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Date : 20191218

Dossier : T-1812-18

Référence : 2019 CF 1641

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 18 décembre 2019

En présence de madame la juge McVeigh

ENTRE :

WAYNE S. CUSITAR

appelant

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Introduction

[1]  La Cour est saisie d’un appel prévu par la loi intenté en vertu du paragraphe 48.5(1) de la Loi sur les brevets (la Loi) relativement au constat de réexamen dans lequel les revendications du brevet canadien no 2,876,770 (le brevet 770) ont été rejetées, du fait qu’elles ont été jugées évidentes et, par conséquent, non brevetables.

II.  Contexte

A.  Le brevet 770

[2]  L’appelant est propriétaire du brevet 770; la demande relative à ce brevet a été déposée le 5 janvier 2015, et le brevet a été délivré le 8 novembre 2016. L’appelant a une formation en génie, et son brevet établit un processus pour une [traduction« méthode améliorée d’exploitation et de transport des sables bitumineux » dans le nord de l’Alberta. Selon le brevet, la méthode permettra d’obtenir un meilleur rendement, de réduire les émissions de gaz à effet de serre et d’améliorer le schéma de traitement par rapport aux méthodes antérieures.

[3]  Le processus de l’appelant est censé avoir de nombreux avantages d’efficacité et de flexibilité si on le compare aux processus d’extraction des sables bitumineux conventionnels qui ont dominé l’industrie au cours des trois dernières décennies. L’appelant donne comme exemple que l’industrie utilise typiquement [traduction« la même séquence d’équipement » pour chaque chaîne de traitement, alors que sa méthode fait appel à des pièces interchangeables et à la redondance. De plus, il affirme que son processus emporte le concassage de matériaux dans la mine, l’utilisation de moyens de transport au front de taille et le transport des matériaux par camion, lesquels sont ensuite acheminés pour traitement ultérieur.

[4]  Le processus simplifié du brevet 770 dans la revendication 1 a été décrit ainsi dans une décision de réexamen préliminaire :

[traduction]

B.  Le processus relatif à la demande de brevet 770

[5]  Des discussions prolongées ont eu lieu entre l’appelant et l’examinateur du Bureau des brevets pendant près de deux ans avant la délivrance du brevet 770.

[6]  Le 26 juin 2015, l’examinateur a soulevé la question concernant l’évidence dans la première lettre de demande. Plus particulièrement, l’examinateur se préoccupait du fait que le brevet 770 était évident, compte tenu du brevet n2,567,644 (délivré en 2007), qui est appelé « référence D1 » dans la première demande et dans les décisions subséquentes. D’autres références, telles que D2 et D3, ne désignent pas les mêmes documents d’une décision à l’autre, mais la référence D1 désigne toujours le même document.

[7]  La référence D1 décrit une méthode d’exploitation et de transport des sables bitumineux à l’aide de convoyeurs à bande. L’examinateur a avancé que le brevet de l’appelant recoupait la référence D1, à l’exception de la substitution des convoyeurs à bande par des camions de transport, notant que [traduction« les camions de transport sont notoirement connus dans le secteur minier pour être utilisés au transport de tous genres de matières... la simple substitution d’un parc de camions de transport aux convoyeurs dans la référence D1 ne peut être considérée comme étant inventive ». L’examinateur a aussi examiné trois autres éléments de méthodes antérieures qui présentaient des caractéristiques similaires. Enfin, l’examinateur a demandé à l’appelant de modifier un libellé qui était vague.

[8]  L’appelant a présenté des commentaires; ces commentaires, qui sont datés du 3 juillet 2015 et qui ont été reçus le 24 août 2015, ont pour objet d’établir une distinction entre sa demande et les quatre références qui ont été examinées par l’examinateur, dont D1. Pour les besoins du présent appel, l’aspect le plus important des commentaires est la façon dont l’appelant a abordé les préoccupations concernant l’évidence dans les trois dernières pages.

[9]  L’appelant a répondu que les brevets antérieurs, comme le brevet D1, n’utilisaient pas de camions au lieu de convoyeurs pour certaines étapes, parce que [traduction« les rôles contributifs novateurs » du « découplage », de la « redondance », de la « capacité tampon » et de la « simplification du schéma » n’étaient pas compris. Il a qualifié ces éléments [traduction« d’avantages composés ». Il a ensuite expliqué que l’équipement des sables bitumineux tombe souvent en panne à cause du couplage en série, ce qui signifie que les systèmes sont souvent indisponibles. Il a soutenu que sa méthode permettrait d’atténuer l’effet négatif de la défaillance d’une machine, et aussi de gagner en redondance et en capacité de stockage tampon. En effet, son système consiste à jumeler n’importe quel concasseur avec n’importe quelle excavatrice, et le concasseur peut ensuite verser n’importe quel sable bitumineux concassé dans n’importe quel camion de transport pour le transporter vers n’importe quelle usine de réception. Il dit qu’il y a plus de changements que la simple utilisation de camions : le brevet porte aussi sur la capacité tampon (la capacité de retenir le sable bitumineux à certains endroits pour éviter d’interrompre le flux du sable), disant que le placement du [traduction« réservoir tampon » dans un mur de terre stabilisé mécaniquement est différent des méthodes antérieures et améliorera la disponibilité du système.

[10]  L’examinateur a semblé satisfait de ces commentaires. Le 22 octobre 2015, l’examinateur a déclaré qu’il [traduction« accepte les arguments du demandeur en ce qui concerne la redondance et l’efficacité » du système. Pourtant, il avait encore plusieurs préoccupations concernant la formulation vague. Sur la dernière page, l’examinateur indique :

[traduction]
En ce qui concerne le dossier d’antériorité, le demandeur a fait valoir qu’il y a un effet de synergie à assurer la redondance des chaînes d’exploitation des sables bitumineux, lequel est rendu possible par l’utilisation de camions de transport et pour le transport des sables bitumineux concassés primaires depuis les moyens mobiles de concassage primaire jusqu’à l’installation de réception et de préparation des sables bitumineux.
L’examinateur en convient, mais l’inventivité du concept n’est pas clairement expliquée dans les présentes revendications... La matière des revendications doit être clarifiée afin de préciser le concept inventif qui est visé par la demande de protection et qui surpasse les méthodes antérieures.

