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Date : 20191223


Dossier : T-1056-15

Référence : 2019 CF 1606

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 23 décembre 2019

En présence de monsieur le juge James W. O’Reilly

ENTRE :

WESTERN OILFIELD

EQUIPMENT RENTALS LTD

demanderesse

(défenderesse reconventionnelle)

et

M-I LLC

défenderesse

(demanderesse reconventionnelle)

ET ENTRE :

M-I LLC

demanderesse reconventionnelle

et

FP MARANGONI INC.

défenderesse reconventionnelle

JUGEMENT ET MOTIFS PUBLICS

(Jugement et motifs confidentiels rendus le 23 décembre 2019)


Table des matières

I. Aperçu  6

II. Le contexte factuel  7

A. Première question en litige ‑ Pour l’interprétation du brevet 173, qui est la personne versée dans l’art?  13

B. Deuxième question en litige ‑ Quelle est la bonne interprétation des revendications du brevet 173 qui sont en litige?  14

(1) Le brevet 173  14

(2) Termes essentiels utilisés dans le brevet  22

(a) [traduction] « boue »  22

(b) [traduction] « premier crible »  24

(c) [traduction] « vapeur » et « gaz dangereux »  28

(d) [traduction] « accroître le débit »  30

(e) [traduction] « contrôler le débit d’air »  31

(f) [traduction] « acheminer la totalité de l’air ou de la vapeur et du fluide de forage »  32

(g) [traduction] « chambre de dégazage »  33

C. Troisième question en litige – Les défenderesses ont-elles contrefait les revendications du brevet 173?  35

(1) Le système Vac-Screen  35

(2) Les défenderesses ont-elles contrefait directement le brevet?  36

(3) Les défenderesses ont‑elles incité d’autres entités à contrefaire le brevet?  46

(a) Les relations d’affaires de Western  46

(b) L’incitation  48

(4) Le projet commun  51

D. Quatrième question en litige – Les revendications en litige sont‑elles invalides?  52

(1) L’inutilité  52

(2) L’insuffisance  54

(3) L’antériorité  56

(a) Premier groupe – Hensley (2005) et Derrick (2005)  58

(b) Deuxième groupe – Vasshus (2006), Manuel (1988) et Schellstede (1987)  63

(c) Troisième groupe – Logue (1949), Ennis (1975), Bongert (1976), Cook (1989) et Fast (1990) 66

(d) Quatrième groupe – Rischer (2004)  70

(4) L’évidence  71

(a) La personne versée dans l’art  71

(b) Les connaissances générales courantes  71

(c) Les concepts inventifs  73

(5) Les revendications d’une portée plus large  78

(a) Les revendications d’une portée plus large que la divulgation  78

(b) Les revendications d’une portée plus large que l’invention  79

(6) L’absence de possibilité d’inférence raisonnable  80

E. Cinquième question en litige – Quels sont les dommages‑intérêts que les défenderesses doivent à M‑I?  86

III. La requête fondée sur l’article 227 des Règles  93

A. Le contexte  93

B. La question en litige  94

C. Conclusion  96

IV. Conclusion et dispositif  96

 


 

 

I.  Aperçu

[1]  La demanderesse (reconventionnelle), M‑I LLC (M‑I), allègue que les défenderesses, Western Oilfield Equipment Rentals Ltd (Western) et FP Marangoni (FPM), ont contrefait son brevet (le brevet canadien portant le numéro 2 664 173). FPM est une filiale en propriété exclusive de Western. Dans les présents motifs, je désignerai généralement les défenderesses (reconventionnelles) de manière collective sous le nom de « Western », sauf si le contexte factuel exige qu’il en soit autrement.

[2]  M‑I soutient que Western a contrefait directement le brevet 173 et a également incité d’autres à le faire, et elle sollicite des dommages‑intérêts et une indemnité. En réponse, Western affirme que le brevet 173 est invalide pour de nombreux motifs, dont l’inutilité, l’insuffisance, l’antériorité, l’évidence et la portée excessive.

[3]  Je suis d’avis que M‑I a établi sa prétention de contrefaçon. Je conclus également que, selon la prépondérance de la preuve, aucune des allégations d’invalidité des défenderesses n’est étayée. M‑I a donc droit à des dommages‑intérêts et à une indemnité.

[4]  Après avoir exposé le contexte et les faits généraux qui s’appliquent à la présente action, je traiterai des questions suivantes :

  1. Pour l’interprétation du brevet 173, qui est la personne versée dans l’art?

  2. Quelle est la bonne interprétation des revendications du brevet 173 qui sont en litige?

  3. Est-ce que les défenderesses ont contrefait les revendications du brevet 173?

  4. Les revendications en litige sont‑elles invalides?

  5. Quels sont les dommages‑intérêts et l’indemnité que les défenderesses doivent à M‑I?

[5]  En plus de répondre à ces questions, je trancherai aussi une requête fondée sur l’article 227 des Règles que M‑I a présentée au cours de l’instruction.

II.  Le contexte factuel

[6]  La présente affaire porte sur une machine appelée « tamis vibrant ». Les tamis vibrants sont utilisés dans l’industrie pétrolière et gazière pour séparer les déblais du fluide de forage qui remonte d’un puits en fonctionnement, afin que le fluide puisse être réutilisé. Les solides, qui sont produits lors de la pénétration de la roche par le trépan, sont souvent appelés « déblais ». Le fluide de forage aide à remonter les déblais en surface et à lubrifier l’équipement de forage. Le mélange solide-liquide qui remonte en surface au site de forage est appelé « boue ».

[7]  Un tamis vibrant fonctionne essentiellement comme un tamis qui vibre. Il reçoit la boue et procède au criblage des déblais qui se trouvent dans celle-ci. Le fluide est ensuite récupéré par les réservoirs se trouvant au-dessous. Étant donné que le fluide de forage est dispendieux, plus le tamis vibrant est efficace à séparer les solides, moins les coûts des travaux de forage sont élevés. Plus on récupère de fluide de forage réutilisable, mieux c’est.

[8]  Au milieu des années 2000, M-I travaillait à mettre au point une technologie améliorée pour les tamis vibrants. Un de ses ingénieurs en mécanique, M. Brian Carr, tout comme 30 autres ingénieurs, a pris part à la recherche et au développement de tamis et de cribles. À l’époque, le processus à M-I pour développer un nouveau produit comprenait un certain nombre d’étapes successives – une étude de faisabilité, une conception détaillée, des essais sur le terrain et la commercialisation. Les nouvelles idées étaient présentées au Product Development Council (conseil du développement de produits) de M-I, qui déterminait si un produit pouvait passer d’une étape à l’autre.

[9]  M. Carr a présenté son idée préliminaire pour un nouveau modèle de tamis au conseil en 2005. L’une de ses idées consistait à appliquer une pression à vide au crible du tamis pour récupérer plus de fluide. Il a fait une présentation plus complète l’année suivante dans laquelle il a décrit ses objectifs : séparer les résidus solides à faible gravité du fluide de forage, réduire la quantité de fluide de forage laissée sur les solides et récupérer le fluide de forage avant qu’il ne soit déversé à l’extrémité du tamis. Il espérait, de façon ambitieuse, qu’un produit pourrait être commercialisé dans les 18 mois.

[10]  Le conseil a approuvé la proposition de M. Carr et lui a donné 30 jours et une équipe de cinq ou six personnes pour réaliser une étude de faisabilité. Cette étude comprenait une évaluation d’un tamis équipé d’un système à vide avec un bac vibrant intégré et un moyen de contrôler le débit d’air pour éviter que les solides ne restent sur place sur les cribles. Un prototype a été fabriqué dans le même délai. M. Carr a estimé qu’il lui faudrait encore trois mois et un budget de 226 400 $ pour continuer.

[11]  Le prototype de M. Carr comprenait une pompe à vide à l’entrée du tamis, c’est-à-dire au point où la boue est introduite sur le tamis. Le tamis avait quatre cribles au total. Le système a été mis à l’essai dans divers scénarios – inondation des cribles de boue à l’entrée, recouvrement partiel des cribles avec de la boue à l’entrée, retrait de deux cribles à la sortie du tamis de sorte que la pression à vide est appliquée aux deux cribles au point d’entrée, application d’une pression à vide continue et application d’une pression à vide pulsée. Dans l’ensemble, les résultats ont été positifs. La pression à vide a permis d’augmenter de 50 % la quantité de fluide qui traverse les cribles et d’avoir des déblais plus secs qui tombent à l’extrémité du tamis. L’un des problèmes était que la pression à vide aspirait l’humidité ainsi que le fluide au travers du crible, ce qui arrêtait la pompe. Il était alors nécessaire de trouver un moyen de séparer l’air du liquide. Une solution simple consistant à utiliser un « aspirateur pour forage », essentiellement une version commerciale d’un aspirateur de liquides domestique, a été proposée.

[12]  À la fin de l’étape de l’étude de faisabilité, M. Carr a recommandé d’aller de l’avant et de faire passer le tamis équipé d’un système à vide à l’étape des essais sur le terrain, lesquels seraient terminés dans les cinq ou six mois. C’est à ce moment, soit le 1er octobre 2007, que M-I a déposé sa demande de brevet provisoire. Le brevet 173 a été délivré le 16 juin 2015.

[13]  En temps opportun, M-I a lancé un nouveau tamis commercial, mais celui-ci ne comprenait pas un système à vide. Néanmoins, le brevet 173 et le brevet américain correspondant comprenaient un élément d’aspiration.

[14]  Environ six ans plus tard, M. Carr a appris l’existence du système Vac Screen (VS) de FPM, un système qui permet de récupérer le fluide de forage sur un tamis à l’aide d’une pression à vide. Certains de ses collègues ne croyaient pas qu’il s’agissait d’une technologie viable, mais ils envisageaient la possibilité de collaborer avec FPM si sa technologie était brevetée. Certains échanges ont eu lieu entre M-I et FP USA, la filiale américaine de FPM, au sujet de cette technologie.

[15]  M. Calvin Carter, directeur du développement des affaires chez M-I, se souvient d’avoir vu le système VS en 2013, y compris au Canada. Selon lui, ce système est pratiquement identique au « Maximizer » de M-I, pour lequel M-I Swaco, une filiale de M-I, avait conclu une entente avec FP USA concernant la location, soit une entente de partage des revenus (60-40) à compter de 2011 ou de 2012. Le système avait été appelé « FP Maximizer ». Aux termes de l’entente, l’entreprise fournissant le système à vide, les tuyaux et les plateaux recevrait 60 % des revenus et l’autre entreprise recevrait 40 %. Ce produit n’a jamais été offert au Canada. Toutefois, M-I a un contrat de licence au Canada avec une entreprise appelée FourK Energy Services pour un produit semblable appelé « Scavenger ».

[16]  M. Al Imler, un ancien employé de Western, a décrit les origines du système VS. En 2010, il travaillait avec M. Dan Pomerleau dans une entreprise appelée EDSI. Les deux hommes ont remarqué qu’une grande quantité de fluide de forage s’écoulait aux extrémités des tamis et ils se sont penchés sur ce problème. Ils ont mis au point un système selon lequel un plateau est inséré à la sortie d’un tamis et une pression à vide est appliquée au crible. M. Imler a affirmé que l’appareil du système VS était [traduction] « bien fixé » au tamis; sinon, il se briserait. Le système VS faisait essentiellement partie du tamis. Dès le début du développement du système VS, des robinets étaient inclus pour régler la succion appliquée au crible pour éviter tout blocage.

[17]  Lorsqu’EDSI a cessé ses activités, M. Imler et M. Pomerleau ont créé FPM, une entreprise spécialisée dans la location de système VS. M. Imler était le directeur des opérations de FPM. Il concevait les plateaux et était responsable de l’installation du système. En 2012, FPM a été acheté par une société de portefeuille appelée 32 Degrees Capital, qui possédait aussi Western (depuis 2011) et une autre entreprise appelée Markwater Handling Systems. FPM a poursuivi la location de système VS. L’année suivante, Western est devenue la branche d’exploitation de l’entreprise et louait les systèmes VS au lieu de FPM.

[18]  En 2013, M. Jeff Cooke a commencé à travailler pour une entreprise de location d’équipement appelée Richfield Equipment Limited (Richfield). Selon lui, Richfield avait une relation d’affaires non écrite avec FPM, qui mettait au point un système à vide pour récupérer le fluide de forage qui traverse les cribles. À l’époque, FPM n’avait pas de nom pour son produit, mais M. Cooke a commencé à l’appeler Vac-Screen, et ce nom est resté. Richfield a collaboré à la mise au point de ce produit de la fin de 2010 jusqu’en mars 2014.

[19]  Richfield était responsable d’installer et d’entretenir l’équipement, ainsi que de louer les pompes à vide et d’autres composants, au besoin. Elle facturait les sociétés pétrolières et transmettait à FPM la part qui lui revenait lorsque les factures étaient payées. M. Cooke a expliqué que cette entente de facturation permettait tout simplement de s’assurer que Richfield était payée immédiatement.

[20]  Dans le cadre de cette relation d’affaires, FPM trouvait presque tous les clients. Lors de l’installation du système VS, le fonctionnement du système était expliqué aux membres de l’équipe, tout comme leurs responsabilités. Le système comprenait des robinets pour ajuster le débit d’air et pour éviter tout blocage sur les cribles, et l’équipe de forage était responsable de régler ces robinets. S’il y avait un problème, Richfield était appelée pour débloquer les cribles, ce qui se produisait habituellement lorsque les équipes de forage ne suivaient pas les directives initiales ou avaient besoin d’un rappel.

[21]  Essentiellement, le système VS est une option ajoutée aux tamis vibrants disponibles sur le marché. Il est composé d’un crible supplémentaire, raccordé à une pompe à vide, qui est posé à la sortie du tamis et qui sert à enlever tout fluide restant qui reste collé aux solides déjà traités par les cribles du tamis. Le système VS ne comprend pas de pompe à vide, il faut plutôt utiliser de l’équipement disponible sur le marché pour compléter le système. Selon M. Cooke, le système VS comprend des robinets pour casser le vide et ajuster le débit d’air. Selon le témoignage de M. Carter, le système VS utilise une [traduction] « soupape d’évacuation » pour régler le débit d’air.

[22]  Les défenderesses (reconventionnelles) confondues offrent la location du système VS au Canada depuis 2010.

A.  Première question en litige ‑ Pour l’interprétation du brevet 173, qui est la personne versée dans l’art?

[23]  Les parties ne sont pas grandement en désaccord au sujet de la définition d’une personne versée dans l’art fictive. L’expert de M‑I, M. Robert Palmer, a décrit cette personne comme quelqu’un qui avait au moins cinq années d’expérience dans l’application, le fonctionnement et la conception des tamis vibrants. (Un résumé des titres de compétence des experts est annexé ci‑après.)

[24]  M. Peter Matthews, agissant pour le compte de Western, a déclaré que la personne versée dans l’art serait titulaire d’un diplôme en génie ou l’équivalent, et qu’elle aurait trois années d’expérience en ce qui concerne les tamis.

[25]  M. Benard Murphy, un autre des experts de Western, s’est dit essentiellement d’accord avec M. Matthews. Selon lui, la personne versée dans l’art était quelqu’un qui avait de l’expérience dans la conception de matériel de fabrication, comme des tamis, des séparateurs dégazeurs et des cyclones, quelqu’un qui avait un diplôme en génie mécanique et qui avait au moins trois années d’expérience dans le domaine, ou quelqu’un qui n’avait pas de diplôme, mais qui détenait davantage d’expérience dans le domaine.

[26]  À mon avis, pour les besoins de la présente affaire, la personne versée dans l’art est quelqu’un qui a cinq années d’expérience dans le domaine de l’application, du fonctionnement et de la conception de tamis vibrants. Il n’est pas nécessaire selon moi que cette personne détienne un diplôme en génie. Le brevet a trait à un dispositif technologique qui était bien connu et largement utilisé dans l’industrie pétrolière et gazière. Il s’adresse à ces personnes censées connaître bien cette technologie et comprendre les améliorations que la méthode et le système brevetés étaient censés offrir.

B.  Deuxième question en litige ‑ Quelle est la bonne interprétation des revendications du brevet 173 qui sont en litige?

(1)  Le brevet 173

[27]  Le brevet 173 est intitulé « Tamis vibrant et dégazeur combinés ». C’est M‑I qui détient le brevet, et M. Carr est le seul inventeur nommé.

[28]  La demande sous‑jacente a été déposée le 1er octobre 2007 et a ensuite été modifiée les 2 octobre 2013, 28 janvier 2014, 27 août 2014 et 4 novembre 2014. Quelques revendications ont été ajoutées, d’autres ont été supprimées, et d’autres encore ont été modifiées. De plus, quelques paragraphes ont été ajoutés au mémoire descriptif. Le brevet a été délivré le 16 juin 2015.

[29]  Le brevet décrit l’invention comme étant un système permettant de séparer des composants d’une boue. Les divers éléments du système sont énumérés et comprennent un logement, un panier servant de support à au moins un crible, un vibrateur couplé au panier, un bac disposé sous le panier et destiné à recueillir au moins une partie de la boue qui traverse le crible, un dispositif de pression différentielle en communication avec le bac servant à générer une pression différentielle dans le crible, un dispositif de variation servant à modifier la pression différentielle dans le tamis, une chambre de dégazage située entre le bac et le dispositif de pression différentielle et un conduit en communication avec la chambre de dégazage servant à récupérer le fluide dégazé.

[30]  Selon la section [traduction] « Contexte » de la description du brevet, les réalisations de l’invention [traduction] « portent généralement sur des tamis vibrants et des cribles » et plus particulièrement sur [traduction] « un tamis vibrant avec des cribles équipés d’un système à vide pulsé » et des [traduction] « méthodes et un appareil de dégazage de la boue ». Cette section décrit ensuite que, dans l’industrie pétrolière et gazière, le fluide de forage vise principalement à servir de lubrifiant pour refroidir les trépans. Le fluide est envoyé dans le trou par la rame de forage et est renvoyé en surface dans la section annulaire entre la rame de forage et le trou de forage.

[31]  Le fluide remonte en surface sous forme de boue. Le brevet définit le terme [traduction« boue » comme étant un [traduction] « mélange de fluide de forage et de déblais de forage ».

[32]  Avant que le fluide puisse être réutilisé, les déblais doivent être enlevés. Il s’agit du rôle du tamis vibrant. Divers types de tamis et leurs composantes qui étaient connus dans l’art antérieur sont décrits dans le brevet.

[33]  Le brevet souligne ensuite l’un des problèmes liés à l’équipement de l’art antérieur. Il arrive parfois que le fluide n’ait pas été entièrement séparé des déblais, ce qui signifie que les déblais sont encore mouillés après qu’ils ont été traités par le tamis. Un autre équipement, comme un séchoir à vide rotatif, doit alors être utilisé pour enlever le liquide restant.

[34]  Selon le brevet, un moyen d’améliorer l’efficacité des tamis pour séparer le fluide des déblais consiste à appliquer une pression différentielle au travers du crible. Le brevet mentionne un tamis divulgué dans l’art antérieur qui utilise en fait une pression différentielle appliquée continuellement sous un crible (Hensley, et al.). Cette technique pose un problème. En raison de la pression à vide continue, des déblais peuvent rester coller au crible, ce qui empêche les fluides de s’écouler au travers de ce dernier. Par conséquent, le brevet mentionne le besoin constant de tamis plus efficaces – avec une capacité de fluide accrue, un débit plus élevé de fluide qui coule au travers des cribles et une meilleure séparation du fluide, sans gêner la course des solides sur les cribles. De plus, le brevet mentionne également le besoin d’un appareil pour séparer les gaz entraînés du fluide récupéré.

