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Date : 20191119


Dossier : T‑759‑16

Référence : 2019 CF 1460

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 19 novembre 2019

En présence de monsieur le juge Norris

ENTRE :

BELL CANADA

BELL EXPRESSVU, SOCIÉTÉ

EN COMMANDITE

BELL MÉDIA INC.

VIDÉOTRON S.E.N.C.

GROUPE TVA INC.

ROGERS COMMUNICATIONS CANADA INC.

ROGERS MEDIA INC.

demanderesses

(parties requérantes)

et

RED RHINO ENTERTAINMENT INC. et ERIC ADWOKAT

défendeurs

(intimés)

et

ANDROID BROS INC. et autres

défendeurs non intimés

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  APERÇU

[1]  Les demanderesses sont des entreprises canadiennes bien connues de radiodiffusion et de distribution de services médiatiques. Entre autres choses, elles offrent un accès à une vaste gamme d’émissions de télévision (à l’égard desquelles elles détiennent les droits de radiodiffusion ou de distribution au Canada) moyennant des frais. Certaines personnes, à tout le moins, préféreraient avoir accès à ces émissions sans payer ces frais, de sorte qu’un marché pour les appareils qui rendent cela possible a émergé. Un de ces appareils est un « boîtier décodeur ».

[2]  Un boîtier décodeur (parfois appelé également une boîte de télévision Android) est un appareil électronique qui peut être utilisé pour fournir des fonctionnalités supplémentaires à une télévision standard. Une fois connecté à une télévision et à Internet, un boîtier décodeur peut permettre à des personnes d’utiliser leur télévision, par exemple, pour naviguer dans Internet, accéder aux courriels, jouer à des jeux ou regarder des vidéos sur YouTube. Il existe divers usages légitimes et non fautifs des boîtiers décodeurs disponibles sur le marché. Toutefois, s’il est configuré à l’aide des applications ou des extensions nécessaires, un boîtier décodeur peut également être utilisé pour obtenir un accès non autorisé à la programmation télévisuelle des demanderesses, en direct et sur demande. Une personne ayant les connaissances et les compétences requises peut configurer un boîtier décodeur pour exécuter cette dernière fonction à partir de zéro, mais il est beaucoup plus facile pour la plupart des gens d’acheter simplement un boîtier qui est déjà configuré à cette fin par quelqu’un d’autre.

[3]  En réponse à la prévalence croissante des dispositifs prêts à l’emploi permettant l’accès non autorisé à leur programmation télévisuelle, en mai 2016, les demanderesses ont intenté une action en justice contre cinq défendeurs qui auraient configuré, annoncé, offert à la vente et vendu des boîtiers décodeurs préinstallés et des services de signal privé de télévision par protocole Internet. (Un service de signal privé de télévision par protocole Internet [IPTV] permet aux utilisateurs de se connecter directement à des serveurs Internet privés qui diffusent des retransmissions non autorisées d’émissions de télévision.) Les demanderesses allèguent que ces activités violent certaines dispositions de la Loi sur le droit d’auteur, LRC 1985, c C‑42, et de la Loi sur la radiocommunication, LRC, 1985, c R‑2, y compris le droit exclusif des demanderesses de mettre leur programmation à la disposition du public. Voir, en particulier, le paragraphe 2.4(1.1), l’alinéa 3f) et l’article 27 de la Loi sur le droit d’auteur.

[4]  Comme nous le verrons bientôt, la question centrale en l’espèce est ce que l’on entend par « boîter décodeur préinstallé ».

[5]  Le 1er juin 2016, la juge Tremblay‑Lamer a délivré une injonction interlocutoire interdisant aux premiers défendeurs, entre autres, directement ou indirectement :

  • de configurer, de faire la publicité, de mettre en vente ou de vendre des boîtiers décodeurs adaptés pour donner aux utilisateurs un accès non autorisé au contenu télévisuel des demanderesses [« boîtiers décodeurs préinstallés »];

  • de fabriquer, d’importer, de distribuer, de louer, de mettre en vente, de vendre, d’installer, de modifier, d’exploiter ou de posséder des boîtiers décodeurs préinstallés dont l’utilisation prévue est de recevoir les signaux d’abonnement des demanderesses après leur décodage autrement que selon ce qui est autorisé par les demanderesses;

  • de faire la publicité, de mettre en vente ou de vendre des abonnements à des services privés IPTV, y compris en faisant la publicité, en mettant en vente ou en vendant des boîtiers décodeurs préinstallés qui permettent aux utilisateurs d’accéder à des services privés IPTV.

Voir Bell Canada c 1326030 Ontario Inc (iTVBox.net), 2016 CF 612, plus particulièrement les alinéas 2a), b) et e) de l’ordonnance de la Cour. (L’injonction interlocutoire a été confirmée par la Cour d’appel fédérale : voir Wesley (Mtlfreetv.com) c Bell Canada, 2017 CAF 55.)

[6]  L’ordonnance de la juge Tremblay‑Lamer prévoyait également sa signification à d’autres particuliers ou entreprises au fur et à mesure que les demanderesses en sont informées. Une fois que l’ordonnance était signifiée à un nouveau particulier ou à une nouvelle entreprise, les demanderesses pouvaient modifier leurs actes de procédure en vue d’ajouter ce particulier ou cette entreprise en tant que défendeur à l’action sous‑jacente. Une fois ajouté à titre de défendeur, le particulier ou l’entreprise pouvait, dans les 14 jours qui suivaient, présenter une requête en vue de demander une modification de l’injonction interlocutoire telle que celle‑ci s’appliquait contre lui ou elle, si c’était son choix. Sauf dans le cas où les nouveaux défendeurs étaient soustraits à son application à la suite d’une telle requête, l’injonction interlocutoire s’appliquait à tous ceux qui étaient mis en cause de cette manière.

[7]  À ce jour, les demanderesses ont modifié leur déclaration à une dizaine de reprises et ont mis en cause quelque 175 défendeurs.

[8]  Parmi ces défendeurs supplémentaires se trouvent Red Rhino Entertainment Inc. et son administrateur unique, Eric Adwokat. Les demanderesses allèguent que Red Rhino et M. Adwokat exploitent (ou exploitaient) une entreprise de configuration, de commercialisation et de vente de boîtiers décodeurs et de services privés IPTV qui fournissent un accès non autorisé à la programmation télévisuelle des demanderesses, en direct et sur demande. Le 21 juin 2016, une déclaration modifiée et l’injonction interlocutoire ont été signifiées à Red Rhino à son bureau à Toronto. La déclaration modifiée a été modifiée à nouveau en octobre 2016 en vue d’ajouter M. Adwokat même en tant que défendeur, étant donné son rôle allégué à titre d’âme dirigeante de Red Rhino. Cette déclaration modifiée et l’injonction interlocutoire ont été signifiées en personne à M. Adwokat le 24 février 2017, au kiosque de vente de Red Rhino exploité au Salon international de l’auto du Canada à Toronto. Toutefois, il a reconnu au cours de la présente instance qu’il était au courant de l’ordonnance au moins dès le 25 juillet 2016.

[9]  Ni Red Rhino ni M. Adwokat n’ont demandé à être soustraits à l’application de l’injonction interlocutoire.

[10]  De plus, à ce jour, ni Red Rhino ni M. Adwokat n’ont déposé de défense dans l’action sous‑jacente.

