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Date : 20020506

Dossier : IMM-4980-00

TORONTO (ONTARIO), le lundi 6 mai 2002

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE MCKEOWN

ENTRE :

                                                                    ADOLFO VANDI

                                                                                                                                                     demandeur

                                                                              - et -

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                      défendeur

                                                                     ORDONNANCE

La demande de contrôle judiciaire est accueillie. La décision de l'agente des visas datée du 22 août 2000 est annulée. L'affaire est renvoyée pour nouvel examen à un autre agent des visas.

                                                                                                                                       « W.P. McKeown »          

                                                                                                                                                                 Juge                     

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


Date : 20020506

Dossier : IMM-4980-00

Référence neutre : 2002 CFPI 515

ENTRE :

                                                                    ADOLFO VANDI

                                                                                                                                                     demandeur

                                                                              - et -

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                      défendeur

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE McKEOWN

[1]                 Le demandeur sollicite l'examen judiciaire de la décision de l'agente des visas datée du 22 août 2000 dans laquelle l'agente des visas a rejeté la demande de résidence permanente présentée par le demandeur à titre de travailleur autonome ou spécialisé.

[2]                 Il s'agit de savoir si l'agente des visas a commis une erreur en n'accordant pas au demandeur l'occasion de répondre à ses réserves.

[3]                 Le demandeur possède les nationalités argentine et italienne. Il a présenté une demande de résidence permanente au Canada à titre d'architecte d'intérieur et a été interrogé par l'agente le 9 mars 2000. Celle-ci lui a accordé 70 points d'appréciation et a recommandé que la demande soit rejetée en vertu de l'alinéa 11(3)b) du Règlement sur l'immigration. Un agent d'immigration principal a souscrit à cette recommandation. L'agente des visas a déclaré ce qui suit dans sa lettre de refus datée du 22 août 2000 :

[Traduction] Vous ne m'avez pas convaincue que vous possédiez la motivation, l'esprit d'initiative, l'ingéniosité et la faculté d'adaptation nécessaires pour subvenir à vos besoins et à ceux de votre famille.

[4]                 Voici les passages pertinents de la lettre de refus de l'agente des visas :

[Traduction] Des points d'appréciation sont attribués lorsque le demandeur a un membre de sa famille au Canada mais je crains que votre belle-soeur ne puisse vous fournir qu'un soutien minime. Vous avez déclaré à trois reprises que vous deviez l'aider à s'occuper de ses enfants et de sa maison. Lorsque je vous ai fait remarquer que votre femme se trouvait avec vous au Canada et pouvait s'acquitter de ces tâches, vous ne m'avez pas répondu. Lorsque nous avons parlé de votre situation financière, vous avez déclaré qu'au départ votre belle-soeur fournissait logement et nourriture à votre famille mais que par la suite vous avez été obligé de lui prêter de l'argent pour qu'elle paie son hypothèque. Je vous ai demandé pourquoi et vous m'avez déclaré que votre belle-soeur avait des problèmes conjugaux. Vous n'avez fourni aucun élément indiquant que votre belle-soeur travaille à un emploi rémunéré. Je crains que votre belle-soeur ait besoin d'aide et je me demande, par conséquent, comment elle pourrait vous aider.


Vous m'avez présenté une offre d'emploi émanant de Ventin Group Ltd. Architects, mais je crains que vous ne donniez pas suite à cette offre d'emploi. Il n'apparaît pas que vous possédiez la motivation, l'esprit d'initiative et l'ingéniosité exigées. Je vous ai interrogé en juillet 1998 au sujet d'un permis de séjour pour étudiant et à nouveau en mars 2000 pour la résidence permanente. Au cours de cette entrevue, nous avons parlé des activités que vous avez exercées au Canada depuis déc. 1997 et vous avez reconnu que vous n'aviez assisté à des cours que pendant quelques mois parce que « il était trop difficile d'étudier à temps plein » et que vous aviez des difficultés d'apprentissage. (Ce sont là des citations directes tirées de mes notes d'entrevue, telles que je les ai transcrites au cours de l'entrevue). Cela ne vous a pas empêché de demander la prorogation de vos permis de séjour. L'offre d'emploi qui vous est faite à titre d'architecte prévoit un salaire annuel de 40 000 $ mais mentionne que « les tâches seront exercées à Toronto et en Argentine » . Vous avez eu du mal à assister aux cours d'ALS tout en vous occupant des enfants et de la maison de votre belle-soeur, mais comment allez-vous faire si vous devez voyager la moitié du temps pour votre travail? J'ai examiné vos antécédents professionnels et je note que vous avez été cinq fois au chômage pendant les périodes suivantes : trois mois, sept mois, douze mois, quinze mois et vingt et un mois! Cela ne comprend pas la période qui s'est écoulée depuis déc. 1997, date de votre arrivée au Canada. Depuis que vous êtes adulte, vous avez essayé de vous établir dans trois autres pays. Il semble que vous ayez du mal à vous adapter. Au cours de l'entrevue, je vous ai demandé si vous connaissiez quelles étaient les conditions d'exercice de la profession d'architecte au Canada. Vous avez répondu que vous les connaissiez mais que cela serait trop difficile à obtenir. Difficile dans quel sens je me le demande? Trop de démarches à faire? Est-ce la raison pour laquelle vous avez d'abord répondu à la question profession en disant architecte (comme vous l'avez mentionné au cours de votre entrevue pour le permis de séjour pour étudiant) puis architecte d'intérieur dans la demande de résidence permanente?