[35]  Le système breveté peut aussi comprendre un générateur de pression différentielle qui aspirerait l’air ou la vapeur au travers du premier crible pour [traduction] « accroître le débit du fluide de forage qui traverse le premier crible par rapport au deuxième crible » auquel aucune pression différentielle n’est appliquée. Le fluide de forage ainsi que l’air ou la vapeur seraient récupérés dans une chambre externe raccordée au générateur de pression différentielle.

[36]  Le résumé décrit également une méthode pour séparer des composants d’une boue en faisant couler la boue sur un crible et en variant la pression différentielle appliquée à celui-ci, soit en créant un vide partiel sous le crible et en interrompant le vide de façon intermittente, soit en perturbant le débit de la vapeur récupérée. L’invention comprend une méthode selon laquelle la boue est introduite sur un tamis comprenant un premier crible et un deuxième crible. La boue traverse le premier crible, auquel une pression différentielle est appliquée, puis sur un deuxième crible, auquel aucune pression différentielle n’est appliquée.

[37]  Le brevet présente ensuite des descriptions détaillées de divers tamis, y compris des dessins rudimentaires, et les réalisations connexes de l’invention. La majorité de la preuve en l’espèce portait sur les tamis illustrés aux figures 5, 6 et 7 du brevet.

[38]  La figure 5 montre [traduction] « un diagramme simplifié » d’une réalisation de l’invention (il ne s’agit pas d’un dessin technique). Elle montre un panier (102), un crible (104), un bac (106), la boue (108), l’entrée (A) et la sortie (B).

[39]  La vapeur dans le bac (112) est en communication, au moyen d’une conduite (113) et d’un robinet (114), avec le dispositif de pression différentielle (116). La vapeur recueillie pourrait être torchée, évacuée ou récupérée au moyen d’une conduite d’écoulement (122). Les fluides (110) seraient récupérés dans le bac au moyen d’une autre conduite d’écoulement (124). Le fluide récupéré pourrait être dégazé par la pression différentielle créée par le dispositif (116).

[40]  La figure 6 montre également un [traduction] « diagramme simplifié » d’une autre réalisation du système. Ce tamis peut comprendre un panier (202), un crible (204) et un bac (206). La boue (208) est introduite sur le tamis (A) et les déblais sont récupérés à la sortie (B). Le fluide de forage est récupéré dans le bac (206). Une pression différentielle est créée en assurant la communication entre le bac (206) et une chambre de dégazage (212), puis avec un dispositif de pression différentielle (216) par l’entremise d’une conduite d’écoulement (213) et d’un robinet (214). Grâce à la pression différentielle, le liquide et la vapeur sont acheminés vers la chambre de dégazage (212). La vapeur peut être torchée, évacuée ou récupérée au moyen d’une conduite d’écoulement (222). Le fluide peut être récupéré au moyen d’une autre conduite d’écoulement (224) et envoyé aux fins de traitement supplémentaire. Le liquide peut être dégazé au moyen de la pression différentielle créée par le dispositif (216).

[41]  La figure 7 illustre un crible vibrant, y compris le logement (502), l’entrée (504), la sortie (506) et de multiples cribles superposés à la verticale (508). Des dispositifs de pression différentielle peuvent être installés à divers endroits, y compris entre les cribles et le bac, à l’intérieur du bac ou à l’extérieur du bac. La grandeur des ouvertures des divers cribles peut varier. Par exemple, il peut y avoir des cribles supérieurs qui ont de plus grandes ouvertures et des cribles inférieurs qui ont de plus petites ouvertures. La boue coule sur les cribles et est acheminée jusqu’à la sortie à l’aide de vibrations et de dispositifs à pulsations. Selon le brevet, les vapeurs, [traduction] « y compris tout gaz dangereux (p. ex. le sulfure d’hydrogène [H2S]) », peuvent être extraites au moyen d’une hotte (516). Les vapeurs ou les gaz pourraient alors être traités ou évacués.

[42]  Le fluide de forage récupéré pourrait ensuite être acheminé vers une aire de confinement pour le dégazage, à l’aide de dispositifs connus dans l’art antérieur.

[43]  Le brevet précise que les diverses réalisations concernent des tamis avec [traduction« une capacité de fluide accrue, un débit accru pour le fluide qui traverse les cribles et/ou une meilleure capacité de séparation du fluide ». De plus, les réalisations pourraient se traduire par des tamis qui produisent [traduction] « moins de vapeurs dangereuses en phases gazeuses » et qui séparent plus efficacement les gaz entraînés.

[44]  Le brevet renferme 23 revendications. Les 18 premières portent sur la méthode et les autres, sur le système.

[45]  La méthode consiste à faire couler une boue sur un tamis équipé d’un premier crible et d’un deuxième crible, à faire traverser la boue sur le premier crible et à appliquer une pression différentielle à celui-ci, mais pas au deuxième crible (revendication 1). Cette méthode comprend le contrôle du débit d’air sous au moins une partie du premier crible pour empêcher que la boue bloque le crible (revendication 2) et l’aspiration des vapeurs et du fluide au travers du crible pour les acheminer vers une chambre de dégazage (revendication 10). Les revendications comprennent une méthode selon laquelle une pression différentielle est appliquée au deuxième crible, mais celle-ci est moins grande que celle appliquée au premier crible (revendication 3) ou est même nulle (revendication 4). Les revendications comprennent également une variation de la pression différentielle appliquée au premier crible (revendication 5), une interruption de façon intermittente de la pression différentielle appliquée (revendication 6), une pulsation de la pression différentielle appliquée (revendication 7), ou l’application d’une troisième pression différentielle à une autre partie du premier crible (revendication 8). Celles-ci comprennent l’utilisation d’une pompe à vide non intégrée au tamis (revendication 9). De plus, la méthode comprend l’application d’une pression différentielle, qui est produite par un dispositif externe, entre un point situé au-dessus du premier crible et point situé sous celui-ci, ainsi que l’application d’une autre pression différentielle au deuxième crible (revendication 11). La méthode comprend les étapes dans la revendication 11 selon lesquelles une pression à vide est appliquée seulement à une partie du premier crible (revendication 18), ou la vapeur recueillie et le fluide de forage sont envoyés vers une chambre pour être séparés (revendication 16).

[46]  Le brevet revendique également une méthode par laquelle l’air ou la vapeur, ainsi que le fluide de forage, sont aspirés au travers du premier crible et acheminés vers une chambre externe où l’air ou la vapeur est séparé du fluide (revendication 12), y compris une chambre de dégazage externe (revendication 17), même si la pression à vide est appliquée seulement à une partie du premier crible (revendication 18).

[47]  La méthode revendiquée peut également comprendre les procédures décrites aux revendications 10 et 11 selon lesquelles la pression différentielle appliquée au premier crible est interrompue de façon intermittente (revendication 13) ou pulsée (revendication 14), ou appliquée à une première partie du deuxième crible (revendication 15).

[48]  Le système revendiqué comprend un premier crible avec un côté plus haut et un côté plus bas pour séparer les déblais des fluides et un générateur de pression différentielle qui aspire l’air ou la vapeur au travers du premier crible [traduction] « pour accroître le débit du fluide de forage qui traverse le premier crible par rapport à celui du deuxième crible ». À cet endroit, le générateur ne produit pas de pression différentielle entre un point situé au-dessus du deuxième crible et un point situé sous celui-ci (revendication 19). Le système peut également comprendre un bac sous le premier crible pour recueillir l’air, la vapeur et le fluide, ainsi qu’une chambre de dégazage pour recueillir [traduction] « tout l’air ou toute la vapeur et le fluide de forage » et séparer l’air ou la vapeur du fluide (revendication 20). Le générateur de pression différentielle peut être externe (revendication 21) et ajusté pour empêcher que les déblais de forage ne s’arrêtent sur le premier crible (revendication 22). Finalement, les systèmes décrits dans les revendications 19 et 20 peuvent inclure un deuxième générateur de pression différentielle raccordé à un troisième crible pour créer une deuxième pression différentielle (revendication 23).

[49]  L’expert de M-I, M. Palmer, a reconnu que les revendications 1, 11, 16 et 19 du brevet 173 sont invalides pour cause d’antériorité (voir ci-après).

(2)  Termes crutiaux utilisés dans le brevet

[50]  Un certain nombre de termes dans le brevet doivent être interprétés pour comprendre la portée des revendications. Le brevet doit être interprété d’après la compréhension d’une personne versée dans l’art, que j’ai décrite précédemment. L’interprétation du brevet est fondée sur les opinions fournies par les experts des parties. Voici les termes essentiels en cause et mon interprétation de ces termes.

(a)  [traduction] « boue »

[51]  Le brevet mentionne que, [traduction] « dans le présent brevet », le terme [traduction] « boue » désigne [traduction] « un mélange de fluide de forage et de déblais de forage ».

[52]  Western soutient que le terme [traduction] « boue » ne signifie pas la même chose que le terme [traduction] « déblais de forage humides » également utilisé dans le brevet. Western me demande de conclure que [traduction] « boue» est un mélange d’huile de forage et de déblais de forage qui entre sur le tamis, tandis que [traduction] « déblais de forage humides » est le produit qui sort du tamis après que la majorité du fluide de forage a été enlevé.

[53]  Les experts de Western, M. Matthews et M. Murphy, font tous les deux cette distinction. M. Matthews a affirmé qu’une « boue » correspond à des particules solides en suspension dans des liquides, mais que le mélange à la sortie du tamis n’est que des déblais de forage humides. Toutefois, il a reconnu que l’inventeur du brevet 173 a fourni une définition du terme [traduction« boue » à utiliser pour interpréter le brevet. De plus, il a accepté que les déblais de forage humides sont, en fait, un mélange de fluide de forage et de déblais de forage.

[54]  M. Murphy a convenu qu’une boue est [traduction] « un mélange de fluide de forage liquide et de déblais de forage solides ». Toutefois, il a affirmé catégoriquement que le mélange de fluide et de déblais à la sortie d’un tamis n’est pas une [TRADUCTION] « boue », et ce, malgré la définition figurant dans le brevet.

[55]  Je ne souscris pas à l’argument de Western selon lequel une [TRADUCTION] « boue » ne comprend pas de déblais de forage humides. Le brevet utilise le terme [TRADUCTION] « déblais de forage humides » seulement pour souligner le problème lié à la technologie existante. Il mentionne que la séparation du fluide de forage des solides [TRADUCTION] « est souvent incomplète, ce qui se traduit par des déblais de forage humides ». Cette déclaration n’est pas contradictoire avec la définition de [TRADUCTION] « boue » dans le brevet. Elle précise tout simplement un problème cité dans les antériorités.

[56]  Par conséquent, comme l’expert de M-I, M. Palmer, je suis d’avis que le brevet définit une boue comme étant un mélange de fluide de forage et de déblais de forage et que cette définition doit être utilisée pour interpréter le brevet. Le fait qu’il y a plus de liquide dans la substance qui entre sur le tamis que dans celle qui sort du tamis ne signifie pas que l’une d’entre elles est une boue et que l’autre ne l’est pas. Certaines boues sont tout simplement plus boueuses que d’autres.

(b)  [traduction] « premier crible »

[57]  Dans les revendications du brevet, une pression différentielle est appliquée sur le [TRADUCTION] « premier crible ».

[58]  Western fait valoir que le [TRADUCTION] « premier crible » signifie le crible le plus près de l’extrémité où la boue entre sur le tamis. Selon Western, cela cadre avec la façon dont les cribles sont numérotés dans divers documents techniques et avec l’utilisation du terme par des personnes versées dans l’art de l’industrie.

[59]  Quant à la définition de [TRADUCTION] « premier crible », M. Murphy a souligné ce que ce terme signifie dans l’industrie. À son avis, le [TRADUCTION] « premier crible » signifie le crible à l’entrée du tamis. Selon lui, le but principal de l’invention, soit d’accroître le débit des liquides qui traversent le tamis, peut être atteint en appliquant une pression différentielle à l’entrée. Il serait donc logique que le [TRADUCTION] « premier crible » désigne le premier crible que la boue traverse.

[60]  Toutefois, il a également affirmé qu’il a interprété le terme [TRADUCTION] « sans avoir lu quoi que ce soit dans le brevet ». Autrement dit, il a reconnu, au moins implicitement, que le brevet peut utiliser le terme [TRADUCTION] « premier crible » d’une façon précise. En effet, il a fini par reconnaître que, dans le brevet, le premier crible pourrait être n’importe quel crible. Il s’est initialement appuyé sur divers énoncés dans le brevet pour confirmer son opinion selon laquelle le [TRADUCTION] « premier crible » désigne le crible à l’entrée d’un tamis, mais toutes les références qu’il a citées précisaient l’emplacement du crible mentionné. Par exemple, à la figure 3, le brevet décrit l’emplacement des deux premiers cribles et l’emplacement des deux derniers cribles. Il s’agirait d’une description superflue s’il était clair qu’un premier crible est toujours situé à l’entrée d’un tamis.

[61]  Selon le témoignage de M. Matthews, le [TRADUCTION] « premier crible » est toujours le crible le plus près de l’entrée. Selon lui, il serait peu logique d’appliquer une pression différentielle ailleurs qu’à l’entrée du tamis, car l’un des buts principaux du brevet est d’accroître la capacité du tamis. Il a ensuite ajouté qu’appliquer une pression différentielle au dernier crible n’améliorerait pas la capacité du tamis à traiter les fluides de forage. Toutefois, il a reconnu que le fait d’ajouter une pression différentielle au crible à la sortie permettrait d’accroître d’un certain pourcentage le débit du fluide de forage qui passe au travers de ce crible. (M. Murphy a exprimé un avis similaire.) M. Matthews a également admis que le brevet 173 mentionne clairement qu’une pression différentielle peut être appliquée au crible à la sortie du tamis (par. 37). Par conséquent, le terme « premier crible » ne peut pas uniquement désigner le crible à l’entrée. En fait, la pression différentielle pourrait être appliquée à n’importe quel crible. M. Matthews a affirmé qu’il n’avait pas tenu compte de cette partie du brevet.

[62]  Pour M-I, M. Palmer a souligné que, selon les revendications, le tamis doit avoir à la fois un [TRADUCTION] « premier crible » et un [TRADUCTION] « deuxième crible » (revendications 1, 11 et 19). Toutefois, il n’est pas nécessaire que le premier crible soit celui le plus près de l’entrée. Selon lui, une personne versée dans l’art comprendrait que la principale différence entre le premier et le deuxième crible n’est pas l’emplacement, mais le fonctionnement. Par exemple, dans la description de la figure 3, l’invention montre clairement qu’une pression différentielle peut être appliquée aux cribles les plus près de l’entrée, aux cribles les plus près de la sortie, ou aux deux (par.37). L’emplacement où la pression différentielle est appliquée correspond au [TRADUCTION] « premier crible », tel qu’il est défini dans le brevet. D’autres passages et figures dans le brevet appuient l’interprétation de M. Palmer (par. 44, 45, 59 et 60; figures 4 et 7).

[63]  M. Palmer a contesté lui aussi l’affirmation de Western selon laquelle l’objectif premier du brevet peut être atteint seulement si une pression différentielle est appliquée au crible le plus près de l’entrée. Selon Western, cet objectif consiste à accroître la capacité de fluide du tamis en aspirant une quantité de liquide maximale au travers du crible à l’entrée. Comme il a été mentionné, M. Murphy et M. Matthews sont tous les deux de cet avis. Toutefois, M. Palmer souligne un autre objectif du brevet – améliorer l’efficacité de la séparation le fluide – qui peut être atteint en appliquant une pression différentielle ailleurs qu’à l’entrée.

[64]  De même, M. Palmer a contesté l’interprétation de Western au sujet de la revendication 19, laquelle envisage l’utilisation d’une pression différentielle pour accroître le débit du fluide de forage qui traverse un premier crible [TRADUCTION] « par rapport à » un deuxième crible. Selon Western, cette revendication exige que le débit du fluide de forage qui traverse le premier crible soit supérieur à celui au deuxième crible et, étant donné que le débit sera plus élevé au crible à l’entrée du tamis, ce crible est sûrement le premier crible. Ce n’est pas la façon dont M. Palmer a interprété la revendication 19. Selon lui, par [TRADUCTION] « accroître » le débit du fluide de forage dans la revendication, on veut tout simplement dire l’améliorer ou l’augmenter. Cela ne signifie pas nécessairement accroître le débit du fluide qui traverse le premier crible de façon à ce qu’il surpasse le débit au deuxième crible. La revendication prévoit une augmentation du débit du fluide qui traverse le crible auquel une pression différentielle est appliquée par rapport au crible auquel aucune pression différentielle n’est appliquée. M. Murphy et M. Matthews ont finalement convenu qu’ajouter une pression différentielle au crible à la sortie permettrait d’accroître d’un certain pourcentage le débit du fluide de forage qui passe au travers de ce crible par rapport au débit au crible à l’entrée.

[65]  Je conclus que le brevet utilise le terme [TRADUCTION] « premier crible » non pas pour indiquer l’emplacement du crible, mais pour préciser l’endroit où une pression différentielle est appliquée. Le brevet n’avance aucune hypothèse quant à l’endroit où le premier crible et le deuxième crible sont situés par rapport à l’entrée et à la sortie du tamis. Lorsqu’il est nécessaire de distinguer les cribles, le brevet dit expressément au lecteur quel crible est lequel. Par exemple, le brevet utilise les termes [TRADUCTION] « premiers deux cribles » et « derniers deux cribles » pour décrire un exemple du fonctionnement d’une réalisation de l’invention. Toutefois, il précise que les termes [TRADUCTION] « premiers et derniers correspondent au sens de l’écoulement », de l’entrée à la sortie, à la seule fin d’expliquer cet exemple en particulier (par. 37). Peu importe, dans cette réalisation, une pression différentielle est appliquée à l’un ou l’autre des ensembles de cribles ou aux deux. Il n’est pas mentionné si on préfère que la pression différentielle soit appliquée à l’entrée ou à la sortie. Il en va de même pour les autres réalisations décrites dans le brevet (par. 36 et 45).

[66]  Par conséquent, je ne peux pas conclure que le terme « premier crible » signifie à coup sûr le crible le plus près de l’entrée du tamis. Le brevet envisage clairement l’application de pressions différentielles à l’entrée ou à la sortie, ou aux deux.

[67]  En outre, le brevet ne précise pas que la boue est introduite au [TRADUCTION] « premier crible ». Par exemple, la revendication 1 dit seulement qu’une boue est introduite sur un tamis qui a un premier crible et un deuxième crible et que cette boue traverse le premier crible. La boue traverserait les deux cribles s’il s’agissait d’un tamis à deux cribles, alors il ne faut pas présumer que le premier crible est situé à l’entrée.