[11]  Ce passage est important pour le présent appel, car l’appelant soutient que l’examinateur a accepté son invention comme étant inventive et non évidente. Le 19 novembre 2015, l’appelant a répondu aux préoccupations de l’examinateur au sujet de l’ambiguïté. Trois autres rapports ont été présentés au cours de l’année suivante, mais ces communications ne portent pas sur la question de l’évidence.

[12]  Environ deux semaines avant la délivrance du brevet 770, Bennett Jones LLP a présenté quatre documents relatifs à l’antériorité aux fins d’examen par l’examinateur. Selon ces observations, le brevet 770 était évident dans son intégralité, parce qu’il [traduction] « est bien connu depuis longtemps dans l’industrie de l’exploitation des sables bitumineux (et dans d’autres industries minières) que les convoyeurs et les camions peuvent être utilisés de manière interchangeable pour transporter les minerais exploités ». Comme l’appelant le fait remarquer, toute personne peut présenter des documents d’antériorité à l’examinateur et celui-ci n’est pas tenu de répondre à ces observations. Comme il en avait le droit, l’examinateur n’a pas répondu à ces commentaires.

[13]  Le 8 novembre 2016, le brevet 770 a été délivré à l’appelant. Il est toujours le propriétaire du brevet 770.

C.  Le processus de réexamen

[14]  Le 17 janvier 2017, Bennet Jones a demandé un réexamen du brevet 770 en vertu de l’article 48.1 de la Loi. (Voir l’annexe A pour les dispositions législatives pertinentes.) Cette demande reprenait les observations relatives à l’antériorité qui avait été présentées vers la fin du processus relatif à la demande de brevet. Bennett Jones a présenté quatre autres documents, ainsi que les quatre mêmes documents présentés au premier examinateur, pour un total de huit documents aux fins d’examen par le réexaminateur.

[15]  Ensuite, le commissaire aux brevets a constitué un conseil de réexamen de trois conseillers (le Conseil) en vue de réexaminer le brevet. Le Conseil a d’abord examiné la question préliminaire de savoir si un nouveau point de fond vis-à-vis de la brevetabilité (PFVB) avait été soulevé dans la demande de réexamen. Un PFVB doit être soulevé pour déclencher un réexamen complet au titre de l’article 48.2 de la Loi.

[16]  Le 25 mai 2017, le Conseil a informé l’appelant que Bennett Jones avait soulevé un PFVB au sujet de l’évidence. Le Conseil a cité le fait que Bennett Jones avait porté à son attention neuf documents relatifs à l’antériorité, dont D1, mais qu’il s’agissait du même D1 dont disposait le premier examinateur. Ainsi, sur ces « neuf » nouvelles références sur les méthodes antérieures, seulement huit ont été présentées par Bennett Jones. Les quatre qui ont été expressément invoquées par le Conseil étaient les suivantes : brevet CA 2,567,644 (le même D1 examiné au cours du processus relatif à la demande de brevet), CA 2,733,640 (D2), CA 1,315,251 (D3) et une demande présentée par Sandvik Mining (D4). Ces quatre mêmes références ont été invoquées dans la décision ultérieure de rejeter le brevet.

[17]  Après avoir examiné le dossier d’antériorité, le Conseil a conclu qu’il n’existait aucun PFVB lié à la nouveauté, mais qu’il existait un PFVB lié à l’évidence. Cette conclusion selon laquelle il existait un PFVB a déclenché un réexamen complet.

[18]  L’appelant a ensuite présenté d’autres observations écrites au Conseil. Il a insisté sur le fait que son invention ne concernait pas seulement l’équipement, mais qu’il s’agissait plutôt d’un schéma de traitement visant à accroître la fiabilité, la disponibilité, la productivité, et à rationaliser les coûts. Il soutient que son invention consiste en davantage qu’une simple utilisation des composantes de l’équipement faisant partie des méthodes antérieures, et que l’accent devrait être mis sur le processus et sur la façon dont l’équipement est intégré. Il a désigné cela tout au long de ses observations écrites comme un [traduction] « brevet de méthode de processus intégrés » et il a contesté la conclusion selon laquelle il existait un point de fond vis‑à‑vis de l’évidence. Il a indiqué au Conseil que la première décision concernant le PFVB ne tenait pas compte des idées de découplage, de redondances, de capacité tampon et de disponibilité de l’équipement, lesquelles distinguent son brevet des méthodes antérieures.

[19]  L’appelant a expliqué que le « découplage » est défini dans son brevet comme étant [traduction« la rupture des liens entre les éléments de la chaîne de traitement connectés en série et un à un ». La « redondance » est définie comme l’utilisation de [traduction] « multiples unités d’équipement technologique identique ou alternatif fonctionnant simultanément dans des rapports parallèles indépendants, mais exécutant la même fonction de traitement avec un effet cumulatif progressif ».

D.  L’opinion préliminaire

[20]  Le 18 janvier 2018, le Conseil a répondu en indiquant que, selon son opinion préliminaire, le brevet 770 était évident. Le Conseil a jugé que le concept inventif était la méthode intégrée du schéma de traitement, mais il a soutenu que le concept inventif des revendications 1 à 11 était simplement l’utilisation d’un convoyeur et ensuite d’un camion minier. À la page 4, le Conseil a indiqué que le terme « découplage » n’ajoutait rien d’inventif au concept. Le Conseil a examiné les observations écrites de l’appelant et a conclu que chacune des étapes faisait déjà partie des méthodes antérieures ou aurait été évidente aux yeux de la personne moyennement versée dans l’art (la PMVA). Cette opinion préliminaire indiquait également qu’une partialité ou un préjudice dans l’industrie minière pourrait militer en faveur de la non-évidence, mais aucun élément de preuve en ce sens n’avait été déposé relativement à ses méthodes concernant les sables bitumineux.

