une compétence « exclusive » étaient plus souples que la disposition sur les relations de travail en cause dans Weber. Le législateur avait laissé la porte ouverte juste assez pour que les tribunaux puissent intervenir.

 

[25]           Bien que le mécanisme de règlement des griefs dont parle l’article 91 de la LRTFP n’autorise pas dans tous les cas l’arbitrage d’une tierce partie indépendante, un contrôle judiciaire demeure possible. Dans la décision Assh, le juge Strayer, se portant à la défense du mécanisme susmentionné, écrit ce qui suit, au paragraphe 12 :

Cela n’entraîne pas non plus d’injustice grave. Cela signifie qu’une fois qu’un grief a été porté au dernier palier de la procédure applicable et ne peut être renvoyé à l’arbitrage, le plaignant peut demander à la Cour de procéder au contrôle judiciaire de la décision rendue au dernier palier. Il ne s’agit pas d’un redressement illusoire. Comme l’a dit le juge Evans dans l’arrêt Vaughan c. Canada, [2003] 3 C.F. 645 (C.A.) :

136  Quatrièmement, le fait qu’il est possible de présenter une demande de contrôle judiciaire à l’encontre d’une décision défavorable rendue au dernier palier à l’égard d’un grief qui ne peut pas être renvoyé à un arbitre en vertu de l’article 92 assure que des mesures disciplinaires externes sont prises à l’égard des décideurs et qu’il existe un degré indépendant de contrôle de la qualité quant à la procédure et quant au résultat. Dans le cadre d’une demande de contrôle présentée devant la Section de première instance en vertu de l’article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale, on peut demander à la Cour d’examiner le caractère équitable de la procédure administrative ainsi que la rationalité des conclusions de fait importantes [...]

 

[26]           La demanderesse elle‑même a tenté plus d’une fois d’obtenir le contrôle judiciaire des décisions qui avaient résulté du mécanisme interne de règlement des griefs. Et la demanderesse a aussi décidé de ne pas solliciter le contrôle judiciaire de maintes décisions issues du mécanisme interne de règlement des griefs.

 

[27]           Dans un arrêt plus récent, Grenier c. Canada, [2005] A.C.F. no 1778, la Cour d’appel confirme l’obligation de contester par contrôle judiciaire, et non par demande introductive d’instance, la légalité de la décision d’un office fédéral. En bref, une décision demeure valide et applicable à moins qu’elle ne soit contestée avec succès à la suite d’une procédure de contrôle judiciaire :

En somme, une décision d’un organisme fédéral, comme celle en l’espèce du directeur, conserve sa force et son autorité légales, demeure juridiquement opérante et produit des effets légaux tant qu’elle n’a pas été invalidée.

[...]

Or, accepter que le contrôle de la légalité des décisions des organismes fédéraux puisse se faire par le biais d’une action en dommages‑intérêts, c’est permettre un recours en vertu de l’article 17. Permettre à cette fin un recours sous l’article 17, c’est tout d’abord soit ignorer, soit dénier l’intention clairement exprimée par le législateur au paragraphe 18(3) que le recours doit s’exercer seulement par voie de demande de contrôle judiciaire. La version anglaise du paragraphe 18(3) met l’emphase sur ce dernier point en utilisant le mot « only » dans l’expression « may be obtained only on an application for judicial review ».

C’est aussi réintroduire judiciairement le partage des compétences entre la Cour fédérale et les tribunaux des provinces. C’est faire renaître dans les faits une ancienne problématique à laquelle le législateur fédéral a remédié par l’adoption de l’article 18 et l’attribution d’une compétence exclusive à la Cour fédérale et, dans les cas de l’article 28, à la Cour d’appel fédérale. C’est précisément cette intention législative que la Cour d’appel du Québec a reconnu dans l’affaire Capobianco, précitée, afin d’éviter que l’action en dommages, introduite en Cour supérieure du Québec et s’attaquant à la légalité des décisions d’offices fédéraux, ne conduise, en fait et en droit, à un démembrement dysfonctionnel du droit administratif fédéral.

 

[28]           J’arrive à la conclusion que le mécanisme de règlement des différends et des griefs qui est prévu par l’article 91 de la LRTFP doit être utilisé. La qualité des relations de travail serait compromise si les tribunaux tentent de concurrencer le régime législatif qui détaille la manière de régler les griefs. Je suis d’avis que la Cour n’a pas compétence dans la présente affaire et qu’il n’y a donc pas de question véritable à trancher.

 

[29]           Par souci d’exhaustivité, j’examinerai maintenant les autres points soulevés dans les requêtes des défendeurs, même si je suis d’avis que la Cour n’a pas compétence.