(c)  [traduction] « vapeur » et « gaz dangereux »

[68]  Le système décrit dans la revendication 19 comprend l’application d’une pression différentielle au premier crible pour aspirer l’air ou la vapeur au travers du crible. Le brevet explique ailleurs qu’une pression différentielle aspirera à la fois les liquides et les vapeurs au travers du crible et que ces derniers seront acheminés vers une chambre de dégazage. Dans cette chambre, les vapeurs peuvent être recueillies et brûlées, évacuées, ou sinon recueillies (par. 52). Dans l’une des réalisations, une hotte est installée sur le tamis pour extraire les vapeurs, [TRADUCTION] « y compris des gaz potentiellement dangereux (p. ex. le sulfure d’hydrogène) » (par. 56). À partir de là, les odeurs nocives et les gaz dangereux pourraient être traités (par. 57).

[69]  M. Murphy a expliqué que le terme [TRADUCTION] « vapeur » désigne généralement un brouillard de particules liquides en suspension. Toutefois, il a affirmé que le brevet n’est pas clair à ce sujet. M. Palmer a convenu que la terminologie utilisée dans le brevet [TRADUCTION] « prête un peu à confusion », mais il a souligné que les gaz dangereux ne seraient jamais traités au moyen d’une pompe à vide. M. Matthews a affirmé que des tamis ne seraient tout simplement pas utilisés en présence de gaz dangereux pour traiter le fluide de forage.

[70]  La signification du terme « vapeur » n’est en soi pas très compliquée – air ou gaz contenant des particules liquides en suspension. Cela dit, M. Matthews a donné une définition légèrement différente – « particules liquides finement divisées en suspens dans l’air ». M. Palmer et M. Matthews s’entendent essentiellement sur ce point. La complication découle du fait que le brevet semble utiliser le terme [TRADUCTION] « vapeur » d’une façon qui inclut les gaz dangereux et même les gaz mortels. L’idée que le brevet indique qu’une hotte ou une autre forme de ventilation pourrait traiter des gaz toxiques de façon sécuritaire semble invraisemblable. Toutefois, la seule référence dans le brevet aux gaz dangereux se trouve dans la réalisation illustrée à la figure 7, et le brevet ne revendique pas cette réalisation. Il n’y a rien dans les revendications du brevet au sujet des gaz dangereux. Les autres références aux vapeurs dans le brevet ne mentionnent pas les gaz dangereux (par. 48 et 52), mais elles mentionnent la possibilité de brûler ou d’évacuer les vapeurs.

[71]  Par conséquent, selon moi, le passage du brevet mentionnant que les [TRADUCTION] « vapeurs, y compris des gaz potentiellement dangereux (p. ex. le sulfure d’hydrogène [H2S]), entraînées dans le fluide de forage » n’est pas une définition du terme « vapeur » aux termes du brevet. Une vapeur peut comprendre un gaz dangereux et, dans ce cas, elle devrait être traitée avec soin. Toutefois, selon mon interprétation du brevet, une vapeur ne contient pas toujours des gaz dangereux. Dans cette section du brevet, le terme [TRADUCTION] « vapeur » est utilisé dans un contexte très particulier qui n’aide pas beaucoup à interpréter les revendications du brevet.

[72]  Le brevet mentionne à de nombreuses reprises l’utilisation d’un dégazeur pour séparer le fluide de forage des gaz entraînés. Par exemple, il mentionne que certaines réalisations [TRADUCTION] « portent sur des méthodes et des appareils pour séparer les gaz entraînés d’une boue » (par. 2). Toutefois, contrairement à l’allégation de Western, je ne trouve pas que ces références aident à interpréter le terme [TRADUCTION] « vapeur » utilisé dans les revendications du brevet. Une vapeur n’est pas un gaz entraîné. Et un gaz n’est pas une vapeur.

(d)  [traduction] « accroître le débit »

[73]  La revendication 19 du brevet vise un système dans lequel un générateur de pression différentielle aspire l’air ou la vapeur au travers du premier crible [TRADUCTION] « pour accroître le débit du fluide de forage qui traverse le premier crible par rapport au deuxième crible », lequel n’est pas toujours équipé d’un générateur de pression différentielle. Selon mon interprétation, cette revendication fait référence à un débit accru du fluide qui traverse un crible équipé d’un dispositif de pression différentielle par rapport à un crible sans un tel dispositif. L’avis des experts à ce sujet ne diffère pas de manière substantielle.

(e)  [traduction] « contrôler le débit d’air »

[74]  La revendication 2 du brevet vise un système qui applique une pression différentielle au crible et qui contrôle le débit d’air pour éviter tout blocage causé par la boue sur le crible.

[75]  L’un des buts du brevet est de régler le problème de blocage causé par l’application d’une pression différentielle continue aux cribles d’un tamis. Le brevet mentionne le brevet de Hensley, et al., dans lequel un vide continu est appliqué sous un crible de tamis, ce qui fait coller des solides au crible (par. 13). Selon le brevet, il faudrait un tamis avec une pression différentielle accrue, à condition que le moyen utilisé ne nuise pas au transport des solides sur le crible (par. 14).

[76]  En ce qui a trait au terme « contrôler le débit d’air », M. Murphy a soutenu que cet aspect de l’invention vise à éviter tout blocage causé par la boue sur le crible, et que la phrase mentionne la variation ou l’interruption de façon intermittente de la pression différentielle, ce qui revient essentiellement au même. La variation et l’interruption de la pression différentielle sont toutes les deux mentionnées expressément dans la divulgation du brevet. Toutefois, le terme plus vague « contrôler le débit d’air » est mentionné dans la revendication 2.

[77]  Le brevet décrit certains des moyens potentiels pour éviter tout blocage. Comme M. Palmer l’a mentionné, le brevet mentionne la [traduction« variation » ainsi que la [traduction] « pulsation ou la variation » à l’aide d’un robinet, et la [traduction« manipulation du robinet ». Selon le témoignage de M. Matthews, il n’y a pas de différence entre la pulsation, la variation ou l’interruption de façon intermittente de la pression différentielle comme moyen pour contrôler le débit d’air afin d’éviter tout blocage. Il a fait remarquer que le brevet mentionne un large éventail de robinets, dont certains conviennent aux applications binaires (marche/arrêt), tandis que d’autres sont conçus à des fins de régulation. M. Murphy s’est dit d’accord.

[78]  Le brevet prévoit qu’une pression différentielle peut être manipulée pour accroître la capacité ou améliorer la récupération du liquide (par. 37). Dans tous les cas, le débit d’air doit être contrôlé pour éviter tout blocage.

(f)  [traduction] « acheminer la totalité de l’air ou de la vapeur et du fluide de forage »

[79]  La revendication 12 se rapporte à une méthode pour aspirer l’air ou la vapeur et le fluide de forage au travers d’un crible et acheminer la totalité de l’air ou de la vapeur et du fluide de forage vers une chambre externe où l’air ou la vapeur est séparé du fluide. De même, la revendication 20 revendique un système selon lequel la totalité de l’air ou de la vapeur et le fluide de forage sont envoyés vers une chambre de dégazage où l’air et la vapeur sont séparés du fluide de forage.

[80]  M. Murphy a examiné l’importance du mot [traduction] « totalité » dans les revendications 12 et 20. Dans ces revendications, la [traduction] « totalité » de l’air ou de la vapeur et la [traduction] « totalité » du fluide de forage qui passe au travers du crible est envoyée vers une chambre de dégazage. Selon M. Murphy, le brevet porte sur un système selon lequel une pression différentielle est appliquée à une section d’un tamis et non à une autre. Cela signifie que même si la totalité de la vapeur et du fluide de forage qui se rend au crible opérationnel est acheminée vers un dégazeur, il pourrait y avoir d’autres gaz libres dangereux qui s’échapperaient aux premières étapes du processus et qui ne seraient pas traités. Selon lui, cela n’a pas de sens. Toutefois, comme il a déjà été mentionné, le brevet ne revendique aucune méthode pour traiter les gaz dangereux. La chambre de dégazage (examinée plus loin) dont il est question dans les revendications traite simplement l’air, la vapeur et le fluide de forage.

[81]  Le mot [traduction] « totalité » dans ces revendications les distingue des autres. Par exemple, la revendication 10 mentionne simplement la collecte des vapeurs et du fluide de forage qui passent au travers d’un crible et leur acheminement vers une chambre de dégazage externe. La collecte de la [traduction] « totalité » de l’air, de la vapeur et du fluide est alors un élément essentiel des revendications 12 et 20. Toutefois, M. Matthews souligne à juste titre qu’il n’y a pas de description dans le brevet d’une réalisation qui y parviendrait. Néanmoins, le brevet mentionne clairement qu’une pression différentielle peut être appliquée à différents cribles ou à différentes sections du lit du tamis. La pression différentielle aspirera l’air, la vapeur et le fluide de forage au travers du crible. La revendication 20 exige seulement que la [traduction] « totalité » de l’air, de la vapeur et du fluide de forage qui a été recueillie soit acheminée vers une chambre externe où l’air et la vapeur sont séparés du fluide de forage.

(g)  [traduction] « chambre de dégazage »

[82]  Les experts s’entendent pour dire qu’une chambre de dégazage sépare l’air ou la vapeur du fluide de forage. M. Murphy a affirmé que [traduction] « au besoin, les gaz entraînés qui restent dans le fluide de forage, qui est traité par le tamis avec un crible équipé d’un système à vide pulsant, peuvent être acheminés vers un dégazeur traditionnel, comme c’est le cas avec tous les appareils de forage qui sont équipés de dégazeurs après un tamis ». M. Palmer et M. Matthews partageaient également cette opinion, mais ils ont souligné que le brevet ne contient pas de revendications liées à la séparation des gaz entraînés du fluide de forage.

[83]  M. Murphy a également tenu compte des termes [traduction] « chambre » et [traduction] « chambre de dégazage » dans le brevet. Bien qu’une chambre de dégazage désigne habituellement un appareil conçu pour séparer les gaz entraînés du fluide de forage, le seul endroit dans le brevet où on mentionne qu’il y a un dégazeur est dans la figure 7. À cet endroit, le brevet mentionne que le dégazage peut être effectué par [traduction] « toute méthode connue par les personnes versées dans l’art ». La description de la figure 6 comprend également une chambre de dégazage, mais M. Murphy croyait que le dispositif mentionné n’était que l’équivalent d’un « aspirateur pour forage » comparable à aspirateur de liquides domestique, dans lequel le liquide est recueilli dans un réservoir de rétention et l’air est évacué par le vide. Selon son interprétation, les mots [traduction] « chambre » et [traduction] « chambre de dégazage » dans les revendications renvoient à la même chose. M. Palmer a exprimé son accord. Je souscris à leur interprétation – la chambre est l’endroit où l’air ou la vapeur est séparé du fluide de forage.

C.  Troisième question en litige – Les défenderesses ont-elles contrefait les revendications du brevet 173?

(1)  Le système Vac-Screen

[84]  Les experts se sont appuyés fortement sur l’affidavit de M. Nic Stanton, gestionnaire des opérations à Western, pour comprendre les composants et le fonctionnement du système VS. L’affidavit de M. Stanton est détaillé et va bien au-delà de l’information requise pour comprendre le fonctionnement du système VS pour les besoins de la présente affaire.

[85]  M. Stanton a commencé à travailler avec le système VS en 2010. Il gérait l’installation, l’entretien et le démontage du système VS à divers sites. En 2013, il est devenu directeur des services chez Western. Il coordonnait alors les opérations liées au système VS chez Western. En 2014, M. Stanton est entré en fonction dans son poste actuel de directeur des opérations.

[86]  M. Stanton a expliqué que les deux versions du système VS, le système Vertical Vac‑Screen et le système Vac-Screen Plus, visent à accroître la quantité de fluide de forage récupéré par les tamis. Pour ce faire, le système VS utilise une pression à vide sous ou après le dernier crible du tamis. En fonctionnement normal, le bassin de fluide s’étendrait jusqu’au dernier crible du tamis.

[87]  Les composants du système VS comprennent un plateau installé sous ou après le dernier crible du tamis pour récupérer le fluide de forage, un collecteur qui raccorde le plateau à la pompe à vide, un réservoir de rétention pour le fluide récupéré, un filtre pour empêcher que le fluide n’entre dans la pompe à vide et une pompe à vide. Le réservoir de rétention comprend une plaque de dérivation qui dirige le fluide vers le bas du bac et l’éloigne de la pompe à vide. Le filtre fournit une protection supplémentaire en empêchant le fluide ou la vapeur d’entrer dans la pompe à vide. Le collecteur est raccordé à un robinet-vanne, qui permet de régler la pression à vide appliquée au plateau. Le robinet-vanne sert à réduire la pression à vide appliquée aux cribles afin d’empêcher que les déblais ne restent sur place. Le plateau est soit installé sous le dernier crible du tamis, soit installé à la sortie du tamis. Selon M. Stanton, environ deux tiers des systèmes étaient montés sous le dernier crible; l’autre tiers des systèmes étaient montés à l’extérieur. Cela dit, il n’a pas vraiment compté. Peu importe, M. Stanton a confirmé que le système VS est intégré au tamis.

[88]  Le système VS n’a jamais été utilisé pour traiter du H2S ou tout autre gaz dangereux. Il ne traite pas la vapeur dans le réservoir de rétention et M. Stanton ne croit pas que la pression à vide appliquée au crible est assez puissante pour aspirer les vapeurs au travers de celui-ci. Toutefois, M. Stanton a reconnu qu’il n’est pas un expert en la matière.

(2)  Les défenderesses ont-elles contrefait directement le brevet?

[89]  Les parties conviennent qu’il n’y a pas eu contrefaçon des revendications qui étaient en attente avant les modifications déposées le 2 octobre 2013. Elles divergent toutefois d’avis quant à savoir s’il y a eu contrefaçon plus tard.

[90]  Western soutient que M-I n’a pas fait la preuve d’une contrefaçon parce que : Western ne vend ou ne loue pas de tamis; le système VS n’applique pas une pression différentielle au premier crible; le système VS ne fait pas couler la boue sur le crible où une pression à vide est appliquée; le système VS ne traite pas les vapeurs ou les gaz dangereux; le système VS n’est pas intégré à un tamis; le système VS n’a pas de chambre de dégazage pour séparer l’air ou la vapeur du fluide de forage; et le système VS ne fait pas pulser, ne varie pas ou n’interrompt pas de façon intermittente la pression différentielle.

[91]  L’analyse de contrefaçon découle essentiellement de l’interprétation du brevet. Les experts divergent d’opinion quant à savoir si Western a contrefait le brevet 173, ou incité à la contrefaçon, presque de la même manière dont ils divergent dans leur interprétation du brevet.

[92]  Selon mon interprétation du brevet, je conclus que Western a contrefait le brevet 173 et qu’elle a incité autrui à sa contrefaçon.

[93]  M. Murphy a conclu que le système VS ne contrefait pas le brevet 173, car il traite des déblais de forage humides, et non de la boue; il n’est pas utilisé sur le premier crible d’un tamis; il ne fait pas varier ou n’interrompt pas de façon intermittente le débit d’air pour éviter tout blocage; il n’aspire pas de gaz dangereux au travers d’un crible; et il ne comprend pas de chambre de dégazage. J’ai déjà traité de ces allégations et je les ai toutes rejetées dans mon analyse de l’interprétation. Toutefois, j’expliquerai plus loin des points sur lesquels l’opinion de M. Murphy et de l’expert de M-I, M. Palmer, divergent.

[94]  M. Matthews a également conclu que le système VS ne contrefait aucune des revendications du brevet 173. Il a fait remarquer que le système VS n’applique pas une pression différentielle au travers d’un premier crible. Le système VS traite des déblais de forage humides, et non de la boue. Le système VS, qui est monté à l’extérieur, traite les déblais de forage humides restants après que le tamis a traité la boue, et ne peut pas être considéré comme étant un premier crible. De plus, la pression différentielle est appliquée à un crible à l’extérieur du tamis et non intégré au tamis. Rien ne prouve que le système VS aspire les vapeurs au travers du crible. Le système VS n’est pas configuré pour traiter les gaz dangereux ou pour séparer les vapeurs du fluide de forage. Le système VS ne fait pas pulser la pression différentielle.

[95]  M. Palmer conteste l’interprétation de M. Matthews au sujet de la revendication 1. M. Matthews affirme que la boue est introduite sur le crible auquel une pression différentielle est appliquée. M. Palmer souligne que la revendication mentionne seulement que la boue coule sur le premier crible et qu’une pression différentielle est appliquée à ce crible. Je suis d’accord avec M. Palmer pour dire que la revendication ne dit pas que la boue est [traduction] « introduite » sur ce crible. Il prévoit simplement que la boue doit couler sur le crible auquel la pression différentielle est appliquée.

[96]  M. Palmer était lui aussi en désaccord avec l’affirmation de M. Murphy selon laquelle l’invention brevetée exige qu’une pression différentielle suffisante soit appliquée au crible pour que des solides y restent collés. Toute pression inférieure, selon lui, ne permettrait pas d’atteindre l’objectif du système, soit d’accroître le débit du fluide de forage qui passe au travers du crible. M. Palmer fait remarquer, à juste titre à mon avis, que le débit du fluide de forage qui passe au travers du crible peut être accru en appliquant une pression différentielle inférieure à celle requise pour que les solides restent bloqués le crible. En effet, il s’agit là de l’objet du système VS.

[97]  M. Murphy et M. Matthews ont tous les deux laissé entendre que la revendication 19 exige que l’air ou la vapeur, et non l’air et la vapeur, soit aspiré au travers du crible. Je pense comme M. Palmer qu’une interprétation plus logique de la revendication 19 est qu’elle exige que l’air, la vapeur, ou une combinaison des deux, soit aspirée au travers du crible.

[98]  M. Matthews a également affirmé que la revendication 19 doit inclure un tamis et que, par conséquent, le système VS ne contrefait pas cette revendication parce qu’il ne s’agit pas d’un tamis. Toutefois, la revendication 19, comme M. Palmer le fait remarquer, n’exige pas expressément un tamis. Elle décrit un système qui sépare les déblais de forage du fluide de forage sur un tamis. Le système comprend deux cribles avec un dispositif de pression différentielle raccordé au premier crible pour accroître le débit du fluide de forage qui passe au travers de ce crible par rapport à un deuxième crible. Cette revendication décrit un système qui peut être utilisé avec un tamis, et non un tamis en soi.

[99]  M. Matthews a également exprimé son désaccord par rapport à la description d’une chambre de dégazage qui a été donnée par M. Palmer et a affirmé que cette description comprendrait un bac à boue ouvert dans lequel le fluide de forage serait déposé. L’air ou la vapeur qui entre dans le bac en même temps que le fluide s’échapperait tout simplement dans l’environnement. M. Palmer souligne l’erreur dans cette interprétation. Le brevet exige que la chambre de dégazage soit située entre le dispositif de pression différentielle et le bac. Le type de bac à boue que décrit M. Matthews ne fonctionnerait pas dans ce scénario parce qu’il serait impossible d’appliquer toute pression à vide au crible.

[100]  M. Palmer a donné son avis d’expert à ce sujet et a conclu que, selon le dossier documentaire et ses observations en personne, le système VS de Western a contrefait le brevet 173, y compris les revendications, dans sa version du 2 octobre 2013. En raison de problèmes sur place, lorsque M. Palmer s’est rendu au site de Western à Leduc, en Alberta, pour voir le Vac-Screen system en action, ce dernier n’était pas entièrement fonctionnel. Toutefois, M. Palmer a été capable de comprendre le fonctionnement du système VS en consultant les affidavits de M. Stanton et de M. Bruce.