[11]  Au moyen d’un avis de requête en date du 26 septembre 2016, les demanderesses ont demandé, en application de l’article 467 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106 [les Règles], une ordonnance enjoignant à Red Rhino et à M. Adwokat de comparaître à une audience afin de déterminer s’ils sont coupables d’outrage au tribunal pour non‑respect de l’injonction interlocutoire. Cette ordonnance a été rendue le 23 octobre 2018 par la protonotaire Tabib en sa qualité de responsable de la gestion de l’instance. L’audience relative à l’outrage au tribunal s’est ensuite déroulée devant moi, sur plusieurs jours, en juin 2019.

[12]  S’appuyant en grande partie sur la preuve recueillie par des enquêteurs privés travaillant en leur nom, les demanderesses allèguent que, entre décembre 2016 et mars 2018, Red Rhino et M. Adwokat ont continué de configurer, de commercialiser et de vendre des boîtiers décodeurs en contravention de l’injonction interlocutoire.

[13]  Pour les motifs qui suivent, je suis convaincu hors de tout doute raisonnable que les activités de Red Rhino Entertainment Inc. et d’Eric Adwokat entre décembre 2016 et mars 2018, décrites en plus de détails ci‑dessous, contrevenaient à l’injonction interlocutoire et constituent un outrage au tribunal.

II.  LE CRITÈRE APPLICABLE À L’OUTRAGE CIVIL

[14]  Dans un tel cas, lorsque l’allégation est une allégation d’outrage civil sous forme de la désobéissance à une ordonnance du tribunal au titre de l’alinéa 466b) des Règles, les requérantes (en l’espèce, les demanderesses) doivent établir que l’auteur prétendu a intentionnellement commis un acte, ou omis d’agir, en violation d’une ordonnance claire dont il avait une connaissance de fait : voir Carey c Laiken, 2015 CSC 17, aux paragraphes 33 à 35 et 38 [Carey]. Pour ce qui est de l’outrage civil, il n’est pas nécessaire que l’auteur de l’outrage ait eu l’intention de désobéir à l’ordonnance ou, de manière plus générale, ait eu l’intention d’entraver l’administration de la justice (Carey, aux par. 29 et 38).

[15]  Exceptionnellement pour une procédure civile, les demanderesses doivent établir les éléments de l’outrage au tribunal hors de tout doute raisonnable avant que Red Rhino ou M. Adwokat ne puissent être déclarés coupables (voir l’article 469 des Règles). Comme cela est bien connu en matière de procédure pénale, il s’agit d’une norme de preuve exigeante. Afin de s’acquitter de leur fardeau, les demanderesses ne sont pas tenues d’établir les éléments de l’outrage selon une certitude absolue ou hors de tout doute. Toutefois, elles doivent les établir hors de tout doute raisonnable. Un doute raisonnable n’est pas un doute imaginaire ou futile ni une possibilité hypothétique. Il n’est pas fondé sur un élan de sympathie ou un préjugé à l’égard d’une personne visée par la procédure. Il s’agit plutôt d’un doute qui est fondé sur la raison et le bon sens. Il s’agit d’un doute qui a un lien logique avec la preuve ou l’absence de preuve. Une preuve hors de tout doute raisonnable est plus exigeante qu’une preuve selon la prépondérance des probabilités. En fait, si elle est placée sur une échelle des normes de preuve, la preuve hors de tout doute raisonnable se rapproche beaucoup plus de la certitude absolue que de la culpabilité probable. Il ne me suffit donc pas de conclure simplement que Red Rhino et M. Adwokat sont probablement coupables ou vraisemblablement coupables. Si c’est ce qu’établit la preuve, il faut les déclarer non coupables. Je peux conclure que Red Rhino et M. Adwokat sont coupables d’outrage au tribunal uniquement s’il ne subsiste aucun doute raisonnable et que je suis donc sûr qu’ils sont coupables. Voir R c Lifchus, [1997] 3 RCS 320, aux paragraphes 36 à 39; R c Starr, [2000] 2 RCS 144, aux paragraphes 241 et 242; R c Cyr‑Langlois, 2018 CSC 54, [2018] 3 RCS 456, au paragraphe 15.

[16]  De plus, les pouvoirs d’un tribunal en matière d’outrage sont exceptionnels. Ils ne devraient être exercés qu’en dernier recours (Carey, au par. 36). Un tribunal conserve un pouvoir discrétionnaire de ne pas consigner une déclaration de culpabilité pour outrage, quoique tous les éléments requis aient été établis. Une déclaration de culpabilité pour outrage « ne doit être prononcée que lorsqu’il est véritablement nécessaire de protéger l’administration de la justice » (Morasse c Nadeau‑Dubois, 2016 CSC 44, [2016] 2 RCS 232, au par. 21 [Morasse]).

[17]  En ce qui concerne les éléments de l’outrage allégué en l’espèce, il n’y a aucun doute que Red Rhino était au courant de l’injonction interlocutoire depuis le 21 juin 2016 ou que M. Adwokat, lui‑même, en était au courant depuis, au moins, le 25 juillet 2016. M. Adwokat prétend n’avoir lu que les premières pages des motifs de l’ordonnance et ordonnance datés du 1er juin 2016. Même si tel est le cas, un tel aveuglement volontaire ne lui permettrait pas d’échapper à sa responsabilité si elle est par ailleurs établie (Carey, au par. 34). En général, l’aveuglement volontaire est l’équivalent juridique d’une connaissance réelle (Sansregret c La Reine, aux pages 584 à 587; R. c Jorgensen, [1995] 4 RCS 55, aux par. 102 et 103).

[18]  Il n’y a aucun doute non plus que la configuration, la commercialisation et la vente des dispositifs de Red Rhino constituent des actes intentionnels au sens voulu.

[19]  Le seul élément en litige consiste à savoir si l’ordonnance interdisait clairement la configuration, la commercialisation et la vente des boîtiers de Red Rhino.

III.  LA QUESTION PRÉLIMINAIRE

[20]  Avant d’examiner sur le fond la requête visant à ce que Red Rhino et M. Adwokat soient déclarés coupables d’outrage, il est nécessaire de trancher une question préliminaire. La présente instance est‑elle suspendue aux termes du paragraphe 69(1) de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, LRC 1985, c B‑3 [la LFI]?

[21]  Peu avant le début de l’audience relative à l’outrage, Red Rhino Entertainment Inc. et M. Adwokat ont chacun déposé un avis d’intention de présenter une proposition en vertu de l’article 50.4 de la LFI. Ce fait a été porté à l’attention de la Cour au moyen d’une correspondance du syndic autorisé en insolvabilité auprès de qui les avis avaient été déposés. Le syndic a également présenté un avis de suspension des procédures au titre du paragraphe 69(1) de la LFI en date du 6 juin 2019, relativement à chacun, Red Rhino Entertainment Inc. et M. Adwokat.

[22]  Notamment, dans leurs listes respectives de créanciers ayant des créances de 250 $ ou plus, Red Rhino et M. Adwokat énumèrent plusieurs des demanderesses (mais, pour une raison quelconque, pas toutes ces dernières). Le montant réclamé relativement à chacune des demanderesses énumérées dans les deux avis serait de 250 $. La seule explication de ces réclamations est un renvoi au numéro de dossier de la Cour de l’action qui a donné lieu à la présente requête (c.‑à‑d. T‑759‑16). En ce qui concerne Red Rhino et M. Adwokat, cette action en justice demeure, bien entendu, en suspens. La responsabilité n’a pas été établie.