[21]  L’appelant a eu la possibilité de répondre à cette opinion préliminaire. Dans sa réponse du 24 mars 2018, il a contesté la façon dont le Conseil a réduit au minimum l’importance des [traduction] « limites de l’installation » selon lesquelles l’exploitation minière et le concassage sont traités par deux entités différentes. Il indique que ce problème lié aux limites de l’installation constitue une pratique systémique de l’industrie plutôt que simplement une tendance de l’industrie. Il a affirmé que le déplacement des configurations mobiles – tel qu’il est indiqué dans son brevet – contribuerait à simplifier la procédure. L’appelant a également fait valoir que le brevet D1 n’est ni fiable ni pratique. En outre, il a réitéré ses arguments sur le découplage et la redondance, en citant plusieurs scénarios possibles de panne figurant dans l’état de la technique existant et que son brevet permet de régler.

[22]  Il a ensuite comparu en personne et a fait une présentation au Conseil le 29 mars 2018. Il a précisé une fois de plus les avantages de son invention.

E.  La décision lors du réexamen

[23]  La décision lors du réexamen, datée du 13 juillet 2018, a eu pour effet d’annuler les 15 revendications du brevet 770. Le Conseil a conclu que l’objet était évident, au regard de la référence D1, du brevet no 2,733,640, soulevé pour la première fois (et délivré en 2010) et qui y est désigné « référence D2 », et des connaissances générales courantes d’une PMVA.

[24]  La décision fait état des similitudes étroites avec le brevet marqué D1 de 2007. La référence D1 comprenait, comme étape du processus de traitement des sables bitumineux, [traduction« le transport des sables bitumineux... vers un réservoir tampon... situé dans une installation de préparation des boues ». Le brevet 770 comprend [traduction« le transport des sables bitumineux primaires concassés à l’aide de camions de transport minier vers une installation de préparation des boues ». Les 7 à 8 autres étapes de chaque processus d’extraction du pétrole sont généralement similaires. Le Conseil fait remarquer que la référence D1 mentionne qu’il est bien connu que les camions de transport sont utilisés pour transporter les matières.

[25]  Entre‑temps, la référence D2 mentionne expressément les camions de transport de matériaux concassés. Les références D3 et D4 portent sur la façon d’accroître l’efficacité, y compris le fait que la D4 tient compte à la fois des camions et des convoyeurs, selon les facteurs environnementaux et d’autres facteurs. Le Conseil a conclu, après application du critère dégagé dans Sanofi (voir ci‑dessous), que le brevet était évident à la lumière du dossier d’antériorité et des connaissances générales courantes d’une PMVA.

[26]  La décision de réexamen conclut par un constat rejetant le brevet 770. Ce rejet est suspendu en attendant l’issue du présent appel, conformément au paragraphe 48.4(3) de la Loi.

F.  L’appel interjeté à l’égard du constat de réexamen

[27]  L’appelant demande :

[28]  En mars 2019, la protonotaire Tabib a rejeté la requête de l’appelant par laquelle ce dernier voulait qu’on lui accorde la possibilité de présenter, dans le cadre de l’appel, de nouveaux éléments de preuve sur les limites de l’installation. La protonotaire Tabib a conclu que les éléments de preuve auraient pu être présentés au Conseil avec une diligence raisonnable, puisque l’appelant avait été informé dans l’opinion préliminaire du fait que le Conseil n’avait aucune preuve d’une pratique systémique de l’industrie concernant les limites de l’installation. Cette décision de la protonotaire Tabib n’a pas été portée en appel.

III.  Les questions en litige

[29]  Les questions en litige sont les suivantes :

A.  La décision de procéder à un réexamen du brevet 770 était‑elle déraisonnable?

B.  La conclusion du Conseil selon laquelle le brevet 770 était évident était‑elle déraisonnable?

IV.  La norme de contrôle

[30]  La norme de contrôle est celle de la décision raisonnable (Newco Tank Corp. c Canada (Procureur général), 2015 CAF 47, au par. 13).

V.  Analyse

A.  La décision de procéder à un réexamen du brevet 770 était‑elle déraisonnable?

1)  Dans le cadre d’un appel interjeté en vertu de l’article 48.5, la Cour peut‑elle examiner la conclusion initiale du Conseil selon laquelle il existait un PFVB?

[31]  Comme l’appelant l’affirme à juste titre, s’il n’existe aucun nouveau point de fond vis‑à‑vis de la brevetabilité, le réexamen aurait pris fin à ce moment-là, conformément au paragraphe 48.2(3) de la Loi.

[32]  Toutefois, cela n’est pas important en l’espèce, parce que le droit d’appel prévu par la loi au paragraphe 48.5(1) se limite au « constat » (c’est‑à‑dire, la décision finale) plutôt qu’à la conclusion quant à la question préliminaire figurant dans la lettre du 25 mai 2017 selon laquelle il existait un PFVB.

[33]  Un examen approfondi des articles 48.1 à 48.5 de la Loi permet de constater les lacunes dans la tentative de l’appelant d’interjeter appel du résultat concernant la question préliminaire quant à l’existence d’un PFVB déclenche la prochaine étape du réexamen. Selon le paragraphe 48.2(2), « [d]ans les trois mois suivant sa constitution, le conseil décide si la demande soulève un nouveau point de fond vis‑à‑vis de la brevetabilité des revendications du brevet en cause ». Si le Conseil conclut qu’il n’existe aucun PFVB, le réexamen prend alors fin, cette décision est définitive et il n’existe aucun droit d’appel, conformément au paragraphe 48.2(3). S’il existe un PFVB, le Conseil « expédie un avis motivé de la décision au titulaire de brevet », conformément au paragraphe 48.2(4). La Loi ne mentionne pas qu’il y a un droit d’appel lorsqu’il existe un PFVB.