[101]  En résumé, M. Palmer a décrit le système VS comme étant un moyen d’appliquer une pression différentielle sous un crible pour aider à récupérer le fluide de forage de la boue qui traverse le tamis. Ce système vise à améliorer la récupération du fluide et à mieux sécher les déblais de forage. Il a décrit le système VS comme étant un appareil modifié installé à un tamis existant. Le système VS est solidement monté sur le tamis de manière à ce qu’il vibre à la même fréquence que le tamis. Les vibrations permettent à la boue de traverser le crible, lequel sépare le fluide des déblais.

[102]  M. Palmer souligne que les composants d’un système VS comprennent un plateau monté sous un crible ou à la fin d’un crible qui est situé à la sortie du tamis. Le plateau recueille le fluide, les particules fines et les gaz qui passent au travers du crible. Le plateau est raccordé à une pompe à vide au moyen d’un collecteur et un tuyau achemine le fluide de forage du collecteur au réservoir de rétention où le liquide est séparé des gaz. Les gaz sont ensuite évacués. La pompe à vide fournit une pression différentielle pour aspirer le fluide de forage au travers du crible. La puissance de la succion appliquée peut être réglée manuellement au moyen de robinets pour éviter tout blocage causé par la boue sur le crible.

[103]  M. Murphy était également en désaccord avec certaines parties de la description de M. Palmer. Premièrement, il a affirmé qu’aucune preuve ne montre que des gaz ou des vapeurs sont aspirés au travers du crible du système VS. Deuxièmement, toute vapeur aspirée au travers du crible se condenserait et se mélangerait au fluide de forage dans le réservoir de rétention.

[104]  Je constate que, selon les documents de commercialisation du système VS, le système vise à atteindre essentiellement les mêmes objectifs que ceux mentionnés dans le brevet 173 – séparer les liquides des déblais plus efficacement et accroître le débit des liquides qui traversent les cribles.

[105]  M. Palmer a abordé les revendications relatives à la méthode du brevet séparément des revendications relatives au système. Je vais donc suivre cette même approche.

[106]  D’une façon cohérente avec sa propre expérience et maintenant étayée par la preuve présentée au procès, M. Palmer a présumé que Western n’est pas propriétaire des tamis sur lesquels le système VS est installé. Les tamis appartiennent plutôt aux entreprises de forage ou aux opérateurs et sont exploités par ceux-ci. La seule utilité du système VS, tout comme des tamis, est de traiter la boue. M. Palmer décrit le système VS comme étant [traduction] « semi-autonome », c’est-à-dire qu’une fois installé, il fonctionne principalement de façon indépendante, à l’exception de l’introduction de la boue sur le tamis, de l’entretien occasionnel et les ajustements de la puissance de succion appliquée.

[107]  En plus de louer des systèmes VS, Western offrait des services d’installation, d’entretien et de démontage. Lors d’appels de service, Western ajustait parfois les robinets pour éviter tout blocage sur le crible. Western fournissait également des directives écrites et verbales aux entrepreneurs en forage sur l’utilisation du système VS, y compris des instructions sur l’ajustement de la pression à vide pour éviter un écoulement au ralenti. La pression devait être ajustée en fonction des conditions sur place, particulièrement les caractéristiques de la boue traitée.

[108]  Selon M. Palmer, la chambre de dégazage mentionnée dans le brevet 173 fonctionne de façon identique au réservoir de rétention dans le système VS. Ni l’un ni l’autre est un vrai « dégazeur », soit un appareil particulier utilisé pour récupérer les gaz entraînés dans le fluide de forage. Les deux servent à séparer les liquides des gaz qui sont entraînés au travers du crible par le dispositif de pression différentielle.

[109]  D’autres personnes ont également expliqué que ni le système VS ni l’objet du brevet 173 ne comprend un vrai dégazeur. M. Cooke a affirmé que le système VS comprend tout simplement une chambre où les fluides sont récupérés et où toute trace de gaz émis à partir de ceux-ci est évacuée dans l’atmosphère. Dans son témoignage, M. Imler a déclaré que cet aspect du système VS peut être décrit comme étant un séparateur de boue et de gaz.

[110]  Selon cette analyse, M. Palmer a conclu que le système VS exécute les mêmes fonctions, a les mêmes avantages, et fonctionne de la même façon que l’invention décrite dans les revendications relatives à la méthode (revendications 1, 2, 4, 9 et 10). Il a conclu que le système VS :

  • (i) applique une pression différentielle sous un premier crible situé à la sortie du tamis;

  • (ii) traite un mélange de fluide de forage et de déblais de forage, c’est-à-dire la boue;

  • (iii) contrôle le débit d’air pour éviter tout blocage sur le crible;

  • (iv) applique une pression différentielle produite par une pompe à vide externe;

  • (v) aspire l’air, la vapeur et le fluide de forage au travers du crible vers une chambre externe;

  • (vi) sépare l’air et la vapeur du fluide de forage dans la chambre externe.

[111]  M. Palmer a cepentant également précisé que Western n’utilise pas réellement la méthode décrite dans ces revendications parce qu’elle ne participe pas elle-même à l’introduction de la boue sur le tamis. Cela est effectué par des entrepreneurs en forage. Toutefois, pendant l’installation ou l’entretien du système Vac-Screen, Western intervenait fréquemment pour contrôler le débit d’air afin d’éviter tout blocage.

[112]  Par conséquent, selon M. Palmer, Western n’a pas contrefait directement les revendications relatives à la méthode du brevet. La question est de savoir si ses activités ont incité d’autres, notamment les entrepreneurs en forage ou les opérateurs, à contrefaire le brevet lorsque des directives ont été fournies sur la façon d’utiliser la méthode décrite dans le brevet 173. J’aborderai cette question ci-après.

[113]  Après avoir examiné la preuve et les opinions des experts, je suis d’accord avec M. Palmer. Les revendications relatives à la méthode qu’il mentionne comprennent l’introduction d’une boue sur un tamis équipé d’un premier crible et d’un deuxième crible, l’écoulement de la boue sur le premier crible où une pression différentielle est appliquée, et le fait qu’aucune pression différentielle n’est appliquée au deuxième crible (revendication 1). Elles comprennent le contrôle du débit d’air sous le premier crible pour éviter tout blocage (revendication 2), et l’application d’une deuxième pression différentielle au premier crible où la pression différentielle est à zéro (revendication 4). La pression différentielle est créée par une pompe à vide externe (revendication 9) qui aspire les vapeurs et une composante fluide de la boue vers une chambre externe (revendication 10). La pression différentielle peut être contrôlée pour éviter tout blocage sur le crible.

[114]  Par conséquent, le système VS tombe sous le coup des revendications relatives à la méthode du brevet.

[115]  M. Palmer a ensuite examiné les revendications relatives au système du brevet (revendications 19, 20, 21 et 22). La question qui se pose en l’espèce est celle de savoir si Western, avec son système VS, a contrefait directement les revendications. Selon M. Palmer, le système VS comprend tous les éléments des revendications relatives au système. Le système VS comprend un crible pour séparer le fluide de forage des déblais; il compte un plateau (bac) sous le crible pour récupérer le liquide et les gaz; les vibrations du tamis font traverser la boue sur le crible; les liquides et les solides sont séparés par le crible; une pompe à vide externe crée une pression différentielle pour aspirer les liquides et les gaz au travers du crible; la pression différentielle est appliquée à un seul crible; la pression différentielle est ajustable pour éviter tout blocage; un réservoir de rétention fonctionne comme une chambre de dégazage; et le bac récupère tous les gaz et le liquide du plateau (bac) et évacue les gaz.

[116]  Je suis également d’accord avec M. Palmer pour dire que les défenderesses ont contrefait directement les revendications relatives au système (revendications 19, 20, 21 et 22), lesquelles n’exigent pas l’étape de l’introduction de la boue sur le tamis. Elles exigent un premier crible pour séparer le fluide de forage des déblais, avec une pression différentielle configurée pour aspirer l’air ou la vapeur au travers du premier crible pour accroître le débit du fluide de forage qui passe au travers de ce crible par rapport au deuxième crible auquel aucune pression différentielle n’est appliquée (revendication 19). Elles comprennent un bac, situé sous le premier crible pour recueillir l’air, la vapeur et le fluide de forage qui passent au travers de ce crible, lequel est raccordé à un générateur de pression différentielle et une chambre externe où l’air et la vapeur seraient séparés du fluide de forage (revendication 20). Le générateur de pression différentielle peut être installé à l’extérieur du tamis (revendication 21). La puissance à laquelle l’air ou la vapeur est aspiré au travers du crible peut être ajustée pour éviter tout blocage causé par des déblais de forage sur le crible (revendication 22).

[117]  Par conséquent, je conclus que les défenderesses ont contrefait les revendications relatives au système du brevet. Elles n’ont toutefois pas contrefait directement les revendications relatives à la méthode.

(3)  Les défenderesses ont‑elles incité d’autres entités à contrefaire le brevet?

(a)  Les relations d’affaires de Western

[118]  En 2010, Western a entrepris une relation d’affaires avec FPM. Celle-ci était entrée en contact avec Western parce qu’elle cherchait un composant à vide pour son système de récupération de fluides de forage, le système VS. Les deux entreprises ont travaillé ensemble et loué le système VS pendant un peu plus d’un an, et elles ont ensuite coupé leurs liens. FPM faisait la mise en marché du système VS et Western fournissait les systèmes à vide et les boyaux connexes requis. FPM fournissait les plateaux, les cribles, les cales, les brides, les collecteurs et les robinets. Western assurait l’entretien du système VS environ une fois par semaine.

[119]  Western a renoué avec FPM en 2012, après que les deux entreprises eurent été acquises par 32 Degrees Capital. En 2012, FPM avait pris de l’expansion, et elle avait son propre personnel de terrain et ses propres pompes à vide. Le rôle de Western avait changé, lui aussi. Western avait continué d’approvisionner FPM en pompes à vide quand celle-ci en avait besoin, mais elle avait aussi mis en marché le système VS et fournissait plus de personnel sur le terrain. En 2014, les employés de FPM sont entrés au service de Western. FPM a continué d’exister, mais elle ne s’est pas livrée à des activités commerciales.

[120]  Western fournissait souvent à ses clients des rapports sur la quantité de fluide de forage qui était récupérée grâce au système VS, comparativement à ce qui aurait été perdu sans lui.

[121]  M. Stanton a dit ne pas croire que Western avait distribué des notices d’utilisation écrites sur des sites de forage au cours de la période de 2010 à 2011, mais il pensait que FPM et Richfield l’avaient peut‑être fait. Il avait peut‑être bien reçu la version écrite que FPM avait produite. Certaines notices avaient été conçues pour l’utilisation des pompes à vide que Western fournissait. Certaines étaient collées sur les pompes elles‑mêmes, mais elles avaient tendance à s’en détacher; d’autres avaient peut‑être bien été remises aux entrepreneurs en forage.

[122]  Quand le système VS était mis en place sur un site, des employés de Western devaient souvent donner des instructions aux équipes chargées des appareils de forage sur la manière de le faire fonctionner – vidage de la pompe à vide, entretien quotidien, fonctionnement des robinets, etc. Ces employés restaient habituellement sur place jusqu’à ce que le puits soit foré afin de s’assurer que le système VS fonctionnait comme il faut et ils effectuaient les ajustements nécessaires.

[123]  Je signale qu’au cours des interrogatoires préalables Western a fourni des réponses à des engagements selon lesquels [traduction] « aucune instruction n’avait été donnée aux équipes chargées des appareils de forage au sujet de l’installation du système Vac‑Screen ». En particulier, Western a maintenu que personne n’avait donné d’instructions à ces équipes sur la manière d’ajuster la pompe à vide sur le système VS. M. Stanton a déclaré que ces deux déclarations étaient fausses. Western a commencé à fournir ses propres notices d’utilisation écrites sur le système VS à son personnel sur le terrain en 2014 ‑ elles n’ont pas été distribuées à l’extérieur de l’entreprise. Depuis 2014, Western effectue généralement tous ses propres travaux d’installation et de désinstallation. M. Stanton a fait remarquer que quand des entreprises tentent d’installer elles-mêmes le système VS, elles font souvent des erreurs et Western est obligée de faire un appel de service pour les corriger.

[124]  M. Stanton savait que Richfield avait des notices d’utilisation écrites pour le système VS, mais il a dit douter qu’elles étaient toujours laissées sur place.

(b)  L’incitation

[125]  L’incitation exige que l’on prouve ce qui suit : 1) il y a eu contrefaçon directe par un tiers, (2) le défendeur a influencé le tiers de sorte que, sans cette influence, l’acte de contrefaçon n’aurait pas eu lieu, et (3) le défendeur savait que son influence entraînerait l’exécution de l’acte de contrefaçon (Corlac Inc. c Weatherford Canada Ltd, 2011 CAF 228, par. 162).

[126]  Western soutient que M‑I n’a pas montré qu’il y avait eu contrefaçon directe de la part d’un tiers. Aucun représentant de société de forage n’a été appelé comme témoin par M‑I pour confirmer ses allégations d’incitation. De plus, Western soutient que M‑I n’a pas réussi à montrer que Western avait exercé une influence quelconque sur les sociétés de forage qui louaient le système VS. Western avait peut‑être bien donné quelques instructions aux employés chargés des appareils de forage sur la manière de faire fonctionner le système VS, mais cela n’équivalait à rien de plus que des directives évidentes quant à l’ajustement de la pression afin d’éviter tout calage. Enfin, Western soutient qu’elle n’aurait pas pu inciter sciemment d’autres parties à commettre un acte de contrefaçon car, pendant la période pertinente, le brevet de M‑I n’avait pas été délivré. De plus, avant octobre 2013, quand les revendications ont été modifiées, Western n’a donné instruction à personne de varier ou d’interrompre de façon intermittente la pression différentielle, comme l’exigeaient les revendications avant qu’on les modifie.

[127]  M‑I soutient que, n’eût été les agissements de Western, des tiers n’auraient pas contrefait le brevet 173. Western [traduction] « louait, fournissait, installait, initialisait et entretenait le système VS » et elle donnait des instructions aux équipes sur son fonctionnement et son entretien, ce qui incluait la manière d’ajuster la pression différentielle.

[128]  Je conclus que M‑I a établi, comme suit, le critère à trois volets qui s’applique à l’incitation.

[129]  Premièrement, les sociétés de forage qui utilisaient des unités munies du système VS louées directement de Western contrefaisaient le brevet 173 en recourant à la méthode revendiquée. Comme il a été mentionné plus tôt, le système VS lui‑même tombe sous le coup des revendications relatives à la méthode, la seule étape manquante étant l’introduction de boue sur le tamis. Les sociétés de forage ont exécuté cette étape essentielle, faisant ainsi tomber directement leur conduite sous le coup des revendications relatives à la méthode.

[130]  Deuxièmement, sans les agissements de Western, il n’y aurait eu aucune contrefaçon directe. Il ressort de la preuve que Western a non seulement fait la promotion du système VS auprès de ses clients, mais qu’elle a aussi installé ce système et assuré son entretien, et qu’elle donné pendant des années des instructions orales et écrites sur le fonctionnement du système, y compris des directives sur la manière d’ajuster la pression à vide en fonction des conditions présentes à l’emplacement du puits. Sans ces agissements, des tiers n’auraient pas mis en pratique la méthode revendiquée dans le brevet 173.

[131]  M. Imler a déclaré qu’on donnait toujours des instructions écrites aux entrepreneurs en forage et aux membres de l’équipe à propos de la manière de faire fonctionner le système VS et de l’entretenir. Les travaux d’entretien consistaient à ajouter de l’huile à la pompe à vide et à drainer les filtres. De plus, il fallait surveiller régulièrement le système pour s’assurer que le débit entre les cribles était continu et que des déblais ne restaient pas sur place. Au moment de l’installation, des membres du personnel de FPM ajustaient les robinets et restaient sur les lieux jusqu’au début des travaux de forage afin de s’assurer que le système fonctionnait convenablement. Au début, il était souvent nécessaire d’ajuster les robinets en fonction des conditions, souvent une ou deux fois par heure. Après cela, c’était les équipes affectées aux appareils de forage qui avaient pour tâche de faire les ajustements nécessaires, conformément aux instructions qu’elles avaient reçues.

[132]  Selon M. Cooke, on laissait toujours aux équipes de forage des instructions écrites, et des copies de celles-ci étaient laissées sur place. Il avait rédigé ces instructions et les avait montrées à M. Pomerleau, de FPM, pour avoir son avis. Les instructions indiquaient clairement qu’il fallait faire des ajustements régulièrement pour avoir la bonne pression à vide, suivant les conditions, dans un éventail très restreint de réglages. Le point de départ était une pression à vide équivalant à trois pouces de mercure. À son avis, il était toujours nécessaire de disposer d’instructions écrites parce que les équipes de forage étaient temporaires. M. Imler, de FPM, a confirmé que les instructions de cette entreprise émanaient au départ de M. Cooke. FPM avait simplement apposé son logo sur les instructions de M. Cooke. Plus tard, Western s’est servi des mêmes instructions.

[133]  Enfin, Western et ses experts ont mal saisi le troisième volet du critère relatif à l’incitation. Ce volet n’exige pas que l’incitateur présumé sache que les agissements du tiers équivalent à de la contrefaçon, ce qui requerrait une analyse juridique des revendications du brevet. Ce qu’il faut, c’est que l’incitateur sache que l’influence qu’il exerce amènera le tiers en question à mettre à exécution les actes qui équivalent à une contrefaçon. Autrement dit, il suffit simplement que l’incitateur présumé sache ce que le tiers fera vraisemblablement en réponse à son influence. Il incombera à la Cour de déterminer si ces actes contrefont le brevet.

[134]  Dans la présente affaire, les sociétés de forage ont eu recours à la méthode revendiquée, Western a exercé une influence au point où, sans celle-ci, il n’y aurait eu aucune contrefaçon, et Western savait ce que les sociétés de forage feraient en réponse à son influence. Le critère relatif à l’incitation qui s’applique aux revendications relatives à la méthode est donc établi.

(4)  Le projet commun

[135]  Compte tenu des conclusions que j’ai tirées au sujet de la contrefaçon directe et de l’incitation, il n’est pas nécessaire d’examiner l’allégation de M‑I selon laquelle Western a réalisé un projet commun avec d’autres en vue de contrefaire le brevet.

D.  Quatrième question en litige – Les revendications en litige sont‑elles invalides?

(1)  L’inutilité

[136]  Western soutient que la totalité des revendications du brevet sont invalides pour cause d’inutilité parce que M. Carr n’a pas réussi à montrer l’utilité de l’invention qu’il revendique à la date de dépôt de la demande de brevet. Western souligne les difficultés que M. Carr a rencontrées lors de ses essais en 2006 ‑ le bac était trop petit, du liquide était aspiré dans la pompe à vide, le réservoir de rétention était trop petit, et le robinet de rupture était trop difficile à manipuler. En réalité, dit Western, le système de M. Carr ne pouvait fonctionner que quelques minutes seulement. De l’avis de M. Matthews, le système conçu par M. Carr était [traduction] « tout à fait inutile et n’aurait été employé dans aucune installation ».

