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                                                                                                                                  Date : 20041223

                                                                                                                       Dossier : IMM-8365-03

                                                                                                                   Référence : 2004 CF 1772

ENTRE :

                                                            DIABO BOUREIMA

                                                                                                                                          demandeur

                                                                             et

                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                       ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                           défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PINARD

[1]         Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire relative à une décision en date du 8 octobre 2003 par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) a statué que le demandeur n'était pas un réfugié au sens de la Convention ou une personne à protéger au sens des articles 96 et 97 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.

[2]         Boureima Diabo (le demandeur) est un citoyen du Burkina Faso. Il est entré au Canada le 4 juin 2002 et il a demandé l'asile le 28 juin de la même année. Il soutient craindre avec raison d'être persécuté du fait de la conduite de la police et de sa participation à des manifestations.


[3]         La Commission a fondé sa décision sur une conclusion défavorable quant à la crédibilité du demandeur. La Cour fédérale ne peut substituer son opinion à celle de la Commission en ce qui a trait aux questions de crédibilité, à moins que le demandeur puisse démontrer que la décision de la Commission était fondée sur une conclusion de fait erronée qu'elle a tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont elle disposait (paragraphe 18.1(4) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7). Il est reconnu que la Commission est un tribunal spécialisé qui est en mesure d'apprécier la vraisemblance et la crédibilité d'un témoignage, pourvu que les inférences qu'elle tire de ce témoignage ne soient pas déraisonnables (Aguebor c. Canada (M.E.I.) (1993), 160 N.R. 315 (C.A.F.)) et que ses motifs soient exprimés de façon claire et compréhensible (Hilo c. Canada (M.E.I.) (1991), 130 N.R. 236 (C.A.F.)).

[4]         Au cours de l'évaluation de la preuve, la Commission a conclu que des manifestations sont survenues en 1999, mais que les forces de la sécurité ne sont pas intervenues. Il n'était pas déraisonnable de la part de la Commission de conclure que le demandeur n'est pas crédible, étant donné que la demande d'asile de celui-ci repose principalement sur les arrestations dont il aurait été victime en 1998 et 1999 et sur la manifestation survenue en juin 2000, alors que la preuve ne corrobore pas ces événements. Le demandeur souligne que la Commission a commis une erreur en invoquant un rapport de 1999 comme preuve d'une manifestation survenue en 1998. Même si la Commission avait conclu qu'une manifestation avait eu lieu en 1998, la preuve documentaire indique qu'il y a eu des manifestations en décembre 2000, mais non en juin 2000, et que le demandeur n'a pu être arrêté en 1999 parce que les forces de la sécurité ne sont pas intervenues. Ces incohérences minent la crédibilité du demandeur.


[5]         De plus, le demandeur a déclaré au cours de son témoignage qu'il a reçu son passeport et ses documents de voyage le même jour. Toutefois, le passeport est daté du 17 avril 2001 et la carte d'identité du 27 octobre 2000. Lorsque le demandeur a été interrogé à ce sujet, il n'a donné aucune réponse satisfaisante.

[6]         La Commission a également conclu que le demandeur n'était pas crédible parce qu'il a déclaré qu'il était resté chez sa mère après les manifestations survenues en 2000, alors qu'il appert de son formulaire de renseignements personnels qu'il est resté chez un ami et qu'aucune mention de sa mère ne figure sur ce document. Après avoir examiné la transcription de l'audience tenue devant la Commission, je n'ai vu aucun élément indiquant que le demandeur a déclaré qu'il était resté chez sa mère après l'incident survenu en 2000. Cependant, l'erreur que la Commission a commise lorsqu'elle a formulé cette conclusion n'est pas importante, parce que la preuve indique que la Commission aurait conclu qu'il n'était pas crédible, indépendamment de l'existence de cette déclaration.

[7]         Après les incidents qui seraient survenus en juin 2000, le demandeur est resté chez un ami, puis est allé au Mali et au Togo et a attendu deux ans avant de quitter son pays pour demander l'asile au Canada, où il a attendu encore 14 jours avant de le faire. Le retard à demander l'asile n'est pas un facteur décisif en soi, mais la Commission peut en tenir compte lorsqu'elle évalue les déclarations et la conduite de l'intéressé (voir Huerta c. Canada (M.E.I.) (1994), 157 N.R. 225 (C.A.F.)). À mon avis, la Commission n'a pas commis d'erreur lorsqu'elle a conclu à l'existence d'une possibilité de refuge intérieur, étant donné que le demandeur a déclaré qu'il n'a eu aucun problème lorsqu'il est resté chez des amis. De plus, la Commission n'a pas tiré de conclusion déraisonnable en statuant que la conduite du demandeur était incompatible avec le comportement d'une personne qui craint d'être persécutée dans son pays, étant donné qu'il aurait pu demander l'asile au Mali ou au Togo et qu'il aurait pu quitter le Burkina Faso bien avant 2002.


[8]         La preuve n'indique pas que la Commission a commis une erreur susceptible de contrôle dans sa décision concernant la présente affaire.

[9]         Pour les motifs précédemment exposés, je rejette la demande de contrôle judiciaire.

                                                                                                                                    « Yvon Pinard »                    

                                                                                                                                                     Juge                             

OTTAWA (ONTARIO)

Le 23 décembre 2004

Traduction certifiée conforme

D. Laberge, LL.L.


                                                             COUR FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                         IMM-8365-03

INTITULÉ :                                        DIABO Boureima c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                  Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                le 23 novembre 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : MONSIEUR LE JUGE PINARD

DATE DES MOTIFS :                       le 23 décembre 2004

COMPARUTIONS:

Styliani Markaki                                                POUR LE DEMANDEUR

Michel Pépin                                                     POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Styliani Markaki                                                POUR LE DEMANDEUR

Montréal (Québec)

Morris Rosenberg                                              POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

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