[23]  Le syndic n’a offert aucune explication quant à la raison pour laquelle cette correspondance avait été envoyée à la Cour. En réponse à une directive de la Cour, le syndic a indiqué qu’il n’avait adopté aucune position concernant la présente affaire et qu’il ne comparaîtrait pas à l’audience.

[24]  Au début de l’audience relative à l’outrage, l’avocat agissant au nom de Red Rhino et de M. Adwokat a soutenu que la suspension de la procédure au titre de l’alinéa 69(1)a) de la LFI empêchait la poursuite de la présente affaire, au moins à ce moment‑ci.

[25]  Tel que je l’ai indiqué dans les brefs motifs prononcés oralement à l’audience, je ne suis pas du même avis.

[26]  L’article 69 de la LFI figure sous la rubrique « Suspension des procédures ». L’alinéa 69(1)a) prévoit plus particulièrement que, dès le dépôt par une personne insolvable d’un avis d’intention aux termes de l’article 50.4, « les créanciers n’ont aucun recours contre la personne insolvable ou contre ses biens et ne peuvent intenter ou continuer aucune action, exécution ou autre procédure en vue du recouvrement de réclamations prouvables en matière de faillite ».

[27]  Selon la LFI, un « créancier » s’entend d’une « [p]ersonne titulaire d’une réclamation prouvable à ce titre sous le régime de la présente loi » (LFI, article 2). L’affirmation selon laquelle les demanderesses sont actuellement des « créancières » de Red Rhino et de M. Adwokat à la suite de l’action sous‑jacente est fausse. Plus précisément, qu’elles soient ou non des créancières de Red Rhino Entertainment Inc. ou de M. Adwokat ou qu’elles puissent le devenir, les demanderesses n’ont pas déposé la présente requête en cette qualité. Elles ont déposé la présente requête afin que la Cour puisse décider si Red Rhino ou M. Adwokat étaient coupables d’outrage au tribunal pour non‑respect de l’injonction interlocutoire. La présente instance n’est en aucune façon une procédure « en vue du recouvrement de réclamations prouvables en matière de faillite », qu’envisage l’alinéa 69(1)a) de la LFI (voir Recycling Worx Solutions Inc c Hunter, 2018 ABQB 395, aux par. 136 et 137 et les affaires qui y sont citées). Il s’agit d’une procédure intentée en vue de protéger l’administration de la justice. L’alinéa 69(1)a) de la LFI ne s’applique tout simplement pas. Il ne fait donc pas obstacle à la présente instance.

IV.  ANALYSE

A.  Introduction

[28]  Les éléments factuels suivants sont admis ou non contestés :

  • èA l’époque pertinente, Eric Adwokat était l’administrateur unique et l’âme dirigeante de Red Rhino Entertainment Inc.

  • M. Adwokat est la personne chargée d’assurer le respect de l’injonction interlocutoire par Red Rhino Entertainment Inc.

  • Red Rhino Entertainment Inc. a configuré, commercialisé et vendu des dispositifs de Red Rhino entre juin 2016 et mars 2018.

  • Les enquêteurs agissant au nom des demanderesses ont acheté des dispositifs de Red Rhino aux dates suivantes auprès de Red Rhino Entertainment Inc. ou de distributeurs tiers de Red Rhino Entertainment Inc. :

  • o le 3 décembre 2016, au marché aux puces de Pickering;

  • o le 16 décembre 2016, à partir du site Web de Red Rhino;

  • o le 3 mars 2017, à partir du bureau de Red Rhino à Toronto;

  • o le 11 mars 2017, au Salon national de l’habitation à Toronto;

  • o le 21 août 2017, à l’Exposition nationale canadienne à Toronto;

  • o le 18 février 2018, au Salon international de l’auto du Canada à Toronto;

  • o le 11 mars 2018, au Salon national de l’habitation à Toronto.

  • Ces dispositifs de Red Rhino pourraient être utilisés pour obtenir un accès non autorisé à la programmation télévisuelle des demanderesses, en direct et sur demande.

[29]  Dans ce contexte, la question déterminante consiste à savoir si les dispositifs de Red Rhino sont visés par les termes clairs de l’injonction interlocutoire. Plus particulièrement, constituent‑ils des « boîtiers décodeurs adaptés pour donner aux utilisateurs un accès non autorisé aux programmes des demanderesses »? En d’autres termes, constituent‑ils des « boîtiers décodeurs préinstallés », au sens défini dans l’injonction interlocutoire?

[30]  M. Adwokat prétend que les dispositifs de Red Rhino ne sont pas des boîtiers décodeurs préinstallés au sens requis, parce que les applications ou les extensions nécessaires pour établir un accès non autorisé à la programmation télévisuelle des demanderesses ne sont pas chargées sur les dispositifs lorsque ceux‑ci sont vendus. Au contraire, avant qu’un dispositif de Red Rhino ne puisse être utilisé pour obtenir un accès non autorisé à la programmation télévisée des demanderesses, l’acheteur doit télécharger et installer les applications ou les extensions nécessaires lui‑même, après l’achat du dispositif. Par conséquent, selon M. Adwokat, les dispositifs de Red Rhino ne sont pas des boîtiers décodeurs préinstallés, au sens de la définition prévue dans l’injonction interlocutoire, et rien de ce qu’il a fait ou de ce que Red Rhino a fait n’a violé l’injonction.

[31]  D’autre part, les demanderesses prétendent que Red Rhino a configuré le dispositif de Red Rhino de manière à faciliter le téléchargement et l’installation des applications ou des extensions nécessaires et que cela fait que les dispositifs sont visés par les termes clairs des interdictions de l’injonction provisoire, même si ces applications ou ces extensions elles‑mêmes ne sont pas déjà chargées dans les dispositifs au moment de la vente. À l’appui de l’allégation d’outrage, les demanderesses soulignent, entre autres, le prix des dispositifs de Red Rhino, la façon dont ils ont été commercialisés (y compris l’argumentaire de vente au point de vente) et la manière dont les applications ou les extensions nécessaires pour obtenir un accès non autorisé à la programmation télévisuelle des demanderesses sont installées dans les dispositifs après l’achat.

[32]  Tel que je l’expliquerai, je suis convaincu hors de tout doute raisonnable que les dispositifs de Red Rhino achetés par les enquêteurs des demanderesses entre décembre 2016 et mars 2018 sont visés par les termes clairs des interdictions de l’injonction interlocutoire.

B.  La portée de l’injonction interlocutoire est‑elle claire?

[33]  Tel que cela est précisé ci‑dessus, le seul élément d’outrage en litige en l’espèce est de savoir si la configuration, la commercialisation et la vente des boîtiers de Red Rhino contrevenaient à une ordonnance claire interdisant cela. Si l’injonction interlocutoire n’interdisait pas clairement la conduite contestée de Red Rhino et de M. Adwokat, ils ne peuvent pas être déclarés coupables d’outrage.