[137]  Western soutient également que l’utilité de la présumée invention de M. Carr n’aurait pas pu être valablement prédite en raison de ses essais restreints. M. Carr savait peut‑être comment régler les problèmes qu’il avait eus, mais il n’y a aucune information dans le brevet qui révèle ces problèmes ou qui aide la personne versée dans l’art à les régler. De plus, le brevet précise bel et bien la pression différentielle souhaitée, la taille du bac requise, la nécessité de disposer d’un moyen d’empêcher le fluide d’entrer dans la pompe à vide, la taille de la chambre, les contrôles nécessaires pour fixer la pression différentielle, ou la manière dont une pression différentielle ne pouvait être appliquée qu’à une partie d’un crible. Par ailleurs, Western signale que M. Carr n’a fait l’essai d’aucun système consistant à appliquer une pression différentielle à la sortie du tamis, ou d’une configuration du genre de celle qui est illustrée à la figure 6 du brevet.

[138]  De plus, Western soutient que certaines des réalisations décrites dans le brevet sont inapplicables (p. ex., la figure 5). En particulier, le brevet ne décrit pas les moyens nécessaires pour éviter que du liquide vienne bloquer la pompe à vide, ni la nécessité d’un réservoir de rétention.

[139]  Je ne suis pas d’accord avec les observations de Western à propos de l’inutilité. Premièrement, il faut mettre l’accent sur les revendications, et non sur les réalisations qui ne sont pas revendiquées ou sur des diagrammes simplifiés dans le brevet. Deuxièmement, on ne considère pas qu’une revendication manque d’utilité parce qu’elle omet de mentionner un composant qu’une personne versée dans l’art reconnaîtrait comme nécessaire, comme un robinet permettant de régler le débit d’un liquide passant dans un conduit. Troisièmement, le fait que M. Carr n’a pas créé au départ un prototype qu’il était possible de commercialiser sur‑le‑champ ne veut pas dire que ses essais ne révélaient pas une invention utile. Quatrièmement, l’un des principaux problèmes que M. Carr a rencontrés, soit l’entrée de liquide dans la pompe à vide, était expressément mentionné dans l’analyse de la figure 5 du brevet et il a été réglé à l’aide d’une chambre externe qui est incluse dans les revendications et illustrée à la figure 6. En se basant sur ses essais, M. Carr disposait d’un fondement solide qui lui permettait de prévoir que la chambre externe réglerait le problème.

[140]  Comme nous l’avons plus tôt, les résultats de M. Carr étaient prometteurs pour ce qui était d’augmenter la capacité de fluide du tamis et le séchage des déblais. À mon avis, ces résultats étaient suffisants pour montrer l’utilité de l’invention et le fondement d’une prédiction d’utilité valable. M. Carr n’a pas mis précisément à l’essai l’application d’une pression différentielle à la sortie d’un tamis, mais son protocole d’essai simulait cet arrangement. Comme l’a fait remarquer M. Palmer, les essais de M. Carr lui ont permis d’évaluer l’effet de l’application d’une pression différentielle à des endroits différents le long du tamis. Cela lui a aussi permis d’évaluer la capacité du système de minimiser la rétention de fluide sur les déblais, ce qui était l’un des objectifs explicites des essais.

(2)  L’insuffisance

[141]  Western fait valoir que le brevet 173 ne définit pas l’invention alléguée et ne décrit pas son fonctionnement. Elle se fonde sur l’avis de M. Murphy, selon lequel une personne versée dans l’art aurait de la difficulté à faire fonctionner l’invention parce que les figures données dans le brevet sont incomplètes. Elles n’indiquent notamment pas clairement de quelle manière éviter que le fluide fasse tomber en panne la pompe à vide, la taille que doivent avoir le bac et les conduits, ou la pression qu’il faudrait appliquer. De plus, le brevet n’explique pas qu’une pression différentielle est appliquée à un crible en particulier et non à un autre; il n’y a dans le brevet aucune description de la manière dont le débit d’air est contrôlé; la nature de la chambre de dégazage n’est pas explicitement indiquée, et l’idée d’acheminer la [traduction] « totalité » de l’air, de la vapeur et du fluide de forage vers une chambre externe n’est pas entièrement décrite.

[142]  De plus, Western soutient que certains des termes utilisés dans le brevet sont ambigus, comme [traduction] « vapeur », [traduction] « chambre de dégazage » et [traduction] « premier crible ».

[143]  Je ne suis pas d’accord avec les observations de Western sur l’insuffisance et l’ambiguïté.

[144]  Comme M. Palmer l’a expliqué dans son rapport et dans son témoignage, la totalité des insuffisances présumées ont trait à des questions que la personne versée dans l’art réglerait sans problème en se fondant sur la connaissance du matériel décrit dans le brevet et sur les connaissances générales courantes au sujet de la manière dont fonctionnent des dispositifs tels que des pompes, des systèmes à vide, des robinets et des dégazeurs. Le brevet ne décrit aucun composant inventif que comporteraient la méthode et le système revendiqués; il a trait à une combinaison de dispositifs bien connus et bien compris, dont on peut se servir pour optimiser la récupération du fluide de forage. C’est donc dire que les figures données dans le brevet montrent comment les composants peuvent être disposés, et on n’y décrit pas les spécifications qui s’y rattachent.

[145]  Pour ce qui est de l’ambiguïté, j’ai analysé les observations de Western dans le cadre de mon interprétation du brevet. Je ne considère pas que les termes soient ambigus.

[146]  Enfin, Western soutient que l’inventeur est tenu de décrire la meilleure manière de mettre en pratique l’invention, citant l’alinéa 27(3)c) de la Loi sur les brevets, LRC (1985), c. P‑4. Cependant, cette disposition se rapporte uniquement aux machines et, selon ma compréhension du brevet, celui‑ci revendique une méthode et un système, et non une machine.

(3)  L’antériorité

[147]  Un breveté ne mérite un monopole que dans les cas où l’invention revendiquée est véritablement nouvelle, utile et non évidente. En général, une invention ne peut pas être considérée comme nouvelle si elle a déjà été publiquement divulguée et si la divulgation fournissait suffisamment d’informations pour permettre à une personne versée dans l’art de l’utiliser. Les parties conviennent qu’un brevet est invalide pour cause d’antériorité si une publication unique ou une utilisation publique de l’invention revendiquée divulgue cette invention d’une manière qui permettrait à une personne versée dans l’art de la fabriquer et de la mettre en pratique sans trop de difficulté. À mon avis, Western a largement échoué à prouver l’antériorité. Il n’existe aucune publication antérieure qui contient l’objet du brevet 173. Certaines publications contiennent quelques éléments de la méthode et du système revendiqués; quelques‑uns d’entre eux pourraient être modifiés, adaptés ou reconfigurés pour ressembler à l’invention revendiquée; quant à d’autres, il faudrait les remanier entièrement pour qu’on puisse s’en servir comme moyen de traiter l’huile et les déblais de forage.

[148]  J’analyse ci‑après l’art antérieur, et je souscris aux opinions de M. Palmer sur l’antériorité; son analyse était toujours approfondie, équilibrée et pratique. Comme nous le verrons, une seule des références d’antériorité (Derrick) révèle une invention qui tombe sous le coup des revendications du brevet 173. Comme M. Palmer l’a conclu, Derrick antériorise les revendications 1, 11, 16 et 19, ce qui les rend invalides.

[149]  L’expert de Western, M. Murphy, a passé en revue de manière détaillée un certain nombre d’antériorités et il a exprimé l’avis que l’objet du brevet 173 était à la fois antériorisé par des inventions antérieures et rendu évident par ces dernières.

[150]  Les avocats de Western ont fourni à M. Murphy un cahier d’antériorités, toutes des brevets. Il n’a pas fait de recherches sur ce qu’il considérait comme de l’art antérieur pertinent. Lors de son témoignage, il a décrit l’art antérieur par le terme suivant : « wahoo » ‑ ce qui voulait dire selon moi, dans le langage texan de M. Murphy, que certaines des antériorités étaient anciennes, obscures et en marge de l’objet du brevet. Pourtant, même si certains éléments de l’art antérieur étaient difficiles à saisir, M. Murphy a pu déterminer de quelle façon le matériel breveté était censé fonctionner et il a jugé qu’une personne versée dans l’art aurait été capable de fabriquer et de mettre en pratique les inventions. La véritable question, selon lui, consistait à savoir si une ou plusieurs des antériorités divulguaient l’invention revendiquée dans le brevet 173.

[151]  M. Murphy a également décrit des travaux qu’il avait lui‑même réalisés sur le tamis de Derrick avec un dispositif à vide différentiel.

[152]  En réponse à l’opinion de M. Murphy, l’expert de M‑I, M. Palmer, a lui aussi procédé à une analyse détaillée de toutes les antériorités que M. Murphy avait citées. Il a regroupé les antériorités en quatre groupes, en fonction de leurs caractéristiques communes, comme suit.

(a)  Premier groupe – Hensley (2005) et Derrick (2005)

[153]  Ce groupe vise des tamis qui servent à séparer le fluide de forage et les déblais. M. Murphy a mentionné que le produit d’Hensley est un système vibrant partiellement fermé, qui compte deux cribles et un dispositif de pression différentielle raccordé à l’un des cribles. Les déblais de forage humides qui ne passent pas au travers des cribles sont acheminés vers un séchoir, auquel un autre dispositif de pression différentielle est raccordé. M. Murphy a reconnu qu’une personne versée dans l’art aurait de la difficulté à faire fonctionner le produit d’Hensley parce que le brevet n’est pas clair quant au fonctionnement des vibrations. Il a également admis que le produit d’Hensley, contrairement au produit décrit dans le brevet 173, est un système intégré, sans chambre externe.

[154]  M. Palmer décrit le produit d’Hensley comme étant un tamis vibrant comprenant de multiples cribles, sur lesquels les vibrations font traverser la boue. Il comprend une pression différentielle pour accroître le débit du fluide qui passe au travers des cribles. Le produit comprend un séchoir pour retirer davantage de fluide de forage.

[155]  Selon M. Palmer, le produit d’Hensley n’antériorise pas le brevet 173 parce qu’une pression différentielle continue est appliquée sur tous les cribles, et non une pression différentielle variable sous un seul crible. M. Murphy a fait remarquer que le produit d’Hensley pourrait inclure d’autres cribles auxquels aucune pression différentielle ne serait appliquée. M. Palmer a conclu qu’Hensley n’indique pas clairement si une pression différentielle serait appliquée à d’autres cribles et, quoi qu’il en soit, le système au complet devrait être fermé pour assurer le vide.

[156]  M. Murphy a également souligné que le produit d’Hensley prévoit une pression différentielle sous les cribles du tamis et une pression positive appliquée à la courroie du séchoir. Cela dit, M. Palmer a souligné que ce n’est pas la même chose qu’appliquer une pression différentielle à un crible du tamis et non à un autre. La courroie du séchoir n’est pas un crible du tamis.

[157]  M. Palmer a également fait observer que le produit d’Hensley ne comprend pas un moyen pour contrôler le débit d’air pour éviter tout blocage. Bien que, comme M. Murphy l’a souligné, le brevet d’Hensley mentionne la possibilité de synchroniser la pression différentielle et le taux de vibration du tamis, avec une pression variant à différents endroits sur les cribles, le brevet ne prévoit pas un moyen pour y arriver. Selon M. Palmer, il serait pratiquement impossible de produire une pression différentielle qui varie de 1 800 fois par minute – taux de vibration courant pour un tamis – et, même si cela était possible, la pression différentielle produite aurait probablement peu d’effet.

[158]  Finalement, M. Palmer a souligné que le produit d’Hensley ne comprend pas une chambre de dégazage pour séparer l’air ou la vapeur du fluide de forage.

[159]  Semblable au produit d’Hensley, le produit de Derrick est décrit comme étant un tamis vibrant qui sert à séparer le fluide de forage d’une boue au moyen d’une succion appliquée sous le crible.

[160]  M. Murphy a décrit le produit de Derrick comment étant semblable à un tamis qui sert à extraire le fluide de forage d’une boue avec une pression différentielle appliquée sous un ou plusieurs cribles. Il a constaté que le brevet de Derrick comprend un moyen pour pulser la pression différentielle afin d’éviter tout blocage sur les cribles et prévoit l’application de divers degrés de succion à différents cribles.

[161]  M. Murphy a travaillé à la Derrick company à une époque où celle-ci mettait à l’essai des tamis équipés d’un système à vide semblable à l’équipement décrit dans le brevet de Derrick. Le résumé suivant est fondé sur les souvenirs de M. Murphy au sujet de l’équipement qui a été mis à l’essai.

[162]  Le premier essai, réalisé en 2003, comprenait un tamis à un seul crible équipé d’une pompe à vide sous le lit de criblage. Le vide pouvait être pulsé de façon intermittente. L’essai a révélé que de la vapeur était aspirée dans la pompe à vide, ce qui aurait pu entraîner sa défaillance.

[163]  Le deuxième essai, réalisé en 2004, comprenait un tamis à trois cribles équipé d’une pompe à vide raccordée à la sortie du tamis. Encore une fois, le vide pouvait être pulsé. Toutefois, cette fois-ci, un réservoir de rétention avait été installé pour recueillir le liquide et l’humidité. L’essai a révélé que l’on obtenait les meilleurs résultats en appliquant une pression à vide pendant quatre secondes et en l’arrêtant pendant une seconde.

[164]  Le troisième essai, réalisé vers la fin de 2004, comprenait un tamis à quatre cribles avec une chambre à vide installée sous la sortie du lit de criblage. Cette disposition a permis de mieux sécher les déblais. De plus, pour empêcher le liquide d’entrer dans la pompe à vide, un séparateur cyclone a été installé entre le tamis et la pompe à vide.

[165]  Il semblerait qu’un quatrième essai aurait été réalisé au moyen d’un tamis à trois cribles avec trois pompes à vide, mais M. Murphy n’a pas assisté à cet essai. Ce tamis est toutefois présenté à la fig. 1 du brevet de Derrick.

[166]  M. Murphy a reconnu que la preuve qu’il a présenté au sujet des essais réalisés par Derrick est fondée seulement sur ses souvenirs – il n’a pas de notes et Derrick a refusé de fournir tout document portant sur ces essais. Les essais sont, et demeurent, confidentiels.

[167]  Selon M. Palmer, le brevet de Derrick prévoit le blocage par la boue sur le crible et l’utilisation d’une pression pneumatique, ainsi que des vibrations du tamis, pour débloquer le crible. Il ne montre pas une méthode pour contrôler le débit d’air pour éviter tout blocage. M. Palmer ne souscrit pas à la manière dont M. Murphy a décrit cette fonction, soit une pulsation ou une variation de la pression différentielle. Il considère plutôt que le brevet de Derrick traite de la façon de régler, et non d’éviter, le blocage.

[168]  De plus, M. Palmer a souligné que le produit de Derrick n’achemine pas l’air, la vapeur et le fluide vers une chambre externe pour la séparation, ou ne comprend pas une chambre de dégazage. Bien que le produit de Derrick comprenne un séparateur cyclone, il sert à séparer le fluide de forage et les solides de l’air ou de la vapeur; il ne sépare pas l’air ou la vapeur du fluide. Le fluide va dans une direction, tandis que l’air et la vapeur vont dans une autre.

[169]  M-I admet que le brevet de Derrick décrit certains aspects des revendications du brevet 173, notamment un tamis équipé d’un premier crible et d’un deuxième crible, ainsi que d’un bac, avec une pression différentielle appliquée au premier crible et non au deuxième. Toutefois, le brevet de Derrick ne montre pas comment contrôler le débit d’air pour éviter tout blocage. Par conséquent, M. Palmer a reconnu que certaines des revendications du brevet 173 – les revendications 1, 11, 16 et 19 – sont antériorisées par le brevet de Derrick; les autres sont valides.

[170]  En ce qui a trait aux essais des tamis de Derrick décrits par M. Murphy, la preuve ne permet pas de déterminer s’il y avait des antériorités. Aucun document ne corrobore les souvenirs de M. Murphy. De toute façon, ni les essais ni les résultats n’ont été rendus publics.

[171]  Par conséquent, M. Palmer n’a pas estimé que les brevets de Hensley et de Derrick ont divulgué ou présenté l’objet du brevet 173, sauf en ce qui a trait aux revendications 1, 11, 16 et 19.

(b)  Deuxième groupe – Vasshus (2006), Manuel (1988) et Schellstede (1987)

[172]  Ce groupe vise des dispositifs qui servent à séparer le fluide de forage des déblais au moyen de courroies filtrantes rotatives; il ne s’agit pas de tamis vibrants.

[173]  Le brevet de Vasshus divulgue un moyen d’introduire la boue sur une courroie mobile et de permettre au liquide de s’écouler au travers de la bande, tandis que le reste de la boue colle à la courroie jusqu’à ce qu’elle tombe. M. Murphy a souligné que la courroie rotative pourrait être remplacée par des cribles vibrants fixes. M. Murphy décrit le produit de Vasshus comme étant une combinaison d’un tamis et d’un dégazeur qui sert à séparer le fluide de forage des déblais, avec un dispositif de pression différentielle qui peut appliquer une pression à vide à un crible et non à un autre. La pression différentielle peut être interrompue de façon intermittente à l’aide de robinets.

[174]  M. Murphy a reconnu que Vasshus fait la distinction entre sa machine et un tamis vibrant. De plus, Vasshus a conçu un système étanche qui recueille certaines vapeurs et qui en évacue d’autres dans l’atmosphère. M. Murphy était d’avis que, avec des modifications importantes effectuées par un ingénieur très compétent et inventif, le produit de Vasshus pourrait être converti en un tamis.

[175]  M. Palmer a reconnu que le brevet de Vasshus envisageait la possibilité d’utiliser des cribles vibrants, mais il a souligné qu’il ne montre pas à une personne versée dans l’art comment arriver à cette disposition. Il faudrait, d’après M. Palmer, avoir recours à une ingéniosité inventive. De plus, Vasshus s’est donné du mal pour faire la distinction entre son invention et des tamis vibrants traditionnels.

[176]  M. Palmer a également souligné que le produit de Vasshus ne comprend aucun crible et encore moins des cribles multiples. M. Murphy a souligné que le produit de Vasshus comprend un élément de criblage préliminaire auquel aucune pression différentielle n’est appliquée. Toutefois, M. Palmer a décrit cet élément comme étant principalement une plaque de distribution qui sert à répartir le fluide de forage sur la courroie filtrante, et non comme étant un crible qui sépare le fluide des déblais.

[177]  M. Palmer a également fait remarquer que le produit de Vasshus n’applique pas une pression différentielle particulière à un crible et aucune à un autre. Il applique plutôt une seule pression différentielle dans l’appareil étanche. Même si les diagrammes dans le brevet de Vasshus démontrent le contraire, ces digrammes sont mal étiquetés, selon M. Palmer.

[178]  De plus, M. Palmer n’est pas d’accord avec M. Murphy en ce qui concerne la possibilité de varier la pression différentielle dans l’appareil de Vasshus. M. Murphy affirme que la mention d’une interruption de la pression différentielle comprend la variation du débit d’air. Toutefois, M. Palmer fait remarquer que l’objet du robinet en question est d’isoler l’appareil de criblage de l’appareil de séparation en cas de défaillance. Il ne vise pas à permettre un contrôle continu du débit d’air. Il n’utilise pas non plus le débit d’air comme moyen pour éviter tout blocage par la boue. Le produit de Vasshus compte sur le blocage pour s’assurer que la boue colle au crible jusqu’à ce qu’elle tombe.

