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                                                                                                                                            Date : 20021125

                                                                                                                                         Dossier : T-515-01

                                                                                                             Référence neutre : 2002 CFPI 2003

Entre :

                                                                 Michel Lajoie-Smith,

                                                                                                                                                    Demandeur

                                                                              - et -

                                                       Le Procureur Général du Canada

                                                                                                                                                     Défendeur

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PINARD :

        La présente demande de contrôle judiciaire vise l'annulation de la décision rendue le 22 février 2001 par Me Paul Maranda, le président indépendant (le « président » ) du tribunal disciplinaire de l'Établissement Donnaconna, qui a condamné le demandeur en vertu du paragraphe 40k) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, L.C. (1992), ch. 20 (la « Loi » ).

        Le demandeur purge présentement sa peine à l'Établissement à sécurité maximale de Donnaconna.

        Le 8 août 2000, le demandeur a reçu un rapport de l'infraction du 26 juillet 2000 précisant : « un rapport d'analyse d'urine indique que le précité a consommé/cannabinoïdes » . Aucun détail additionnel n'a été donné au demandeur quant au résultat de cette analyse.


        Lors de la première audience disciplinaire à l'Établissement Donnaconna, le demandeur a demandé au président d'ordonner au Service correctionnel du Canada de lui communiquer le résultat chiffré de l'analyse d'urine. Le Service correctionnel n'ayant pas le résultat en sa possession, le président a ajourné l'audience à quelques reprises, le temps de vérifier avec un expert la nécessité d'obtenir ce résultat.

        Le 22 février 2001, n'ayant pas reçu le résultat chiffré, le président a finalement déclaré le demandeur coupable et l'a condamné à 30 $ d'amende, avec huit (8) jours de détention suspendue pour 90 jours.

        Les articles de la Loi ayant rapport à cette demande sont les suivants :


40. Est coupable d'une infraction disciplinaire le détenu qui :

[. . .]

k) introduit dans son corps une substance intoxicante;

43. (3) La personne chargée de l'audition ne peut prononcer la culpabilité que si elle est convaincue hors de tout doute raisonnable, sur la foi de la preuve présentée, que le détenu a bien commis l'infraction reprochée.


40. An inmate commits a disciplinary offence who

[. . .]

(k) takes an intoxicant into the inmate's body;

43. (3) The person conducting the hearing shall not find the inmate guilty unless satisfied beyond a reasonable doubt, based on the evidence presented at the hearing, that the inmate committed the disciplinary offence in question.


        Les articles pertinents du Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, DORS/92-620 (le « Règlement » ) sont les suivants :


68. (1) Le laboratoire doit remettre une attestation du résultat de l'analyse au coordonnateur du programme de prises d'échantillons d'urine et, sur demande du directeur du pénitencier, en fournir une copie par transmission électronique.

(2) Le coordonnateur du programme de prises d'échantillons d'urine doit remettre une copie de l'attestation du laboratoire à la personne qui a fourni l'échantillon d'urine.


68. (1) A laboratory shall submit to the urinalysis program co-ordinator a certificate and, where requested by the institutional head, an electronically transmitted copy of the certificate, that states the results of the test.

(2) The urinalysis program co-ordinator shall give the donor a copy of the laboratory certificate respecting the sample.




69. Aux fins de toute audition d'une infraction disciplinaire visée à l'alinéa 40k) de la Loi, l'attestation visée au paragraphe 68(1) portant que le résultat de l'analyse d'échantillon d'urine est positif établit, jusqu'à preuve contraire, que le détenu qui a fourni l'échantillon a commis l'infraction en cause.


69. For the purposes of a hearing of a disciplinary offence referred to in paragraph 40(k) of the Act, a certificate referred to in subsection 68(1) that states that the result of a urinalysis test is positive establishes, in the absence of evidence to the contrary, that the inmate who provided the sample has committed the offence.


        Le demandeur soumet que le Service correctionnel a refusé, sans droit et sans justification raisonnable, de lui communiquer le résultat précis et chiffré de son analyse d'urine, le privant ainsi de son droit à une défense pleine et entière.

