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Date : 19980323


Dossier : T-194-97

     ACTION IN REM CONTRE LES NAVIRES "LE CHÊNE

     NO. 1", "L"ORME NO. 1", "LE SAULE NO. 1" ET

     "W.M. VACY ASH"

Entre :

     BANQUE CANADIENNE IMPÉRIALE DE COMMERCE

     Demanderesse

ET:

     LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES AUTRES PARTIES

     INTÉRESSÉES DANS LES NAVIRES "LE CHÊNE

     NO. 1", "L"ORME NO. 1", "LE SAULE NO. 1" ET

     "W.M. VACY ASH"

     Défendeurs

     MOTIFS DE L"ORDONNANCE

LE JUGE NADON

[1]      Par leur requête, déposée sous la règle 474(1)1 des Règles de la Cour fédérale, les requérants cherchent à obtenir une ordonnance pour qu"il soit statué sur certains points de droit.

[2]      Afin de mieux comprendre la requête, il est nécessaire de faire un bref résumé des faits pertinents. Le 7 avril 1997, cette Cour confirmait la vente des navires "Le Chêne No. 1", "L"Orme No. 1" et "Le Saule No. 1" (les "navires"). Le 9 juin 1997, le protonotaire Richard Morneau rendait jugement en faveur de la Banque Canadienne Impériale de Commerce (la "demanderesse") c. les navires. Par son jugement, le protonotaire statuait, inter alia, que la demanderesse "is hereby recognized as the holder of first ranking priority mortgages on the ships "Le Chêne No.1", "L"Orme No. 1" and "Le Saule No. 1", said mortgages standing as security for the amount of the judgment rendered herein".

[3]      Le 9 juin 1997, le protonotaire rendait trois ordonnances, à la demande de la demanderesse, sous la règle 10081. Les ordonnances, toutes identiques, prévoient ce qui suit:

THIS COURT ORDERS THAT:

1.      Any claim that has not been filed at one of the local Registry offices of the Court on or before April 1, 1997, unless its filing has been authorized by a further Order of the Court, shall be barred;

2.      Within one hundred and twenty (120) days from the date of this Order, claimants shall file affidavits in support of their claims, including affidavits by experts advancing proof of any foreign law relied upon. All documents relied upon by a claimant shall be filed as exhibits to that party"s affidavit(s);

3.      Within a further delay of thirty (30) days, any party wishing to contest another party"s claim shall do so by filing a Notice of contestation setting out its grounds for contesting the claim, with a statement of the material facts on which it relies. All reply affidavits including affidavits dealing with foreign law shall be filed within the same delay;

4.      Within a further delay of thirty (30) days, the claimant whose claims are subject to a contestation shall be at liberty to file a reply with any supporting affidavits;

5.      There shall be no cross-examination upon any affidavit save by leave of the Court;

6.      Within a further delay of thirty (30) days, all claimants shall file their affidavits of documents which shall be in conformity with Rules 448;

7.      Within a further delay of sixty (60) days, the parties shall be at liberty to conduct the discovery examinations of a representative of each claimant, at Montréal, or at such other place as the parties may agree upon or the Court determine, the discovery process to be in conformity with Rules 455 and following insofar as applicable. All undertakings given during the discovery examination shall be completed with a further delay of forty-five (45) days;

8.      The parties shall serve notice upon one another of all filings made pursuant to this Order but shall not be required to serve a copy of the material so filed. On request, a party shall provide any other party with a copy of its material;

9.      The parties or any one of them shall be at liberty to apply for a hearing date upon completion of discoveries;

10.      Subject to any further Orders of the Court, there shall be no viva voce evidence heard and the rights of all parties shall be adjudicated upon the affidavit and discovery evidence files;

[4]      Selon les ordonnances rendues sous la règle 1008, les réclamants, dont les "M.N."

requérants qui avaient déposé une réclamation au greffe de la Cour le ou avant le 1er avril 1997, devaient déposer les affidavits au soutien de leurs réclamations dans un délai de 120 jours à compter du 9 juin 1997.

[5]      Le 3 octobre 1997, les requérants déposaient une requête visant à obtenir une ordonnance prolongeant le délai de production des affidavits. Le 7 octobre 1997, le protonotaire accordait un délai supplémentaire pour déposer les affidavits aux réclamants qui ne pouvaient se conformer au délai prévu au paragraphe 2 des ordonnances du 9 juin 1997. Par son ordonnance du 7 octobre 1997, le protonotaire accordait à ces réclamants jusqu"au 10 décembre 1997 pour déposer leurs affidavits.