[179]  Comme le produit de Vasshus, le produit de Manuel n’est pas un tamis à crible vibrant; il utilise plutôt une courroie rotative. Toutefois, contrairement au produit de Vasshus, le produit de Manuel vibre, mais ses vibrations sont relativement légères – elles n’aident pas à faire traverser la boue sur la courroie, mais plutôt à séparer le liquide.

[180]  M. Murphy décrit le produit de Manuel comme étant une combinaison de tamis vibrant à courroie mobile et de dégazeur distinct, avec deux sections sous vide qui interagissent avec la courroie.

[181]  Encore une fois, il n’y a pas de premier crible, de deuxième crible, ou d’autres cribles dans le produit de Manuel; il n’y a qu’une seule courroie rotative. Une pression à vide est appliquée sous la courroie pour garder la boue en place, laquelle est collée sur la courroie. La pression différentielle est continue, et non ajustable.

[182]  Le brevet de Manuel ne comprend pas une chambre de dégazage externe. Il prévoit une chambre interne incompatible avec un tamis.

[183]  Ces caractéristiques ont amené M. Palmer à conclure que le brevet de Manuel ne divulgue pas l’objet du brevet 173.

[184]  Le brevet de Schellstede porte sur un autre système de filtrage à courroie mobile, et non un tamis vibrant. Ce système ne comprend pas de multiples cribles. Bien qu’une succion soit appliquée à une partie de la courroie, le brevet ne prévoit pas de variations faciles de la pression différentielle et ne traite pas du problème de blocage, sauf lorsqu’il indique que la courroie devra être lavée pour enlever les solides qui y sont pris. Essentiellement, pour qu’ils se déplacent, les déblais de forage doivent être collés à la courroie.

[185]  M. Murphy décrit le produit de Schellstede comme étant un appareil qui applique une pression à vide à des sections d’une courroie filtrante. Le liquide qui traverse le crible est ensuite dégazé, et les solides, l’air, et la vapeur peuvent être séparés du liquide.

[186]  M. Palmer souligne que le produit de Schellstede ne comprend pas une chambre de dégazage externe. Le dégazeur est à l’intérieur de l’unité, ce qui ne serait pas possible pour un tamis vibrant. Le brevet de Schellstede divulgue l’utilisation d’un système de criblage qui utilise une pompe à vide; toutefois, l’objectif de ce système n’est pas de séparer le fluide de forage des déblais, mais bien de récupérer l’eau ou le carburant diesel.

[187]  M. Palmer a conclu que le brevet de Schellstede ne divulgue pas les revendications du brevet 173 ou ne permet pas à la personne versée dans l’art d’y arriver.

(c)  Troisième groupe – Logue (1949), Ennis (1975), Bongert (1976), Cook (1989) et Fast (1990)

[188]  Ces brevets sont liés à des technologies non utilisées pour séparer le fluide de forage des déblais et portent plutôt sur des appareils qui servent principalement à séparer les liquides de solides (p. ex. du charbon, un minerai de fer ou de la tourbe), afin de récupérer les solides. Par contraste, l’objectif du brevet 173 et des technologies semblables est de récupérer le liquide, et non les solides.

[189]  Les systèmes dans ce groupe fonctionnent en formant un pâté de matériaux solides après l’extraction du liquide d’un mélange liquide-solides. Il semble peu probable qu’ils puissent être utilisés pour récupérer le fluide de forage de la boue.

[190]  M. Murphy a décrit le produit de Logue comme étant un tamis équipé de multiples sections de crible, avec un dispositif de pression différentielle qui peut être utilisé de façon intermittente pour éviter tout blocage. Ce produit comprend également une chambre pour séparer les liquides des gaz. Le brevet de Logue ne mentionne pas son application par rapport au fluide de forage, mais M. Murphy croit qu’une personne versée dans l’art comprendrait que l’invention peut être adaptée pour être utilisée ainsi. Même si la description de l’invention était « très grossière », M. Murphy a conclu que le brevet de Logue antériorise les revendications relatives à la méthode et les revendications relatives au système du brevet 173.

[191]  Selon M. Palmer, le brevet de Logue porte sur un moyen d’appliquer une succion à un crible pour que les solides sur le crible collent à celui-ci et forment un pâté. L’objectif consiste à faire coller les solides sur le crible en le bloquant. Le produit de Logue utilise de légères vibrations pour déplacer le pâté vers l’avant et vers l’arrière sur le crible. Le rôle de ces vibrations est donc différent que celui des vibrations à force d’accélération élevée dans un tamis. Les vibrations dans un tamis servent principalement à aider la séparation et à déplacer la boue vers l’avant de façon constante.

[192]  De plus, selon M. Palmer, le produit de Logue utilise un seul crible qui ne conviendrait pas à un tamis et qui sert à bloquer les solides sur le crible au moyen d’une pression à vide continue. Le brevet de Logue prévoit l’ajustement de la puissance de succion selon les caractéristiques du matériel traité ou pour éviter tout blocage, mais il ne divulgue pas des ajustements continus pour contrôler le débit d’air pendant le fonctionnement. Selon M. Palmer, le produit de Logue n’antériorise pas le brevet 173 parce qu’il ne divulgue pas un tamis qui sert à séparer le fluide de forage des déblais; il ne serait pas efficace pour séparer le fluide de forage des déblais; il n’a pas un premier crible et un deuxième crible; il ne contrôle pas le débit d’air pour éviter tout blocage (tout le contraire); et il ne comprend pas de chambre de dégazage externe dans laquelle l’air, la vapeur et le liquide sont aspirés.

[193]  M. Murphy décrit le produit d’Ennis comme étant un dispositif qui sert à séparer les liquides des solides à l’aide d’une série de cribles vibrants et d’un dispositif de pression différentielle dont la puissance peut être ajustée. Il a conclu que le produit d’Ennis antériorise les revendications 1, 2, 9, 15, 19 et 22.

[194]  M. Murphy souligne que, selon le brevet de Bongert, l’utilisation d’une pompe à vide pour aspirer le liquide au travers d’un crible était déjà connue. Le brevet de Bongert porte lui-même sur un appareil vibrant qui déplace un matériau sur une courroie filtrante qui permet au liquide de passer au travers de celle-ci. Une pression à vide peut être appliquée à des portions du crible pour séparer le liquide et la force de celle-ci peut être ajustée. Les solides restants peuvent être traités avec une autre pompe à vide pour séparer tout air et liquide restants. M. Murphy a affirmé que, avec des modifications, le produit de Bongert pourrait être utilisé pour traiter le fluide de forage. Il a conclu que le brevet de Bongert antériorise les revendications 1, 2, 3, 10, 9, 10, 11, 13, 14, 15, 16, 19, 21, 22 et 23.

[195]  M. Palmer a qualifié les produits de Logue, d’Ennis et de Bongert de technologies d’assèchement dont l’objectif et le fonctionnement sont très différents de ceux des tamis qui servent à séparer le fluide de forage et les déblais.

[196]  Selon M. Palmer, tout comme le brevet de Logue, ni le brevet d’Ennis ni le brevet de Bongert n’antériorise le brevet 173 parce qu’ils ne divulguent pas de tamis qui servent à séparer le fluide de forage des déblais; ces produits ne seraient pas efficaces pour séparer le fluide de forage des déblais; ils ne varient pas la pression différentielle sous le crible; ils ne contrôlent pas le débit d’air pour éviter tout blocage (tout au contraire); et ils ne comprennent pas de chambre de dégazage externe dans laquelle l’air, la vapeur et le liquide sont aspirés.

[197]  M. Murphy décrit le produit de Cook comme étant un tamis vibrant équipé d’un système à vide utilisé pour séparer les liquides et les solides. Pour éviter tout blocage, le produit de Cook utilise une toile perforée qui entre en contact avec le filtre et qui est courbée contre celui‑ci au moyen d’une pression différentielle interrompue de façon intermittente. Une pression à vide peut également être appliquée au filtre pour accroître le débit du liquide qui passe au travers de celui‑ci. Le liquide, l’air et la vapeur sont séparés dans un réservoir de rétention.

[198]  M. Palmer a décrit le produit de Cook comme étant un [traduction] « système de nettoyage de solvant » qui, comme les autres technologies dans cette catégorie, sert principalement à récupérer les solides, et non les liquides. Selon lui, le brevet de Cook n’antériorise pas le brevet 173 pour les mêmes raisons que le brevet de Logue.

[199]  Selon M. Murphy, le brevet de Fast divulgue un système de courroie mobile pour séparer les liquides des solides. Les liquides et les solides qui ne passent pas au travers du crible immédiatement sont acheminés vers une autre section où une pression à vide est appliquée, puis l’air, la vapeur et le liquide sont recueillis et acheminés vers une chambre de séparation.

[200]  M. Palmer a souligné que le brevet de Fast porte sur la séparation de liquides, autres que le fluide de forage, des solides. Selon lui, il ne constitue pas une antériorité parce qu’il ne décrit pas un tamis qui sert à séparer le fluide de forage des déblais; il ne serait pas efficace pour séparer le fluide de forage des déblais; il ne contrôle pas le débit d’air pour éviter tout blocage (tout au contraire); il ne varie pas la pression différentielle; et son bac de retenue sert à récupérer les solides des liquides, ce qui ne serait pas possible avec du fluide de forage.

(d)  Quatrième groupe – Rischer (2004)

[201]  Selon M. Murphy, le brevet de Risher porte sur un dispositif qui sert à séparer les fluides des déblais de forage et qui devrait être placé à côté d’un tamis. Le produit de Risher utilise un crible cylindrique, sur lequel on fait couler une boue, et un dispositif de pression différentielle, qui aide à séparer les liquides des solides. La pompe à vide est raccordée à un séparateur pour recueillir la vapeur et séparer le liquide de l’air. Sous sa forme commerciale, le produit de Risher est appelé « Rotovac ». Le brevet 173 mentionne cet appareil dans sa description de l’art antérieur (par. 11).

[202]  Selon M. Palmer, le produit de Risher est un séchoir qui n’antériorise pas le brevet 173 parce qu’il ne divulgue pas un tamis; il ne vibre pas; il n’a pas un premier crible et un deuxième crible; il ne contrôle pas le débit d’air pour éviter tout blocage; et il ne sépare pas l’air ou la vapeur du fluide de forage.

(4)  L’évidence

[203]  Un breveté ne mérite un monopole que dans les cas où l’invention revendiquée est véritablement nouvelle, utile et non évidente. La manière d’aborder la question de l’évidence est bien connue (Apotex Inc. c Sanofi‑Synthelabo Canada Inc. [2008] 3 RCS 265).

[204]  Western soutient que l’objet du brevet 173 est évident, compte tenu de l’état de la technique à l’époque. Pour les motifs qui suivent, je ne suis pas d’accord.

(a)  La personne versée dans l’art

[205]  J’ai déjà indiqué plus tôt quelles sont les positions des parties quant aux qualités que possède la personne versée dans l’art en cause. J’ai défini cette personne comme étant quelqu’un qui avait cinq années d’expérience dans le domaine de l’application, du fonctionnement et de la conception des tamis vibrants.

(b)  Les connaissances générales courantes

[206]  M. Murphy a exprimé l’avis que les connaissances générales courantes de la personne versée dans l’art comprenaient une bonne connaissance du matériel habituellement utilisé dans l’industrie – les séparateurs gaz‑boue, les dégazeurs, les séchoirs, les cyclones, les pompes à vide utilisées dans les installations de forage et, bien sûr, les tamis. Pour ce qui est des tamis, la personne versée dans l’art serait au courant de l’utilisation d’un ou plusieurs cribles ou, subsidiairement, des courroies filtrantes. Il saurait que le fait d’appliquer une pression différentielle sous un crible pouvait faire augmenter le débit du liquide traversant le crible, et que la pression appliquée serait ajustable.

[207]  La personne versée dans l’art serait également au courant des produits disponibles sur le marché, dont les appareils brevetés. Elle saurait comment faire des recherches dans les publications en matière de brevets. Elle connaîtrait bien les règlements et les mesures de sécurité qui s’appliquent au traitement des gaz libres et entraînés.

[208]  M. Palmer a mis quelque peu en doute la description que M. Murphy a faite des connaissances générales courantes. Il a convenu que la personne versée dans l’art saurait que le fait d’appliquer une pression différentielle à un crible accroîtrait le débit du liquide traversant le crible, mais pas que ce serait toujours le cas peu importe le type de crible employé ou la consistance de la boue. De plus, la personne versée dans l’art ne saurait pas que la pression différentielle pourrait amener des solides à rester bloqués sur le crible, ou qu’il faudrait contrôler le débit d’air afin d’éviter tout blocage.

[209]  M. Palmer a précisé aussi qu’une personne versée dans l’art serait consciente que les moyens de séparer les liquides des solides ne sont pas tous interchangeables. Par exemple, elle saurait qu’il serait préférable d’utiliser plusieurs cribles plutôt qu’un seul, et des cribles plutôt que des courroies filtrantes.

[210]  Au sujet de l’ajustement de la pression différentielle, M. Palmer a indiqué que les connaissances générales courantes de la personne versée dans l’art n’incluraient pas le fait qu’il serait nécessaire d’ajuster la pression différentielle en vue d’éviter tout blocage. Rien dans l’art antérieur, et cela inclut les brevets de Derrick et d’Hensley, ne traite de cette question.

[211]  Je suis d’avis que la description que donne M. Palmer des connaissances générales courantes est plus complète et exacte.

(c)  Les concepts inventifs

[212]  La question consiste à savoir si les concepts inventifs du brevet 173 représentent un avancement par rapport aux connaissances générales courantes que possède la personne versée dans l’art et qui se reflètent dans l’art antérieur pertinent.

[213]  M. Murphy a exprimé l’avis qu’il n’y a aucune différence entre l’état de la technique et les concepts inventifs du brevet 173. En fait, il a dit croire que le brevet ne contenait rien de véritablement inventif.

[214]  Pourtant, M. Murphy a groupé les revendications du brevet en trois catégories, correspondant aux concepts inventifs possibles qu’il a relevés ‑ d’abord, celles qui ont trait à une pression différentielle appliquée à un crible en particulier, et non à un autre (revendications 1, 2, 4, 8, 9, 11, 15, 18, 19, 21 et 23), deuxièmement, celles qui ont trait au contrôle du débit d’air (revendications 2, 5, 6, 7, 13, 14 et 22), et troisièmement, celles qui ont trait à la combinaison d’une pression différentielle et d’une chambre de dégazage (revendications 10, 12, 16, 17 et 20).

[215]  Pour ce qui est de la première catégorie, M. Murphy a indiqué que le concept inventif était l’application d’une pression différentielle à un crible en particulier, et non à un autre, ou à une partie d’une série de cribles, et non à une autre. Faisant écho à son opinion sur l’interprétation du terme [traduction] « premier crible » ainsi qu’à son idée selon laquelle l’objet principal du brevet était d’améliorer le débit de liquide traversant la série de cribles, il a dit croire que la personne versée dans l’art comprendrait que la pression différentielle serait appliquée à l’entrée du tamis. De plus, elle comprendrait que l’on pourrait se servir d’une courroie filtrante plutôt que d’un crible.

[216]  De l’avis de M. Murphy, ce concept inventif était déjà exposé dans un grand nombre des antériorités, dont les brevets d’Hensley, Derrick, Logue, Bongert, Ennis, Vasshus, Manuel, Schellstede, Fast, Cook et Risher.

[217]  Pour ce qui est de la deuxième catégorie de revendications, M. Murphy a expliqué que le concept inventif comprenait l’idée d’appliquer une pression différentielle à un crible en particulier, et non à un autre, mais il a ajouté l’idée de contrôler le débit d’air en ajustant la pression différentielle. À son avis, le contrôle du débit d’air avait pour but d’éviter que la boue bloque sur le crible. Une personne versée dans l’art saurait que les dispositifs à pression différentielle sont toujours munis de robinets de réglage dont on peut se servir pour ajuster la pression appliquée. Le concept inventif de ce groupe de revendications, d’après M. Murphy, était déjà divulgué dans de nombreuses antériorités, dont les brevets d’Hensley, Derrick, Logue, Bongert, Ennis, Vasshus, Cook, Risher et Manuel. À son avis, il n’y a donc aucune différence réelle entre l’état de la technique et ce groupe de revendications du brevet. Il a conclu que s’il y avait eu une différence quelconque la personne versée dans l’art aurait été en mesure de la surmonter et d’arriver à l’invention revendiquée.

[218]  Quant au troisième groupe de revendications, M. Murphy a considéré qu’elles avaient trait à la combinaison d’un dispositif à pression différentielle et d’un autre dispositif capable de séparer les gaz et l’air d’un fluide. À son avis, cet arrangement était déjà divulgué dans l’art antérieur, dont les brevets de Derrick, Longue, Ennis, Vasshus, Cook, Manuel, Schellstede et Fast. De plus, la personne versée dans l’art serait au courant des composants des pompes à vide utilisées dans les installations de forage, dont les réservoirs de rétention servant à séparer les gaz, même les gaz entraînés, des fluides. D’après lui, il n’y avait donc rien dans les revendications du brevet qui représentait un avancement par rapport à l’état de la technique ou, du moins, aucun problème que la personne versée dans l’art ne pouvait pas surmonter aisément.

[219]  M. Murphy a ensuite indiqué comment chacune des antériorités correspondait aux revendications du brevet 172.

[220]  Comme il a été mentionné, M. Palmer a admis que les revendications 1, 11, 16 et 19, lesquelles étaient incluses dans le premier groupe de M. Murphy, étaient invalides.

[221]  Pour ce qui est des revendications faisant partie du deuxième groupe, M. Palmer a exprimé l’avis que leur concept inventif était le contrôle du débit d’air en vue d’éviter tout blocage. Il a considéré que l’opinion de M. Murphy s’appliquait à tous les moyens et toutes les raisons de contrôler le débit d’air, et pas seulement à ceux qui visaient à éviter que la boue reste bloquée sur le crible. À son avis, une personne versée dans l’art comprendrait que le contrôle du débit d’air avait pour but d’éviter tout blocage de la boue. L’art antérieur, selon lui, fait généralement appel à une pression différentielle constante qui n’est pas ajustable. Ces documents ne traitent pas non plus du fait de contrôler le débit d’air pour éviter tout blocage. En fait, dans certains des documents, ce blocage est recherché car il permet aux solides de former des pâtés une fois que les fluides qu’ils contiennent ont été retirés. Cela est particulièrement vrai dans les antériorités qui font appel à des courroies filtrantes.

[222]  M. Palmer a exprimé l’avis qu’aucune des antériorités ne divulgue la présence d’un tamis vibrant destiné à séparer le fluide de forage des déblais et comprenant un moyen d’éviter que la boue reste bloquée sur les cribles. Il a convenu que le produit de Derrick est un tamis vibrant qui applique une pression différentielle différente ou nulle sur les cribles, et que les pressions peuvent être variées, mais que cette stratégie n’a pas pour but d’éviter que la boue reste bloquée. Il a conclu qu’aucune des antériorités ne divulgue la possibilité de contrôler le débit d’air en vue d’éviter tout blocage; cette technique ne serait pas non plus évidente aux yeux de la personne versée dans l’art.