[5]                 Étant donné qu'il s'agit d'une décision prise aux termes de l'alinéa 11(3)b), je suis tenu d'appliquer les règles énoncées dans Sadeghi c. (Canada) Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration [2000] 4 C.F. 337 (C.A.). Le juge Evans énonce les motifs aux paragraphes 14, 15, 17 et 18. Le juge Evans déclare :

14 Il est important de mettre l'accent sur le contexte particulier dans lequel cette question d'équité procédurale se pose. L'alinéa 11(3)b) confère un pouvoir extraordinaire s'appliquant aux cas exceptionnels et n'accorde pas aux agents des visas un pouvoir discrétionnaire général leur permettant de réviser l'appréciation qu'ils ont faite selon les critères de sélection particuliers prévus ou de justifier un point de vue selon lequel le demandeur n'est pas d'une certaine façon tout à fait [Traduction] « à la hauteur » : voir la décision Chen, précitée, [1991] 1 C.F. 350 (1re inst.), à la page 363. L'exigence selon laquelle le demandeur indépendant qui sollicite un visa de résident permanent doit être apprécié conformément aux critères de sélection prévus par la loi vise comme objectif de la loi à garantir une certaine objectivité et une certaine uniformité dans le processus décisionnel des agents des visas.

15 En conséquence, dans l'exercice du pouvoir que lui confère l'alinéa 11(3)b), l'agente des visas a pris une décision discrétionnaire privant l'appelant de son attente légitime selon laquelle, comme il avait rempli les critères de sélection particuliers prévus par la loi, qui, pour la plupart, sont conçus pour apprécier la capacité du demandeur de réussir son installation au Canada sur le plan économique, il obtiendrait un visa, à moins...

Cette exception ne touche pas la question qui m'est posée puisqu'elle concerne l'inadmissibilité aux termes du paragraphe 19(1). Le juge Evans poursuit :


17 Pour s'assurer du bien-fondé de son opinion selon laquelle il existe de bonnes raisons de croire que les points d'appréciation ne reflètent pas de façon appropriée les chances du demandeur de réussir son installation au Canada, il est important que l'agente des visas communique ses réserves à l'intéressé de façon à lui donner la possibilité d'y répondre, au moins dans les cas où le demandeur peut apporter un éclaircissement utile. La rigueur du processus décisionnel est particulièrement importante quand une opinion défavorable est susceptible de priver une personne de ses droits ou, comme en l'espèce, de la réception légitimement attendue d'un bénéfice prévu par la loi.

18 L'obligation qui incombe normalement aux demandeurs de visas de « présenter leurs meilleurs arguments » en soumettant à l'agent des visas tous les renseignements nécessaires pour démontrer qu'ils satisfont aux critères de sélection réduit l'obligation des agents des visas, sur le plan de l'équité procédurale, d'informer le demandeur de toutes les réserves qu'ils peuvent avoir en ce qui a trait au caractère approprié de la demande. Toutefois, une fois que le demandeur a obtenu le nombre de points d'appréciation normalement requis pour obtenir un visa dans la catégorie applicable, il sera souvent considéré inéquitable de s'attendre à ce que le demandeur prévoit les motifs sur lesquels l'agent des visas est susceptible de fonder sa décision discrétionnaire défavorable.

Il s'agit donc de savoir si le demandeur aurait pu prévoir les motifs formulés sur lesquels l'agente des visas était susceptible de fonder sa décision discrétionnaire défavorable.