[34]  L’exigence de clarté dans l’ordonnance dont on allègue la violation est de la plus haute importance. Elle veille à ce qu’une partie ne soit pas déclarée coupable d’outrage lorsqu’une ordonnance n’est pas claire ou qu’elle est ambiguë (Carey, au par. 33). Bien qu’une précision absolue ne soit pas requise, une injonction [traduction« doit donner à la partie visée une orientation suffisante pour établir clairement quelles sont les activités interdites » (Fettes c Culligan Canada Ltd, 2010 SKCA 151, au par. 19 [Fettes]). L’auteur prétendu de l’outrage a droit à l’interprétation la plus favorable de l’ordonnance, conformément à son sens ordinaire et en tenant compte du contexte dans lequel elle a été rendue (Fraser Health Authority c Schmidt, 2015 BCCA 72, au par. 4). Toute ambiguïté dans l’ordonnance devrait être réglée en faveur de cette partie (Fettes, au par. 20; Lee c Weidner, 2019 BCCA 326, au par. 47). Ainsi, avant que je puisse déclarer Red Rhino et M. Adwokat coupables d’outrage pour avoir contrevenu à l’injonction interlocutoire, je dois être convaincu, hors de tout doute raisonnable, que l’ordonnance formule [traduction« de manière claire et non équivoque ce qui doit et ne doit pas être fait » (Carey, au par. 33, citant Prescott‑Russell Services for Children and Adults c G(N) (2006), 82 OR (3d) 686, au par. 27).

[35]  Réduite à l’essentiel, l’injonction interlocutoire interdit la configuration, la commercialisation et la vente de boîtiers décodeurs préinstallés. La juge Tremblay‑Lamer présente la distinction entre les boîtiers décodeurs « préinstallés » (visés par l’injonction) et les autres types de boîtiers décodeurs au paragraphe 5 de ces motifs, où elle déclare ce qui suit :

Les défendeurs sont des particuliers et des entreprises vendant des boîtiers décodeurs, c’est‑à‑dire des dispositifs électroniques pouvant être connectés aux télévisions traditionnelles pour y ajouter des fonctionnalités supplémentaires sur lesquels un ensemble d’applications est préalablement installé et configuré. Ceci distingue les boîtiers « préinstallés » des défendeurs de ceux généralement trouvés dans les magasins de vente au détail sans applications préinstallées ou ne possédant que les applications de base, faisant en sorte que les utilisateurs doivent chercher activement et installer eux‑mêmes les applications qu’ils souhaitent utiliser.

[36]  Dans la preuve dont disposait la juge Tremblay‑Lamer, trois types particuliers d’« applications préinstallées » pouvaient être utilisées pour avoir accès au contenu protégé par le droit d’auteur ont été désignés (au par. 8) :

A.  KODI : en ayant les extensions appropriées, le diffuseur de médias à code source libre KODI peut être utilisé pour accéder à des sites web de diffusion en continu;

B.  Showbox : le logiciel de diffuseur médias Showbox peut être utilisé pour accéder à des sites web de diffusion en continu et pour télécharger du contenu tel que de la programmation télévisuelle et des films.

C.  Services privés IPTV : il s’agit de serveurs Internet privés qui retransmettent des émissions de télévision par l’intermédiaire d’Internet, moyennant généralement des frais mensuels.

Rien ne donnait à penser qu’il s’agissait des seuls types d’applications ou d’extensions qui préoccupaient les demanderesses.

[37]  Afin que l’injonction interlocutoire soit claire, elle doit établir clairement les types de dispositifs visés, ainsi que les dispositifs non visés. Il est clair qu’elle ne s’applique pas à un boîtier décodeur « sans applications préinstallées ou ne possédant que les applications de base, faisant en sorte que les utilisateurs doivent chercher activement et installer eux‑mêmes les applications qu’ils souhaitent utiliser » (voir au par. 5 des motifs de la juge Tremblay‑Lamer, cités ci‑dessus). Il est également clair qu’elle s’applique aux boîtiers décodeurs sur lesquels les applications ou les extensions nécessaires pour obtenir un accès non autorisé à la programmation télévisuelle des demanderesses sont « préinstallées » — c.‑à‑d. qu’elles sont déjà installées sur le dispositif au moment de son achat.

[38]  Quoique le fait d’avoir des applications ou des extensions préinstallées soit une condition suffisante pour constituer un boîtier décodeur préinstallé visé par l’injonction interlocutoire, cela ne constitue pas une condition nécessaire, parce que l’expression « boîtier décodeur préinstallé » est définie de manière plus générale dans l’ordonnance. Elle signifie : un boîtier décodeur « adapté[…] pour donner aux utilisateurs un accès non autorisé aux programmes des demanderesses » (voir l’alinéa 2a) de l’ordonnance). Une façon dont une personne peut « adapter » un boîtier décodeur de cette manière consiste à préinstaller les applications ou les extensions nécessaires (tel qu’était le cas pour au moins certains des dispositifs en question lorsque l’injonction interlocutoire a été obtenue à l’origine). Cependant, ce n’est pas la seule façon de faire. Une façon consiste à configurer le dispositif de sorte qu’il ne soit pas nécessaire pour l’utilisateur de « chercher activement et installer [lui]‑même[…] les applications qu’il[…] souhaite[…] utiliser », parce le dispositif guide l’utilisateur au cours de ce processus. En résumé, selon les termes clairs de l’ordonnance, « adapter » un dispositif pour donner aux utilisateurs un accès non autorisé aux programmes des demanderesses vise plus que la simple préinstallation des applications ou extensions nécessaires.

[39]  M. Adwokat a présenté des éléments de preuve par l’entremise d’un expert, Bryan Zarnett, selon lesquels le terme « préinstallé » est couramment utilisé dans l’industrie des logiciels et du matériel informatiques et signifie [traduction« placer des renseignements ou un programme dans un ordinateur ou un dispositif technique avant sa vente ou son utilisation ». Même si c’est le cas, cette définition n’a rien à voir avec la question, étant donné que l’expression « boîtier décodeur préinstallé » est définie de manière plus large dans l’ordonnance.

[40]  Ce sens plus large est également clair dans les références aux applications de services privés IPTV dans l’ordonnance. Une façon dont un défendeur peut mettre en vente ou vendre des services privés IPTV consiste à faire de la publicité, à mettre en vente ou à vendre des boîtiers décodeurs préinstallés (tel que cela est défini) « permettant aux utilisateurs d’accéder à des services privés IPTV » (alinéa 2e) de l’ordonnance). Un boîtier décodeur sur lequel un service privé IPTV est déjà installé permettrait d’accéder aux services privés IPTV, mais il n’est pas nécessaire qu’il en soit ainsi pour que le dispositif soit visé par les modalités de l’interdiction. Tout ce qu’il faut est que le dispositif soit adapté de manière à permettre d’accéder au service.

[41]  En outre, ce sens plus large ressort également clairement de l’alinéa b) de l’ordonnance, qui interdit certaines mesures en ce qui concerne les boîtiers décodeurs préinstallés « dont l’utilisation prévue est de recevoir les signaux d’abonnement des demanderesses », autrement que selon ce qui est autorisé par les demanderesses. Un dispositif peut être utilisé ou destiné à être utilisé à cette fin sans que les applications ou extensions nécessaires n’y soient installées au moment de la vente.