[223]  Quant au troisième groupe de revendications, les experts s’entendent tous pour dire qu’une chambre de dégazage est un dispositif qui sépare l’air ou la vapeur du fluide de forage. Le brevet 173 (revendications 21 et 30) envisage la collecte de l’air ou de la vapeur et du fluide dans une chambre externe où cet air ou cette vapeur sont séparés du fluide. M. Palmer n’a pas considéré que les antériorités que M. Murphy avait citées (Derrick, Logue, Ennis, Vasshus, Cook, Risher, Manuel, Schellstede et Fast) englobaient la présence de tamis vibrants  pour séparer le fluide des solides présents dans une boue.

[224]  De plus, Logue et Risher ne traitent pas de la séparation de l’air ou de la vapeur du fluide. Manuel et Schellstede font appel à un dégazeur interne, et non externe, qui ne conviendrait pas à un tamis. Ennis et Cook recourent à un processus semblable, qui ne convient pas au fluide de forage. Vasshus et Fast se servent d’un dispositif qui n’est pas un tamis. Le tamis Derrick n’achemine pas la totalité de l’air, de la vapeur et du fluide vers une chambre externe en vue de les séparer.

[225]  M. Palmer a conclu que, de façon générale, l’art antérieur pertinent n’étayait pas l’opinion de M. Murphy. Cet art antérieur ne divulgue pas des systèmes de tamis qui seraient utiles pour séparer, dans une boue, les liquides des solides. Cet art divulgue plutôt des systèmes d’assèchement ou de lavage par solvant qui ne recourent pas à des vibrations, qui ne déplacent pas la boue au travers de cribles, qui ne sont pas munis de cribles distincts et qui n’acheminent pas la totalité de l’air ou de la vapeur et du fluide vers une chambre de dégazage externe où ils sont séparés.

[226]  Par conséquent, selon M. Palmer – et je suis d’accord avec lui – que les revendications 2 à 10, 12, 13 à 15, 17, 18 et 20 à 23 sont toutes valides.

(5)  Les revendications d’une portée plus large

[227]  Western fait valoir que les revendications du brevet sont à la fois d’une portée plus large que l’invention divulguée dans le brevet et d’une portée plus large que l’invention concrètement réalisée.

(a)  Les revendications d’une portée plus large que la divulgation

[228]  Western admet que cette question repose en grande partie sur des questions d’interprétation, dont j’ai traité plus tôt. Dans cet ordre d’idées, elle soutient que le mémoire descriptif original du brevet ne considère pas le [traduction] « premier crible » comme un dispositif autre que le crible situé à l’entrée du tamis, que les mots [traduction] « contrôler le débit d’air » signifie varier ou interrompre de façon intermittente la pression différentielle, que le mot [traduction] « vapeur » signifie dangereux, que le brevet n’inclut pas un moyen de séparer l’humidité du fluide de forage, et qu’aucune réalisation ne montre comment la [traduction] « totalité » de l’air, de la vapeur et des fluides de forage aspirés au travers d’un premier crible est traitée. De l’avis de Western, ces lacunes du brevet dénotent que la divulgation n’étaye pas les revendications.

[229]  J’ai rejeté chacune de ces affirmations dans le cadre de mon interprétation du brevet, et il s’ensuit donc que je ne suis pas d’accord avec l’allégation de Western selon laquelle les revendications sont d’une portée plus large que la divulgation.

(b)  Les revendications d’une portée plus large que l’invention

[230]  Western fait valoir que les revendications du brevet excèdent ce que M. Carr a concrètement inventé. Il y a, selon elle, trois sujets de préoccupation. Premièrement, l’intention de M. Carr était d’appliquer une pression différentielle pulsée à un tamis, et non une pression différentielle ajustable. Deuxièmement, M. Carr n’envisageait pas de situer la pression différentielle uniquement sous le crible situé à la sortie du tamis. Troisièmement, M. Carr n’a jamais envisagé un moyen de séparer l’air et la vapeur du fluide de forage. M. Matthews a relevé ces trois questions après avoir lu des documents que des avocats lui avaient fournis. Il n’a pas lu la transcription complète de l’interrogatoire préalable de M. Carr, pas plus qu’il n’a eu l’occasion d’entendre le témoignage de M. Carr à l’instruction.

[231]  Lors de l’interrogatoire préalable, M. Carr a déclaré qu’il avait envisagé une pression intermittente pulsée, une pression différentielle intermittente et une pression différentielle continue. Ses essais comprenaient un débit d’air continu, ainsi que le fait de pulser et de modifier la pression différentielle en ajustant le robinet de régulation.

[232]  M. Carr a déclaré aussi qu’il avait bel et bien envisagé d’appliquer une pression différentielle à un crible situé à la sortie du tamis. Ses essais, décrits plus tôt, simulaient précisément ce scénario.

[233]  Enfin, M. Carr a décrit les problèmes qu’il avait eus en aspirant une trop grande quantité de fluide dans le tuyau d’entrée, ce qui avait causé une défaillance de la pompe à vide. Il avait prévu deux solutions possibles : augmenter la taille du bac ou utiliser un réservoir de confinement externe. Il s’était dit que cette dernière solution était infaisable et il avait donc opté pour la première.

[234]  Je ne vois donc aucun fondement factuel à l’allégation de Western selon laquelle les revendications du brevet sont d’une portée plus large que l’invention de M. Carr.

(6)  L’absence de possibilité d’inférence raisonnable

[235]  Western soutient que le brevet 173 a été modifié après le dépôt de la demande de brevet originale et qu’un nouvel objet y a été ajouté; cet objet, dit Western, n’aurait pas pu être raisonnablement inféré du mémoire descriptif et des dessins originaux qui avaient été déposés, ce qui contrevenait donc au paragraphe 38.2(2) de la Loi sur les brevets, LRC (1985), c. P‑4, ainsi qu’à l’article 181 des Règles sur les brevets, DORS/96‑423. Western soutient que la question à laquelle il faut répondre consiste à savoir si une personne versée dans l’art qui examinerait la demande de brevet initialement déposée aurait raisonnablement inféré le nouvel objet.

[236]  À l’instruction, j’ai jugé que les circonstances de fait entourant les modifications n’étaient pas pertinentes à l’égard de cette question. Le fait de savoir si les modifications peuvent raisonnablement être inférées est une question de logique, et non de fait.

[237]  Western se fonde sur le témoignage de M. Matthews, qui a fait remarquer que le mémoire descriptif et les revendications du brevet ne prévoyaient au départ que la possibilité de varier, de pulser ou d’interrompre de façon intermittente la pression différentielle, et non le concept plus général du [traduction] « contrôle du débit d’air ». De plus, Western soutient que le brevet 173, après modification, proposait un sens plus large pour l’expression [traduction« premier crible », sens qui n’était pas présent dans la demande originale. Western maintient que, collectivement, les modifications ont introduit des concepts que l’on n’aurait pas pu inférer raisonnablement de la demande de brevet déposée.

[238]  M‑I admet qu’il existe peu de droit canadien sur la question.

[239]  Comme il a été mentionné précédemment, M. Matthews a conclu que Western n’aurait pas pu contrefaire ou inciter à contrefaire les revendications initialement déposées le 1er octobre 2007 parce que ces revendications exigeaient toutes que l’on varie la pression différentielle, ce que le système VS ne fait pas. Les revendications ont été modifiées le 2 octobre 2013 en vue d’ajouter les nouvelles revendications 25 à 44, laissant intactes les 24 revendications originales. Le mémoire descriptif a été modifié lui aussi par la suppression d’un paragraphe et la modification légère d’un autre.

[240]  Les nouvelles revendications comprenaient des revendications relatives à la méthode qui ne figuraient pas dans la série originale de revendications. La nouvelle revendication 25 faisait référence à l’application d’une pression différentielle à une première partie du [traduction« premier crible ». La nouvelle revendication 33 ajoutait le concept du [traduction« contrôle du débit d’air » afin d’éviter tout blocage de la boue sur le crible.

[241]  Les revendications du 2 octobre 2013 ont été modifiées une fois de plus le 28 janvier 2014 : les 24 revendications originales ont été retirées et remplacées par les revendications 25 à 44 tirées de la série de revendications du 2 octobre 2013. Les revendications ont été renumérotées de 1 à 20 et ont été maintenues jusqu’à leur modification le 27 août 2014.

[242]  Les modifications du 27 août 2014 ont changé les revendications 1, 8, 10 et 17. La revendication 1 modifiée exigeait que le tamis soit muni de deux cribles ‑ la pression différentielle serait appliquée au premier crible et non au second. La revendication 8 modifiée introduisait une pompe à vide externe. La revendication 10 modifiée comprenait l’application d’une seconde pression différentielle, différente celle‑là, au second crible. La revendication 17 modifiée exigeait que le système soit muni d’un premier crible auquel on appliquerait une pression différentielle de manière à intensifier le débit du fluide de forage le traversant, par rapport à un second crible. Elle ajoutait aussi une chambre externe pour recueillir l’air, la vapeur et le fluide de forage. De plus, les paragraphes 16A et 16B ont été ajoutés au mémoire descriptif. Ces paragraphes décrivent la méthode dans la revendication 1, et le système dans la revendication 17.

[243]  Deux modifications relativement minimes, destinées à corriger des erreurs, ont été faites le 4 novembre 2014. La revendication 13 a été modifiée pour changer [traduction] « un second crible » par [traduction] « le second crible ». La revendication 15 a été changée pour être dépendante de la revendication 14, plutôt que de la revendication 10. Et un nouveau paragraphe a été ajouté au mémoire descriptif (le par. 16C) pour correspondre à la revendication 10.

[244]  Le brevet a été modifié une fois de plus le 19 décembre 2014. De nombreuses revendications ont été renumérotées, les revendications 10 et 19 ont été légèrement modifiées et trois nouvelles revendications ont été ajoutées : les revendications 2, 12 et 20. D’autres changements mineurs ont été apportés le 20 février 2015. Le brevet a été délivré sous cette forme le 16 juin 2015.

[245]  M. Matthews a conclu que, pour un certain nombre de raisons, les revendications du brevet délivré et les paragraphes 16A à 16C ne peuvent pas être inférés de manière raisonnable de la demande de brevet originale. Premièrement, il fait remarquer que la demande originale (et les demandes de priorité) faisaient référence à la variation d’une pression différentielle et que la variation était un élément que l’on retrouvait dans toutes les revendications. Elle ne fait partie d’aucune des revendications indépendantes que comporte le brevet délivré.

[246]  Deuxièmement, M. Matthews a dit des paragraphes 16A à 16C ajoutés qu’ils ne concordaient pas avec les descriptions originales qui figuraient dans le brevet. Ces nouveaux paragraphes sont liés à l’application d’une pression différentielle au premier crible et non à l’application d’une pression différentielle, ou d’une pression différentielle différente, au second crible. Ces paragraphes ne font pas état d’une variation de la pression différentielle, même si l’un des problèmes sur lesquels le brevet était axé était la prévention de tout blocage.

[247]  Troisièmement, d’après M. Matthews, la demande de brevet originale employait le terme [traduction] « premier crible » comme le ferait une personne versée dans l’art – elle faisait référence au crible situé le plus près de l’entrée du tamis. Cependant, les paragraphes 16A à 16 C font référence à un [traduction] « premier crible » et à un [traduction] « second crible », ce qui donne lieu à l’interprétation possible (celle sur laquelle M‑I se fonde pour interpréter le brevet) selon laquelle le premier crible pourrait être situé ailleurs qu’à l’entrée du système. Cette interprétation, dit M. Matthews, est incompatible avec le reste du brevet ainsi qu’avec l’objet déclaré de ce dernier, qui est de rehausser la capacité de fluide du tamis. Il n’est possible d’obtenir une capacité de fluide accrue qu’en mettant en place un dispositif à pression différentielle sous le crible le plus rapproché de l’entrée.

[248]  Quatrièmement, les revendications modifiées et les paragraphes 16A à 16C semblent, aux yeux de M. Matthews, envisager le seul dégazage du fluide de forage traversant le crible auquel est appliquée la pression différentielle. À son avis, cela n’aurait aucun sens et M. Carr n’envisageait certainement pas ce scénario quand il a déposé sa demande de brevet.

[249]  Cinquièmement, M. Matthews note que la figure 5 du brevet ne montre qu’un seul crible; un tamis conçu de cette façon ne pourrait pas avoir des zones de pression différentielle distinctes. M. Carr n’a pas été capable de fabriquer une version de la figure 5.

[250]  L’analyse que fait M. Matthews ne me convainc pas, et je traiterai de chacun des points qu’il a soulignés.

[251]  Premièrement, si la variation était effectivement un élément essentiel des revendications originales (et, pour cette raison, Western ne les a pas contrefaites), le mémoire descriptif original envisageait quelque chose de plus vaste. Le paragraphe 34 faisait mention d’une pulsation et d’une variation, mais il ajoutait ensuite que [traduction] « le fait de manipuler le robinet en l’ouvrant ou en le fermant, du moins en partie, peut perturber l’écoulement de vapeur depuis le bac, ce qui se répercute donc sur la pression différentielle ». Le concept du contrôle du débit d’air, et pas seulement la pulsation et la variation, peut être raisonnablement inféré de ce passage.

[252]  Deuxièmement, bien que le mot « pulsation » ne soit pas précisément mentionné aux paragraphes 16A à 16C, d’autres parties du mémoire descriptif indiquent clairement qu’il faudrait varier la pression différentielle pour éviter tout blocage. Par exemple, le paragraphe 33 fait mention d’un changement de la pression différentielle afin que les solides puissent être acheminés sur le crible sans obstacles, [traduction] « ce qui évite que des solides s’accumulent sur le crible ou y adhèrent, et n’empêchent donc pas le fluide de traverser le crible ».

[253]  Troisièmement, M. Matthews répète son interprétation du [traduction] « premier crible » et l’objet du brevet. J’ai déjà analysé cette interprétation. M. Matthews ne s’est pas rendu compte que son interprétation ne concordait pas avec le paragraphe 37 du brevet déposé.

[254]  Quatrièmement, comme il a été analysé plus tôt, la chambre de dégazage mentionnée dans le brevet est tout simplement un dispositif qui permet de séparer l’air et la vapeur du fluide de forage. Il ne s’agit pas d’un dégazeur classique. Si c’était le cas, l’observation de M. Matthews au sujet du dégazage d’une partie seulement du fluide récupéré aurait peut‑être été valide.

[255]  Cinquièmement, la figure 5 n’est pas une description d’un tamis fonctionnel; il s’agit d’un diagramme simplifié qui illustre la disposition des divers composants du système.

[256]  En conséquence, les concepts du [traduction] « premier crible » et du [traduction« contrôle du débit d’air » qui apparaissent dans les modifications datées du 2 octobre 2013 étaient déjà présentes dans la demande de brevet original ou pouvaient être raisonnablement inférés de cette demande.

E.  Cinquième question en litige – Quels sont les dommages‑intérêts que les défenderesses doivent à M‑I?

[257]  Les parties conviennent qu’il y a lieu de calculer des dommages‑intérêts en prenant pour base une redevance raisonnable : le montant de la redevance dont les parties auraient vraisemblablement convenu si elles avaient négocié un accord d’octroi de licence au moment pertinent, c’est‑à‑dire au moment de la première contrefaçon.

[258]  M‑I sollicite également une indemnité raisonnable au titre de la contrefaçon, en prenant aussi pour base une redevance raisonnable, et ce, pour la période antérieure à la délivrance du brevet, c’est‑à‑dire à compter du 2 octobre 2013, date à laquelle le brevet a été modifié pour inclure les revendications qui ont finalement fait partie du brevet délivré.

[259]  Western fait valoir que M‑I n’a pas droit à une redevance raisonnable parce qu’elle disposait de solutions de substitution non contrefaisantes à la technologie brevetée, des solutions qu’elle aurait pu employer au lieu de payer une redevance à M‑I. Western soutient également qu’aucune indemnité ne devrait être payable pour la période du 2 octobre 2013 au 27 août 2014 car, au cours de cette période, les revendications du brevet faisaient état de l’application d’une pression différentielle à la [traduction] « première partie » du [traduction] « premier crible » ‑ elles ne faisaient pas état de l’application d’une pression différentielle à un premier crible, et non à un second. Western souligne que FPM a cessé de louer le système VS en 2013, de sorte qu’aucuns dommages‑intérêts ne devraient être adjugés à son encontre. Western ajoute qu’il y avait également des différences entre les revendications modifiées le 27 août 2014 et les modifications du 16 juin 2015. Enfin, elle fait valoir que si M‑I a droit à une redevance raisonnable, celle‑ci ne devrait pas être supérieure à 7,4 %.

[260]  Je ne suis pas d’accord avec Western. Elle ne disposait pas d’une véritable solution de substitution non contrefaisante au système VS. Une solution non contrefaisante est un dispositif qui remplace réellement le dispositif en question, qui est économiquement viable, qui est disponible en quantité suffisante et que le contrefacteur aurait réellement vendu (Apotex Inc. c Merck & Co., 2015 CAF 171, par. 73 et 74).

[261]  Western soutient qu’elle avait deux solutions de substitution non contrefaisantes au système VS : un compresseur qui créait une pression différentielle à travers un crible et qui déversait le fluide de forage dans un réservoir à boue, ainsi qu’un mini‑tamis situé à l’extrémité d’un tamis dans le but de sécher les déblais humides.

[262]  Pour ce qui est du compresseur, M. Stanton a déclaré que ce dispositif avait été mis à l’essai, mais qu’il n’y avait sur le marché aucun produit réel qui conviendrait à cette fin, et ni Western, ni FPM ni FPM USA n’en avaient utilisé un. Quant aux mini‑tamis, ces derniers auraient essentiellement fonctionné comme des tamis de séchage qui retirent une partie du fluide de forage, mais ce fluide requiert un traitement supplémentaire pour en retirer les particules fines. Ce matériel, selon M. Stanton, est nettement plus coûteux que le système VS; Western ne fabrique pas de mini‑tamis ou n’en offre pas à ses clients.

[263]  Il ne ressort pas de la preuve que Western avait une solution de substitution non contrefaisante au système VS. L’opinion de M. Palmer l’a confirmé, tout comme M. Tate.

[264]  Je ne suis pas d’accord non plus avec Western pour dire que le système VS n’a pas contrefait les revendications telles qu’elles apparaissaient le 2 octobre 2013. J’ai déjà conclu que les modifications apportées ultérieurement au brevet n’ont pas introduit un nouvel objet. Par conséquent, la date d’entrée en vigueur du calcul d’une indemnité raisonnable est le 2 octobre 2013. M. Palmer a confirmé que le système VS contrefaisait les revendications du brevet à compter du 2 octobre 2013.

[265]  Je ne suis pas d’accord non plus avec Western à propos du montant d’une redevance raisonnable. Je suis d’avis qu’une telle redevance serait ||||||||.

[266]  Il y a un certain nombre de facteurs qui sont pertinents pour ce qui est du calcul d’une redevance raisonnable (JAY‑LOR International Inc. c Penta farm systems ltd., 2007 CF 358, par. 159 à 173). Les parties et leurs experts respectifs conviennent que l’indicateur le plus important d’une redevance raisonnable est un contrat d’octroi de licence comparable. La preuve a été principalement axée sur les licences que l’on pouvait considérer comme comparables.