[6]      Le 3 décembre 1997, les requérants déposaient une nouvelle requête pour obtenir un délai additionnel afin de déposer les affidavits au soutien de leurs réclamations. Le 10 décembre 1997, le protonotaire accordait un délai supplémentaire jusqu"au 15 janvier 1998 aux réclamants qui ne pouvaient se conformer à son ordonnance du 7 octobre 1997.

[7]      Les requérants ont tous déposé leurs affidavits en conformité des ordonnances rendues par le protonotaire. Le 16 février 1998, la demanderesse a déposé ses contestations à l"encontre des réclamations des requérants.

[8]      Selon les ordonnances du protonotaire en date du 9 juin 1997, les réclamants, dont les requérants, avaient 30 jours à compter du dépôt de la contestation par la demanderesse de leurs réclamations pour déposer une réplique. Après ce délai de 30 jours, les réclamants devaient, toujours selon les ordonnances du 9 juin 1997, déposer leurs affidavits de documents en conformité avec la règle 448. Les délais prévus aux paragraphes 4 et 6 des ordonnances du 9 juin 1997 n"ayant pas été respectés, les requérants me demandent de suspendre ces délais si j"en viens à la conclusion que leur demande principale, à savoir la détermination des points de droit précités, doit être accordée. Dans l"alternative, si la demande principale est rejetée, les requérants me demandent de leur accorder un délai supplémentaire de 30 jours en ce qui concerne le délai pour déposer une réplique aux contestations de la demanderesse et un délai supplémentaire de 6 mois pour déposer leurs affidavits de documents.

[9]      Les requérants demandent à cette Cour de statuer sur les questions de droit suivantes:

a)      Le privilège maritime prévu en droit maritime canadien et dans la loi sur la Cour fédérale et dans la loi sur la marine marchande du Canada ou dans toutes autres dispositions législatives, pour les gages, salaire, à l"argent, aux biens ou à tout [sic] autre forme de rémunération ou de prestation découlant de son engagement, dus aux marins brevetés et aux marins non-brevetés est-il réclamable du dernier navire où a travaillé le marin et/ou de tous les navires où il a travaillé ayant appartenus au même armateurs (Sister Ships)?
b)      Le privilège maritime mentionné au paragraphe précédent inclus-t-il:
     i)      L "indemnité de fin d"emploi (severance pay) prévu par la loi et/ou la convention collective?
     ii)      Le préavis de cessation d"emploi prévu par la loi et/ou la convention collective?
     iii)      Les contributions des marins retenues à la source et/ou payable par les défendeurs pour le Fonds de Pension le tout conformément à la Convention Collective?
     iv)      Les contributions des marins retenues à la source et/ou payable par les défendeurs pour le Plan de Bien-Être le tout conformément à la Convention Collective?
     v)      Les contributions des marins retenues à la source et/ou payable par les défendeurs pour les cotisations syndicales le tout conformément à la Convention Collective?
     vi)      Les contributions des marins retenues à la source et/ou payable par les défendeurs pour la salle d"embauche le tout conformément à la Convention Collective?
     vii)      Les contributions des marins retenues à la source et/ou payable par les défendeurs pour le fonds légal le tout conformément à la Convention Collective?
     viii)      Les déboursés et/ou frais de transports et autres non remboursés par les défendeurs et qui sont dus aux marins aux termes de la Convention Collective?
     ix)      Les réclamations (griefs) non encore plaidés pour temps supplémentaires et autres?
     x)      Les chèques N.S.F. reçus par des marins des défendeurs?
     xi)      Les pénalités pour retard de remise et/ou de paiements prévues dans la Convention Collective?

[10]      Selon les requérants, une réponse à ces questions réduira considérablement le litige présentement devant la Cour. Spécifiquement, les requérants soumettent qu"une adjudication des points de droit réglera définitivement plusieurs points en litige et, par conséquent, le procès devant avoir lieu sera évité ou considérablement écourté.

[11]      Il est évident, à la lecture des questions de droit précitées, qu"elles ont pour but de déterminer si les réclamations des requérants comportent un privilège maritime. Selon les requérants, la question à savoir si l"indemnité de fin d"emploi comporte un privilège maritime est la question qui aura le plus grand impact sur les réclamations. Selon les requérants, si la réponse aux questions de droit auxquelles on demande à cette Cour de statuer est non, cela aura pour effet, à toutes fins pratiques, de mettre fin au litige entre la demanderesse et les requérants.