[34]  À l’issue de la procédure de réexamen, le Conseil délivre un constat en vertu du paragraphe 48.4(1) qui porte rejet, confirmation ou modification du brevet. Par la suite, le paragraphe 48.5(1) précise que « [l]e titulaire du brevet peut saisir la Cour fédérale d’un appel portant sur le constat de décision visé au paragraphe 48.4(1) » [non souligné dans l’original].

[35]  Le problème pour l’appelant est que la conclusion selon laquelle il existait un PFVB n’est pas un « constat de décision ». Le Conseil disposait de trois avenues en ce qui a trait à son constat de réexamen : il pourrait rejeter, confirmer ou modifier le brevet 770. Le constat indique que [traduction] « les revendications 1 à 15 [...] sont non brevetables et sont rejetées du brevet susmentionné ». Ce constat de décision de rejeter le brevet 770 peut faire l’objet d’un appel en vertu du paragraphe 48.5(1), ce qui n’est pas le cas des lettres envoyées au cours des premières étapes ni de la question préliminaire concernant le PFVB. Si le législateur avait eu l’intention d’offrir une voie d’appel concernant la question préliminaire, il l’aurait fait ou il aurait utilisé un libellé plus général au paragraphe 48.5(1). Au contraire, le paragraphe 48.5(1) n’autorise que les appels visant le « constat » de décision.

[36]  La raison pour laquelle l’article 48 de la Loi ne prévoit pas un droit d’appel à l’égard des décisions concernant le PFVB réside peut-être dans l’objectif précisé à l’article 23.02 du Recueil des pratiques du Bureau des brevets selon lequel le réexamen doit être « une procédure relativement sommaire et une solution de rechange peu coûteuse aux procédures d’invalidation devant les tribunaux ». Si l’appelant avait pu interjeter appel de la décision concernant le PFVB, cet appel aurait alors retardé davantage la procédure de réexamen de 18 mois pendant que les parties attendaient une décision de la Cour.

[37]  De plus, le titulaire du brevet n’est pas une partie au processus concernant le PFVB et ne devient une partie qu’après la décision à cet égard, moment auquel la personne ayant présenté la demande cesse d’être une partie. Il serait donc logique que le titulaire de brevet n’ait pas un droit d’appel, étant donné qu’il n’était même pas une partie.

[38]  Cette thèse est conforme au point de vue exprimé dans Novozymes A/S c Canada (Commissaire aux brevets), 2007 CAF 129, au par. 7, qui précise que le réexamen comporte « deux étapes ». L’appelant tente d’interjeter appel de la première étape, plus d’un an après qu’elle eut été tranchée. De même, dans Prenbec Equipment Inc. c Timberblade Inc., 2010 CF 23, au par. 36, le juge de Montigny a déclaré que, « [s]i le breveté n’est pas satisfait de la décision définitive du conseil de réexamen, il peut interjeter appel de la décision devant la Cour; entre‑temps, l’effet de la décision du conseil sera suspendu jusqu’au jugement définitif de la Cour (voir l’article 48.5) » [non souligné dans l’original]. La conclusion concernant le PFVB n’est pas la décision finale, c’est une décision préliminaire.

[39]  Subsidiairement, même si la première décision préliminaire concernant le PFVB pouvait faire l’objet d’un appel, le délai de trois mois prévu pour interjeter appel aux termes du paragraphe 48.5(2) est expiré.

[40]  Compte tenu de ma conclusion concernant la première question, je n’ai pas à trancher la question de savoir si la décision préliminaire, selon laquelle il existait un nouveau point de fond vis‑à‑vis de la brevetabilité était raisonnable, parce que cette question ne relève pas de la portée de la voie d’appel prévue à l’article 48.5.

B.  La conclusion du Conseil selon laquelle le brevet 770 était évident était‑elle déraisonnable?

[41]  L’appelant conteste la façon avec laquelle les étapes 1b) à 4 du critère de l’évidence ont été appliquées. Il indique que la conclusion concernant le concept inventif du brevet 770 était déraisonnable, car son brevet ne se limitait pas à l’utilisation de camions, mais qu’il traitait plutôt de la redondance, du découplage, de la capacité tampon, de la réduction des coûts, de l’amélioration de la disponibilité de l’équipement et de la réduction des émissions de gaz à effet de serre (collectivement, ce sont les effets de synergie). Il fait valoir que le concept inventif est la façon dont l’équipement figurant dans son schéma de traitement interagit pour générer des avantages, en soulignant que la simplicité n’annule pas l’invention.

[42]  Il précise ensuite que la différence entre le brevet 770 et l’antériorité a été décidée de manière déraisonnable. Par conséquent, l’appelant soutient que la conclusion concernant le quatrième et dernier élément du critère – la question de savoir si la différence entre le brevet 770 et les méthodes antérieures était une différence évidente – était également déraisonnable. L’appelant a fait remarquer que, pendant le processus de demande de brevet, l’examinateur a finalement accepté le fait qu’il existait des effets de synergie et que le brevet n’était pas évident, ce qui étaye son point de vue selon lequel la décision de réexamen était déraisonnable. L’appelant affirme que les questions concernant l’évidence sont [traduction« essentiellement identiques » aux questions soulevées dans la décision concernant le PFVB en mai 2017, ainsi qu’aux objections initiales formulées par l’examinateur pendant le processus de demande de brevet en 2015. Il soutient en outre que, puisque les motifs ne tiennent pas compte de la décision antérieure de l’examinateur sur la question, la décision est encore plus déraisonnable.

