Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20010705

Dossier : IMM-4601-00

Référence neutre : 2001 CFPI 759

ENTRE :

                                             JOSEPH PREMKUMAR FERNANDO

                                                                                                                                          demandeur

                                                                          - et -

                        MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                           défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE NADON

[1]                Le demandeur demande l'annulation de la décision du 8 août 2000 par laquelle la Commission du statut de réfugié a rejeté sa revendication du statut de réfugié au Canada.


[2]                La Commission a conclu que le demandeur n'était pas un réfugié, comme il ne craignait pas subjectivement d'être persécuté. La Commission a conclu, en particulier, que le défaut du demandeur de revendiquer le statut de réfugié pendant la période de plus de trois mois où il a habité aux États-Unis ne cadrait pas avec sa prétendue crainte d'être persécuté. Dans Tabet-Zatla c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), (2 novembre 1999), IMM-6291-98 (C.F. 1re inst.), ma collègue, Mme le juge Tremblay-Lamer, a émis les commentaires suivants aux paragraphes 5 et 6 :

Il était raisonnable pour la section du statut de conclure que son comportement était incompatible avec l'existence d'une crainte subjective de persécution. [...]

Comme je l'indiquais récemment dans l'arrêt Kamana c. Ministre :

L'absence de preuve quant à l'élément subjectif de la revendication constitue une lacune fatale qui justifie à elle seule le rejet de la revendication puisque les deux éléments de la définition de réfugié, subjectif et objectif, doivent être rencontrés. [renvoi omis]

[3]                Après avoir étudié la preuve avec soin, notamment le témoignage de vive voix du demandeur, je ne peux comprendre pour quel motif la conclusion de la Commission pourrait être critiquée. Les raisons invoquées par le demandeur pour ne pas revendiquer le statut de réfugié aux États-Unis ne concordent pas, indubitablement, avec la crainte qu'il allègue pour le revendiquer au Canada. Et comme le juge Tremblay-Lamer l'a signalé à juste titre, l'absence de crainte subjective de persécution porte un coup fatal à une revendication du statut de réfugié.

[4]                Je suis également d'avis que le dossier permet clairement de corroborer la conclusion de la Commission selon laquelle le demandeur n'était pas un témoin crédible. Le témoignage de vive voix du demandeur fait voir qu'est raisonnable la conclusion de la Commission sur ce point.

[5]                La conclusion de la Commission selon laquelle la revendication du demandeur n'avait pas un minimum de fondement est aussi, selon moi, clairement étayée par le dossier.


[6]                Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire du demandeur sera rejetée.

[7]                Le demandeur soutient que je devrais certifier que la question suivante constitue une question grave de portée générale :

LA SIMPLE CONCLUSION QU'UN DEMANDEUR DU STATUT DE RÉFUGIÉ N'EST PAS UN TÉMOIN CRÉDIBLE SUFFIT-ELLE À ENTRAÎNER L'APPLICATION DU PARAGRAPHE 69.1(9.1) DE LA LOI SUR L'IMMIGRATION?

[8]                Comme je l'ai mentionné à l'avocat du demandeur à l'audience, je ne crois pas que cette question devrait être certifiée. Ce n'est pas, selon moi, une question de portée générale au sens où l'a expliqué le juge Décary dans Liyanagamage c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1994), 176 N.R. 4, à la page 5 :

Lorsqu'il certifie une question sous le régime du paragraphe 83(1), le juge des requêtes doit être d'avis que cette question transcende les intérêts des parties au litige, qu'elle aborde des éléments ayant des conséquences importantes ou qui sont de portée générale [voir l'excellente analyse de la notion d' « importance » qui est faite par le juge Catzman dans la décision Rankin v. McLeod, Young, Weir Ltd. et al. (1986), 57 O.R. (2d) 569 (H.C. de l'Ontario)], et qu'elle est aussi déterminante quant à l'issue de l'appel. Le processus de certification qui est visé à l'article 83 de la Loi sur l'immigration ne doit pas être assimilé au processus de renvoi prévu à l'article 18.3 de la Loi sur la Cour fédérale ni être utilisé comme un moyen d'obtenir, de la Cour d'appel, des jugements déclaratoires à l'égard de questions subtiles qu'il n'est pas nécessaire de trancher pour régler une affaire donnée.


[9]                À mon avis, la question dont la certification est demandée ne satisfait pas au critère ci-dessus, comme la réponse à lui apporter est entièrement fonction des faits d'espèce. Dans une cause donnée, la conclusion selon laquelle le demandeur n'est pas un témoin crédible justifie ou non de conclure que sa revendication n'a pas un minimum de fondement selon la nature de la preuve produite et le fondement de la revendication du demandeur.

[10]            Selon moi, la question en cause ne transcende pas les intérêts des parties et n'aborde pas des éléments ayant des conséquences importantes ou qui sont de portée générale. Je sais, pour en avoir été informé par l'avocate du demandeur, que dans Rahaman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2 novembre 2000), IMM-1112-99 (C.F. 1re inst.), le juge Teitelbaum a certifié la question qui m'est soumise par le demandeur. Avec le plus grand respect pour mon collègue, je ne crois pas que la question qu'il a certifiée aurait dû l'être. Elle ne satisfait pas, selon moi, au critère expliqué par le juge Décary dans Liyanagamage, précité.

                                                                                   « Marc Nadon »                 

                                                                                                   JUGE                        

OTTAWA (ONTARIO)

Le 5 juillet 2001

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

N ° DU GREFFE :                                          IMM-4601-00

INTITULÉ :                                                     JOSEPH PREMKUMAR FERNANDO c. MCI

LIEU DE L'AUDIENCE :                             MONTRÉAL (QUÉBEC)

DATE DE L'AUDIENCE :                             Le 28 juin 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : Monsieur le juge Nadon

DATE DES MOTIFS :                                  Le 5 juillet 2001

COMPARUTIONS :

Mme Diane Doray                                                                      POUR LE DEMANDEUR

Mme Sylviane Roy                                                                     POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

M. Joseph W. Allen                                                                   POUR LE DEMANDEUR

Montréal (Québec)

M. Morris Rosenberg                                                                POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada


 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.