[12]      Dans Berneche c. La Reine [1991] 3 C.F. 383, la Cour d"appel fédérale s"est prononcée concernant le sens de la Règle 474(1)(a). Le juge Mahoney, au nom de la Cour, aux pages 388 et 389, a émis l"opinion suivante:

     Ce qu"exige la Règle 474(1)a) , c"est qu"au moins l"une des parties sollicite une décision préliminaire: la Cour ne peut agir de son propre chef. La Règle exige ensuite qu"il soit démontré de façon jugée satisfaisante par la Cour (1) qu"aucun fait essentiel à la question de droit à être tranchée n"est contesté; (2) que ce qui doit être tranché est une pure question de droit; et (3) que la décision sera péremptoire aux fins d"un point en litige de façon à éliminer la nécessité d"un procès, ou tout au moins, à l"abréger ou le rendre plus rapide.

     La dernière exigence a été exposée par le juge en chef Jackett, dans les termes suivants, dans l"arrêt R. c. Achorner:

         À mon sens, il incombait à la Division de première instance ... de juger si pour rendre la poursuite de l"action plus efficace, il était ou non "opportun" de statuer sur la [question] avant de passer aux autres phases de l"action.         

Bien que la première exigence vise souvent une entente ou une reconnaissance des faits parce que c"est là le contexte dans lequel est étudiée la demande, ce que l"on requiert, c"est que les faits essentiels à la question de droit ne soient pas contestés. Cela n"exige pas l"accord de toutes les parties. C"est une conclusion que le juge doit tirer, et je ne vois aucune raison pour laquelle cette conclusion ne pourrait être tirée à partir de l"ensemble des plaidoiries de la partie intimée à la demande en présumant que ce qui a été plaidé est exact. Je ne vois pas non plus pourquoi une fin de non-recevoir indirecte (issue estoppel) ne peut être prise en considération lorsque l"on détermine si les faits sont contestés.

[13]      Donc, les requérants doivent me satisfaire que les faits essentiels à la détermination des questions précitées ne sont pas contestés, que les questions à déterminer sont véritablement des questions de droit et que la décision qui sera rendue par la Cour mettra fin au litige ou réduira la durée du procès à être tenu.

[14]      De toute évidence, en l"instance, la décision que rendra la Cour concernant les questions de droit précitées sera, à mon avis, "péremptoire aux fins d"un point en litige de façon à éliminer la nécessité d"un procès, ou tout au moins, à l"abréger ou le rendre plus rapide". Il ne peut faire de doute que, si les réclamations des requérants ne comportent aucun privilège maritime, le litige entre la demanderesse et les requérants sera terminé. Le quantum des réclamations n"a d"importance que dans la mesure où celles-ci sont greffées d"un privilège maritime, ce qui assurera aux requérants priorité devant les hypothèques maritimes de la demanderesse. Quant aux faits pertinents à la détermination des questions de droit précitées, il n"y a pas de dispute.

[15]      Par conséquent, je suis d"avis qu"il est approprié, dans les circonstances, pour la Cour de statuer sur les points de droit précités. Dans les jours qui suivent, je convoquerai les parties, par voie d"appel conférence, pour discuter des directives qui doivent être données en vertu de la règle 474(2).

[16]      Les requérants me demandent de suspendre les délais prévus aux paragraphes 4

"M.N."      et 6 des ordonnances du 9 juin 1997. Quant au délai prévu au paragraphe 4, je ne suis

pas disposé à le suspendre. Les requérants devront déposer leur réplique au plus tard le 30 avril 1998. Pour ce qui en est du délai prévu au paragraphe 6 de l"ordonnance du 9 juin 1997, les requérants devront déposer leurs affidavits de documents dans les soixante jours de la décision qui sera rendue par la Cour sur les points de droit.

[17]      Les frais seront à suivre.