(1) Le critère de l’évidence

[43]  Selon l’article 28.3 de la Loi, le brevet 770 « ne doit pas, à la date de la revendication, être évident pour une personne versée dans l’art ou la science dont relève l’objet », après avoir examiné les renseignements pertinents. Les parties s’entendent quant au critère d’évidence à quatre volets, tel qu’il est précisé dans Apotex Inc. c Sanofi‑Synthelabo Canada Inc., 2008 CSC 61, au paragraphe 67 (Sanofi) :

[traduction]
(1) a) Identifier la « personne versée dans l’art »
;

b) Déterminer les connaissances générales courantes pertinentes de cette personne;

(2) Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation;

(3) Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui sous‑tend la revendication ou son interprétation;

(4) Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituent‑elles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotent‑elles quelque inventivité?

[44]  L’évidence est « un critère auquel il est très difficile de satisfaire » (Beloi Canada Ltée c Valmet Oy (1986), 8 CPR (3d) 289, à la page 294 (CAF)). Cependant, puisque la norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable, il convient de faire preuve de déférence envers la décision du Conseil (Newco Tank Corp. c Canada (Procureur général), 2015 CAF 47).

(2) L’application du critère de l’arrêt Sanofi

Étape 1 du critère de l’arrêt Sanofi : Les choix du Conseil concernant la PMVA et les connaissances générales courantes de cette personne étaient raisonnables

[45]  Les parties n’ont soulevé aucune question au sujet de l’étape 1a). La PMVA a été désignée comme étant [traduction] « les experts en exploitation minière, les ingénieurs en exploitation à ciel ouvert et les ingénieurs en planification des mines ».

[46]  L’étape 1b) consiste à déterminer les connaissances générales courantes pertinentes. Combinées, les connaissances générales courantes deviennent importantes pour les étapes 3 et 4 du critère de l’arrêt Sanofi.

[47]  Les connaissances générales courantes peuvent inclure des renseignements tirés des méthodes antérieures et les deux « ne s’excluent pas mutuellement » (Corning Cable Systems LLC c Canada (Procureur général), 2019 CF 1065, au par. 69). En plus de certaines méthodes antérieures, les connaissances générales courantes comprennent également « ce qu’on peut légitimement s’attendre à ce qu’elle sache et soit capable de trouver » (Janssen‑Ortho Inc. c Novopharm Inc., 2007 CAF 217, au par. 25). Il convient de noter qu’aux pages 4 et 5 de la décision, le Conseil a examiné le dossier d’antériorité et a conclu que les connaissances générales courantes comprennent, entre autres :

[traduction]

  « L’utilisation de concasseurs mobiles pour broyer les matériaux à la surface de la mine »

  « L’utilisation combinée de convoyeurs et de camions de transport dans les méthodes d’exploitation minière » (D4)

  « L’utilisation de camions de transport pour déplacer les matières du front de taille à une installation de préparation des boues » (basé sur D1)

  « L’optimisation de la capacité de chargement d’un système de manutention de matières en vrac pour assurer une utilisation efficace des ressources » (D3)

  « L’utilisation de réservoirs tampons... »

[48]  Le Conseil a appuyé ces conclusions concernant les connaissances générales courantes en faisant référence à des parties bien précises du dossier d’antériorité. Je reconnais que la description des connaissances générales courantes faite par le Conseil était raisonnable.

[49]  Le Conseil a conclu qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve pour étayer l’argument de l’appelant au sujet des limites de l’installation qui empêchaient l’industrie d’envisager l’utilisation du concassage à ciel ouvert afin de créer un processus plus efficace.

[50]  J’estime que cela est raisonnable, parce que l’appelant savait qu’il y avait des lacunes dans la preuve au sujet des limites en matière d’installation qui empêchent l’industrie de progresser, mais il n’a pas présenté ces éléments de preuve devant le Conseil, et sa demande subséquente en vue de présenter de nouveaux éléments de preuve a été rejetée par la protonotaire. Par conséquent, aucun poids ne devrait être accordé aux arguments de l’appelant concernant le critère de l’arrêt Sanofi qui supposent qu’il existe des limites de l’installation.

Étape 2 du critère de l’arrêt Sanofi : Le point de vue du Conseil quant au concept inventif

[51]  En ce qui concerne l’étape 2, l’appelant soutient que le Conseil a adopté un point de vue trop étroit au sujet du concept inventif. L’appelant a présenté des renseignements sur le schéma de traitement général et l’interaction entre l’équipement qui mène à la redondance, au découplage, à la capacité de stockage tampon et à d’autres avantages. L’appelant affirme qu’il s’agissait bien plus [traduction] « qu’une simple utilisation de camions de transport » et d’autres équipements. L’appelant soutient en outre que le processus a recours aux excavatrices mobiles, aux concasseurs mobiles et à une flotte partagée de 25 à 35 camions miniers qui alimentent deux usines, ce qui, ensemble, évitera l’improductivité en cas de pannes ou de retards imprévus.

[52]  Je ne peux pas souscrire à ces prétentions, car les motifs du Conseil indiquent qu’il a tenu compte des observations de l’appelant concernant son schéma de traitement intégré et qu’il a jugé que les 15 revendications du brevet constituaient le concept inventif. Il n’a pas jugé qu’il s’agissait d’une [traduction« simple utilisation de camions de transport », comme le soutient l’appelant. Le Conseil n’a pas effectué un examen approfondi du concept inventif; il n’était toutefois pas nécessaire d’interpréter le brevet, puisque l’appelant avait toujours déclaré que son brevet visait un « schéma de traitement » « intégré » aux fins de l’exploitation des sables bitumineux, tel que cela est précisé dans les 15 revendications.

Étape 3 du critère de l’arrêt Sanofi : La différence déclarée entre l’état de la technique et le concept inventif

[53]  L’appelant a soutenu qu’un examen de l’étape 3 révèle que la différence entre le brevet 770 et le dossier d’antériorité est qu’aucun élément de ce dossier ne fait référence au découplage, à la redondance, à la capacité tampon ou à la simplification du schéma. Il indique qu’en ce qui concerne le document D1, si une unité du processus échoue, la chaîne d’équipement complète n’est pas disponible, ce qui fait en sorte que D1 est inutilisable.

