Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

     IMM-2847-96

OTTAWA (ONTARIO), le mardi 27 mai 1997

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE ALLAN LUTFY

ENTRE :

     DWIGHT BROWN TOMLINSON,

     requérant,

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     intimé.

     O R D O N N A N C E

     À LA SUITE d'une demande de contrôle judiciaire entendue le 23 avril 1997, à Toronto (Ontario);

     LA COUR STATUE QUE :

     La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

     " Allan Lutfy "

                                     Juge

Traduction certifiée conforme :         
                             F. Blais, LL.L.

     IMM-2847-96

ENTRE :

     DWIGHT BROWN TOMLINSON,

     requérant,

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     intimé.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE LUTFY

     Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire de la décision datée du 12 mars 1996 rendue au nom du directeur, Détentions et renvois, de Citoyenneté et Immigration Canada. Cette décision, transmise par lettre à Mme Norma Brown, la mère du requérant, indiquait en partie ce qui suit :

     [TRADUCTION]         
     Comme suite à notre lettre, nous vous informons que la caution en espèces de 2 000 $ a été déclarée confisquée, de même que la caution d'exécution de 3 000 $.         
     M. Dwight Tomlinson a omis de se présenter aux services de l'immigration du Canada pour fins de renvoi le 5 décembre 1995, conformément aux instructions accompagnant les cautions.         
     Veuillez établir votre chèque certifié ou mandat à l'ordre du " Receveur général du Canada ", en y indiquant le numéro de référence des cautions, ou le numéro de dossier de l'Immigration cité.         

Mme Brown est la personne qui avait versé la caution en espèces de 2 000 $ et la caution d'exécution de 3 000 $ en vue d'obtenir la libération de son fils, mis en détention par l'Immigration, le 6 décembre 1994.

     Les faits pertinents sont résumés dans l'exposé des points d'argument de l'intimé :

     [TRADUCTION]         
     8.      Au moment de sa mise en liberté en novembre 1994, après avoir purgé la majeure partie de la peine d'emprisonnement d'un an qui lui avait été infligée pour voies de fait causant des lésions corporelles, le requérant a été mis en détention par l'Immigration. Le 16 novembre 1994, un arbitre de l'Immigration a ordonné que le requérant soit mis en liberté à la condition que : a) une personne appropriée dépose une caution d'exécution de 3 000 $, et b) la mère du requérant effectue un dépôt de garantie en espèces d'un montant de 2 000 $. Les deux conditions mises à l'ordonnance de mise en liberté de l'arbitre étaient les suivantes : a) que, conformément aux instructions écrites, le requérant se présente en vue de la prise de mesures de renvoi, et b) qu'avant de changer d'adresse domiciliaire, il en fasse part en personne aux agents de l'Immigration.         
     9.      En accord avec l'ordonnance de mise en liberté de l'arbitre, la mère du requérant a déposé une caution d'exécution de 3 000 $ le 6 décembre 1994. La caution était également assortie des conditions suivantes : a) que le requérant se présente, selon les instructions d'un agent d'immigration, en vue de la prise de mesures de renvoi, et b) que le requérant " obtienne un accusé de réception écrit que chaque changement d'adresse domiciliaire au Canada a été enregistré au préalable auprès d'un agent de l'Immigration ".         
     10.      Toujours en accord avec l'ordonnance de mise en liberté de l'arbitre, la mère du requérant a effectué un dépôt de garantie de 2 000 $ le 6 décembre 1994. Ce dépôt était assorti des mêmes conditions que la caution d'exécution, relativement à l'obligation de se présenter en vue de la prise de mesures de renvoi, ainsi qu'à l'obtention d'une preuve écrite d'un agent d'immigration qu'un changement d'adresse avait été dûment enregistré auprès du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration.         
     11.      Sur la foi du dépôt en espèces et de la caution d'exécution susmentionnés, le requérant, gardé en détention par l'Immigration, a été mis en liberté.         
     12.      Le requérant a été informé en février 1996 (sic) que le ministre examinait s'il constituait ou non un " danger pour le public " aux termes du par. 70(5) de la Loi sur l'immigration . Avec l'aide d'un avocat, le requérant a répondu en fournissant des preuves et des arguments à l'appui de sa position qu'il ne constituait pas un tel danger. Le ministre a statué que le requérant était un " danger pour le public " le 2 novembre 1995. Le requérant a demandé l'autorisation de contester cette décision devant la présente Cour, mais cela a été refusé par la voie d'une ordonnance du juge Rothstein datée du 6 mars 1996.         
     [...]         
     17.      Le 21 novembre 1995, un agent d'immigration a envoyé au requérant une lettre de " convocation ", le 5 décembre 1995, à une entrevue à la Section des détentions et des renvois du bureau d'immigration de Mississauga, de manière à pouvoir régler les détails relatifs à son expulsion. Cette lettre a été envoyée à l'adresse la plus récente du requérant qui figurait dans les dossiers informatiques du Ministère, c'est-à-dire : 5995, Glen Erin Drive, Unit #74. La lettre informait le requérant que s'il ne se présentait pas à l'entrevue, un mandat d'arrestation serait lancé à son endroit. L'original de cette lettre n'a pas été renvoyé au bureau d'immigration de Mississauga avec la mention " non livrable ", " adresse inconnue " ou " retour à l'expéditeur ".         
     18.      Le requérant ne s'est pas présenté à l'entrevue fixée au 5 décembre 1995, en vue de régler les détails de son expulsion du Canada. Un mandat d'arrestation a été lancé le lendemain, soit le 6 décembre 1995.         