     "Marc Nadon"

                                     Juge

Toronto (Ontario)

Le 23 mars 1998

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     NOMS DES AVOCATS ET DES AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DE LA COUR:              T-194-97
INTITULÉ:              Banque Canadienne Impériale de Commerce
                 and/et
                 Les propriétaires et toutes les autre parties intéressées dans les navires "Le Chêne No. 1", "L'Orme No. 1", "Le Saule No. 1" et "W.M. Vacy Ash"
LIEU DE L'AUDIENCE:          Montréal (Québec)
DATE DE L'AUDIENCE:          Le 2 mars 1998

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE NADON

EN DATE DU 23 MARS 1998

COMPARUTIONS:

M. Édouard Baudry                  POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

    

M. Paul-Émile Dion

M. Bernard Gravel

M. Gary H. Waxman              POUR LES PARTIES RÉCLAMANTES

     - 2 -

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Édouard Baudry

Lavery de Billy

1 Place Ville Marie

Suite 4000

Montréal, Québec                 

H3B 4M4                  POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Paul E. Dion                     

800 René-Lévesque Blvd.

Suite 2450

Montréal, Québec                  Le Syndicat Canadien des Officiers de
H3B 4V7                  Marine Marchande

Bernard Gravel

de Grandpré, Chaurette, Lévesque

2000 Avenue McGill College

Suite 1600

Montréal, Québec                  La Guilde de la Marine Marchande du
H3A 3H3                  Canada

Gary H. Waxman

1000 de La Gauchetière Street West

Suite 2700

Montréal, Québec

H3B 4W5                  Le Syndicat International des Marins
                     POUR LES PARTIES RÉCLAMANTES

                     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     Date: 19980323

                         Dossier: T-194-97

                     Between:

                     Banque Canadienne Impériale de Commerce

     Demanderesse

                     and/et
                     Les propriétaires et toutes les autre parties intéressées dans les navires "Le Chêne No. 1", "L'Orme No. 1", "Le Saule No. 1" et "W.M. Vacy Ash"

     Défendeurs

                    

            

                         MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                    


__________________

474. (1) La Cour pourra, sur demande, si elle juge opportun de le faire,a) statuer sur un point de droit qui peut être pertinent pour la décision d'une question, oub) statuer sur un point afférent à l'admissibilité d'une preuve (notamment d'un document ou d'une autre pièce justificative),et une telle décision est finale et péremptoire aux fins de l'action sous réserve de modification en appel.(2) Sur demande sollicitant une ordonnance pour qu'il soit statué sur une question en vertu du paragraphe (1), la Cour doit, si elle accorde l'ordonnance,a) donner des directives sur ce qui doit constituer le dossier à partir duquel la question doit être débattue;b) décider si des exposés doivent être déposés et signifiés et, dans l'affirmative, fixer les délais dans lesquels ils doivent l'être; etc) sous réserve du paragraphe 15(2) de la Loi, fixer les temps et lieu du débat sur la question.

En cas de demande de versement par prélèvement sur de l'argent consigné au tribunal en vertu de la Règle 1007(7), la Cour aura le pouvoir de déterminer les droits de tous les réclamants sur cet argent et elle pourra rendre l'ordonnance et donner les instructions qui lui permettront de statuer sur les droits que possèdent tous les réclamants sur cet argent, et elle a également le pouvoir d'ordonner le versement à une personne de tout ou partie de cet argent selon ses conclusions.
(2) Aux fins d'une demande faite en vertu de l'alinéa (1), la Cour pourra, au moment où elle rend l'ordonnance de vente des biens [ou] à tout moment par la suite, donner des instructions au sujet des avis à donner aux autres réclamants éventuels et de cet argent, et au sujet de la publicité à faire à leur intention, au sujet du délai dans lequel les réclamants sont tenus de déposer leurs demandes et, d'une façon générale, au sujet de la procédure à suivre pour permettre à la Cour de statuer équitablement sur les droits des parties, et de rendre jugement sur une ou plusieurs demandes réclamant de l'argent consigné à la Cour; une fin de non-recevoir doit être opposée à toute demande qui n'est pas faite dans le délai fixé et de la manière prescrite par une telle ordonnance de la Cour, et la Cour pourra procéder au jugement des autres demandes et répartir l'argent entre les parties qui y ont droit sans tenir compte des demandes auxquelles une fin de non-recevoir a été ainsi opposée.
(3) Sur demande de ce genre, la Cour pourra ordonner le versement immédiat, par prélèvement sur l'argent consigné, au prévôt ou à une autre personne, en vertu de la présente Règle, des droits gagnés ou frais engagés par eux à l'occasion de la saisie, de la garde, de l'évaluation ou de la vente de ces biens.

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