[42]  Enfin, ce sens plus large est clair à la lumière des motifs de la juge Tremblay‑Lamer pour accorder l’injonction. Lorsqu’elle a conclu que les demanderesses avaient satisfait au critère d’obtention d’une injonction interlocutoire, elle a déclaré ce qui suit (au par. 22) :

Les dispositifs électroniques commercialisés, vendus et programmés par les défendeurs permettent aux consommateurs d’avoir un accès non autorisé à du contenu pour lequel les demanderesses détiennent le droit d’auteur. Il ne s’agit pas d’une situation où les défendeurs servent simplement d’agents de communication comme l’a fait valoir M. Wesley. Elles encouragent plutôt délibérément les consommateurs et les clients potentiels à contourner les méthodes autorisées d’accès au contenu, par exemple grâce à un abonnement au câble ou par l’accès au contenu de diffusion en continu sur les sites Web des demanderesses, de façon à promouvoir leur activité et en offrant des tutoriels sur la manière d’ajouter et d’utiliser des applications donnant accès au contenu illégalement obtenu. […]

Le type de dispositifs et de pratiques visés par l’injonction interlocutoire ressort très nettement de ces constatations.

C.  Les boîtiers de Red Rhino sont‑ils visés par l’injonction interlocutoire?

[43]  Cela nous amène à l’élément fondamental de l’outrage allégué : les dispositifs de Red Rhino achetés par les enquêteurs des demanderesses sont‑ils visés par les interdictions contenues dans l’injonction interlocutoire? Étant donné les modalités de l’injonction invoquées par les demanderesses, cette question se divise en trois parties : (1) Les dispositifs de Red Rhino sont‑ils « adaptés pour donner aux utilisateurs un accès non autorisé aux programmes des demanderesses » (alinéa 2a) de l’ordonnance)? (2) L’utilisation prévue des dispositifs de Red Rhino est‑elle de donner aux utilisateurs un accès non autorisé aux programmes des demanderesses (alinéa 2b) de l’ordonnance)? (3) Les dispositifs de Red Rhino permettent‑ils particulièrement aux utilisateurs d’accéder à des services privés IPTV (alinéa 2e) de l’ordonnance)?

[44]  Comme je l’expliquerai, je répondrai par l’affirmative à ces trois questions. Je suis convaincu hors de tout doute raisonnable que les modalités de l’injonction interlocutoire interdisaient clairement la configuration, la commercialisation et la vente des dispositifs de Red Rhino.

[45]  Avant d’aller plus loin, je fais remarquer qu’en ce qui concerne l’alinéa 2b) de l’ordonnance, aucune preuve n’a été présentée en l’espèce à l’égard d’un processus de « décodage » ou de la réception non autorisée de programmes décodés en tant que tels. Toutefois, il est clair que le fond de la plainte des demanderesses a trait à la capacité du boîtier de Red Rhino d’obtenir un accès non autorisé aux programmes des demanderesses d’une manière ou d’une autre. Red Rhino et M. Adwokat ont été joints au litige en conséquence.

[46]  Je fais également remarquer que l’injonction interlocutoire tient Red Rhino et M. Adwokat responsables non seulement de leurs propres actions, mais également des actions de leurs « mandataires, employés, associés et représentants ». Dans leur argumentation, les demanderesses ne s’appuient pas seulement sur les actes de M. Adwokat même, mais également celles de plusieurs autres particuliers qui, selon elles, étaient des « mandataires, employés, associés [ou] représentants » de Red Rhino et/ou de M. Adwokat, en vue d’établir que Red Rhino et M. Adwokat ont désobéi à l’injonction interlocutoire (p. ex. les particuliers travaillant au bureau ou aux kiosques temporaires de Red Rhino, où les dispositifs de cette dernière étaient vendus lors de différents événements). Tel que cela sera examiné plus loin, bien que M. Adwokat ait tenté, pour la forme, de se distancier de ces particuliers, rien ne donne à penser qu’ils ne sont pas visés par la description de « mandataires, employés, associés [ou] représentants » de Red Rhino ou de M. Adwokat même. Rien ne donne non plus à penser que ces particuliers ont outrepassé leur pouvoir ou qu’ils ont agi en contravention des modalités de l’injonction interlocutoire, malgré la diligence raisonnable dont M. Adwokat a fait preuve en cherchant à s’assurer qu’ils s’y conforment.

[47]  Passant maintenant à la question de savoir si les dispositifs de Red Rhino ont été adaptés pour donner un accès non autorisé ou étaient destinés à donner un tel accès aux programmes des demanderesses, soit au moyen de services privés IPTV ou autrement, je suis convaincu hors de tout doute raisonnable qu’ils l’étaient et qu’ils sont donc visés par l’interdiction claire prévue aux alinéas 2a), b) et e) de l’injonction interlocutoire. Je suis parvenu à cette conclusion principalement compte tenu de la preuve établissant la façon dont la configuration initiale des dispositifs se déroule. Toutefois, pour mettre cette preuve en contexte, il peut être utile d’examiner d’abord la façon dont le dispositif de Red Rhino était commercialisé et ce pour quoi une personne l’achetait en premier lieu.

[48]  Les demanderesses ont présenté une preuve non contestée selon laquelle une boîte de télévision Android dotée de fonctionnalités standard et non fautives pouvait être achetée pour la modique somme de 80 $. En revanche, le dispositif de Red Rhino était généralement vendu à 499,99 $. L’un des enquêteurs des demanderesses (Steven Rogers) a acheté une unité à ce prix, alors que d’autres enquêteurs ont acheté des unités pour environ 300 $ à 350 $, selon les rabais promotionnels offerts. (Une supposée baguette magique — une télécommande à utiliser avec le boîtier de Red Rhino – pouvait être achetée pour un montant supplémentaire de 49,99 $.) Cela soulève la question suivante : pourquoi une personne serait‑elle prête à payer autant pour ce dispositif en particulier?

[49]  M. Zarnett, l’expert de la défense, a expliqué que le dispositif de Red Rhino utilisait un système d’exploitation Android pour offrir une plate‑forme de présentation multimédia sur des appareils externes, comme une télévision. Il utilise une version adaptée de l’application KODI (ou une [traduction« sous‑version » de KODI) pour offrir aux utilisateurs une expérience personnalisée et pour améliorer le rendement.

[50]  Dans son témoignage, M. Adwokat a déclaré que la haute qualité du dispositif de Red Rhino justifiait le prix facturé. Le dispositif offre aux utilisateurs une expérience améliorée par rapport aux autres boîtiers décodeurs. Il possède des fonctionnalités et des graphiques supérieurs. Selon M. Adwokat, le logiciel propriétaire de Red Rhino améliore la présentation et le mode de fonctionnement de la plate‑forme KODI sous‑jacente — il [traduction« la rend belle ». Le dispositif même est conçu de manière attrayante, est doté du meilleur matériel et du meilleur emballage.

[51]  Je suis disposé à accepter la description qu’a faite M. Adwokat du dispositif de Red Rhino et de l’expérience qu’il offre aux utilisateurs. Toutefois, je ne crois pas M. Adwokat lorsqu’il affirme qu’il s’agit de ce pour quoi une personne serait prête à payer un prix élevé pour l’acheter et son témoignage ne me donne aucun doute raisonnable. Au contraire, je conclus que la principale, sinon la seule, raison pour laquelle quelqu’un était prêt à payer un tel prix pour un dispositif comme celui‑ci est parce qu’il croyait que le dispositif lui permettait d’économiser de l’argent à long terme en le libérant du coût des services de télévision par câble ou par abonnement.