[6]                 La première réserve exprimée par l'agente concerne la capacité de la belle-soeur du demandeur à subvenir aux besoins de ce dernier. L'agente a déclaré dans sa lettre de refus qu'il n'existait aucun élément indiquant que la belle-soeur en question occupait un emploi rémunéré. Elle a également noté que le demandeur lui avait prêté de l'argent pour qu'elle rembourse son hypothèque. En fait, il existe des éléments indiquant que la belle-soeur fabriquait chez elle des maillots de bain. L'agente des visas n'a aucunement indiqué que l'affidavit de la belle-soeur ne présentait pas correctement sa situation professionnelle. En outre, l'agente des visas disposait d'éléments qui montraient que la belle-soeur avait remboursé son prêt hypothécaire en 1999, soit sept mois avant l'entrevue. L'agente des visas n'a donc pas posé au demandeur des questions qui montraient qu'elle s'inquiétait de la situation financière de la belle-soeur.

[7]                 Je suis convaincu que l'agente des visas a opéré une déduction raisonnable lorsqu'elle a déclaré que l'emploi que proposait le Ventin Group au demandeur obligerait ce dernier à passer la moitié de son temps en Argentine, ou à peu près. Je ne suis toutefois pas convaincu que le demandeur a eu l'occasion d'expliquer comment il pourrait travailler à l'étranger la moitié du temps tout en s'occupant des enfants et de la maison de sa belle-soeur, alors qu'il a affirmé que ses cours d'ALS l'empêchaient de s'occuper de ces tâches.

[8]                 Je suis convaincu que l'agente des visas n'a pas commis d'erreur lorsqu'elle a parlé des cinq périodes de chômage, puisqu'elle a tiré ces éléments du formulaire de demande du demandeur. Il n'appartient pas à l'agente des visas d'examiner l'ensemble du dossier pour vérifier s'il existe d'autres éléments indiquant que le demandeur a en fait étudié pendant une partie de ces périodes de chômage.

[9]                 Je ne suis pas convaincu que l'agente des visas ait été fondée à déclarer que le demandeur n'était pas suffisamment motivé parce qu'il lui a affirmé qu'il était trop difficile de remplir les conditions exigées pour obtenir le permis d'exercer en tant qu'architecte au Canada. Dans sa lettre de refus, l'agente des visas s'interroge sur le sens de la remarque du demandeur mais elle n'a pas essayé de préciser cet aspect, ni d'amener le demandeur à lui fournir d'autres explications. Les questions qu'a posées l'agente des visas concernaient l'expérience de travail qu'avait eue le demandeur en design d'intérieur pour obtenir sa licence d'architecte et ne portaient pas directement sur la motivation du demandeur, en tant que motif l'incitant à ne pas tenter d'exercer cette profession au Canada.

[10]            L'ensemble des erreurs commises par l'agente des visas constitue une erreur susceptible de révision puisque celle-ci n'a pas fourni au demandeur l'occasion de répondre à ses réserves, et ce, dans plusieurs domaines. Par conséquent, la décision de l'agente des visas est annulée. L'affaire est renvoyée pour décision à un autre agent des visas.

[11]            Il est fait droit à la demande de contrôle judiciaire.

  

                                                                                  « W.P. McKeown »          

                                                                                                             Juge                     

Toronto (Ontario)

le 6 mai 2002

    

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                  Avocats inscrits au dossier

  

DOSSIER :                                                         IMM-4980-00

INTITULÉ :                                                         ADOLFO VANDI

                                                                                                  demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET

DE L'IMMIGRATION

                                                                                                    défendeur

DATE DE L'AUDIENCE :                              LE LUNDI 29 AVRIL 2002

LIEU DE L'AUDIENCE :                                TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :                 MONSIEUR LE JUGE MCKEOWN

DATE DES MOTIFS :                                     LE LUNDI 6 MAI 2002

  

COMPARUTIONS :

M. Hart A. Kaminker                                                                     pour le demandeur

M. Kevin Lunney                                                                            pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Kranc & Associates                                                                       pour le demandeur

Avocats

425, avenue University

Bureau 500

Toronto (Ontario)

M5G 1T6

M. Morris Rosenberg                                                                     pour le défendeur

Sous-procureur général du Canada


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                   Date : 20020506

                     Dossier : IMM-4980-00

ENTRE :

ADOLFO VANDI

                                             demandeur

- et -

    

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                              défendeur

                                                                                        

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                                                                                        

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