[267]  L’experte de Western, Mme Melanie Russell, a procédé à l’examen d’un certain nombre de contrats d’octroi de licence concernant des parties et des produits différents, ce qui l’a amenée à conclure qu’une redevance raisonnable se situait quelque part entre 4,8 % et 10 %, la redevance moyenne étant de 7,4 %.

[268]  L’expert de M‑I, M. Michael Tate, a conclu que la licence la plus comparable était celle consentie par M‑I à FourK Energy Services pour la même invention qui est en litige en l’espèce à l’époque pertinente, avec un taux de redevance de ||||||||. Le contrat a été conclu le 1er septembre 2014.

[269]  Je ne souscris pas à la conclusion de Mme Russell car aucun des contrats d’octroi de licence sur lesquels elle s’est fondée est réellement comparable au contrat hypothétique entre M‑I et Western. Chacun d’eux comprenait des modalités, des conditions ou des variables supplémentaires qui seraient absentes du contrat hypothétique et qui fausseraient à la baisse les taux de redevance. Par exemple, Mme Russell a fait mention d’un contrat de licence qui incluait un taux de redevance de 1,3 %. Cependant, ce contrat n’était pas une opération sans lien de dépendance, il incluait une rémunération fondée sur un pourcentage des recettes brutes, et il offrait au concédant une entente d’achat de produits avec une faible marge bénéficiaire. Le taux de redevance ne reflétait pas suffisamment les conditions réelles de la licence; il n’était pas comparable à la simple entente en matière de redevances que Western et M‑I auraient négociée. Il est inutile de passer en revue toutes les licences comparables que Mme Russell a prises en considération, mais elles présentaient toutes des caractéristiques qui en faisaient des éléments de comparaison douteux.

[270]  Mme Russell a également tenu pour acquis que Western n’aurait pas payé plus de |||||||| et qu’elle n’avait pas les moyens de payer ||||||||. Ces présomptions n’étaient pas étayées par la preuve et contredisaient la réalité de l’entente conclue entre M‑I et FourK.

[271]  Tout en reconnaissant que M. Tate était l’expert le plus chevronné en matière de taux de licence et de redevances, Western a contesté sa conclusion pour de nombreux motifs. À mon avis, les observations de Western ne changent rien à l’analyse de M. Tate.

[272]  Je souscris à la conclusion de M. Tate selon laquelle un taux de redevance raisonnable serait de ||||||||, compte tenu du contrat qu’ont conclu M‑I et FourK Energy Services à l’époque pertinente en vue de l’utilisation de la méthode et du système brevetés. M. Tate a également pris en compte l’importance de la technologie pour M‑I, les avantages de cette technologie pour les clients, l’absence de solutions de substitution non contrefaisantes, l’éminence de l’entrée de M‑I sur le marché canadien avec un produit concurrent, la taille de la part de marché de Western (24 %), ainsi que les profits que Western avait réalisés grâce à la technologie au fil des ans. Comme M‑I avait conclu un accord de licence exclusif avec FourK (excluant l’entrée de M‑I sur le marché), l’octroi d’une nouvelle licence à Western aurait obligé M‑I à renégocier son contrat avec FourK, ce qui se serait vraisemblablement soldé par une réduction de la redevance et par une diminution des revenus que M‑I tirerait de cette source. Elle n’aurait pas été disposée à risquer de perdre d’autres revenus en acceptant de Western un taux de redevance réduit.

[273]  Ces facteurs ont amené M. Tate à conclure que M‑I se serait attendue à recevoir ‑ et que Western aurait payé ‑ une redevance de ||||||||. Western aurait peut‑être dû majorer les prix qu’elle facturait à ses clients afin de pouvoir payer cette redevance, mais rien ne prouvait qu’elle ne pouvait pas le faire. En fait, il ressort de la preuve que Western tirait des revenus élevés de la location du système VS et que les utilisateurs réalisaient des économies considérables; les clients seraient incités à payer davantage pour louer le système VS.

[274]  Lors de sa négociation avec FourK, la position initiale de M‑I était que la redevance devait être de ||||||||. Ce chiffre était basé sur une entente conclue aux États‑Unis entre la filiale de M‑I, M‑I Swaco, et FP USA en vue de la location d’un produit semblable – le « FP Maximizer » – dans le cadre d’une entente de partage des revenus dans une proportion de 60/40 à compter de 2011 ou de 2012. Selon l’entente, l’entreprise qui fournissait la pompe à vide, les conduits et les plateaux touchait 60 %, et l’autre entreprise 40 %. Ce produit n’a jamais été offert au Canada.

[275]  Pour contrer la redevance de |||||||| que M‑I suggérait, FourK a offert ||||||||. En fin de compte, les parties se sont entendues sur ||||||.

[276]  La licence de FourK est le meilleur indicateur de la redevance que M‑I aurait acceptée et que Western aurait payée. Il s’agissait d’un contrat à l’égard du brevet en litige, qui portait sur des produits semblables au moment pertinent.

[277]  Certes, il a quelques facteurs qui auraient exercé une pression à la baisse sur le taux de redevance. La licence permettrait d’utiliser la méthode et le système du brevet, mais sans inclure un transfert de technologie. La licence serait non exclusive (vu la présence de FourK sur le marché) et elle se limiterait au Canada.

[278]  Cependant, il y aurait aussi des facteurs qui exerceraient une pression à la hausse. La méthode et le système brevetés présentaient d’importants avantages par rapport à d’autres options et il n’existait aucune solution de substitution non contrefaisante. Étant donné que M‑I était susceptible d’entrer sur le marché avec son propre produit, elle aurait demandé une redevance considérable à Western en tant que concurrente. Elle aurait aussi voulu remplacer son manque à gagner en renégociant l’entente avec FourK. Le système VS était en grande demande et Western en tirait des profits considérables. Elle aurait été incitée à continuer et était bien placée au sein du marché pour le faire. Le taux de redevance raisonnable aurait été fondé sur l’hypothèse que le brevet était à la fois valide et contrefait. Pour ce qui est du contrat conclu entre FourK et M‑I, il n’y aurait aucune hypothèse de ce genre.

[279]  Dans l’ensemble, je suis convaincu que la redevance de |||||||| que M. Tate a suggérée est convenable. Les parties s’entendent sur la redevance de base à partir de laquelle seront calculés l’indemnité et les dommages‑intérêts, et il est inutile que je tranche cette question.

III.  La requête fondée sur l’article 227 des Règles

[280]  À l’instruction, M‑I s’est inquiétée du fait que Western se fondait sur des documents qui ne lui avaient pas été communiqués, ce qui donnait à penser que les affidavits de documents de Western étaient peut‑être inexacts et incomplets. M‑I a présenté une requête en vertu de l’article 227 des Règles afin de sanctionner la conduite de Western. M‑I a qualifié les agissements de Western d’abus de procédure et a sollicité, d’une part, des dépens d’un montant de 45 500 $ afin de l’indemniser pour avoir dû demander des éléments de preuve supplémentaires et, d’autre part, une ordonnance visant à faire radier la défense de Western concernant l’incitation.

[281]  Après avoir examiné les éléments de preuve et les circonstances, je suis convaincu que M‑I devrait avoir gain de cause dans le cadre de sa requête, et que Western devrait payer sans délai à M‑I des dépens d’un montant de 10 000 $.

A.  Le contexte

[282]  En 2018, les avocats de M‑I ont rencontré M. Cooke (de Richfield) et M. Imler (anciennement de Western). M. Cooke a fourni à M‑I des instructions écrites concernant le système VS qui avaient été distribuées à des tiers. M-I a remis le document à Western.

[283]  Le 5 octobre 2018, quelques semaines avant l’instruction, Western a produit des documents supplémentaires, dont les clauses contractuelles liant FPM et ses clients. À l’instruction, lors du contre‑interrogatoire, les avocats de Western ont présenté à M. Cooke un document qui n’avait pas été produit antérieurement et qui indiquait qu’il y avait d’autres documents non produits de cette nature qu’il se proposait d’utiliser en contre‑interrogatoire. J’ai ordonné sur‑le‑champ à Western de produire les documents qu’elle entendait utiliser. Western a fourni sept documents qui n’avaient pas été produits antérieurement. Je lui ai également ordonné de bien chercher d’autres documents pertinents, s’il y en avait, et de produire un nouvel affidavit de documents.

B.  La question en litige

[284]  M‑I sollicite une ordonnance radiant la défense de Western concernant l’incitation, ainsi que le paiement immédiat, par Western, de dépens d’un montant élevé.

[285]  Western soutient qu’il n’y a aucune raison pour laquelle sa défense relative à l’incitation devrait être radiée, et que la demande de 45 500 $ en dépens de M‑I ne repose sur aucun fondement factuel.

[286]  M‑I fait valoir que les affidavits de Western étaient inexacts ou lacunaires sous les rapports suivants :

  • M. Doug Bruce, le déposant de Western, a déclaré sous serment qu’une recherche diligente de dossiers de Western et de FPM avait eu lieu et que des demandes de renseignements appropriées avaient été faites à d’autres;

  • M. Bruce a déclaré sous serment que son affidavit contenait tous les documents pertinents qui étaient en la possession, sous l’autorité ou sous la garde de Western et de FPM;

  • M. Bruce a déclaré sous serment qu’il avait énuméré et décrit tous les documents pertinents qui étaient en la possession, sous l’autorité ou sous la garde de Western et de FPM.

[287]  Western soutient qu’avant octobre 2018, M. Bruce et d’autres employés de Western n’étaient pas au courant de la pertinence et de l’importance des documents qu’ils n’avaient pas produits. Pourtant, à l’instruction, les avocats ont admis que les documents étaient bel et bien pertinents.

[288]  Néanmoins, les documents non produits antérieurement étaient liés à un point litigieux dans l’affaire (la question de l’incitation) et ils comportaient des informations qui contredisaient la preuve que Western avait fournie lors de l’interrogatoire préalable, ainsi que les réponses données à des engagements pris. En particulier, les nouveaux documents montraient que Western avait fourni à ses clients des instructions écrites concernant le système VS.

[289]  Il a été demandé à M. Bruce de comparaître en vue d’être contre‑interrogé de nouveau sur son affidavit. J’ai lu la transcription de ce contre‑interrogatoire et je suis convaincu que les avocats de Western ont tenté irrégulièrement de brouiller la raison pour laquelle M. Bruce devait fournir d’autres éléments de preuve susceptibles d’aider la cause de M‑I.

[290]  De plus, comme il a été mentionné précédemment, il a été découvert au cours de l’instruction que certaines réponses à des engagements que M. Bruce avait données sur les mêmes questions étaient, selon M. Stanton, inexactes.

C.  Conclusion

[291]  Je suis convaincu que, pour des raisons d’ordre stratégique, Western ne s’est pas acquittée de son obligation de produire des documents pertinents qu’elle entendant utiliser. Elle n’a donné aucune explication qui aurait donné à penser le contraire.

[292]  Cependant, je ne suis pas convaincu que les circonstances justifient que l’on radie la défense de Western ou que le montant de dépens demandé soit justifié. Néanmoins, je crois qu’il est justifié d’imposer une sanction importante. Le défaut de Western de s’acquitter de son obligation de produire des documents pertinents a perturbé l’instruction et a obligé à tenir des interrogatoires préalables supplémentaires, de même qu’à fournir des observations écrites et orales au sujet de la requête. Je fixerai les dépens à 10 000 $, payables sans délai.

IV.  Conclusion et dispositif

[293]  Je conclus que Western a incité à contrefaire les revendications relatives à la méthode du brevet et qu’elle a directement contrefait les revendications relatives au système. Je conclus par ailleurs que Western n’est pas parvenue à établir que les revendications du brevet sont invalides (à l’exception des revendications 1, 11, 16 et 19). Western est redevable envers M‑I d’une indemnité et de dommages‑intérêts fondés sur une redevance de ||||| calculée à partir de la redevance de base convenue. Si jamais les parties ont besoin de l’aide de la Cour pour calculer l’indemnité, les dommages‑intérêts, les dépens ou les intérêts, une requête à cet effet sera entendue et réglée dans un délai raisonnable à compter de la date du présent jugement.


JUGEMENT dans le dossier T-1056-15

LA COUR ORDONNE :

  1. les défenderesses reconventionnelles, Western et FPM, ont contrefait ou incité à contrefaire les revendications 2, 4, 9, 10, 20, 21 et 22 du brevet 173;

  2. les revendications 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 12, 13, 14, 15, 17, 18, 20, 21, 22 et 23 du brevet 173 sont valides;

  3. il est interdit aux défenderesses reconventionnelles de contrefaire ou d’inciter à contrefaire les revendications du brevet 173;

  4. les défenderesses sont tenues de produire tous les documents en leur possession, sous leur autorité ou sous leur garde qui tombent sous le coup de l’injonction;

  5. les défenderesses sont tenues de payer une indemnité et des dommages‑intérêts fondés sur une redevance de |||||||| calculée à partir de la redevance de base convenue, plus les intérêts avant jugement, les intérêts après jugement et les taxes applicables;

  1. les défenderesses sont redevables envers M‑I du paiement de dépens;

  2. pour ce qui est de la requête fondée sur l’article 227 des Règles, Western doit payer sur‑le‑champ à M‑I des dépens de 10 000 $.

« James W. O’Reilly »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 16e jour de mars 2020

Sandra de Azevedo, LL.B.


Annexe A

Loi sur les brevets, LRC (1985), ch P-4

Loi sur les brevets, RSC, 1985, c P-4

Demandes de brevets

Application for Patents

Mémoire descriptif

Specification

27(3) Le mémoire descriptif doit

27(3) The specification of an invention must

[…]

c) s’il s’agit d’une machine, en expliquer clairement le principe et la meilleure manière dont son inventeur en a conçu l’application;

(c) in the case of a machine, explain the principle of the machine and the best mode in which the inventor has contemplated the application of that principle; and

Modification du mémoire descriptive et des dessins

Amendments to specifications and drawings

Limite

Restriction on amendments to specifications

38.2(2) Le mémoire descriptif ne peut être modifié pour décrire des éléments qui ne peuvent raisonnablement s’inférer de celui-ci ou des dessins faisant partie de la demande, sauf dans la mesure où il est mentionné dans le mémoire qu’il s’agit d’une invention ou découverte antérieure.

38.2(2) The specification may not be amended to describe matter not reasonably to be inferred from the specification or drawings as originally filed, except in so far as it is admitted in the specification that the matter is prior art with respect to the application.

Règles sur les brevets, DORS/96-423

Patent Rules, SOR/96-423

Modifications visant l’inclusion d’autres matières

Amendments to add matter

181. Il est interdit de modifier le mémoire descriptif ou les dessins faisant partie de la demande pour décrire ou ajouter des éléments qui ne peuvent raisonnablement s’en inférer.

181. No person shall amend the specification or drawings to describe or add matter not reasonably to be inferred from the specification or drawings as originally filed.


Annexe B

Sommaire des titres de compétence des experts

M_I

Robert Palmer

M. Robert Palmer est l’expert de M‑I en matière de validité et de contrefaçon. Il détient un certificat Scotec en génie mécanique et de la production. Il est consultant et fournit des services indépendants en matière de solutions et d’applications relatives au contrôle des solides émanant de champs pétrolifères. Il a travaillé à la conception, la mise au point, la fabrication, la réparation, l’entretien et la vente de matériel de forage.

Michael Tate, BBA (Finance), MSc (Administration industrielle)

M. Michael Tate est l’expert de M‑I en matière de dommages. Il est le vice‑président de Charles Rivers Associates et s’occupe de questions de stratégie, d’octroi de licences et d’évaluation en matière de propriété intellectuelle. Il a agi comme témoin expert et consultant pour un vaste éventail de sujets, dont des sujets liés à l’industrie pétrolière et gazière.

Western Oilfield Equipment Rentals et FP Marangoni

Mme Melanie Russell (BCom)

Mme Russell est l’experte en dommages de Western et de FP Marangoni. Elle a enseigné dans le domaine de l’évaluation d’entreprise ainsi que dans des matières connexes dans des universités et des organismes professionnels, et elle a publié divers articles sur le sujet. Elle donne un cours préparatoire à l’intention des étudiants qui passeront leur examen d’entrée national au titre d’expert en évaluation d’entreprise. Mme Russell a déjà témoigné à titre d’expert dans le domaine des évaluations d’entreprise et de la quantification des dommages.

M. Benard Murphy

M. Benard Murphy est l’un des experts de Western et de FP Marangoni en matière de validité et de contrefaçon. Il a suivi trois des années d’un programme de quatre ans en pneumatique et en fluidique. Il a aussi suivi des cours dans les domaines du génie des fluides de forage, du génie du forage, ainsi que des produits et des ventes. M. Murphy a conçu des cyclones, des tamis vibrants et d’autres appareils de traitement des solides.

M. Peter Matthews

M. Peter Matthews est l’un des experts de Western et de FP Marangoni en matière de validité et de contrefaçon. Il a eu abondamment recours à la technique des tamis dans le cadre d’activités de contrôle des solides et de traitement des fluides de forage. Il a occupé plusieurs postes au sein desquels il a été chargé d’activités relatives au traitement des fluides, au contrôle des solides et à la gestion des déchets.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1056-15

 

INTITULÉ :

WESTERN OILFIELD EQUIPMENT RENTALS LTD. c M-I LLC ET M-I LLC c FP MARANGONI INC.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Calgary (Alberta)

 

DATES DE L’AUDIENCE :

du 22 au 26 Octobre, du 29 OCTOBRe au 2 nOVEMBRe, du 5 au 9 nOVEMBRe et du 12 au 16 novembre 2018

 

JUGeMENT ET MOTIFS PUBLICS :

le juge O’REILLY

 

DATE DES MOTIFS :

LE 23 DÉcembrE 2019

 

COMPARUTIONS :

Kevin L LaRoche

Christine J Collard

Kirsten Crain

 

POUR LA demanderesse

(DÉFENDERESSE RECONVENTIONNELLE)

 

Patrick S Smith

R Nelson Godfrey

 

POUR LA DÉFENDERESSE

(DEMANDERESSE RECONVENTIONNELLE)

 

Patrick S Smith

R Nelson Godfrey

 

pOUR LA demanderesse RECONVENTIONNELLE

 

Taryn C Burnett

Sydni M Kind

 

POUR LA DÉFENDERESSE RECONVENTIONNELLE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Gowling Lafleur Henderson S.E.N.C.R.L., S.R.L.

Avocats

Calgary (Alberta)

 

POUR LA DEMANDERESSE

(DÉFENDERESSE RECONVENTIONNELLE)

 

Borden Ladner Gervais S.E.N.C.R.L., S.R.L.

Avocats

Ottawa (Ontario)

 

POUR LA DÉFENDERESSE

(DEMANDERESSE RECONVENTIONNELLE)

 

Borden Ladner Gervais S.E.N.C.R.L., S.R.L.

Avocats

Ottawa (Ontario)

Avocats

Calgary (Alberta)

 

pOUR LA DEMANDERESSE RECONVENTIONNELLE

 

Gowling Lafleur Henderson S.E.N.C.R.L., S.R.L.

Avocats

Calgary (Alberta)

 

POUR LA DÉFENDERESSE RECONVENTIONNELLE

 

 

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