[52]  En contre‑interrogatoire, l’avocat des demanderesses a interrogé M. Adwokat à cet égard. Je conclus que ses réponses étaient évasives et ne répondaient pas aux questions.

[53]  D’après la façon dont il est commercialisé, il est évident qu’il s’agit de la principale caractéristique de vente du boîtier de Red Rhino. Il suffit d’examiner la façon dont le dispositif était présenté aux kiosques de vente temporaires de Red Rhino exploités aux divers endroits énumérés au paragraphe 28 ci‑dessus.

[54]  La preuve établit clairement ce qui suit :

  • Les kiosques de vente étaient toujours ornés de plusieurs slogans :

[traduction]

  • o « Diffusion vidéo en continu gratuite »

  • o « Divertissement à domicile tout‑en‑un »

  • o « Émissions de télévision, films, sports, jeux et bien plus »

  • Des affiches sur les murs des kiosques de vente juxtaposaient les termes suivants en caractères gras [traduction« Aucuns frais mensuels » avec les termes [traduction« Émissions de télévision, films, sports et bien plus ».

  • Cette même juxtaposition se trouve à l’arrière des t‑shirts de Red Rhino portés par les représentants des ventes travaillant aux kiosques, y compris M. Adwokat même.

  • Plusieurs télévisions étaient intégrées aux kiosques de vente. Elles affichaient des films et des émissions de télévision (y compris du contenu appartenant aux demanderesses) ou les représentants des ventes les utilisaient pour démontrer aux acheteurs éventuels ce à quoi le dispositif de Red Rhino pouvait servir, notamment en leur montrant à quel point il était facile de diffuser des films et des émissions de télévision (y compris du contenu appartenant aux demanderesses).

  • Les données d’information sur le fournisseur pour les besoins du kiosque de Red Rhino au Salon international de l’auto du Canada de 2018 indiquaient en partie ce qui suit :

[traduction]

Red Rhino Entertainment est la société dominant le marché en Amérique du Nord en ce qui a trait au matériel, aux logiciels, à la conception d’interfaces ainsi qu’à la distribution de dispositifs et d’accessoires haut de gamme pour la diffusion continue d’émissions de télévision. Nous croyons en la fourniture à nos clients des meilleures solutions prêtes à l’emploi. Notre objectif principal consiste à offrir un service qui permet de regarder la télévision gratuitement, sans interruption, sans publicité et sur demande.

  • Lorsque James Grimshaw, un des enquêteurs d’infiltration des demanderesses qui a acheté un dispositif de Red Rhino, a remis en question le prix de 350 $, le représentant des ventes a répondu : [traduction« 350, c’est tout, une seule fois. Vous annulez votre câble et tout. »

[55]  Compte tenu de cette preuve, ainsi que des éléments de preuve établissant la façon dont Red Rhino a commercialisé son dispositif (p. ex. sur son site Web, sur Facebook et sur Twitter), je conclus que la principale, sinon la seule, raison pour laquelle quelqu’un paierait le prix qu’il coûtait pour acheter un dispositif de Red Rhino, c’est pour obtenir un accès gratuit au contenu qu’il devrait autrement payer (y compris, bien sûr, la programmation télévisuelle des demanderesses). De même, je suis convaincu hors de tout doute raisonnable que l’intention de Red Rhino et de M. Adwokat était que le dispositif de Red Rhino soit utilisé à cette fin (même s’il pouvait être utilisé également à d’autres fins). Les qualités que M. Adwokat a décrites pourraient permettre de distinguer le produit de Red Rhino de ceux de ses concurrents directs, mais personne ne s’intéresserait à un tel dispositif en premier lieu, à moins de chercher un moyen d’éviter de payer les frais réguliers pour la programmation télévisuelle. Si tout ce que quelqu’un voulait faire était de consulter ses courriels ou de regarder des vidéos sur YouTube à la télévision, il n’aurait pas besoin d’un dispositif de Red Rhino. Une boîte de télévision Android qui coûte beaucoup moins serait sûrement suffisante.

[56]  (Je note entre parenthèses que les prix payés par les enquêteurs des demanderesses comprenaient apparemment une [traduction« garantie » de 12 mois. Les demanderesses ont déposé des éléments de preuve sous forme de messages sur Facebook de particuliers se plaignant du fait que leurs dispositifs de Red Rhino avaient cessé de fonctionner correctement après l’expiration de la période de garantie de 12 mois. Selon la thèse des demanderesses, il semble que la [traduction« garantie » constitue effectivement un coût caché au titre d’un abonnement d’un an à un service privé IPTV connu sous le nom d’Apollo Group. Après la période de 12 mois, il était nécessaire de prolonger la [traduction« garantie » en vue de renouveler l’abonnement d’une autre année. Aucun des particuliers qui ont affiché ces plaintes n’a été cité à témoigner dans le cadre de la présente instance. Leurs messages, s’ils sont pris en considération pour la véracité de leur contenu, constituent du ouï‑dire. Les demanderesses n’ont avancé aucun motif pour lequel cette preuve par ouï‑dire pourrait être admise (au titre de l’approche fondée sur des principes ou d’une exception de common law). En outre, aucun des témoins des demanderesses n’a fourni un témoignage direct sur ce qui se produit si la [traduction« garantie » n’est pas prolongée après 12 mois. Par conséquent, je ne tiendrai pas compte davantage de ces plaintes de clients mécontents ni de la thèse des demanderesses concernant un coût caché d’abonnement).

[57]  M. Adwokat a tenté de prendre ses distances à l’égard de ce qui s’est passé aux kiosques de vente, en affirmant qu’ils étaient exploités par des distributeurs ou des agents indépendants ou d’autres tiers. Je ne crois pas que la dénégation par M. Adwokat d’un lien entre lui et les activités de vente sont en litige en l’espèce, et son témoignage ne soulève en moi aucun doute raisonnable. Je parviens à la même conclusion en ce qui concerne son affirmation selon laquelle il n’avait rien à voir avec les autres façons dont le dispositif de Red Rhino était commercialisé (p. ex. sur Facebook ou Twitter). Ces affirmations ne sont pas plus crédibles que celle selon laquelle il ne connaissait pas une personne qui, manifestement, travaillait dans son bureau. La preuve démontre que le dispositif de Red Rhino était commercialisé à l’aide de messages cohérents partout sur un certain nombre de plateformes, y compris aux kiosques de vente temporaires. Fait important, tous les kiosques de vente étaient installés de la même manière et utilisaient le même argumentaire de vente que celui utilisé lorsque M. Adwokat même était présent et participait activement à la vente de dispositifs de Red Rhino – à savoir, le Salon international de l’automobile du Canada de 2017 ainsi que le Salon national de l’habitation en 2017 et 2018. Quoi qu’il en soit, comme cela a été mentionné au début, il s’agissait au mieux, de la part de M. Adwokat, d’un effort pour la forme qui était éloigné du cœur de sa défense.