[54]  Après examen, je conclus que le Conseil a tenu compte de D1 et a déclaré qu’il n’était pas nécessaire qu’il s’agisse d’un [traduction] « système exploitable sur le plan commercial ». Le Conseil a conclu que le brevet D1 [traduction] « révèle un système d’exploitation des sables bitumineux présentant des caractéristiques très similaires à celles du brevet 770 et est classé dans la même catégorie de méthodes antérieures que le brevet 770 ». Ensuite, le Conseil a examiné D1 et a conclu que la différence par rapport au schéma de traitement de l’appelant était [traduction« que les matériaux des sables bitumineux sont d’abord placés sur un moyen de transport au front de taille et ensuite déchargés dans un camion pour transporter les matériaux à une installation de préparation de boue ». Je ne crois pas que l’omission de mentionner les avantages de la redondance, du découplage et de la capacité tampon constituait une erreur qui rend la décision déraisonnable. Je conclus ainsi, parce que le Conseil a dit que [traduction] « les revendications 2 à 10 et 12 à 15 définissent davantage les étapes de la méthode des revendications 1 et 11 » et ces revendications ne portent pas sur les avantages du découplage et de la flexibilité.

Étape 4 du critère de l’arrêt Sanofi : Le Conseil a raisonnablement conclu que ces différences seraient évidentes pour une PMVA

[55]  Cette quatrième étape est l’étape où les connaissances générales courantes visées à l’étape 1b) entrent en jeu (Ciba Specialty Chemicals Water Treatments Limited’s c SNF Inc., 2017 CAF 225, au par. 62). Certains facteurs soulevés par la Cour suprême du Canada à l’égard de cette dernière étape du critère établi dans l’arrêt Sanofi sont (1) la question de savoir si le brevet est évident en soi, (2) les efforts – leur nature et leur ampleur – requis pour réaliser l’invention, (3) le motif de rechercher une solution, (4) la démarche qui a mené à l’invention et (5) si l’invention « allait de soi » (Sanofi, aux par. 84 à 92). Un examen cumulatif de ces facteurs, surtout des facteurs 1 et 5, démontre que la décision du Conseil était raisonnable.

[56]  Tel que l’a déclaré le juge Pelletier, s’exprimant au nom de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Société Bristol‑Myers Squibb Canada c Teva Canada Limitée, 2017 CAF 76, au par. 65 :

[] Il pourrait être utile de garder à l’esprit que l’analyse de l’évidence vise à vérifier si la personne versée dans l’art peut rapprocher deux points dans le perfectionnement de la technique en se fondant uniquement sur ses connaissances générales courantes. Si tel est le cas, il y a évidence.

[57]  Compte tenu de la formulation de la question par le juge Pelletier, ainsi que de l’analyse de la Cour suprême dans Sanofi, je suis d’accord avec le Conseil pour dire que le schéma de traitement [traduction] « efficace » de l’appelant décrit dans le brevet 770 était évident.

[58]  Tel que cela est indiqué à la page 12 des motifs, D1 révèle en fait que le fait d’utiliser des camions pour transporter des matériaux est bien connu. Toutefois, D2 révèle l’utilisation de camions et/ou de convoyeurs avec des camions acceptant les matériaux des broyeurs à ciel ouvert. Ensuite, les D3 à D5 expliquent certains facteurs visant à déterminer le meilleur moyen de transport des matériaux. Par exemple, la page 3 de D4 contient une liste de facteurs à prendre en considération pour optimiser l’emplacement des camions et des convoyeurs. Il est de notoriété publique que l’équipement devrait être organisé de la façon la plus efficace possible pour les besoins de l’exploitation minière. En outre, je suis d’accord avec le Conseil pour dire que les [traduction] « caractéristiques supplémentaires » (qui sont secondaires, d’après les observations de l’appelant), comme la nature mobile du concasseur et l’emplacement du réservoir tampon, sont [traduction] « bien connues dans le milieu, compte tenu des connaissances générales courantes ».

[59]  L’appelant souligne l’écart de huit ans entre la publication du brevet D1 en 2007 et le dépôt du brevet 770 en 2015. Il reconnaît qu’il s’agissait d’une idée [traduction] « simple à mettre en œuvre », mais que « personne » n’y avait pensé avant lui.

[60]  Comme l’intimé le fait remarquer, l’argument concernant l’écart de huit ans n’avait pas été présenté au Conseil. En outre, le critère ne consiste pas à décider si une personne a pensé à la revendication, mais plutôt à juger si les différences entre les revendications et l’état de la technique « constituent [...] des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou si elles dénotent [...] quelque inventivité. » (Sanofi, au par. 67). Je suis d’accord avec l’intimé pour dire qu’il n’y a pas inventivité si une PMVA peut remédier à l’écart entre l’état de la technique et le concept, sans user d’ingéniosité inventive. C’est exactement ce que fait le brevet 770, brevet maintenant rejeté.

[61]  Je suis d’accord avec le Conseil pour dire que l’appelant n’a pas formulé un concept inventif qui mérite un brevet, surtout lorsque l’on tient compte de la déférence due au Conseil de trois conseillers experts. Par conséquent, la décision selon laquelle le brevet 770 était évident appartenait aux issues raisonnables.

(1)  L’absence de discussion du Conseil au sujet du processus relatif à la demande de brevet n’a pas rendu le constat de réexamen déraisonnable.

[62]  Comme l’appelant le fait remarquer, le 26 juin 2015, dans le cadre de la première demande présentée dans le contexte du processus, l’examinateur a soulevé des préoccupations quant à l’évidence qui étaient similaires à celles soulevées plus tard par le Conseil. L’appelant a répondu à ces préoccupations le 22 août 2015. Puis, le 19 novembre 2015, dans le cadre de la deuxième demande, l’examinateur n’a pas donné beaucoup de motifs que le fait d’accepter qu’il existait des effets de synergie et que le concept était effectivement inventif.