     Le requérant dit ne pas avoir reçu la lettre de convocation datée du 21 novembre 1995 dont il est question au paragraphe 17 de l'exposé des points d'argument de l'intimé, à la suite de quoi il ne s'est pas présenté à l'entrevue fixée au 5 décembre 1995 et un mandat d'arrestation a été lancé contre lui le lendemain. S'il est vrai que le requérant n'a pas reçu la lettre de convocation, c'est à cause d'un changement d'adresse domiciliaire. Le dossier ne comporte cependant aucune preuve que le requérant [TRADUCTION] " ... avant de changer d'adresse domiciliaire... en [avait fait] part en personne aux agents de l'Immigration " ou qu'il avait obtenu [TRADUCTION] " ... un accusé de réception écrit que chaque changement d'adresse domiciliaire au Canada [avait] été enregistré au préalable auprès d'un agent de l'Immigration à la Section des détentions et renvois... " au sens des engagements pris en vue de garantir l'ordonnance relative à sa mise en liberté.

     La raison pour laquelle on oblige une personne détenue par l'Immigration qui est mise en liberté à obtenir un accusé de réception écrit de l'agent d'immigration au sujet du changement de son lieu de résidence est évidente. Sans cela, le genre de confusion qui est apparu dans la présente affaire au moment d'essayer de déterminer si la lettre de convocation avait été envoyée ou non à la bonne adresse deviendrait la règle, et non l'exception. Dans les circonstances, j'accepte les observations de l'avocat de l'intimé selon lesquelles le fait que le requérant ait omis de s'assurer que les fonctionnaires du Ministère avaient été mis au courant de sa nouvelle adresse en obtenant d'eux un accusé de réception écrit constitue un manquement à un engagement lié à la caution.

     Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire de la décision du 12 mars 1996 concernant la caution en espèces et la caution d'exécution doit être rejetée. Dans les circonstances, il n'est pas nécessaire que j'examine la question que Mme Brown elle-même n'était pas une partie requérante en l'espèce.

     Deux questions relatives à l'expulsion du requérant le 28 février 1996 méritent d'être examinées et commentées.

     Le requérant a été arrêté, au début de janvier 1996 semble-t-il, par le corps de police régional de Peel. Cette arrestation était en rapport avec des accusations criminelles liées à des voies de fait causant des lésions corporelles et des menaces de mort. Ces accusations avaient été portées après que le ministre eut exprimé l'avis que le requérant constituait un danger pour le public. Plus tard en janvier 1996, lesdites accusations ont été soit retirées soit rejetées; aussitôt après, le requérant a été mis en détention par l'Immigration.

     Aux termes du paragraphe 103(6) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2, une audience de révision des motifs de la détention du requérant a été fixée au 26 février 1996. Comme il était impossible aux autorités de s'arranger pour que le requérant se présente ce jour-là, l'audience a été reportée au 28 février suivant. Dans l'intervalle, le requérant a été amené par le personnel de la Section des détentions et renvois en vue de son vol d'expulsion à destination de la Jamaïque, à 10 h 00 de l'avant-midi le 28 février 1996. Il semblerait que le fait que l'on renvoie le requérant avant la tenue de l'audience de révision des motifs de sa détention était imputable à un manque de communications entre les fonctionnaires au sujet du report de la date de l'audience.

     Il ressort aussi du dossier qu'un appel antérieur auprès de la Section d'appel de l'immigration n'a pas été réglé avant le 13 mars 1996. Selon la décision récente du juge Gibson dans l'arrêt Solis c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, IMM-9-97 et IMM-4898-96, 19 mars 1997, le sursis à l'exécution d'une mesure de renvoi que prévoit le paragraphe 49(1) de la Loi aurait encore été en vigueur à la date de l'expulsion du requérant, soit le 28 février 1996. À l'époque où le requérant a été expulsé, la décision Solis n'avait pas encore été rendue.

     Ces circonstances soulèvent des préoccupations qui, du fait de la décision précise qui fait l'objet d'un contrôle judiciaire, ne s'appliquent pas à la présente demande. Quoi qu'il en soit, les propos tenus par le juge Rothstein dans la décision qu'il a récemment rendue dans l'affaire Cuskic c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, IMM-29-97, 7 mai 1997, s'appliqueraient tout autant à toute suggestion de retour au Canada du requérant en l'espèce :

     Même si la Cour ne peut tolérer que la ministre ait contrevenu à l'article 50 en l'espèce, il ne serait pas logique de l'obliger à faire revenir le requérant pour qu'il continue à se conformer à l'ordonnance de probation rendue contre lui jusqu'à l'expiration de celle-ci et soit ensuite à nouveau expulsé. Ce résultat aurait pour conséquence illogique de placer les contrevenants dans une situation plus avantageuse que les personnes expulsées qui n'ont commis aucune infraction et qui n'étaient assujetties à aucune ordonnance d'un tribunal. Enfin, il n'y a aucun fait probant en l'espèce qui justifie une directive de cette nature.         

     Pour ces motifs, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée. Dans les circonstances, il ne convient pas de certifier une question sérieuse à trancher.

     " Allan Lutfy

                                 Juge

Ottawa (Ontario)

Le 27 mai 1997

Traduction certifiée conforme :     
                         F. Blais, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

NE DU GREFFE :              IMM-2847-96
INTITULÉ DE LA CAUSE :      Dwight Brown Tomlinson c. M.C.I.
LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE :          23 avril 1997

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR MONSIEUR LE JUGE LUTFY

EN DATE DU :              27 mai 1997

ONT COMPARU :

Me Stuart Beverly Scott                  pour le requérant

Me Marie-Louise Wcislo                  pour l'intimé

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Stuart Beverly Scott                  pour le requérant

Kingston (Ontario)

Me George Thomson                      pour l'intimé

Sous-procureur général du Canada


 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.