 

Loi sur l’indemnisation des agents de l’État

[30]           Je partage l’avis de la défenderesse lorsqu’elle dit que, dans sa réclamation, la demanderesse réclame en réalité des dommages‑intérêts pour congédiement injustifié et que la Cour n’est pas l’instance compétente pour une telle action. Ce raisonnement a été confirmé par le juge Dubé dans la décision Blais c. Canada (Procureur général), [1994] A.C.F. no 917, où il écrivait ce qui suit, au paragraphe 6 :

Il s’agit donc manifestement d’une action basée sur le congédiement du demandeur et tombant dans le cadre statutaire de la Loi. En conséquence, la Cour fédérale n’a pas compétence en la matière.

 

[31]           La Couronne défenderesse dit que, dans sa demande de dommages‑intérêts, la demanderesse allègue des ennuis de santé et/ou des blessures qui seraient survenus au lieu de travail. Cependant, les réparations de cette nature ne peuvent pas être demandées aux termes de la Loi sur l’indemnisation des agents de l’État (la LIAG). La définition du mot « accident » qui se trouve à l’article 2 de la LIAG englobe les blessures résultant d’un acte délibéré du genre de ceux qu’allègue la demanderesse.

 

« accident » Sont assimilés à un accident tout fait résultant d’un acte délibéré accompli par une autre personne que l’agent de l’État ainsi que tout événement fortuit ayant une cause physique ou naturelle.

"accident" includes a willful and an intentional act, not being the act of the employee, and a fortuitous event occasioned by a physical or natural cause;

 

[32]           Par ailleurs, comme l’a fait observer la Couronne défenderesse, des sommes ont été payées sur le Trésor à la demanderesse pour certaines présumées blessures, au titre du régime d’indemnisation des victimes d’accidents du travail, ainsi que le prévoit la LIAG. Par conséquent, les parties de la réclamation de la demanderesse pour lesquelles elle a reçu une indemnité en application de la LIAG sont empêchées par l’application combinée des articles 4 et 12 de la LIAG et par l’application de l’article 9 de la Loi sur le contentieux administratif et la responsabilité civile de l’État. Ces dispositions sont reproduites ci‑après :

4. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente loi, il est versé une indemnité :

a) aux agents de l’État qui sont :

(i) soit blessés dans un accident survenu par le fait ou à l’occasion de leur travail.

 

4. (1) Subject to this Act, compensation shall be paid to (a) an employee who (i) is caused personal

injury by an accident arising out of and in the course of his employment, or

 

12. L’agent de l’État ou les personnes à sa charge qui, par suite d’un accident du travail, ont droit à l’indemnité prévue par la présente loi ne peuvent exercer d’autre recours contre Sa Majesté ou un fonctionnaire, préposé ou mandataire de celle‑ci pour cet accident.

 

12. Where an accident happens to an employee in the course of his employment under such circumstances as entitle him or his dependants to compensation under this Act, neither the employee nor any dependant of the employee has any claim against Her Majesty, or any officer, servant or agent of Her Majesty, other than for compensation under this Act.

 

9. Ni l’État ni ses préposés ne sont susceptibles de poursuites pour toute perte -- notamment décès, blessure ou dommage -- ouvrant droit au paiement d’une pension ou indemnité sur le Trésor ou sur des fonds gérés par un organisme mandataire de l’État.

9. No proceedings lie against the Crown or a servant of the Crown in respect of a claim if a pension or compensation has been paid or is payable out of the Consolidated Revenue Fund or out of any funds administered by an agency of the Crown in respect of the death, injury, damage or loss in respect of which the claim is made.

 

 

Abus de procédure

[33]           La Couronne défenderesse dit que la réclamation de la demanderesse doit être radiée parce qu’elle constitue un abus de procédure, selon l’alinéa 221(1)f) des Règles des Cours fédérales (1998), en ce sens que la demanderesse cherche à faire rejuger des points qui ont déjà été décidés. La Couronne défenderesse dit aussi que, conformément au régime législatif applicable au cas de la demanderesse, la Cour d’appel de la Nouvelle‑Écosse a été saisie de plusieurs des réclamations de la demanderesse dans la présente affaire, qui concernent des lésions corporelles. Selon la Couronne défenderesse, il y a abus de procédure si la demanderesse est autorisée à faire rejuger ces questions par la Cour, après décision rendue par une instance dont la vocation est précisément de statuer sur ces questions.