        Au sujet des principes qui gouvernent la discipline au niveau du Service correctionnel, j'ai déjà exprimé ce qui suit dans Procureur général du Canada (Service correctionnel du Canada) c. Plante (10 novembre 1995), T-1452-94, [1995] A.C.F. no 1509 (QL) :

Quant à la nature et aux fonctions du tribunal disciplinaire en cause, elles ont été bien résumées par mon collègue le juge Denault dans Hendrickson v. Kent Institution Disciplinary Court (Independent Chairperson) (1990), 32 F.T.R. 296, aux pages 298 et 299 :

The principles governing the penitentiary discipline are to be found in Martineau (No. 1) (supra) and Martineau v. Matsqui Institution Disciplinary Board (1979), 30 N.R. 119; 50 C.C.C. (2d) 353 (S.C.C.); Blanchard v. Disciplinary Board of Millhaven Institution (1982), 69 C.C.C. (2d) 171 (F.C.T.D.); Howard v. Stony Mountain Institution Inmate Disciplinary Court (1985), 57 N.R. 280; 19 C.C.C. (3d) 195 (F.C.A.), and may be summarized as follows:

1. A hearing conducted by an independent chairperson of the disciplinary court of an institution is an administrative proceeding and is neither judicial nor quasi-judicial in character.

2. Except to the extent there are statutory provisions or regulations having the force of law to the contrary, there is no requirement to conform to any particular procedure or to abide by the rules of evidence generally applicable to judicial or quasi-judicial tribunals or adversary proceedings.

3. There is an overall duty to act fairly by ensuring that the inquiry is carried out in a fair manner and with due regard to natural justice. The duty to act fairly in a disciplinary court hearing requires that the person be aware of what the allegations are, the evidence and the nature of the evidence against him and be afforded a reasonable opportunity to respond to the evidence and to give his version of the matter.

4. The hearing is not to be conducted as an adversary proceeding but as an inquisitorial one and there is no duty on the person responsible for conducting the hearing to explore every conceivable defence, although there is a duty to conduct a full and fair inquiry or, in other words, examine both sides of the question.

5. It is not up to this court to review the evidence as a court might do in a case of a judicial tribunal or a review of a decision of a quasi-judicial tribunal, but merely to consider whether there has in fact been a breach of the general duty to act fairly.

6. The judicial discretion in relation with disciplinary matters must be exercised sparingly and a remedy ought to be granted "only in cases of serious injustice" (Martineau No. 2, p. 360) [Martineau v. Matsqui Institution Disciplinary Board (1979), 30 N.R. 119].


(Je souligne.)

      La norme de contrôle applicable, en semblable matière, a été bien définie par le juge Kelen, dans l'arrêt Forrest v. The Attorney General of Canada, 2002 FCT 539, au paragraphe 19 :

Accordingly, this Court will not intervene on a question of fact, or a question of mixed fact and law unless the Disciplinary Court:

(i)            has made the finding of fact in a patently unreasonable manner; or,

(ii)           has made the finding of mixed fact and law in an unreasonable manner, i.e. without a reasonable basis.

      En l'espèce, aucune disposition de la Loi ou du Règlement n'obligeait le président à attendre le résultat chiffré requis par le demandeur avant de rendre son jugement. Bien au contraire, l'article 69 du Règlement prévoit spécifiquement qu'une simple attestation portant que le résultat de l'analyse d'échantillon d'urine est positif établit, jusqu'à preuve contraire, que le détenu qui a fourni l'échantillon a commis l'infraction en cause. Ici, le demandeur a tenté, par preuve d'expert, de convaincre le président que le résultat chiffré de l'analyse d'échantillon d'urine était nécessaire pour considérer l'impact de la fumée secondaire avoisinante. Le défendeur a contré cette preuve en déposant une expertise scientifique du Dr Albert D. Fraser, toxicologue, concluant qu'il n'avait pas « connaissance de travaux scientifiques publiés indiquant qu'une inhalation passive "modérée ou réaliste" de fumée de marijuana aboutirait à un résultat positif de dépistage de cannabinoïdes » . Le président accorda manifestement une crédibilité plus élevée à l'expertise scientifique du défendeur qu'à celle du demandeur. Ainsi, l'équité de procédure est sauve, le président ayant entendu les deux parties et ayant considéré les deux rapports d'expertise.


      Dans la mesure où l'appréciation des faits est concernée, la décision du président m'apparaît fondée sur d'importants éléments de preuve, ce qui m'amène à conclure qu'il a rendu une décision tout a fait raisonnable et que l'intervention de cette Cour n'est pas justifiée.

      En conséquence, la demande de contrôle judiciaire est rejetée, avec dépens.

                                                                    

       JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 25 novembre 2002


                             COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                          SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

             NOMS DES AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                              T-515-01

INTITULÉ :                           Michel Lajoie-Smith c. Le Procureur Général du Canada

LIEU DE L'AUDIENCE :                   Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                   Le 23 octobre 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE :     L'honorable juge Pinard

EN DATE DU :                    25 novembre 2002

ONT COMPARU :

Me Jacques Normandeau                 POUR LE DEMANDEUR

Me Sébastien Gagné                     POUR LE DÉFENDEUR

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Felleau, Belleau, Normandeau & Daelman      POUR LE DEMANDEUR

Montréal (Québec)

Morris Rosenberg                      POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

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