[58]  Tel que je l’ai indiqué, le cœur du moyen de défense de M. Adwokat est l’argument selon lequel le dispositif de Red Rhino n’était pas vendu avec les applications ou les extensions nécessaires, déjà installées, pour obtenir un accès non autorisé à la programmation télévisuelle des demanderesses. Au contraire, un acheteur devait télécharger et installer ces applications lui‑même, une fois qu’ils avaient apporté le dispositif à la maison. M. Adwokat a témoigné lui‑même à cet effet. Tout comme l’a fait M. Zarnett, l’expert appelé à témoigner par M. Adwokat dans le cadre de sa défense. En effet, les demanderesses n’ont pas contesté le fait que les applications et les extensions devaient être téléchargées et installées sur les dispositifs de Red Rhino que leurs enquêteurs avaient achetés avant que les dispositifs ne puissent être utilisés pour obtenir un accès non autorisé à la programmation télévisuelle des demanderesses.

[59]  Je n’ai aucune difficulté à conclure en fonction de ces éléments de preuve que les applications ou les extensions nécessaires pour obtenir un accès non autorisé à la programmation télévisuelle des demanderesses n’étaient pas installées sur les dispositifs de Red Rhino en cause au moment de la vente. Toutefois, la difficulté pour Red Rhino et pour M. Adwokat est que ce fait ne soustrait pas les dispositifs de la portée de l’injonction interlocutoire. Au contraire, la preuve quant à la façon dont les acheteurs ont procédé à la configuration initiale des dispositifs établit hors de tout doute raisonnable que les dispositifs sont visés par les modalités claires de cette ordonnance, comme cela a été exposé aux paragraphes 35 à 42 ci‑dessus.

[60]  Lorsque M. Grimshaw, l’un des enquêteurs d’infiltration des demanderesses, a acheté un dispositif de Red Rhino au Salon national de l’habitation de 2018 à Toronto, il a enregistré M. Adwokat lorsqu’il lui a dit ce qui suit : [traduction« Lorsque vous arrivez chez vous, vous [le] connectez à Internet, et la fenêtre d’installation de Red Rhino s’affichera. Vous n’avez qu’à cliquer sur [TRADUCTION] “installer”, et tout devrait fonctionner. » Les mesures précises à prendre ont légèrement varié au cours de la période en question, mais c’était réellement aussi simple que M. Adwokat l’avait laissé entendre.

[61]  Comme l’ont démontré les enquêteurs des demanderesses, afin qu’un dispositif de Red Rhino fonctionne, un acheteur devait d’abord télécharger une application appelée Super Installer. Les représentants des ventes expliquaient aux clients comment y procéder, et au moins certains des dispositifs de Red Rhino ont également été vendus avec des instructions d’installation décrites étape par étape. Dans certaines versions, on téléchargeait et installait Super Installer simplement en cliquant sur un bouton qui indiquait : [traduction« Cliquez pour installer ». Une fois que Super Installer était téléchargé et installé, [traduction« l’habillage » Red Rhino s’affichait. À partir de là, l’utilisateur était guidé par des messages‑guides à l’écran. Un menu proposait les options [traduction« Sports », [traduction« Musique », [traduction« Films », [traduction« Télévision en direct » et ainsi de suite. Par exemple, la première fois qu’on cliquait sur [traduction« Télévision en direct », le message‑guide suivant s’affichait :

[traduction]

EXTENSION NÉCESSAIRE

Pour utiliser cette fonctionnalité, vous devez télécharger une extension

Apollo Group

Souhaitez‑vous télécharger cette extension?

Oui  Non

Si l’utilisateur cliquait sur [traduction« Oui », l’extension Apollo Group était téléchargée et installée. Les utilisateurs se voyaient alors offrir l’option suivante : [traduction« Utiliser le Guide des émissions de télévision Apollo? – Oui ou Non. » Une fois qu’Apollo était installé, l’utilisateur avait accès à une gamme complète de programmation télévisuelle, y compris celle des demanderesses. Un processus semblable donnait un accès aux films ainsi qu’aux sports en direct. L’utilisateur n’était jamais obligé de faire autre chose que de répondre aux messages‑guides à l’écran. Cela est conforme à la représentation de Red Rhino selon laquelle son dispositif était « prêt à l’emploi ».

[62]  Comme il est habituellement nécessaire de le faire lors d’une audience en matière d’outrage (voir le paragraphe 470(1) des Règles), les demanderesses ont présenté le témoignage de vive voix des enquêteurs qui ont effectué la configuration initiale des dispositifs de Red Rhino qui avaient été achetés le 3 mars 2017, le 11 mars 2017, le 21 août 2017, le 18 février 2018 et le 10 mars 2018. Leur témoignage était conforme aux directives données par Red Rhino et par M. Adwokat même, quant à la façon de configurer le dispositif pour la première fois. En fait, personne ne conteste que les enquêteurs ont procédé comme l’aurait fait tout acheteur du dispositif. Je suis convaincu hors de tout doute raisonnable, en fonction de cette preuve, que les dispositifs de Red Rhino achetés par les enquêteurs des demanderesses étaient « adaptés pour donner aux utilisateurs un accès non autorisé aux programmes des demanderesses », en étant conçus de manière à guider les utilisateurs vers les applications ou extensions nécessaires pour obtenir un tel accès, et que l’intention de Red Rhino et de M. Adwokat était qu’ils soient utilisés de cette manière. Cette preuve démontre également, hors de tout doute raisonnable, que ces dispositifs de Red Rhino « permett[ent] aux utilisateurs d’accéder à des services privés IPTV », en particulier à l’Apollo Group. Le témoignage de M. Zarnett, l’expert de la défense, concernant la façon dont il a exécuté la configuration initiale d’un autre dispositif en juin 2019 ne soulève aucun doute à l’égard de cette preuve.

[63]  Il n’y a aucun doute qu’une fois la configuration initiale achevée, les mises à l’essai ont permis de confirmer que chacun des sept dispositifs achetés par les enquêteurs des demanderesses pouvait être utilisé pour obtenir un accès non autorisé au contenu appartenant à au moins une des demanderesses dans la procédure sous‑jacente, à l’aide de services privés IPTV ou autrement. Par conséquent, je suis convaincu, hors de tout doute raisonnable, que les dispositifs de Red Rhino achetés par les enquêteurs des demanderesses sont visés par l’injonction interlocutoire. La configuration, la commercialisation et la vente de ces dispositifs auxquelles ont participé Red Rhino et M. Adwokat étaient donc contraires aux interdictions claires des alinéas 2a), b) et e) de l’injonction interlocutoire.

[64]  Les demanderesses ont également tenté de plusieurs façons d’établir un lien entre M. Adwokat, personnellement, et l’Apollo Group ainsi qu’entre lui et Super Installer. M. Adwokat a nié un tel lien. J’ai de nombreuses préoccupations quant à la crédibilité de M. Adwokat en général, mais les éléments de preuve sur lesquels les demanderesses se sont appuyées sont bien loin d’établir de tels liens. En tout état de cause, ils ne constituent pas un élément essentiel de l’outrage qui est allégué contre Red Rhino et M. Adwokat.