 

[34]           La Couronne défenderesse dit aussi que la réclamation de la demanderesse constitue un abus de procédure parce qu’elle renferme pour l’essentiel les mêmes allégations que le dossier T‑1085‑85. Toutefois, la demanderesse fait valoir que le dossier T‑1085‑85 n’a jamais été instruit au fond puisqu’il a été rejeté pour cause de retard après examen de l’état de l’instance. La présente affaire ne saurait donc constituer un abus de procédure.

 

[35]           La demanderesse soutient qu’elle ne cherche pas à faire rejuger les questions qui la concernent et qu’il n’y a donc ici aucun abus de procédure, et cela parce que les questions entourant la cessation de son emploi et les divers préjudices évoqués n’ont jamais été soumises à un arbitre impartial.

 

[36]           La demanderesse dit que la Couronne défenderesse n’a pas, dans sa défense, plaidé des points de fait ou de droit qui justifieraient une allégation d’abus de procédure et que, pour cette raison, sa requête en jugement sommaire devrait être rejetée. D’ailleurs, la Couronne défenderesse a eu 13 ans pour demander que cette réclamation soit radiée pour cause d’abus de procédure, et elle ne l’a pas fait.

 

[37]           Dans la décision Aventis Pharma Inc. c. Apotex Inc., [2005] A.C.F. no 1843, la juge Tremblay‑Lamer expose en détail le principe de l’abus de procédure. Elle s’exprime ainsi, au paragraphe 28 :

Selon la doctrine, la Cour dispose du pouvoir discrétionnaire résiduel inhérent d’empêcher que ses procédures soient utilisées abusivement. Cette doctrine est souple et « n’est pas alourdie par les exigences précises du principe de l’autorité de la chose jugée » : S.C.F.P., précité, au paragraphe 42. « La doctrine de l’abus de procédure s’articule autour de l’intégrité du processus juridictionnel et non autour des motivations ou de la qualité des parties » comme dans le cas de la préclusion : S.C.F.P., précité, au paragraphe 51. Comme l’indique la juge Layden‑Stevenson dans la décision AB Hassle, précitée, au paragraphe 94 :

Ceux qui critiquent cette doctrine font valoir que l’utilisation de l’abus de procédure à la place de la préclusion brouille la vraie question sans rien ajouter d’autre qu’une vague impression de pouvoir discrétionnaire. Je ne partage pas cette vue. Dans tous ses cas d’application, la doctrine de l’abus de procédure vise essentiellement à préserver l’intégrité de la fonction judiciaire. L’accent est mis davantage sur l’intégrité du processus décisionnel judiciaire comme fonction de l’administration de la justice que sur l’intérêt des parties. Lorsque l’accent est correctement mis sur l’intégrité du processus, le mobile de la partie qui cherche à rouvrir le débat ne saurait constituer un facteur décisif.

 

[38]           Dans la décision Telus Communications (Edmonton) Inc. c. Canada, [2005] A.C.F. no 775, la Cour d’appel fédérale a confirmé, au paragraphe 24, que le fait de plaider une cause d’action qui dépasse la compétence de la Cour constitue un abus de procédure :

[L’intimée] rappelle à la Cour que, dans Weider c. Beco Industries (1976), 29 C.P.R. (2d) 175 (C.F. 1re inst.), à la page 176, le juge Mahoney a dit que « [...] plaider une cause d’action sur laquelle la Cour n’a pas compétence pour statuer constitue clairement un emploi abusif des procédures [...] ».

 

[39]           En l’espèce, j’ai déjà conclu que la Cour n’a pas compétence pour statuer sur les prétentions de la demanderesse parce que c’est le mécanisme de règlement des différends et des griefs prévu par l’article 91 de la LRTFP qui doit plutôt être utilisé. Puisque la Cour n’est pas compétente, je dois conclure que l’examen des prétentions de la demanderesse constituerait un abus de procédure selon l’alinéa 221(1)f) des Règles des Cours fédérales (les Règles).

 

Lenteur à faire avancer l’instance

[40]           La Couronne défenderesse dit que les prétentions de la demanderesse devraient être rejetées, conformément à l’article 167 des Règles, en raison de sa lenteur extrême à faire avancer l’instance. Cette instance a été introduite en 1992 et se fonde sur des faits survenus en 1985 et en 1986. Toutefois, une déclaration modifiée expose des faits qui remontent aussi loin que 1972.

 

[41]           Selon la Couronne défenderesse, les antécédents procéduraux de la présente affaire révèlent d’incessants et longs délais de la part de la demanderesse. Le dossier montre que la demanderesse n’a jamais respecté les échéances fixées par la Cour. La Couronne défenderesse dit aussi qu’elle serait gravement lésée si cette action devait aboutir à un procès, puisque nombre des témoins sont à la retraite ou sont en mauvaise santé.