[63]  L’omission de tenir compte de cet échange ne suffit pas à rendre déraisonnable la décision concernant l’évidence. Le Conseil aurait pu donner davantage de détails au sujet des questions tranchées lors de ce processus; il s’agitlà d’un constat souvent tiré après le fait. Quoi qu’il en soit, les motifs de l’examinateur ne comportaient pas beaucoup d’éléments que le Conseil pouvait traiter et son absence de communication à ce sujet ne rend pas la décision déraisonnable.

[64]  Je souscris au point de vue du juge Mosley exprimé dans la décision Newco Tank Corp c Canada (Procureur général), 2014 CF 287, au par. 36, conf. par 2015 CAF 47 :

Comme l’évoquait le juge Gibson dans la décision Genencor, précitée, au paragraphe 4, ces formalités ont pour objet « la création d’une procédure sommaire et d’une solution de rechange peu coûteuse aux procédures d’invalidation ». Elles équivalent aux décisions du commissaire de refuser d’accorder un brevet en vertu de l’article 40 de la Loi. Il est inapproprié d’imposer à un conseil de réexamen administratif des responsabilités qui incombent aux cours de justice dans des procédures contradictoires relatives à des actions en invalidation : décision Genencor, précitée, au paragraphe 70. En l’espèce, le Conseil n’est pas une partie adverse et n’a aucun intérêt dans l’issue. Il convient de faire preuve d’une grande déférence à son endroit en raison de son expertise, notamment en ce qui a trait aux conclusions factuelles comme celles qui concernent la personne versée dans l’art approprié et les connaissances courantes de cette dernière.

[65]  Dans le cadre de cette procédure sommaire peu coûteuse, l’appelant a présenté ses observations sur l’évidence au Conseil. Elles ont été examinées, mais le Conseil a conclu que le brevet 770 était évident. L’absence de discussion sur les motifs antérieurs de l’examinateur n’a pas rendu la décision déraisonnable.

VI.  Dépens

[66]  Après l’audience, les parties ont conclu une entente concernant les dépens. Elles se sont entendues pour dire que des dépens sous la forme d’une somme forfaitaire fixée à 4 000 $, débours et taxes compris, seront accordés.


JUGEMENT dans T‑1812‑18

LA COUR STATUE que :

2.  L’appelant doit payer à l’intimé les dépens sous la forme d’une somme forfaitaire fixée à 4 000 $, débours et taxes compris.

« Glennys L. McVeigh »

Traduction certifiée conforme

Ce 22e jour de janvier 2020

Maxime Deslippes
Annexe A – Dispositions pertinentes

Loi sur les brevets, LRC (1985), ch P-4

Patent Act, RSC 1985 c P-4

Objet non évident

28.3 L’objet que définit la revendication d’une demande de brevet ne doit pas, à la date de la revendication, être évident pour une personne versée dans l’art ou la science dont relève l’objet, eu égard à toute communication :

Invention must not be obvious

28.3 The subject-matter defined by a claim in an application for a patent in Canada must be subject-matter that would not have been obvious on the claim date to a person skilled in the art or science to which it pertains, having regard to

a) qui a été faite, plus d’un an avant la date de dépôt de la demande, par le demandeur ou un tiers ayant obtenu de lui l’information à cet égard de façon directe ou autrement, de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs;

(a) information disclosed more than one year before the filing date by the applicant, or by a person who obtained knowledge, directly or indirectly, from the applicant in such a manner that the information became available to the public in Canada or elsewhere; and

b) qui a été faite par toute autre personne avant la date de la revendication de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs.

(b) information disclosed before the claim date by a person not mentioned in paragraph (a) in such a manner that the information became available to the public in Canada or elsewhere.

Dossier d’antériorité

Dépôt

34.1 (1) Une personne peut déposer auprès du commissaire un dossier d’antériorité constitué de brevets, de demandes de brevet accessibles au public et d’imprimés qu’elle croit avoir effet sur la brevetabilité de toute revendication contenue dans une demande de brevet.

Filing of Prior Art

Filing

34.1 (1) Any person may file with the Commissioner prior art, consisting of patents, applications for patents open to public inspection and printed publications, that the person believes has a bearing on the patentability of any claim in an application for a patent.

Pertinence

34.1(2) La personne qui dépose le dossier doit en exposer la pertinence.

Pertinency

34.1(2) A person who files prior art with the Commissioner under subsection (1) shall explain the pertinency of the prior art.

Réexamen

Demande

Re-examination

Request for re-examination

48.1 (1) Chacun peut demander le réexamen de toute revendication d’un brevet sur dépôt, auprès du commissaire, d’un dossier d’antériorité constitué de brevets, de demandes de brevet accessibles au public et d’imprimés et sur paiement des taxes réglementaires.

48.1 (1) Any person may request a re-examination of any claim of a patent by filing with the Commissioner prior art, consisting of patents, applications for patents open to public inspection and printed publications, and by paying a prescribed fee.

Pertinence

48.1 (2) La demande énonce la pertinence du dossier et sa correspondance avec les revendications du brevet.

Pertinency of request

48.1(2) A request for re-examination under subsection (1) shall set forth the pertinency of the prior art and the manner of applying the prior art to the claim for which re-examination is requested.

Avis

48.1(3) Sur réception de la demande, le commissaire en expédie un double au titulaire du brevet attaqué, sauf si celui-ci est également le demandeur.

Notice to patentee

48.1(3) Forthwith after receipt of a request for re-examination under subsection (1), the Commissioner shall send a copy of the request to the patentee of the patent in respect of which the request is made, unless the patentee is the person who made the request.

Constitution d’un conseil de réexamen

48.2 (1) Sur dépôt de la demande, le commissaire constitue un conseil de réexamen formé d’au moins trois conseillers, dont deux au moins sont rattachés au Bureau des brevets, qui se saisissent de la demande.

