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                                                                                                                                 Date : 20040318

                                                                                                                    Dossier : IMM-2012-03

                                                                                                                  Référence : 2004 CF 390

ENTRE :

                                                          MUHAMMAD SHAHID

                                                               BUSHRA SHAHID

                                                          MUHAMMAD AHMAD

                                                            MUHAMMAD DAUD

                                                                                                                                          demandeurs

                                                                             et

                                              LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                         ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                             défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PINARD

[1]         Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire de la décision rendue par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) datée du 5 mars 2003, dans laquelle la Commission a conclu que les demandeurs n'avaient pas qualité de réfugié au sens de la Convention ni de « personne à protéger » au sens des articles 96 et 97 respectivement de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.


[2]         M. Muhammad Shahid, sa femme Bushra Shahid et leurs deux enfants, Muhammad Ahmad et Muhammad Daud sont des citoyens du Pakistan. Mme Shahid est la représentante désignée des deux enfants qui fondent leurs demandes sur celles de leurs parents. M. et Mme Shahid ont soumis un exposé des faits individuel dans leurs Formulaires de renseignements personnels.

[3]         M. Shahid fonde sa demande sur des opinions politiques, plus précisément son appartenance et sa participation active au Parti populaire pakistanais. Mme Shahid fonde sa demande sur son appartenance à un groupe social, plus précisément sa famille et ses croyances religieuses chiites. En outre, tant M. que Mme Shahid allèguent avoir qualité de personne à protéger parce qu'ils sont exposés à un risque de torture, de menace à leur vie ou au risque de peines inusitées et cruelles au Pakistan.

[4]         La Commission a conclu que les demandeurs n'avaient pas qualité de réfugié au sens de la Convention ni de « personne à protéger » pour des raisons de crédibilité.

[5]         Les demandeurs prétendent que la Commission n'a pas tenu compte de certains éléments de preuve et qu'elle a mal interprété et scruté à la loupe d'autres éléments. Plus précisément, les demandeurs mentionnent la preuve à l'appui des allégations de Mme Shahid, savoir les pièces P-1 à P-22. Il s'agit d'un principe élémentaire de droit que l'on doive présumer qu'un tribunal a tenu compte de l'ensemble de la preuve dont il était saisi. Pourtant, un tribunal n'a pas l'obligation de mentionner dans ses motifs tous les éléments de preuve dont il a tenu compte avant de rendre sa décision. (Taher c. Canada (M.C.I.), [2000] A.C.F. no 1433 (1re inst.) (QL)). L'évaluation de la valeur probante à accorder aux documents relève du pouvoir discrétionnaire du tribunal chargé de l'appréciation de la preuve (Aleshkina c. Canada (M.C.I.), [2002] A.C.F. no 784 (1re inst.) (QL)). Un examen de la décision de la Commission et des transcriptions de l'audience révèle que la Commission a correctement examiné toute la preuve avant de rendre sa décision.


[6]         Il appert également du dossier que la Commission s'est beaucoup interrogée sur les allégations de persécution des demandeurs, de même que sur le contexte dans lequel cette persécution aurait eu lieu. Par exemple, la Commission a beaucoup hésité à reconnaître qu'un mandat avait été émis contre M. Shahid et la Commission a également eu l'impression que le comportement des demandeurs contredisait leur crainte alléguée de persécution. Ces conclusions en matière de crédibilité sont au coeur des demandes des demandeurs parce qu'elles mettent en doute le motif même de leur crainte de persécution. Comme l'a dit la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Sheikh c. Canada (M.E.I.), [1990] 3 C.F. 238, la perception du tribunal que le demandeur n'est pas un témoin crédible équivaut en fait à la conclusion qu'il n'existe aucun élément crédible sur lequel pourrait se fonder le tribunal pour faire droit à la demande. En outre, la Commission peut rejeter des éléments de preuve non réfutés s'ils ne sont pas compatibles avec les probabilités propres à l'affaire prise dans son ensemble ou si elle relève des contradictions dans la preuve (voir Monteiro c. Canada (M.C.I.), [2002] A.C.F. no 1720 (1re inst.) (QL)) et Akinlolu c. Canada (M.E.I.), [1997] A.C.F. no 296 (1re inst.) (QL)). Dans la présente affaire, la Commission a clairement expliqué les motifs qu'elle avait de douter de la crédibilité des appelants en se fondant sur plusieurs contradictions et omissions et je ne suis pas convaincu que la Commission a agi d'une manière arbitraire en décidant que les demandeurs n'étaient pas crédibles.


[7]         C'est une règle de droit bien connue que la Cour ne peut substituer son opinion à celle de la Commission quand il s'agit de conclusions en matière de crédibilité sauf si les demandeurs peuvent établir que la décision de la Commission était fondée sur une conclusion de fait erronée tirée de manière abusive ou arbitraire ou sans égard aux éléments dont elle disposait (paragraphe 18.1(4) de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. 1985, ch. F-7). La Commission est un tribunal spécialisé qui a pleine compétence pour apprécier la plausibilité d'un témoignage dans la mesure où les inférences qu'elle tire ne sont pas déraisonnables (Aguebor c. Canada (M.E.I.) (1993), 160 N.R. 315 (C.A.F.)) et les motifs sont énoncés en termes clairs et explicites (Hilo c. Canada (M.E.I.) (1991), 130 N.R. 236 (C.A.F.)).

[8]         Pour les motifs susmentionnés, je suis d'avis que la Commission n'a commis aucune erreur manifestement déraisonnable dans sa décision en l'espèce. La demande de contrôle judiciaire est donc rejetée.

                                                                                                                                    « Yvon Pinard »                  

                                                                                                                                                     Juge                           

OTTAWA (ONTARIO)

le 18 mars 2004

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL. L.


                                                             COUR FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                     IMM-2012-03

INTITULÉ :                                                    MUHAMMAD SHAHID, BUSHRA SHAHID, MUHAMMAD AHMAD, MUHAMMAD DAUD

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                              MONTRÉAL (QUÉBEC)

DATE DE L'AUDIENCE :                            LE 11 FÉVRIER 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :               LE JUGE PINARD

DATE DES MOTIFS :                                   LE 18 MARS 2004

COMPARUTIONS :

Viken Artinian                                       POUR LES DEMANDEURS

Mario Blanchard                                                POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Jeffrey Nadler                                                    POUR LES DEMANDEURS

Avocat

Montréal (Québec)

Morris Rosenberg                                              POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

                                                                                                                                                           

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