 

[42]           Dans la décision Nichols c. Canada (1990), 36 F.T.R. 77, le juge Dubé expose le critère à appliquer pour savoir dans quelle mesure un retard justifie le rejet d’une action :

Il s’agit de savoir si, dans les circonstances, il est toujours possible de tenir un procès équitable après un délai si long. Le critère classique à appliquer pour résoudre cette question est triple. En premier lieu, le retard est‑il excessif? En deuxième lieu, le retard est‑il inexcusable? En troisième lieu, les défendeurs sont‑ils susceptibles de subir un préjudice grave en raison de ce retard (voir les motifs du lord juge Salmon dans l’arrêt Allen v. Sir Alfred McAlpine & Sons Ltd., [1968] 2 Q.B. 229, à la page 268).

 

[43]           Plus récemment, selon ce qu’allègue la demanderesse, la Cour a jugé que le critère général du rejet d’une procédure ne devrait pas s’appliquer aux procédures qui ont survécu à un examen de l’état de l’instance et que les requêtes en rejet pour cause de retard devraient être l’exception maintenant que la Cour dispose d’une bonne capacité de gestion des instances et qu’elle intervient activement dans le suivi des procédures (Bell c. Succession Bell (2000), 187 F.T.R. 64). Par conséquent, si je n’avais pas déjà fait droit aux requêtes en jugement sommaire dans la présente affaire, le retard n’aurait pas constitué un motif de rejet parce que la procédure avait déjà survécu à un examen de l’état de l’instance.

 

Délai de prescription

[44]           La Couronne défenderesse et les syndicats défendeurs affirment que le délai de prescription applicable à l’ensemble des faits susmentionnés avait expiré, en application du Limitations of Actions Act, avant l’introduction de cette instance.

 

[45]           La demanderesse a perdu son emploi le 6 mai 1986, et la présente instance a été introduite le 6 mai 1992. Je suis donc d’avis que son allégation de congédiement injustifié a été faite à l’intérieur du délai de prescription de six ans. Pour ce qui est des allégations présentées après l’expiration de ce délai de prescription, la demanderesse prétend qu’elles se rapportent à son congédiement définitif. Je trouve cet argument un peu forcé car il est improbable que des événements survenus il y a plus de 20 ans aient pu influer sur le congédiement de la demanderesse. Toutefois, puisque la requête en jugement sommaire a été accordée, je n’estime pas qu’il soit nécessaire d’étudier le bien‑fondé de cet argument.

 

[46]           La Couronne défenderesse voudrait aussi modifier sa défense. Puisque la requête en jugement sommaire a été accordée, il n’est pas nécessaire d’examiner cette demande.

 


 

ORDONNANCE

 

            LA COUR ORDONNE :

  1. Les requêtes interlocutoires en jugement sommaire sont accordées;

 

  1. La déclaration modifiée de la demanderesse est radiée;

 

  1. L’action de la demanderesse est rejetée;

 

  1. Les défendeurs déposeront et signifieront leurs conclusions écrites sur les dépens au plus tard 15 jours après la date de cette ordonnance;

 

  1. La demanderesse déposera et signifiera ses conclusions écrites sur les dépens au plus tard 15 jours après le dépôt des conclusions des défendeurs;

 

  1. Les défendeurs auront cinq jours après le dépôt des conclusions de la demanderesse pour produire une réponse, le cas échéant.

 

 

 

 

« Pierre Blais »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

DOSSIER :                                        T‑1029‑92

 

INTITULÉ :                                       JOSEPHINE E. MARSHALL

                                                            c.

                                                            SA MAJESTÉ LA REINE, L’ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA ET LE SYNDICAT DES EMPLOYÉS DE LA FONCTION PUBLIQUE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 HALIFAX (NOUVELLE‑ÉCOSSE)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 1er NOVEMBRE 2005

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       LE JUGE BLAIS

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 19 JANVIER 2006

 

COMPARUTIONS :

 

Kenneth MacLean

 

POUR LA DEMANDERESSE

James Klassen

 

 

David Yazbek

 

POUR LE DÉFENDEUR,

LE MINISTRE DE LA JUSTICE

 

POUR LE SYNDICAT DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Kenneth MacLean

Boyne Clarke

Halifax (Nouvelle‑Écosse)

 

POUR LA DEMANDERESSE

John H. Sims, c.r.

Sous‑procureur général du Canada

Halifax (Nouvelle‑Écosse)

 

David Yazbek

Rayen Allen

Ottawa (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR,

LE MINISTRE DE LA JUSTICE

 

 

POUR LE SYNDICAT DÉFENDEUR

 

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