[65]  J’ai pris soigneusement en compte le fait que je n’ai pas entendu l’enquêteur qui avait effectué la configuration initiale et la mise à l’essai des dispositifs achetés le 3 décembre et le 16 décembre 2016. Apparemment, il a pris sa retraite. Toutefois, j’ai conclu qu’il était raisonnable de déduire que la configuration initiale de ces dispositifs s’était déroulée de la même façon que celle des dispositifs achetés aux dates ultérieures. Je suis prêt à tirer cette inférence, parce que tous les dispositifs sont identiques à tous les autres égards importants et ont tous été commercialisés de la même façon. La preuve dont je dispose ne me permet pas d’avoir un doute raisonnable que les deux premiers dispositifs ont fonctionné de manière différente des autres à l’étape de la configuration initiale. Une fois qu’ils étaient configurés, le rendement de tous les dispositifs était identique (tel que l’a confirmé Anthony Martin, un des enquêteurs des demanderesses qui a témoigné dans la présente instance).

[66]  M. Adwokat souligne que, parmi les affiches apposées sur les kiosques de vente, l’une d’elles indiquait ce qui suit : [traduction« Red Rhino ne vend pas des dispositifs préinstallés ». Il souligne également que le reçu de l’achat du 3 décembre 2016 énonce, entre autres choses, ce qui suit : [traduction« Vous, l’acheteur, reconnaissez par la présente que le dispositif, tel qu’il a été acheté de TSIT Electronics, ne contient aucune application visant à faciliter ou à aider à faciliter le téléchargement ou la diffusion de contenus protégés par le droit d’auteur. » En ne tenant pas compte du fait que M. Adwokat a tenté par ailleurs de prendre ses distances à l’égard des exploitants des kiosques de vente de Red Rhino, une partie ne peut pas simplement indiquer, à l’aide de déclarations intéressées comme celles‑ci, que leur conduite n’est pas visée par l’ordonnance d’un tribunal.

[67]  En outre, à un moment donné au cours de son témoignage, M. Adwokat a répondu volontairement à une question posée par son avocat qu’il avait reçu un avis juridique selon lequel ses dispositifs n’étaient pas préinstallés et qu’il n’aurait pas dû, en premier lieu, être un défendeur dans l’action sous‑jacente. Cet élément de preuve a été présenté en vue d’expliquer la raison pour laquelle M. Adwokat n’avait pas décidé de contester l’application de l’injonction interlocutoire au dispositif de Red Rhino après qu’elle lui avait été signifiée. Quoi qu’il en soit, il n’y a aucun doute que l’invocation de conseils juridiques ne protège pas une partie contre une conclusion d’outrage (Carey, au par. 44).

[68]  Comme cela est indiqué ci‑dessus, même si je suis convaincu que les éléments requis de l’outrage ont été établis hors de tout doute raisonnable, je conserve le pouvoir discrétionnaire de ne pas déclarer Red Rhino et M. Adwokat coupables. Je répète qu’une déclaration de culpabilité pour outrage « ne doit être prononcée que lorsqu’il est véritablement nécessaire de protéger l’administration de la justice » (Morasse, au par. 21). Je suis convaincu que c’est le cas en l’espèce. La conduite de Red Rhino et de M. Adwokat au cours de la période en question s’est poursuivie sans relâche, malgré leur connaissance de l’injonction interlocutoire. Il ne s’agissait pas d’un manque de jugement momentané. Même en se limitant aux achats particuliers sous‑jacents à la présente requête, la conduite fautive a continué pendant près de deux ans, au mépris flagrant d’une ordonnance de la Cour. Il existe également des éléments de preuve selon lesquels cette conduite s’est poursuivie jusqu’au moins aussi récemment qu’en février 2019. Je prends également note du fait que, le 6 mai 2019, il a fallu que la protonotaire Tabib rende une ordonnance au titre du paragraphe 147(1) des Règles pour valider la signification à M. Adwokat de l’ordonnance de comparution à la présente audience. Enfin, je conclus que le dépôt, à la dernière minute, des avis d’intention de présenter une proposition au titre de la LFI par Red Rhino Entertainment Inc. et M. Adwokat constituait une tentative transparente et mal conçue pour contrecarrer l’exercice, par la Cour, de son obligation d’assurer le respect de ses ordonnances. Compte tenu de toutes ces considérations, des déclarations de culpabilité sont nécessaires en l’espèce pour protéger l’administration de la justice.

[69]  J’ajouterais une dernière remarque. Dans Bell Canada c Vincent Wesley dba MtlFreeTV.com, 2018 CF 66, mon collègue le juge Roy a traité d’allégations d’outrage très semblables contre M. Wesley, un autre des défendeurs de l’action sous‑jacente. Il semble que la conduite à l’origine des allégations d’outrage et la défense présentée étaient en grande partie les mêmes que ceux en l’espèce (quoique la conduite dans l’autre affaire semble avoir été à une échelle beaucoup moins grande que celle établie en l’espèce). Je suis parvenu à la même conclusion finale que mon collègue, mais je l’ai fait uniquement en fonction de la preuve et des observations présentées dans l’affaire dont je suis saisi.

D.  Résumé

[70]  En résumé, je suis convaincu hors de tout doute raisonnable que les sept actes particuliers d’outrage allégués par les demanderesses (à savoir la mise en vente et la vente de dispositifs de Red Rhino le 3 décembre 2016, le 16 décembre 2016, le 3 mars 2017, le 11 mars 2017, le 21 août 2017, le 18 février 2018 et le 10 mars 2018) ont été établis et qu’ils contrevenaient aux alinéas 2a), b) et e) de l’ordonnance rendue par la juge Tremblay‑Lamer le 1er juin 2016. Par conséquent, je suis convaincu hors de tout doute raisonnable qu’en configurant, en faisant de la publicité, en mettant en vente et en vendant les dispositifs de Red Rhino entre décembre 2016 et mars 2018, Red Rhino Entertainment Inc. et Eric Adwokat ont tous les deux commis un outrage au tribunal pour non‑respect de l’ordonnance de la juge Tremblay‑Lamer.

V.  CONCLUSION

[71]  Pour ces motifs, je conclus que Red Rhino Entertainment Inc et Eric Adwokat sont tous les deux coupables d’outrage au tribunal pour avoir désobéi à l’injonction interlocutoire ordonnée par la juge Tremblay‑Lamer le 1er juin 2016.

[72]  La responsabilité étant ainsi établie, il est nécessaire de passer à l’étape de la détermination de la sanction dans la présente instance.

[73]  Le greffe de la Cour communiquera avec les parties pour fixer une téléconférence de gestion d’instance en vue de planifier et d’organiser les prochaines étapes dans le cadre de la présente instance.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER T‑759‑16

LA COUR STATUE que Red Rhino Entertainment Inc. et Eric Adwokat sont coupables d’outrage au tribunal. L’affaire passera maintenant à l’étape de la détermination de la sanction.

« John Norris »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 15e jour de janvier 2020

C. Laroche, traducteur


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T‑759‑16

 

INTITULÉ :

BELL CANADA ET AL c RED RHINO ENTERTAINMENT INC. ET AL

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATES DE L’AUDIENCE :

Les 11, 12, 13, 17 et 28 juin 2019

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE NORRIS

 

DATE DU JUGEMENT

ET DES MOTIFS :

 

Le 19 novembre 2019

 

COMPARUTIONS :

François Guay

Guillaume Lavoie Ste‑Marie

 

pour les demanderesses/parties requérantes

 

Steven Sinukoff

 

pour les défendeurs/intimés

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Smart & Biggar

Montréal (Québec)

 

pour les demanderesses/parties requérantes

 

Prudent Law

Mississauga (Ontario)

 

pour les défendeurs/intimés

 

 

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