Establishment of re-examination board

48.2 (1) Forthwith after receipt of a request for re-examination under subsection 48.1(1), the Commissioner shall establish a re-examination board consisting of not fewer than three persons, at least two of whom shall be employees of the Patent Office, to which the request shall be referred for determination.

Décision

48.2(2) Dans les trois mois suivant sa constitution, le conseil décide si la demande soulève un nouveau point de fond vis-à-vis de la brevetabilité des revendications du brevet en cause.

Determination to be made by board

48.2(2) A re-examination board shall, within three months following its establishment, determine whether a substantial new question of patentability affecting any claim of the patent concerned is raised by the request for re-examination.

Avis

48.2(3) Le conseil avise le demandeur de toute décision négative, celle-ci étant finale et ne pouvant faire l’objet d’un appel ou d’une révision judiciaire.

Notice

48.2(3) Where a re-examination board has determined that a request for re-examination does not raise a substantial new question affecting the patentability of a claim of the patent concerned, the board shall so notify the person who filed the request and the decision of the board is final for all purposes and is not subject to appeal or to review by any court.

Idem

48.2(4) En cas de décision positive, le conseil expédie un avis motivé de la décision au titulaire du brevet.

Idem

48.2(4) Where a re-examination board has determined that a request for re-examination raises a substantial new question affecting the patentability of a claim of the patent concerned, the board shall notify the patentee of the determination and the reasons therefor.

Réponse

48.2(5) Dans les trois mois suivant la date de l’avis, le titulaire en cause peut expédier au conseil une réponse exposant ses observations sur la brevetabilité des revendications du brevet visé par l’avis.

Filing of reply

48.2(5) A patentee who receives notice under subsection (4) may, within three months of the date of the notice, submit to the re-examination board a reply to the notice setting out submissions on the question of the patentability of the claim of the patent in respect of which the notice was given.

Procédure de réexamen

48.3(1) Sur réception de la réponse ou au plus tard trois mois après l’avis mentionné au paragraphe 48.2(4), le conseil se saisit du réexamen des revendications du brevet en cause.

Re-examination proceeding

48.3(1) On receipt of a reply under subsection 48.2(5) or in the absence of any reply within three months after notice is given under subsection 48.2(4), a re-examination board shall forthwith cause a re-examination to be made of the claim of the patent in respect of which the request for re-examination was submitted.

Dépôt de modifications

48.3(2) Le titulaire peut proposer des modifications au brevet ou toute nouvelle revendication à cet égard qui n’ont pas pour effet d’élargir la portée des revendications du brevet original.

Patentee may submit amendments

48.3(2) In any re-examination proceeding under subsection (1), the patentee may propose any amendment to the patent or any new claims in relation thereto but no proposed amendment or new claim enlarging the scope of a claim of the patent shall be permitted.

Durée

48.3(3) Le réexamen doit être terminé dans les douze mois suivant le début de la procédure.

Time limitation

48.3(3) A re-examination proceeding in respect of a claim of a patent shall be completed within twelve months of the commencement of the proceedings under subsection (1).

Constat

48.4(1) À l’issue du réexamen, le conseil délivre un constat portant rejet ou confirmation des revendications du brevet attaqué ou, le cas échéant, versant au brevet toute modification ou nouvelle revendication jugée brevetable.

Certificate of board

48.4(1) On conclusion of a re-examination proceeding in respect of a claim of a patent, the re-examination board shall issue a certificate

(a) cancelling any claim of the patent determined to be unpatentable;

(b) confirming any claim of the patent determined to be patentable; or

(c) incorporating in the patent any proposed amended or new claim determined to be patentable.

Annexe

48.4(2) Le constat est annexé au brevet, dont il fait partie intégrante. Un double en est expédié, par courrier recommandé, au titulaire du brevet.

Certificate attached to patent

48.4(2) A certificate issued in respect of a patent under subsection (1) shall be attached to the patent and made part thereof by reference, and a copy of the certificate shall be sent by registered mail to the patentee.

Effet du constat

48.4(3) Pour l’application de la présente loi, lorsqu’un constat :

 

Effect of certificate

48.4(3) For the purposes of this Act, where a certificate issued in respect of a patent under subsection (1)

a) rejette une revendication du brevet sans en rejeter la totalité, celui-ci est réputé, à compter de la date de sa délivrance, délivré en la forme modifiée;

(a) cancels any claim but not all claims of the patent, the patent shall be deemed to have been issued, from the date of grant, in the corrected form;

b) rejette la totalité de ces revendications, le brevet est réputé n’avoir jamais été délivré;

c) modifie une telle revendication ou en inclut une nouvelle, l’une ou l’autre prend effet à compter de la date du constat jusqu’à l’expiration de la durée du brevet.

(b) cancels all claims of the patent, the patent shall be deemed never to have been issued; or

(c) amends any claim of the patent or incorporates a new claim in the patent, the amended claim or new claim shall be effective, from the date of the certificate, for the unexpired term of the patent.

Appel

48.4(4) Le paragraphe (3) ne s’applique qu’à compter de l’expiration du délai visé au paragraphe 48.5(2). S’il y a appel, il ne s’applique que dans la mesure prévue par le jugement définitif rendu en l’espèce.

Appeals

48.4(4) Subsection (3) does not apply until the time for taking an appeal has expired under subsection 48.5(2) and, if an appeal is taken, subsection (3) applies only to the extent provided in the final judgment on the appeal.

Appel

48.5(1) Le titulaire du brevet peut saisir la Cour fédérale d’un appel portant sur le constat de décision visé au paragraphe 48.4(1).

Appeals

48.5(1) Any decision of a re-examination board set out in a certificate issued under subsection 48.4(1) is subject to appeal by the patentee to the Federal Court.

Prescription

48.5(2) Il ne peut être formé d’appel plus de trois mois après l’expédition du double du constat au titulaire du brevet.

Limitation

48.5(2) No appeal may be taken under subsection (1) after three months from the date a copy of the certificate is sent by registered mail to the patentee.



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